« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

dimanche 22 octobre 2023

#ChallengeAZ 2023 : présentation

 

Voici le mois de novembre et le #ChallengeAZ, ce défi d'écriture généalogique où pendant tout le mois un article est publié chaque jour suivant l'ordre de l'alphabet.

 

Cette année, pour mon 10ème ChallengeAZ (waouh : déjà 10 !) je vous propose d’aller à Conques en Rouergue (aujourd’hui département de l’Aveyron). Les fidèles lecteurs de ce blog le savent, c’est le berceau de mes ancêtres éponymes. Ils y ont vécu de 1671 (trace la plus ancienne retrouvée à ce jour) jusqu’au milieu du XIXème siècle. J’ai choisi de me pencher non sur mes ancêtres directement mais sur la paroisse en général : j’ai dépouillé une décennie d’actes paroissiaux afin d’y dénicher les personnalités marquantes, les métiers, les quartiers, etc… Certaines familles sont établies là depuis plusieurs générations, d’autre ne font que passer. 

Registre paroissial de Conques (détail), 1780 © AD12
 

J’ai choisi cette décennie un peu au hasard, parce que les registres étaient écrits lisiblement (tout au moins au début : je n’avais pas vu qu’ensuite ça allait se gâter). C’est la décennie 1780/1790 qui a été retenue.


Conques est une petite bourgade développée autour de son abbaye. Elle est établie à flanc de coteau, au milieu de vallées profondes. L’abbaye a connu une immense renommée au Moyen-Age, étape importante sur les chemins de Saint-Jacques de Compostelle. Elle a compté jusqu’à 900 moines. Autour de son abbaye s’est développé un bourg de commerçants et d’artisans, ville close de murailles. 

L’utilisation de matériaux locaux (schiste, grès, calcaire « rousset », pans de bois et toits de lauze) confère une grande unité à l’habitat conquois. Disposées en palier sur le versant, les maisons tournent en général leur façade principale vers le midi et elles possèdent deux entrées : celle du rez-de-chaussée, ouverte sur la rue inférieure, et celle de l'étage, ouverte sur un jardin ou la rue supérieure.

 

Conques © K.Golik


Le déclin s'amorce à partir du XIVème siècle, lorsque la vogue des pèlerinages s'estompe. Conques compte alors 3 000 habitants, se plaçant ainsi au septième rang parmi les villes du Rouergue. En 1770, à la veille de ce ChallengeAZ, elle n’en compte plus que 630. Au XVIème siècle la discipline monastique s’est nettement relâchée. Le pape sécularise l’abbaye, c'est-à-dire qu’il remplace des moines par des chanoines (ils sont une vingtaine). Si les premiers vivent retirés du monde, consacrant leur vie à Dieu, dans les locaux communs de l’abbaye, les autres ont davantage de contact avec la population, habitent des maisons dans le bourg et sont relevés de leurs vœux de pauvreté. En général ils sont prêtres. Il existe plusieurs ordres : au XVIème ce sont des chanoines de St Augustin, aujourd’hui ce sont des Prémontrés.
Au XVIIIème siècle la misère règne. Conques reste un bourg ecclésiastique : les chanoines y tiennent un rôle important dans le secours de la ville, notamment à l’hôpital (ou hospice). 


Voici donc un aperçu d’une communauté, en des temps difficiles, vu au travers de ses registres paroissiaux.

 

Pour des raison de commodité, j'ai parfois modernisé la transcription des actes cités, mais la plupart du temps je les ai laissé tels quels.



dimanche 24 septembre 2023

Passer la Révolution

GABARD est le patronyme de ma grand-mère maternelle. Pendant plus de deux cents ans sa famille occupa la même ferme, située au lieu-dit La Gidalière, à Saint-Amand-sur-Sèvre (Deux-Sèvres, commune frontalière avec la Vendée).

Signature d'un de "mes" Gabard, 1813 © AD79

Selon la légende familiale ils en étaient propriétaires, mais je ne serai pas aussi catégorique. En effet, j’ai trouvé aux archives la mention de baux (par exemple en 1821 : acte passé devant Me Bellin notaire à Châtillon par M. Augustin Dumoutiers propriétaire à Loudun tant pour lui que pour M. Joseph Jerome Dumoutiers son frère à Jean Gabard et Françoise Paineau sa femme [mes sosas 112 et 113] de la métairie de la Gidalière commune de St Amand pour trois, six ou neuf années à grée respectif qui ont commencé à la St George dernière 1820, moyennant 600 fcs, 146 décalitres seigle, la filature d'un kilogramme et demi de fil, de 6 kg de beurre et les contributions.

Les Dumoustier sont une famille de seigneurs locaux, comptant des gardes du corps du roi, président du baillage de Loudun, légion d'honneur, etc. Qui dit bail dit locataire. Qui dit locataire dit pas propriétaire. Il faudra que je creuse cette question.

Bref, ce n’est pas vraiment le sujet du jour. Non, moi ce qui m’intéresse c’est le avant « les deux cents ans ». Car avant, c’est le trou noir.

 

Les GABARD sont nombreux dans la région. Sur Geneanet, en 1800, on recense plus de 650 porteurs du nom rien qu’à saint-Amand. Dans mon arbre j’en ai enregistré au total 144.

 

Selon Tosti ce patronyme aurait pour origine le nom d’une personne d'origine germanique, Gebhard (geba = don et hard = dur). Autre possibilité, selon Morlet, ce serait un dérivé de l'ancien français gab (= moquerie, plaisanterie), surnom d'un joyeux drille.

Le nom est surtout porté en Poitou-Charentes (avec un gros noyau en Deux-Sèvres/Vendée), dans le Centre et dans le Bourbonnais.

 

Côté prénom, mes GABARD ne sont guère imaginatifs : dans mon arbre 16% sont des Marie, 12% sont des Jean, 11% des Pierre et 9% des Jacques. Ça fait beaucoup d’homonymes.

 

Depuis longtemps je cherche à remonter l’ascendance de Jacques GABARD (sosa 224), marié à Anne GOBIN (ou GAUBIN). Il est né vers 1735 et est décédé en 1798 à St Amand sur Sèvre. C’est lui le « premier » aïeul, cultivateur à La Gidalière.

 

Je reprends sporadiquement ces recherches, mais deux difficultés s’offrent à moi :

  • Les registres paroissiaux ont disparus.
  • L’existence de nombreux homonymes.

 

Cette région a en effet subi de plein fouet les guerres de Vendée. Comme le raconte l’abbé Gabard (un de nos lointains cousins) : « les paysans vendéens accueillirent assez mal les changements qui se succédèrent rapidement en France, à partir de 1789. Bientôt la constitution civile du clergé*, le serment des prêtres, la vente des biens ecclésiastiques, les poursuites exercées contre les prêtres fidèles changèrent cette défiance en une vive irritation. Quelques désordres éclatèrent à Châtillon ; ils furent réprimés avec une rigueur imprudente qui ne fit qu'exciter les esprits. En février 1792, la levée de trois cent mille hommes ordonnée par la Convention amena un soulèvement universel; les jeunes gens refusent d'aller défendre à la frontière un gouvernement qui emprisonnait leur roi et opprimait leur conscience. Bientôt toute la Vendée est en insurrection. » Les révoltes paysannes se transforment alors en mouvement contre révolutionnaire. Ce sont les « Blancs ».

D’abord maître de tout le territoire, les Vendéens doivent bientôt faire face aux soldats envoyés depuis Paris (que l’on appelle les « Bleus »). Victoire et défaites marquent les deux camps. « Au mois de janvier [1794], les colonnes infernales commencèrent à sillonner le pays dans tous les sens, brûlant, pillant, massacrant tout ce qu'elles rencontrent sur leur passage. » Loin de pacifier le pays, ces exactions provoquent de nouveaux soulèvements. Plusieurs tueries marquent l’année jusqu’à ce que la Convention rappelle leurs chefs. En décembre 1794 les républicains engagent des négociations qui aboutissent au printemps 1795 à la signature de traités de paix. Quelques désordres perdurent en 1795 et les années suivantes mais globalement la paix est rétablie.

Néanmoins, le bilan est lourd dans le pays : on estime le nombre des victimes à environ 170 000 (dont près de 50 000 rien que pour les colonnes infernales), soit entre 20 et 25 % de la population du territoire insurgé. D’après l’historien Reynald Secher, « les troupes républicaines, et notamment les colonnes infernales, seraient responsables de la destruction de 35 % des maisons du département. »

 

A Saint-Amand on note des troubles dès l’hiver 1789. À la mi-janvier 1794 la garnison de Mallièvre s’abat sur Saint-Amand-sur-Sèvre à la recherche, selon la tradition orale, du camp des partisans de Charette.

Quelques jours plus tard, les 24 et 25 janvier 1794, c’est la colonne infernale de Boucret, ralliant Châtillon-sur-Sèvre (Mauléon) aux Épesses qui incendie Saint-Amand au passage. Le même 25 janvier, la colonne de Grignon marchant entre Cerizay et La Flocellière ravage l’ouest de la commune dans les parages de La Pommeraie. C’est ainsi que Saint-Amand devint sans doute la seule commune à avoir subi deux colonnes le même jour. La mémoire locale désignait ces événements sous le nom de « Grand Brûlement ». Selon les estimations la population de Saint-Amand passa de 1 220 habitants en 1790 à 767 en 1800. Et que les registres paroissiaux ont disparus, hélas pour nous généalogistes.

Saint-Amand reprendra les armes encore en 1799, puis brièvement en 1815.

 

Comme on l’a vu plus haut, les GABARD aiment beaucoup les prénoms Pierre, Jean et Jacques. Au début de ces (nouvelles) recherches, la famille serait composée du père (peut-être prénommé Jacques), qui a deux fils prénommés Jacques, un petit-fils Jacques, trois petit-fils Pierre, et encore des Jean (3), Jacques(5) ou Pierre (5) aux générations suivantes. Bref, un joli sac de nœuds à démêler.

 

Sur Geneanet on retrouve cette famille. Plusieurs généanautes donnent l’identité du père :

- Selon soubise307 il se prénommerait Jacques, marié à Marie BREMAUD (pas de source).

- Selon beraud86 il se prénommerait aussi Jacques, né au Pin en 1699 mais aurait eu deux épouses : 
  • Marié avec une première épouse dont le nom n’est pas connu, dont : 
    • Jacques GABARD /1735-1798 notre ancêtre 
  • Marié avant 1738 avec Marie BREMAUD †, dont : 
    • Mathurin GABARD ca 1735-1797, marié avec Jeanne Marie COUDRIN 
    • Jacques Jean GABARD 1738-1822, marié avec Marie COUDRIN 
    • Pierre GABARD 1740-1812, curé de Chambretaud, 
    • Jean GABARD 1743-1803, marié avec Louise MORISSET 
 
- Selon babbouff il se prénommerait Jean, mariée le 19 janvier 1734, Treize-Vents, avec Perrine ECHASSERIEAU. 
 
- Selon jeangodet il se prénommerait Jacques, marié avec Anne GABORIT, dont : 
  • Jean GABARD ca 1763-1839, marié vers 1789 avec Marianne MORISSET, puis marié avec Marie Jeanne CHARRIER 
  • Marie GABARD ca 1768-1827, mariée vers 1800 avec Louis MARTINEAU 
  • François Marie GABARD 1782-1836, marié le 18 février 1813 avec Jeanne RONDEAU 
  • Jacques GABARD †1798, marié avec Anne GOBIN †1813 
  • Jean GABARD ca 1778-1827, marié avec Jeanne Françoise PAINEAU

 

Bref, on a le choix !

 

Pour ma part, je sais de façon avérée qu’il y a trois frères : deux Jacques et un Mathurin (mon sosa 1012 car je descends de deux des frères). L’un des Jacques n’est qu’un demi-frère. En effet, lors du décès de Mathurin assistent deux Jacques : l’un "frère propre" et l’autre "frère de père".

Fratrie Gabard avérée avant le début de ces recherches

Le premier Jacques et sa descendance est cultivateur à la Gidalière (ce sont mes ancêtre directs), Mathurin est installé au Poux (ferme voisine) et l’autre Jacques au Puy Jourdain (à moins de 2 km), toutes des fermes de Saint Amand s/Sèvre.



Mais je ne parviens pas à remonter plus avant : pas de registre paroissiaux, donc, mais aussi pas de notaire avant l’an IV (1796) et rien dans les successions qui n’indiquerait une quelconque ascendance.

 

Après vérification, je ne valide pas l’arbre de jeangodet : si François Marie est bien le fils des parents indiqués, il comporte par ailleurs trop d’erreurs (Jean donné pour frère de Jacques alors qu’il est bien dit fils dans son acte de mariage par exemple).

L’arbre de babbouff, bien que très complet, n’est pas assez sourcé : je ne parviens pas à suivre ses filiations.

 

L’hypothèse la plus probable est la parenté avec Jacques GABARD et Marie BREMAUD. J’ai travaillé un moment sur ce couple. Trois enfants sont identifiés de façon certaine :

  • Pierre, le curé de Chambretaud décédé en 1812,
  • Jacques, son frère témoin au décès,
  • Jean, époux de Louise MORISSET, dont la parenté est signalée lors de son décès.
Arbre Gabard/Bremaud

Ce couple de parents aurait vécu à St Amand, décédé dans les années 1740/1750.

 

Leur fils Pierre est bien identifié car il apparaît dans le Dictionnaire des Vendéens : Fils de Jacques GABARD et de Marie BREMAUD, il était curé de Chambretaud depuis mai 1780, succédant à René LOIZEAU (décédé en 1780). Au début il ne se montra pas hostile au mouvement émancipateur né de la Révolution : il est nommé électeur du canton des Herbiers, envoyé à Fontenay en 1790 pour élire les députés à l’Assemblée législative. Mais il refusa de prêter le serment constitutionnel imposé au clergé*. Caché à Saint-Malo-du-Bois (à 3 km de Chambretaud), il prit part à l'insurrection. Il rédigea un dernier acte sur le registre de sa paroisse en août 1792 mais, en mars et avril 1793, on le voit rebaptiser sous condition** les enfants nés depuis la cessation de ses fonctions. En effet, régulièrement il revient à Chambretaud (où aucun curé n’a été nommé pour le remplacer), afin d’assurer les fonctions de son ministère de manière officieuse. Plusieurs fois il failli se faire prendre par les Bleus (soldats républicains). Il tint un registre clandestin à Chambretaud de mars à octobre 1793, puis de juin 1794 à septembre 1797. Il prononça finalement le serment de fidélité par écrit en 1803 en tant que desservant de Chambretaud. Il reprit son registre en juillet 1803. Il décéda en 1812 en tant que « prêtre et desservant de Chambretaud », dit âgé de 73 ans ; la déclaration en a été faite par son frère Jacques et son neveu aussi prénommé Jacques. L’office aurait été célébré par Macé, curé des Herbiers. La notice précise qu’il serait né le 20 juin 1740 bien qu’il n’y ait pas de registre antérieur à l’an VI.

En fait, j’ai retrouvé dans les registres notariés un acte de notoriété, passé devant Me Bellin, notaire à Chatillon en l’an VI, attestant qu’il était né au Poux de St Amand mais la date diffère légèrement : le 29 juin 1730 (au lieu du 20/6/1740).

 

L’hypothèse est donc que le Jacques, frère du curé Pierre, serait un de « mes » Jacques. Il est vrai que dans l’acte de décès de son frère il est dit de St Amand. Cela exclue toutefois mon ancêtre direct, qui est décédé en 1798 et ne peut, par conséquent, pas être témoin du décès de Pierre en 1812. Reste la possibilité qu’il soit le Jacques époux de Marie COUDRIN (qui ne meurt qu’en 1822).

Le lien reste mince. J’ai donc cherché une autre preuve.

 

Parmi les enfants de Jean et Louise MORISSET d’abord : nés à St Jouin sous Chatillon (aujourd’hui Mauléon), ils se sont installés côté Vendée ensuite (Les Châtelliers Châteaumurs, Les Epesses, Treize Vents). S’ils sont très présents entre frère et sœurs, jamais je ne les vois chez leurs « cousins ». A contrario, les « cousins » Deux Sévriens sont aussi très présents les uns pour les autres mais « ne passent pas la frontière ».

 

Carte des Gabard

 

En cherchant du côté de Marie BREMAUD, j’ai la confirmation que le couple GABARD/BREMAUD demeurait bien à Saint-Amand (confirmé lors du mariage de la nièce de Marie, Jeanne JANNEAU, en 1746). Marie y est dite veuve : Jacques est donc décédé cette date.

Ce fait est confirmé par ailleurs : Jacques GABARD, le père du curé, demeurait au Poux de St Amand de son vivant, selon l’acte de notoriété de son fils Pierre. Ledit curé étant lui-même né au Poux.

Le Poux est une ferme où ne vit qu’une seule famille : le fait que « mon » Mathurin GABARD y vivait, de façon certaine, tendrait à confirmer la filiation entre Jacques et Mathurin.

Marie BREMAUD semble encore vivante en 1797 lors de l’établissement de cet acte de notoriété ; mais elle est décédée en 1806 (décès de son fils Jean). Malheureusement son acte de décès n’a pas été trouvé. Je ne l’ai pas trouvée non plus sur les différentes tables de l’enregistrement (décès, testament, succession) du bureau de Châtillon – dont dépend Saint-Amand.

 

Pendant les guerres de Vendée, on l’a vu, dans la plupart des paroisses il n'a pas été tenu de registres paroissiaux ou bien ils ont été détruits. Ainsi à Saint-Amand il n’existe pas de registre antérieur à 1798. Françoise de Chabot, dans son ouvrage « un canton du bocage vendéen », cite néanmoins un registre paroissial de Saint-Amand rédigés pendant cette triste période, de façon plus ou moins officieuse. « A l'avant-dernière page de cet intéressant registre nous trouvons [la mention suivante] : N. B. Plusieurs actes sont transposés ou imparfaits, parce que je n'ai pu, dans la persécution, les faire à heure et à temps, je les ai recueillis au milieu des déroutes et des combats. Cependant j'ai copié sur des feuilles volantes les noms, les dates fort exactement, et j'ai toujours appelé des témoins dignes de foi, et quand j'en ai manqué, je n'ai mis dans les actes que ce qui est de notoriété publique.... ma connaissance. Signé Feuille ». Elle en a tiré notamment la liste de ceux qui sont morts les armes à la main ou massacrés par les Républicains entre 1793 et 1800.

J’ai eu accès à quelques actes appartenant vraisemblablement à ce registre et à un relevé dactylographié (transmis par un de nos cousins, Robert ***). J’y retrouve deux GABARD : « Gabard, Jean-Mathurin, du Poux, 16 ans, des témoins affirment l'avoir vu sabrer près Chemillé, le 10 mai. Gabard, Mathurin, du Poux, 21 ans, mort de ses blessures, le 10 juillet ». Il s’agit des fils de Jean et de Mathurin; peut-être des cousins ?

On trouve des GABARD dans d’autres listes :

- Listes générales des individus condamnés par jugements ou mis hors la loi par décrets, et dont les biens ont été déclarés confisqués au profit de la République) : « Gabard Pierre, brigand de la Vendée, commission militaire Savenay, 4 nivôse. Gabard Jean, id. 6 nivôse. »

- Contrôle nominatif des Vendéens qui ont servi dans l'armée Royale entre 1793 et 1800 : « Gabard, Jacques, né à Saint-Amand, 1740, commissaire en 1794, 1795 et 1799. Gabard, Mathurin, né à Saint-Amand, 1776, capitaine, 4 ans de guerre, action d'éclat, pris un drapeau. Gabard, Jean, né à Saint-Amand, 1781, 3 ans de guerre. Gabard, Jean, né à Saint-Amand, 1756, 4 ans de guerre. Gabard, Pierre, né à Saint-Amand, 1760, 4 ans de guerre. Gabard, Pierre, né à Saint-Amand, 1778, s'est battu en1799. Gabard, Jacques, né à Saint-Amand, 1780, id. »

Encore beaucoup de Jean, de Pierre et de Jacques. Cependant, compte tenu des homonymies, il est difficile de les identifier avec certitude, encore moins de les utiliser pour en dresser des liens.

 

Grâce à ce registres, je sais que Pierre Mathurin, fils de Jacques GABARD et Marie COUDRIN, et sa sœur Marie Jeanne, se marient le même jour en 1800. Et c’est Pierre, le curé de Chambretaud qui officie lors de la cérémonie. Un des rares liens qui uni les deux familles.

 

Mais je trouve mieux encore, grâce à la transcription dactylographiée récemment confiée par Robert. Il s'agit de la naissance de Marie Victoire GABARD, fille de Pierre et Marie DIGUET, en 1804 (petite-fille de Mathurin). J’avais trouvé en ligne son acte, daté du 1er jour complémentaire an XII (18/9/1804). Sur ce document étaient cités comme témoins « Pierre Gabard, 27 ans et Marie COUDRIN, 31 ans ». Je n’étais pas parvenue à déterminer qui étaient exactement ces témoins. Et j’avais oublié cet acte. Or, dans le relevé des « actes révolutionnaires » de Saint-Amand la transcription de cette naissance est bien différente :

« Le 24-12-1803
GABARD Marie Victoire enfant légitime de sexe féminin, née ce jour, fille de GABARD Pierre, taillandier au Poux et de DIGUET Marie
Parrain : GABARD Pierre, curé de Chambretau, grand oncle
Marraine : COUDRIN Marie Victoire, grand-mère
Acte rédigé par Nicolas LE FRANÇOIS prêtre desservant de St Amand »

La date est différente, ce qui n’est guère étonnant : les actes en ligne sont souvent des actes rédigés à postériori, après les troubles. J’ai ainsi pour sa cousine Marie Anne j'ai deux actes de mariages : un en 1796 et un en 1801.

Les témoins ne sont plus de simples témoins, mais un parrain et une marraine. L’acte est dirigé par le prêtre desservant la paroisse et non par le maire ; là encore ce n’est pas étonnant l’acte de 1804 est fait à la mairie, selon les nouvelles directives post-révolutionnaires, tandis que l’autre a été fait devant le prêtre (d’où les parrains).

Mais ce qui est frappant ce sont les témoins, qui n’ont plus d’âge mais des liens familiaux indiqués sans ambigüité.

 

Le lien entre les deux parties de la famille, la Vendéenne et la Deux-Sévrienne, est ici attesté de façon formelle (si on considère que cette transcription est bien correcte ; ce que j’ai très envie de croire). Je n’ai, hélas, pas eu accès au document original de cet acte (si jamais un lecteur en a une copie et qu’il veut bien me la transmettre, j’en serai ravie), mais c’est la  preuve de la parenté de mes ancêtres directs avec le couple Jacques GABARD et Marie BREMAUD qui est enfin avérée.

Sauf élément contraire, j’ai enfin brisé le plafond de verre de la Révolution et j’ai gagné une génération supplémentaire. Voire plus...

Nouvel arbre Gabard (cliquez pour agrandir)

 

En effet, tant qu’à faire, j’ai tenté de remonter la piste des ascendants de Jacques GABARD, époux BREMAUD : il serait le fils de Jean et Perrine PEHILIPPON, couple installé au Pin (à une quinzaine de kilomètres à l’Ouest de Saint-Amand – et où les registres vont jusqu’au milieu du XVIIème siècle). Il aurait eu 5 frères et sœurs, tous décédés en bas âge ou jeune, hormis une sœur – mais il n’apparaît pas de son côté. Les généalogies en ligne déroulent les générations de GABARD jusqu’au début du XVIIème siècle avec un couple fondateur demeurant à Nueil les Aubiers, 10 km plus loin, Jean GABARD et Françoise VIOLLEAU.



De mon côté, il me reste à prouver que Jacques est bien le fils de Jean…

 

 

* La Constitution civile du clergé est créée en 1790 par l’Assemblée constituante, réorganisant unilatéralement le clergé français, instituant une nouvelle Église, l'Église constitutionnelle. Cette réorganisation est condamnée par le pape Pie VI, ce qui provoque la division du clergé français en clergé constitutionnel (les « jureurs ») et clergé réfractaire. La Constitution civile du clergé est finalement abrogée en 1801 par Napoléon Bonaparte.

** Baptisé sous condition : Le baptême efface le pêché originel. Un enfant mort sans baptême est condamné à errer éternellement dans les limbes. C’est pourquoi il faut le baptiser au plus vite (en général le jour même) : quelque soit le temps, il faut se rendre à l'église la plus proche. Un enfant mort-né ou en danger de mort à la naissance est "ondoyé" par la sage femme ; acte qui lui ouvre le ciel en cas de décès (C’est l’une des raisons pour lesquelles la sage-femme était nommée par le curé et prêtait serment). Ensuite, le prêtre baptise le nouveau-né « sous condition » : il suffit que les témoins attestent qu’ils ont aperçu un mouvement du cœur, un semblant de respiration, le tressaillement d’un doigt, un souffle … L’enfant mort, retrouve la vie quelques instants, le temps de recevoir le baptême.

*** Que je remercie d’avoir partagé ses découvertes avec moi.

 

 

samedi 19 août 2023

L'enfant surprise

Cécile Rols, épouse Astié, est mon aïeule à la Vème génération (sosa 17). Avec son époux, elle a eu 11 enfants : 4 sont morts en bas âge, 3 sont Morts pour le France lors de la Première Guerre Mondiale (j’ai raconté cette triste histoire dans un article du blog – un de mes préférés je vous le conseille si vous ne l'avez déjà lu, voir ici). Il en reste 4 (dont mon AGP Augustin).

Étant un peu en panne de nouvelles fraîches concernant mes ancêtres directs sur les sites des archives départementales, je me suis intéressée à mes collatéraux. Et en particulier aux deux frères et à la sœur de mon AGP Augustin. Il me manquait quelques actes de décès ou de mariages les concernant. J’ai tenté de les pister entre Ivry (94) et Paris 13e où je savais qu’ils avaient habité. Pour cela, j’ai mobilisé toutes les ressources à ma disposition : état civil, recensements, registres d’inhumation des cimetières, arbres et relevés en lignes (Geneanet, Filae…)…

Et c’est là, dans les tables d'état civil, que j’ai fait une curieuse découverte : Benoit, l’un des frères Morts pour la France d’Augustin (auquel je ne m'intéressais pas particulièrement ce jour-là), a eu un enfant hors mariage ! J’ai aussitôt abandonné Louis, François, etc... pour examiner cet enfant surprise.

 

Benoit est né en 1892 à Angers (49). Il suit ses parents lorsqu’ils déménagent en région parisienne au tout début du XXème siècle. C’est le vaurien de la famille. J’ai raconté ses « méfaits » dans un article du défi #52Ancestors sur ce blog (voir ici).

En résumé, le jeune Benoit (alors âgé de 18 ans) a de mauvaises fréquentations. En 1910 il est arrêté dans l’affaire de la « caverne aux huit voleurs ». Il n’a pas été condamné, mais a eu chaud. Cela ne lui a pas servi de leçon : en 1911 il est condamné par le tribunal de la Seine à deux mois de prison pour vol.

Lors de sa mobilisation dans l’armée il est envoyé dans un Bataillon d’Afrique, histoire de le mater. Les « bat d’af » recevaient les civils ayant un casier judiciaire non vierge ou recyclaient les militaires condamnés à des peines correctionnelles. Utilisés initialement pour écarter les fortes têtes, ils sont conçus pour redresser « ceux qui ont failli ». Considérant le type de soldats qui les composent, il y règne une discipline bien plus forte que dans les autres unités de l'armée.

Là encore, Benoit fait des siennes : condamné par le conseil de guerre de Tunis le 11 août 1914, coupable d'abandon de poste étant de garde, à un mois de prison ; puis à nouveau en 1916 comme on le verra plus bas.

 

Or, les registres d’état civil m’indiquent que le 5 décembre 1916, en pleine Guerre Mondiale, il reconnaît pour son fils un garçon né le 17 juin 1916 au domicile de sa mère, Louise Caroline Rosala, 30 ans, journalière demeurant 68 rue de Clisson, Paris 13e, prénommé Alexandre Benoît.

 

Reconnaissance Astié Alexandre Benoit, 1916 © AD75

D’abord affecté en Tunisie, où les Bat d’Af étaient chargés d’assurer « l’intégrité des colonies », Benoit est rappelé en France, « contre l’Allemagne », après la déclaration de guerre de 1914. Pour la durée de la guerre trois bataillons de marche d'infanterie légère d'Afrique (BMILA) ont été formés par prélèvement de compagnies dans les 5 Bataillons d’Afrique et engagés en métropole : ce sont les 1er, 2e et 3e BMILA. Benoit est affecté au 3e, le 3 janvier 1915. Embarqué pour la métropole fin décembre, Benoit et son bataillon arrivent dans le secteur d’Ypres en Belgique. Tranchées, bombardements, pluies diluviennes puis gel implacable sont l’ordinaire de ces soldats. Au printemps, ils succombent à l’étouffement et l’asphyxie d’un « nouveau et barbare moyen de combat » poussé par les vents : le gaz moutarde. C’est pourtant un bon vieil éclat de shrapnel qui blesse Benoit le 30 avril 1915 (plaie à la jambe gauche, hémorragie). Combien de temps a-t-il été hospitalisé ? A-t-il eu une permission après son rétablissement ? Je l’ignore.Toujours est-il qu’en septembre 1915 il devait bien se trouver en région parisienne puisque c’est à cette époque qu’a été conçu l’enfant !

En octobre 1915 il est de retour sur le front, transféré au 4e BILA.

Benoit ne s’est toujours pas assagi : il est condamné en février 1916 par le tribunal de guerre de Tunis à un mois de prison pour coups et blessures volontairement porté sur le chasseur Vasse le 21 novembre 1915. Ayant trop peu d’informations sur cet épisode, je n’ai pas pu retrouver ce soldat ni quel rôle il a joué dans cette bagarre.

Après avoir reçu la médaille coloniale avec agrafe « Tunisie » en 1917, Benoit est finalement tué sur le champ de bataille le 5 avril 1918 à Cantigny (Somme), attaque qui compte parmi les combats les plus durs et les plus meurtriers auxquels le bataillon ait pris part. Mort pour la France, sa sépulture est à la nécropole nationale de Montdidier. Il avait 25 ans.

 

Mais revenons à son fils : Alexandre Benoit est donc né le 17 juin 1916 au domicile de sa mère, Louise Rosala, journalière demeurant 68 rue de Clisson, Paris 13e. La naissance est déclarée par Cécile Rols, veuve Astié, journalière de 60 ans, qui demeure à la même adresse, « ayant assisté à l'accouchement » ; en présence de Louise Bodin, femme Astié, journalière demeurant à la même adresse. Ladite Louise est l’épouse de François Astié, fils de Cécile et frère de Benoit.

Un peu plus tard, le 29 juin, Louise Caroline Rosala se présente à la mairie du 13e pour reconnaître son enfant. En effet, d'après le Code napoléonien, naissance ne vaut pas reconnaissance pour un enfant d'une femme non mariée : celle-ci doit le faire reconnaître par un acte officiel. Elle est accompagnée dans sa démarche par Louise Bodin-Astié notamment.

Enfin, en décembre, c’est autour de Benoit de venir reconnaître officiellement son fils – il doit bénéficier d’une nouvelle permission pour ce faire.

Mais qui est cette Louise Rosala ?

Née à Ivry en 1887 d’un chauffeur/journalier originaire de Suisse, Louis Auguste, et d’une matelassière/blanchisseuse, Pauline Luxembourg ; couple non marié qui aura deux autres enfants, Auguste et Henriette.

En cherchant des informations sur Louise, je découvre d’autres surprises : elle a eu 4 autres enfants de « père non dénommé » :

- Marcelle née à l’hôpital de la Pitié, Paris 5e, en 1910 qui n’a vécu que « un mois vingt et un jours »,

- Raymond, « fils naturel » né au domicile de sa mère à Ivry en 1912, décédé à l’hôpital Trousseau en 1913 (hôpital spécialisé dans le traitement des enfants malades),

- Raymonde née à la maternité de Port Royal, Paris 14e, en 1914 et décédée trois mois plus tard à l’hôpital Necker,

- un enfant sans vie né en 1915 à l’hôpital de la Pitié Salpêtrière (nouveaux bâtiments inauguré après la destruction de l’ancienne Pitié devenue vétuste en 1912).

On le voit, Louise était grande consommatrice d’hôpital. C’était sans doute parce que les femmes qui venaient à l’hôpital pour accoucher étaient principalement des filles-mères ou des femmes de milieux très pauvres.

Sa sœur Henriette a eu, elle aussi, deux enfants nés illégitimes et son frère Auguste un : les enfants naturels, une histoire de famille quoi !

Au fil des naissances et décès de ses enfants, on voit Louise déménager : d’abord à Ivry, 56 rue du Liégat en 1910, 13 rue Grand Gord en 1912, 51 route de Choisy en 1913, 29 rue Fontainebleau en 1914 ; puis à Paris 13e : 15 rue Damesme en 1914, 25 rue des Cinq Diamants en 1915, 68 rue de Clisson Paris 13e de 1916 à 1926.


Route de Choisy © AD94

Apparemment le 51 route de Choisy devait être une petite maison (d’après le recensement de 1936 : un seul couple y vit) – aujourd’hui remplacée par un immeuble moderne. 

Or certaines de ces adresses me sont connues : Cécile Rols demeure elle aussi au 51 route de Choisy en 1913, au 11 rue Damesmes en 1914 et au 68 rue de Clisson en 1916/1926.

Donc en 1913 Louise devait habiter chez Cécile, son mari et ses fils… Est-ce là qu’elle a connu Benoit ? En 1916 elle habite avec Cécile, son fils François et son épouse Louise Bodin qui est témoin de plusieurs actes des enfants de Louise Rosala. En 1926 les deux femmes habitent ensemble, toujours à la même adresse (son fils a déménagé).

Cécile et Louise entretiennent donc des relations étroites : elles demeurent ensemble durant une longue période. La première est témoin lors du décès du fils de la deuxième, Raymond, en 1913. Elle déclare aussi la naissance de son petit fils Alexandre Benoit, né chez elle comme on l’a vu plus haut. La « belle-fille » illégitime est donc acceptée par sa belle-mère. Elle est d'ailleurs qualifiée comme telle (« belle-fille ») dans le recensement de 1926, bien qu'elle ne soit pas mariée légitimement au fils de Cécile.

C'est au tout début des années 1930 qu'elles doivent se séparer. En effet, en 1931, Céclie habite désormais chez sa fille et son gendre, toujours dans le 13e. Je pers momentanément la trace de Louise et ne la retrouve qu’en 1936 : elle habite alors 33 rue Deparcieux, Paris 14e, avec un « ami », Henri Bootz (un livreur parisien né en 1901). Quels sont précisément les liens qui les unissent ? Je l’ignore.

Les deux femmes se sont-elles brouillées ? Est-ce simplement la vie qui les a séparées ? Pas de réponse là encore.

L'unique fils survivant de Louise, Alexandre Benoit, n’habite jamais avec elle. Je ne l’ai pas trouvé non plus avec sa grand-mère Cécile Rols. Et, bien sûr, pas avec son père puisqu'il est décédé. Alors où est cet enfant ?

Une mention en marge de son acte de naissance indique que suivant un jugement du tribunal de la Seine en date du 12 septembre 1919, Alexandre Benoit est déclaré « adopté par la Nation ». L'institution des pupilles de la Nation a été créée par la loi du 27 juillet 1917. Son but était d'apporter une protection morale et matérielle, jusqu’à leur majorité, aux nombreux orphelins de guerre et enfants de mutilés ou d'invalides. Cette demande a été acceptée en premier ressort, ce qui n’est guère étonnant puisque son père est Mort pour la France. Si le jugement (succinct) est en ligne, le dossier individuel complet a disparu (avec tous les dossiers de 1918 à 1940, dans l'incendie du Fort de Montlignon en 1974).

Une autre mention indique qu’il se mariera en 1946 avec Lucie Trichard à Paris 14e. Il décèdera finalement à Lapalud (Vaucluse) en 1977, à l’âge de 60 ans.

Louise Rosala meurt en 1946 à l’âge de 59 ans dans le 14e arrondissement de Paris… à l’hôpital Broussais. Encore un hôpital.
Cécile, pour sa part, meurt en 1937 à l'âge de 79 ans, chez sa fille à Paris (13e arrondissement).

En rédigeant cet article, j’aperçois soudain une mention ajoutée au crayon de papier, à moitié effacée, sur la fiche matricule de Benoit : « Secours de 150 f le 20.7.1918 à Mme Rosala Louise mère de l’enfant mineur Astier ». 

Bon sang ! Cet enfant était là sous mes yeux depuis tout ce temps !