« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

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samedi 29 avril 2023

L'héritage d'Antoine Astié

En 2020 sur ce blog j’avais raconté comment j’avais retrouvé les maisons de mes ancêtres Astié à Conques (12) – voir ici.

Grâce aux recherches effectuées aux archives de Rodez j’ai trouvé des informations complémentaires.

 

Rappel des protagonistes :

- Antoine Astié (1732/1809), marié en 1769 avec Marguerite Paul (1741/1816), dont :

  • Pierre Astié (1772/1836), marié en 1797 avec Marianne Frances (1772/1840), dont :

- Marianne Astié (1800/1847) mariée en 1827 avec Jean Antoine Dujou (1800/1872)

- Marie Jeanne Astié (1802/1840) mariée en 1827 avec Jean Antoine Marty (1800/1882)

- Christine (1804/1853) mariée en 1833 avec Geraud Roux (1809/1881)

  • Augustin Astié, mon sosa 64 (1774/1861), marié en 1805 avec Catherine Chivalié (1784/1866)

  • Marie Anne Astié (1776/1843), mariée en 1799 avec Jean Pierre Barbes (1772/1836)

 

Arbre Antoine Astié et ses enfants

 

Lors de la création du cadastre napoléonien dans les années 1840 Antoine Astié et son épouse sont décédés, de même que Pierre (le fils aîné) et son épouse Marianne. Comme expliqué dans l’article précédent, la fille cadette d’Antoine, Marie Anne, quitte Conques avec son mari et n’est donc plus concernée par le patrimoine conquois. Christine, la fille cadette de Pierre, fait de même dans les années 1830. Sur le cadastre apparaissent donc les deux premiers gendres de Pierre, Jean Antoine Dujou et Jean Antoine Marty, ainsi que mon ancêtre Augustin Astié.

Le premier possède les parcelles 138 et 141, le second la 135 et mon ancêtre la 96.

 

Cadastre Conques © AD12

 

J’avais émis l’hypothèse que Jean Antoine Dujou avait hérité sa maison (et des terres) de son beau-père puisqu’il était originaire d’une autre paroisse.

 

Ce patrimoine se trouvait-il déjà en possession des Astié lors de la génération d’Antoine ?

 

J’ai d’abord trouvé aux archives une donation passée le 1er fructidor an XIII (19/8/1805) devant Me Pierre Paul Flaugergues, notaire à Conques (3E31246) entre les époux Astié et leur fils aîné Pierre : les premiers "voulant donner à pierre Astié leur fils ayné des marques de leur affection" donnent "purement et simplement par donation entre vifs a jamais valable et irrevocable audit Pierre Astié ici présent et acceptant, le quart de la totalité de leurs biens meubles, immeubles présents [...] par preciput* avantage avec dispense de toute imputation sous la réserve de l'usufruit leur vie durant".

Lesdits biens sont situés en totalité dans la commune de Conques. Le document les détaille : "scavoir ceux dudit Astié en maison, jardin, vignes, prés, nogaretes**, terres, bois dans toute leur contenance, évalué le tout quatre mille francs, et revenant pour le quart à mille francs". 4 000 francs, c’est tout de même une certaine somme : les Astié étaient aisés.

La donation comprend en outre "le quart du mobilier dont le détail suit : deux tonneaux, deux cuves vinaires, deux barriques, une grande chaudiere et deux autres moyennes, une conche***, un seau, une marmite le tout cuivre, douze assiettes, trois plats, dix ecuelles, dix cuillères à bouche, deux pots le tout étain, douze serviettes, quatre nappes, quatre linceuls****, trois armoires et autres meubles ordinaires". La présence des cuves et tonneaux s’expliquent par le fait qu’Antoine et Pierre étaient vignerons. On remarque que le mobilier ordinaire (table, lit…) n’est pas détaillé précisément.

Enfin, la donation concerne aussi les biens de Marguerite Paul, qui est "expressement autorisée » par son mari à donner à son fils « le quart [de ses] biens consistant aux reprises**** qu'elle a sur les biens dudit Astié son mari à deux cents francs".

 

Pourquoi cette donation très privilégiée au fils aîné au détriment du cadet (et de la fille) ? Est-ce juste au nom du droit d’aînesse ou y avait-il un attachement particulier des parents à ce fils ? Impossible de répondre à cette question, bien sûr. Quoi qu’il en soit, cet acte donne un premier aperçu du patrimoine familial, qui est plutôt confortable.

 

La succession d’Antoine en 1809 (tables de succession du bureau de Conques 50Q252 et registres de mutation 50Q139), trouvée elle aussi aux archives, est très précise puisque ses biens sont inventoriés.

 

Pierre Astié, propriétaire, comparait tant pour lui que pour Augustin et Marie Anne Astié ses frère et sœur. Il déclare que son père est décédé dans sa maison de Conques (sans préciser le lieu de cette maison, hélas pour moi, mais son acte de décès dit qu’elle est située « Au Palais »). Une autre donation au comparant est citée dans ce document, faite à l’occasion de son contrat de mariage en date du 6 germinal an VII - 26/3/1799 (ce qui est curieux car le mariage de Pierre est daté, lui, du 28 prairial an V, soit deux ans auparavant) ; je n’ai pas encore pu vérifier s’il y a bien un document à cette date. Cette donation était composée d'un tiers des biens du défunt. Ce qui signifierait que Pierre a reçu un tiers des biens parentaux lors de son mariage puis un quart 6 ans plus tard.

 

Selon la succession il est échu aux trois enfants les terres suivantes :

"- une châtaigneraie et bois taillis dit de feifreley de 10 sétérées; revenu 10 [?] fcs, capital 400 fcs
- un pré à la Salesse, 1 sétérée 29 quarte; revenu 30 fcs, capital 600 fcs.
- un lopin de terre dite canteserp, contenance 2 premires [ ?]; revenu 50 fcs; capital 10 fcs.
- terre et vigne au terroir de las combes, 1 sétérée; revenu 10 fcs, valeur 200 fcs.
- autre vigne las combes, 15 journées; revenu 40 fcs, valeur 800 fcs.
- une nogarete* à las combes, 1 quarte; revenu 7,50 fcs, valeur 150 fcs.
- un petit jardin audit lieu, 2 premières; revenu 6 fcs, valeur 120 fcs.
- terre rocher et brassier à rocassou, 6 sétérées; revenu 15 fcs, valeur 300 fcs.
- châtaigneraie et bois à catet, 14 sétérées; revenu 40 fcs, valeur en capital 800 fcs.
- autre châtaigneraie au méja, 8 sétérées; revenu 10 fcs et valeur au capital 200 fcs"
.

Le capital c'est ce que l’on touche si on vend (ou paye si on achète), le revenu c'est ce que cela rapporte (par an le plus souvent) – merci à @cecile_kza pour cette précision.

 

J’ai pu situer la majorité de ces terres sur une carte. Et je les ai retrouvées (toutes sauf deux) dans les possessions des héritiers probables d’Antoine sur le cadastre napoléonien : son fils Augustin et ses gendres Dujou et Marty.

 

Tableau des possessions d’Antoine transmises aux héritiers

 

Reste la question de la maison. La succession mentionne "une petite maison-séchoir à Conques non affermée, d'un revenu de 25 fcs et valeur en capital de 500 fcs". Le quartier n’est pas mentionné. Parmi les maisons des héritiers, j’écarte celle d’Augustin, située dans le bas de Conques et non « Au Palais » comme le précise l'acte de décès d'Antoine.

Dans le cadastre napoléonien, Augustin possède bien une petite maison et un séchoir, mais ces bâtiments sont situés près du pont romain, sur le Dourdou (en fond de vallée) et il ne les obtient qu’en 1911 : ce ne peut absolument pas être la maison d’Antoine. 

Dans mon article précédent j’avais émis l’hypothèse que cette maison était la parcelle 138, appartenant à Jean Antoine Dujou. Mais elle fait 1,40 are et compte 4 portes et fenêtres : c’est la plus grande de toutes les maisons familiales. Dujou dispose aussi de la parcelle 141 qui mesure 27 centiares (soit 27m²) et n’a que 2 portes et fenêtres. Elle est donc beaucoup plus petite. Elle est qualifiée de maison en 1840, mais il n’y a pas de séchoir. Le seul séchoir du quartier est situé en bas de la rue du Palais, parcelle 143. Il appartient à Jean Pierre Servieres (folio 501).

Le qualificatif de "petite" maison dans la succession me ferait pencher vers la 141 plutôt que la 138 comme maison d’Antoine. Mais après tout cet adjectif n’est-il pas subjectif ? Ou était-elle réellement petite ? Comment savoir ? Antoine habitait-il une maison de 27m² ? Ou est-ce en fait le séchoir, plus tard qualifié de maison ?

 

"Les meubles existants dans sa maison, effets et cabaux*****" sont évalués à 300 francs.

Le document précise : "le tout étant détaillé article par article dans un état estimatif certifié par le comparant joint à ladite présente déclaration". Hélas cet état ne nous est pas parvenu.

 

Le total de la succession s’élève à 4 080 francs (soit un montant équivalent à celui évalué lors du partage en 1805). Lors du décès de Marguerite Paul, l’épouse d’Antoine, en 1816 il est échu aux trois enfants 750 francs, montant des reprises que la défunte avait sur les biens de feu Antoine Astié son mari, plus son linge et habits déclaré d'une valeur de 30 francs.

Je n’ai pas trouvé la succession d’Augustin (la page du registre étant déchirée), mais celle de son épouse Catherine Chivalié a été déclarée en 1866 par leur fils Louis Etienne. Celui est le troisième fils dans l’ordre de la fratrie, mais le premier survivant (ses deux frères aînés étant décédés en 1850 et 1864). Il a bénéficié lui aussi d’une donation d’un quart des biens parentaux, en 1859.

On notera que l’un des fils d’Augustin, qui se fit ouvrier d’usine a Cransac (à 22 km de Conques), n’avait pas d’actif lors de sa succession : trois générations après Antoine, le patrimoine familial a nettement fondu !

 

Bon, je n’ai pas résolu de façon absolue la question de la maison d’Antoine, mais grâce à mes recherches aux archives j’en sais un peu plus sur son patrimoine et la façon dont il a été distribué.

 

 

 

 

* Preciput = Désigne une disposition successorale avantageant l'un des héritiers en excluant sa part de la succession du défunt.
** Nogarette = Noyeraie.
*** Conche = Sans doute une bassine.
**** Linceul = Drap de lit, généralement en lin.
***** Reprise = Opération par laquelle, à la dissolution de la communauté, chaque époux reprend ses biens propres en nature ou en argent.
****** Cabau = Avoir, ce que l'on possède, bien, fortune, cheptel.
Un mot de vocabulaire vous manque ? N’hésitez pas à consulter la page lexique de ce blog !


 

samedi 25 mars 2023

La grange de Conques

Au début de ce mois j’ai été porter mes pas dans les pas de mes ancêtres : sur leurs traces, j’ai arpenté le village de Conques en Rouergue (suivi de trois jours au archives départementales), ce village aveyronnais que mes ancêtres ont habité pendant un peu plus de deux cents ans. Préparant ma visite, j’ai repéré les propriétés de mes ancêtres sur le cadastre napoléonien. Une fois sur place, j’ai vu la chapellerie de pépé Augustin, la maison du Palais (voir ici comment j’ai reconstitué l’emplacement de ces maisons) et les maisons de Jean Pierre Rols situées non loin de l’abbatiale.

 

Celui-ci, né en 1784, cultivateur propriétaire, apparaît sur les états des sections du cadastre napoléonien de Conques : il possède une vingtaine de parcelles dans la commune (1 bois, 3 châtaigneraies, 2 jardins, 2 sols et cours, 5 pâtures, 1 pré, 1 séchoir, 1 terre, 3 vignes, 3 bâtiments; pour un total imposable de 42,01 francs). Trois bâtiments sont construits :

- une grange et écurie, sur la parcelle 239 ;

- sa maison, parcelle 251, qui a 4 portes et fenêtres, classée dans la 8ème catégorie, elle vaut 4 francs.

- celle de la parcelle 252 en a 2 (10ème catégorie) et vaut 1 franc. 

 

Propriétés bâties de JP Rols sur le cadastre napoléonien de Conques, 1840 © AD12

 

Une fois dans l’ancienne rue Droite, j’ai facilement reconnu les maisons 251/252 et, de l’autre côté de la rue, la parcelle 239 qualifiée de grange en 1840.

 

Maison de la parcelle 251 ; sur la gauche on aperçoit la 252.

 

En face, la parcelle 239

 

Le village de Conques est installé sur un site très accidenté. De nombreuses maisons appartiennent ainsi à deux propriétaires : l’un possède le premier étage ouvrant sur une rue haute, l’autre possède le rez-de-chaussée donnant sur une rue basse. C’est le cas de parcelle 252 : Jean Pierre Rols ne possède que le rez-de-chaussée ; l’étage, que l’on devine à gauche sur la photo, appartient à un autre propriétaire, François Bousquet.

Les rues étant étroites, il y a peu de recul pour prendre des photos ! De solides murs étayent parfois les constructions, comme on le voit côté 239. Cette grange a manifestement été transformée en habitation.

 

Déjà heureuse de cette visite, je ne me doutais pas de ce que j’allais trouver le lendemain aux archives…

 

Mon temps était compté, j’avais donc fait plusieurs listes de recherches à faire en priorité sur les cotes qui ne sont pas sur le site internet des archives départementales : listes de tirage au sort militaire, successions et quelques contrats de mariage dont j’avais mention par exemple… Le nombre de cotes est limité à 10 par demi-journée. Afin, de rentabiliser au maximum cette précieuse visite, je ne me suis pas contentée de récupérer les contrats de mariage visés mais j’ai consulté les liasses notariales en entier à chaque fois que j’en demandais une. J’ai ainsi fait des découvertes au hasard dans ces liasses.

 

C’est le cas pour l’acte concernant François Rols. Celui-ci est le père de Jean Pierre. Il est tantôt qualifié de marchand, vigneron ou propriétaire.



Accord de François Rols © AD12

Le 9 messidor an XIII (28 juin 1805) il se présente devant Me Pierre Paul Flaugergues, notaire à Conques, avec Pierre Dalmon (est-ce le cultivateur né vers 1752, marié en 1800 avec Marie Servie ? Je pers sa trace après ce mariage – je n’ai pas trouvé d’autre Pierre Dalmon). Celui-ci possède la parcelle 237, qualifiée de "patus". Le patus désigne un terrain dépendant d'un bâtiment, destiné à ses commodités (cour intérieure, basse-cour, fumier, place) ; il peut être divis (appartenant à un seul propriétaire) ou indivis (plusieurs propriétaires en indivision, parfois la communauté des habitants). La parcelle 237 est donc une petite cour.

Souhaitant construire une bâtisse ou une grange sur une parcelle contigüe à celle dudit Dalmon, François Rols s'accorde avec son voisin pour avoir l’autorisation de "bâtir une muraille avec mortier, d'aplomb au roc, [au] nord, sur lequel ledit Rols élèvera la muraille à la hauteur qu'il jugera à propos, qui demeure et sera pour toujours à sa charge".

La question de l’eau étant de tout lieu et de tout temps une question cruciale, les deux parties s’accordent sur ce point :

Ledit Rols aura "toute faculté même de faire tomber les eaux du couvert du côté du patus dudit Dalmon qu'il recevra au moyen d'un canal pour les conduire dans la ruelle [...] qui sépare le patus sur lequel est bâti ladite grange d'avec d'autre patus restant audit rols. […] Ledit rols [pourra] recevoir [...] dudit dalmon les eaux qui découleront d'icelui sans aucune indemnité quelconque."

 

L’accord est très précis quant aux différentes possibilités des deux parties concernant cette muraille : ledit Rols "pourra faire placer des pierres saillantes dans le mur à construire du côté du patus de dalmon pour le soutien [dudit] canal ; et rols consent de son côté que dalmon ait la liberté de batir et faire construire un pilié sur la muraille du côté du patus de dalmon sur l'angle oriental de la grange dudit rols sur lequel il pourra placer des poutres et autres matériaux au cas il voulut augmenter sa maison sur ledit patus . Ledit dalmon sera tenu de laisser un jour pour l'emplacement [du] canal".

 

Or, cet accord entre voisins a lieu parce que François Rols fait bâtir une grange. Cette grange que l’on retrouve dans l’état des sections napoléonien au nom de son fils. Et que j’ai photographiée au début de ce mois (du moins son emplacement).

 

Et voici comment l’émotion ressentie sur place, dans le village, s’est trouvée doublée d’une autre devant un papier vieux d’un peu plus de 200 ans qu’a tenu et signé mon aïeul.

 

 

 

 

 

samedi 14 janvier 2023

Le cadastre de l'homme mort

Ce premier article de l’année sur le blog ne sera pas consacré (pour une fois) à ma généalogie, mais à celle du village de mes parents. Et, grâce à vous, j’espère résoudre un mystère : un propriétaire au cadastre mort depuis plusieurs années… (sic).

 

En effet, mon père s’est intéressé à l’histoire de sa maison, et par extension à celle du village. Pour vous situer, nous sommes en Limousin. Le village s’appelle Mercier Ferrier, dans la commune de Faux la Montagne (département de la Creuse). Entendons-nous bien, en Limousin un village désigne ce que l’administration appelle un hameau. Le chef lieu de la commune, où se situent notamment église et mairie (ici Faux la Montagne, donc), est désigné sous le terme vernaculaire de « bourg ». Le village de Mercier ne compte qu’une poignée de maisons.

Extrait du plan du cadastre "napoléonien", section C dite de Mercier Ferier 3ème feuille © AD23
 

Mon père s’est intéressé au cadastre. Ou plutôt « aux cadastres » :

  • Le premier, dit « napoléonien », érigé en 1834, contenant plan et états des sections. Il est consultable en ligne sur le site des archives départementales de la Creuse ;
  • Le deuxième date de 1882. Il n’y a pas de (nouveau) plan pour cette période. Les états des sections se divisent en un registre des propriétés bâties et un autre des propriétés non bâties. Le premier a été consulté en mairie, leur exemplaire du second a disparu.
  • Le troisième est de 1911. Toujours pas de plan (on continue d'utiliser ceux de 1834), mais la mairie a conservé les deux registres, bâti et non bâti.

 

Sur la totalité de la période (1834/1911), le village compte 23 bâtiments : maisons, masures, granges, moulins, écuries.

 

La maison de mes parents est issue de trois propriétés, chacune dites « maison écurie à cour ».

  • La parcelle C467 a appartenu en premier à « Brugère Pierre à Mercier ». Le bâtiment qui est construit dessus ne contient qu’une seule fenêtre (les portes ne semblent pas être comptabilisées). Il est classé dans la septième catégorie (la dernière), entraînant un revenu de 1,07 franc. La parcelle totale mesurait 84 m² ; si l’on se base sur la construction actuelle, on estime la maison à environ 42 m². Elle correspond au salon actuel de mes parents.
  • La parcelle C468 appartenait à « Nauche Antoine à Mercier ». Elle est similaire à la première : légèrement plus grande (91 m²), le bâtiment dispose de deux fenêtres, il est classée dans la même catégorie et dégage le même revenu. Il est estimé à 44 m². Elle correspond à la chambre actuelle et la cuisine de mes parents.
La salle de bain correspond à un ancien appentis (agrandi) appartenant à la C469. En face d’une petite cour se trouve le (futur) atelier de mon père : il déblaie actuellement une ruine qui correspond au grand bâtiment de la parcelle C469.
  • Cette parcelle C469 appartenait à « Chapelle Jean à Mercier ». C’est la plus vaste : 1,67 are. Classée elle aussi dans la septième catégorie, elle valait 1,14 franc et avait deux fenêtres. Sa petite bosse caractéristique sur le plan indique la présence d’un four à pain (ce qu’a confirmé l’exploration des ruines par mon père).

 

Extrait du plan du cadastre "napoléonien", section C dite de Mercier Ferier 3ème feuille © AM Faux


Afin de savoir qui étaient ces gens, je me suis intéressée aux familles : en croisant état civil, recensements, et éventuellement tables de successions ou registres matricules, j’ai établi leurs généalogies. C’est là que j’ai soulevé un loup. En effet, si Jean Chapelle est clairement identifié comme propriétaire de la C469 en 1834, il le reste jusqu’en 1928. Première bizarrerie : propriétaire en 1834, il serait né vers 1815 au minimum (je ne pense pas qu’il puisse être propriétaire avant ses 20 ans). Désigné ainsi jusqu’en 1928, cela le ferait âgé de plus d’une centaine d’années. Des recherches complémentaires étaient nécessaires pour éclaircir cela.

 

Pour ceux qui ne sont pas familiers des généalogies limousines, il faut savoir quelques éléments : d'abord tous les enfants se prénomment Léonard. S’ils ne s’appellent pas Léonard, ils s’appellent Léonarde, parce que c’est une fille. Bon, j’exagère, mais à peine.
Les homonymes sont très nombreux. Ainsi l’épouse de Jean Chapelle se nomme Marie Chapelle (les deux familles ne semblent pas avoir de liens, bien qu’elles portent le même patronyme). Ils ont nommé leurs trois filles Marie. L’une d’elle a épousé un Antoine Laluque et a nommé ses six filles Marie ! A la génération suivante je compte encore trois Marie supplémentaires.

Autre éléments récurrent de la généalogie limousine : le prénom de naissance on s’en fiche ! Ainsi dans les recensements j’ai trouvé un Antoine qui devient au fil des comptages Jean, ou bien un Léonard > Eugène et même une « Eugénie, fille » mutée en « Eugène, fils » au dénombrement suivant ! L’état civil est tout aussi fantaisiste : née Léonie en 1884, elle meurt Élise en 1888 ; née Jeanne en 1863, elle meurt Marguerite en 1864 ; né François en 1833, il meurt Léonard en 1835, etc…

Ah ! et, régulièrement les parents « oublient » de déclarer la naissance de leurs enfants : il faut alors passer par le tribunal pour établir un acte de notoriété. C’est le cas par exemple du second fils de Jean et Marie Chapelle né en 1823 mais jamais déclaré officiellement.

Bref, de jolis sacs de nœud et beaucoup de patience pour démêler tout ça.

 

Mais revenons à notre Jean Chapelle. J’ai retrouvé sa naissance, en 1767. Et son décès en 1840 ! Ce décès est confirmé par les tables de successions : ses héritiers sont ses enfants.

 

Donc comment Jean peut-il être déclaré propriétaire au cadastre jusqu’en 1928 alors qu’il est décédé dès 1840 ?

Avez-vous déjà rencontré ce cas ?

Je veux bien croire qu’un agent recenseur ne soit pas tout à fait rigoureux dans ses enregistrements, mais l’administration fiscale ?

Alors comment est-ce possible ?

 

Il va de soit qu’il n’y a pas d’autre Jean Chapelle (du moins officiellement), ni dans l’état civil, ni dans les recensements.

 

Pourtant le numéro de case est relativement petit (61), ce qui confirme son ancienneté. En effet, à partir du cadastre de 1882, chaque propriétaire dispose d'une fiche portant un numéro où sont regroupées toutes leurs possessions, appelée la « case » pour les propriétés bâties et le « folio » pour les non bâties. Les propriétaires déjà présents au cadastre précédent ont les premiers numéros de ces cases, tandis que les nouveaux propriétaires de cette fin du XIXème ont les numéros suivants, donc plus élevés (par exemple les derniers propriétaires dont le nom commence par un C indexés en 1882 ont des numéros autour de 350). D'après son numéro de case, ce propriétaire ne peut pas être un homonyme plus récent (il aurait alors un numéro dépassant la centaine).

 

Par ailleurs, le nouveau propriétaire de la parcelle C469 en 1928 est Léonard Fleitout (ou Eugène, ça dépend des jours)… qui se trouve être l’arrière petit fils de Jean Chapelle.
Filiation : Jean Chapelle > Marie Chapelle épouse Laluque > Marie Laluque épouse Fleitout > Léonard Fleitout fils.

 

Sur le cadastre de 1911, la case 125 a d’abord été attribuée à « Fleitout Léonard veuve à Mercier Ferrier » (c'est-à-dire Marie Laluque) avant d’échouer en 1921 à « Fleitout Léonard fils à Mercier Ferrier ». La C469 sort de la case appartenant à « Chapelle Jean à Mercier Ferrier » en 1928 pour entrer dans celle de Léonard Fleitout. Celui-ci l’a donc probablement hérité de son arrière grand père.

 

Sur les répertoires des formalités hypothécaires, Léonard Fleitout a bien une transaction en 1928, pour 23 315 francs, désignée sous le terme de « donation » (?). Je n’ai malheureusement pas plus d’information sur cette transaction, et notamment le propriétaire d’origine du bien.

 

J’ai pensé un temps qu’il y avait eu un changement de prénom d’usage, bien que je n’étais pas sûre que les prénoms d’usage puissent être employés dans le cadastre (mais bon, ils le sont bien dans l’état civil, alors…). Mais la transmission se fait par les filles : pas moyen de changer Marie en Jean (du moins j’espère).

 

Et vous savez quoi ? Le propriétaire de la C468 est, à partir de 1882, Antoine Ruby, petit fils par alliance du précédent propriétaire, Antoine Nauche. Il l’est toujours dans le cadastre de 1911… mais il est décédé en 1901 !

 

Bref, je cale. Si vous avez une explication pour ces mystérieux propriétaires fantômes, je suis preneuse.

 

 

vendredi 23 décembre 2022

#52Ancestors - 51 - Michel Barré

   - Challenge #52Ancestors : un article par semaine et par ancêtre -

Semaine 51 : Sur quoi voulez-vous progresser ?

 

Sur la paléographie bien sûr !

 

S’il y a un fond que j’aime explorer, c’est le fond des notaires. Il révèle la vie de nos ancêtres : des événements importants, comme les contrats de mariage ou testaments, mais aussi des fragments d’existence aussi divers que variés. Ainsi au fil de mes recherches j’ai trouvé des achats, donations, baux, fondations de chapelle, réfections des murs du cimetière, comptes de fabriques. Mais aussi des actes plus mystérieux comme des remises en main, actes d’office ou lausimes*.

Pour les comprendre, il a fallu appréhender le vocabulaire notarial.

 

Mais bien sûr, avant cela, il faut pouvoir lire les documents !

 

C’est là que la paléographie intervient. Je n’ai jamais eu de formation en paléographie : tout ce que je sais je l’ai appris sur le tas. A force, je reconnais les formules notariales caractéristiques (comme « procedant de l’authorité avis et consentement », « a peine de tout damps » ou « une bonne parfaitte sante, mémoire de ses bons sens et entendement »).

Les documents de type testament obéissent à des structures identiques : date, protagonistes, état de santé, recommandation de son âme, dispositions, témoins, signatures. Bien des fois j’ai réussi à débloquer une transcription en retrouvant l’expression dans un autre document similaire dont le déchiffrement avait été plus facile.

Plus je lis un notaire, plus je me familiarise avec son écriture et plus il devient facile de comprendre son écriture.

Cette expérience me permet assez souvent de bien comprendre de quoi il s’agit. Mais parfois j’ai plus de mal à déterminer le sujet même du document.

 

Par exemple avec le document de Michel Barré.

Michel est mon ancêtre à la XIVème génération (sosa n°9158). Il a vécu au XVIIème siècle sans doute d’abord à La Ferté Macé puis à la Sauvagère (Orne). Il était clerc (de notaire ?). Je n’ai aucun acte paroissial le concernant. Tout ce que je sais de lui (et de son père, son épouse et ses filles) je l’ai appris dans les fonds notariaux.

Acte notarié Michel Barré, 1624 © AD61 via Geneanet


J’ai trouvé ce document grâce à l’indexation collaborative sur Geneanet (l’Orne n’a pas mis en ligne ses fonds notariés). La signature de Michel, aisément reconnaissable avec sa jolie ruche au bas de l’acte, confirme que cet acte concerne bien « mon » Michel.

D’ailleurs « Michel Barré fils de Léonard » sont les rares mots que je parviens à lire dans ce document.

 

La première ligne doit concerner la date (même jour et an que le document précédent ?).

Ligne 2 : Michel Barré fils de Léonard.

Ligne 3 Guillaume Nyault fils de ???

Ligne 4 : paroisse de la Ferté Macé

Un peu plus loin : la somme de soixante quatorze ???

 

C’est en gros à peu tout ce que je comprends.

 

On notera que ce n’est absolument pas une question de date : il est parfois plus facile de déchiffrer un document du XVIème qu’un autre du XVIIIème.

 

Les difficultés auxquelles on doit faire face ?

  • L’orthographe, bien sûr, qui n’est pas fixée – voir ici mes réflexions humoristiques à ce sujet. Mon truc à moi : lire à voix haute. Bien souvent le sens se révèle malgré mon cerveau strictement dressé à l’orthographe.
  • Les espacements entre les mots, qui ne sont pas toujours ceux auxquels nous sommes habitués aujourd’hui.
  • La forme des lettres qui, non seulement peuvent varier de celles que nous connaissons, mais qui en plus – les traîtresses – peuvent varier au sein d’un même mot ! La comparaison avec une lettre similaire dans le texte peut aider à déterminer de quelle lettre il s’agit. Conseil qui peut s’avérer aussi utile pour le point suivant.
  • Les caméléons : ces lettres qui se prennent pour une autre, comme le e/o, r/v ou p/x.

 

Mais bon, il faut bien l’avouer, ces trucs et astuces ne suffisent pas toujours. Et parfois, comme ici avec Michel, je reste dans l’ignorance la plus totale…

 

 

 

* Voir la page lexique de ce blog !

 

vendredi 16 décembre 2022

#52Ancestors - 50 - Jean Astié

   - Challenge #52Ancestors : un article par semaine et par ancêtre -

Semaine 50 : Traditions

 

Pour cette antépénultième semaine du challenge #52Ancestors (déjà !), je garderai le sujet au singulier : la tradition ; et plus particulièrement la tradition orale. Voici quelques fragments de vie recueillis auprès de mon oncle Jean.

 

Augustin Pierre Jean Astié est mon arrière-arrière-grand-père. Il est né 1851, a grandi en Corse, s’est installé en Maine et Loire, a fait des séjours en Aveyron et a fini sa fini en région parisienne en 1914. Je lui compte plus d’une vingtaine de domiciles. Mon oncle Jean m’en a fourni une probable explication : « Il était journalier dans une ferme. Quand il n'y avait plus de travail, on le renvoyait. Il mettait ses enfants et ses effets dans un coffre, le tout dans une charrette à bras, et partait avec toute la famille à pied à la recherche d'un nouvel emploi. Si une parente avait besoin d'une aide il lui laissait un enfant. C'est ainsi qu'Augustin Daniel [son fils, 1888/1974] s'est retrouvé commis boucher boulevard St Michel [à Angers, Maine et Loire]. Il allait chercher des quartiers de viande à l'abattoir d'Angers, situé dans [le quartier de] la Doutre, avec une charrette à bras et à l'occasion buvait un bol de sang frais pour se ravigoter. Vrai ou faux ces souvenirs dégoutaient ses petits-enfants quand il le leur racontait... »

Son fils Augustin Daniel « travaillait au cardage du chanvre à l'usine Bessonneau. Comme il était interdit de fumer il chiquait. Quand on lui offrait une cigarette il la mettait dans sa bouche avec le papier (la cigarette à bout filtre n'existait pas dans ma jeunesse) et la mastiquant avec plaisir à grands crachats de jets de salives par terre comme dans les films de cowboys. Au repas il plaçait sa chique dans la doublure de sa casquette ou sous la table ce qui rendait grand-mère furieuse. Il était payé à la semaine mais la paye finissait souvent au café du coin. Comme excuse il disait que son frère qui lui ressemblait s'était fait passer pour lui ou qu'il avait perdu son porte-monnaie. La grand-mère devait gérer la pénurie ce qui explique leur faible niveau de vie et le surnom donné à Augustin à la retraite de "grand-père pastis". Heureusement il avait un très bon côté. »

 

Augustin a épouse Louise Lejard en 1912 à Angers.
Jean se souvient des logements habités par trois générations de notre famille :

« Au début Augustin et son épouse Louise habitaient au dessus de la boucherie Frète, Faubourg St Michel ». Cette boucherie était tenue par l’oncle et la tante d’Augustin, Daniel Frète et Elisabeth Rols.

« Le bâtiment était en partie creusé dans l'ardoise. Le premier étage était réservé à la "grand-mère Frète" [Elisabeth Rols], c'est ainsi que nous l'appelions et nous ne la voyions que très rarement. L'étage au sommet du rocher était une petite cour avec le logement des grands-parents et un cabinet d'aisance. Dans ces vieux bâtiments les logements étaient imbriqués les uns dans les autres. L'escalier était taillé dans le rocher d'ardoise. L'appartement était petit et sombre. La cuisine donnait sur la cour et la chambre donnait sur la rue. Dans cette chambre une cloison séparait le lit de Daniel du lit des parents. La fosse du cabinet était creusée au deuxième étage dans le rocher, je te passe les détails quand il fallait la vider…

Quand le grand-père était en colère après l'un d'entre nous, il lançait sa casquette, en jurant d'un "Non d'une pipe de peau d'chien vert ! ".  C'était un signal d'un grand mécontentement et qu'il fallait se tenir à carreau. »

 

Augustin et Louise n’ont eu qu’un seul enfant, Daniel Augustin. En 1935, il épouse Marcelle Assumel-Lurdin.

« Militant populaire des familles, il prit avec son épouse, l'organisation et la gestion de la Maison Familiale de Vacances et de Repos des Travailleurs, située sur le domaine du Hutreau (de 1945 à 1952). »

Le Hutreau est un grand domaine situé près d’Angers. Ce n'était à l'origine qu'une modeste closerie, une petite exploitation rurale. Au XVIIème il est la propriété de familles de la bourgeoisie d’Angers, puis de familles nobles. Petit à petit le domaine est aménagé. Le château de style néo-Renaissance et le parc à l’anglaise datent du XIXème siècle. Le propriétaire est alors Armand Laity, préfet des Basses Pyrénées. Il meurt sans enfants. Divers propriétaires se succèdent alors jusqu'à l’installation des Ursulines en 1932 qui y établissent un pensionnat. En 1944 la Gestapo le réquisitionne. La Maison Familiale est installée après la guerre. Mais reprenons le cours des souvenirs de Jean :

« Le Hutreau était, dans les années d'avant la guerre 1939/45, un collège pour les filles des donateurs au financement du Bon Pasteur. La congrégation de Notre-Dame de Charité du Bon Pasteur est une institution de religieuses qui, ailleurs, rééduquait les "filles perdues" (voleuses et prostituées ou simplement "filles mères").

Ces demoiselles – les religieuses, pas les filles perdues – disposaient d'un parc de 8 hectares clos par un mur. Le château et l'annexe étaient équipés en salle de classe et en internat avec logement du personnel. La ferme était occupée par un couple qui entretenait le château. Au temps d’Armand Laity il y avait plein de personnel qu'il fallait loger près de leur lieu d'activité d'où cette profusion de logements indépendants, de combles pour les personnes de service. 

Après l'occupation par la Gestapo d'Angers et leur fuite précipitée [lors de la libération d’Angers], l'association "Mouvement Populaire des Familles" a loué le château, sauf la ferme, aux religieuses. Papa a été nommé directeur de la maison familiale de vacances. »

 

Mon père, aussi prénommé Daniel, est né en 1948 dans le château du Hutreau, au premier étage, où habitaient mes grands-parents.

 

« Quand notre famille est venue au Hutreau, les grands-parents leur ont succédé dans la location du 56 rue des Fours à Chaux. Il y avait un grand tennis désaffecté, un grand jardin entretenu avec soin et une ancienne loge de 3 pièces qui était destinée au concierge. Au sous sol il y avait les deux vestiaires destinés aux tennismans. Pendant les vacances scolaires les parents nous envoyaient en vacances dans leur ancienne maison chez les grands-parents. La loge, le tennis, et le jardin ont été rasés pour laisser la place à une maison médicale et son parking.

 

Quand l'association a cessé ses activités, en accord avec les religieuses, la famille a déménagé dans l'Annexe. C'était un grand bâtiment avec les pièces hautes de 3 mètres, cloisonnées et séparée du reste de l'espace, pour que toute la famille puisse y habiter dans une partie qui leur était réservée. A la retraite, grand-père Augustin et sa femme Louise ont rejoint Daniel et Marcelle au Hutreau. Ils habitaient deux pièces de l'Annexe avec une entrée autonome.

 


Quand nous avons tous quitté le Hutreau en 1954, ils ont habité le Frémureau, petite cité d'urgence d'après guerre, située à 500 mètres du Hutreau.

Le logement se composait de deux petites pièces de 9 m² chacune (la cuisine et la chambre) avec un petit jardin. Grand-père Augustin y avait construit une cabane pour y ranger ses outils de jardinage et de bricolage. La dizaine de petites maisons construites était sans eau courante : les habitants du hameau devaient de contenter d’un puits collectif desservant des robinets au dessus de bacs à laver en ciment, un bloc sanitaire de plusieurs cabinets mais pas de douche, dans un bâtiment commun à l’extérieur. Pour le chauffage chacun apportait sa cuisinière à charbon qui servait de chauffage l’hiver pour les deux pièces. Il y avait quand même un compteur électrique individuel pour l’éclairage.

 

Daniel et Marcelle ont fait construire une maison rue Auguste Blandeau. La famille devenait propriétaire d’une parcelle d’un petit terrain  triangulaire  situé dans un vieux quartier où il y avait de grandes surfaces de maraîchage que la ville grignotait progressivement. Il a dessiné un plan qui lui convenait (ses études de commis d'architecture lui ont bien servi) en fonction de sa famille de sept enfants. J’avais alors quinze ans. C'est ainsi que nous avons quitté le Hutreau pour habiter une maison pas encore finie (il fallait monter au premier étage par une échelle). Elle se situait à un carrefour de cinq rues au sud de la ville d’Angers.

Quand il a fallu la couvrir, la ville à imposé une toiture en tuile rouge pour éviter la trop grande monotonie des toitures d’ardoises bleues.

Mon grand-père, papa et moi avons hissé les tuiles plates dans les deux  greniers. Comme les escaliers n’étaient pas encore posés, c’était par des échelles qu’il a fallu transporter tout le stock de tuiles. Grand-père et papa se sont chargés de les poser puis de les fixer sur les liteaux de la toiture avec un fil de fer. Un couvreur est venu tout vérifier et a posé les tuiles faîtières collées avec un mortier.

Quand le menuisier eut posé l’escalier, tout le monde pris possession des chambres. Les parents avaient la chambre, au premier étage, donnant sur la rue. Notre chambre, celle des trois fils aînés, donnait sur le jardin. Il n’y avait de place que pour trois lits et trois chaises. Mes deux autres petits frères, avaient une chambre un peu moins grande. Un placard, sur le pallier permettait de ranger les vêtements des cinq garçons. Nos deux sœurs dormaient en bas dans la chambre donnant sur la rue. »

 

Merci à mon oncle Jean pour ses/ces souvenirs…

 

 

 

vendredi 2 décembre 2022

#52Ancestors - 48 - Augustin Pierre Jean Astié

  - Challenge #52Ancestors : un article par semaine et par ancêtre -

Semaine 48 : Les ombres de votre généalogie (ancêtres non encore explorés)

 

Dans mon arbre, il n’y a pas vraiment d’ancêtre non exploré (comment résister à la tentation d’en savoir plus dès qu’un nouvel ascendant est connu ? Impossible). Mais il y a des pistes de recherche que je n’ai pas travaillées. En général, c’est parce que je suis loin du dépôt d’archives qui pourrait me renseigner.

Ainsi Augustin Pierre Jean Astié et son passé de prisonnier de guerre.

Augustin est né en 1851 à Conques (Aveyron) mais c'est son grand-père maternel Jean Antoine Mas qui a déclaré sa naissance, son père étant dit "gendarme à pied à la résidence d'Ajaccio". J’ai déjà parlé sur ce blog des mes ancêtres soit disant Corses (voir ici).

Augustin grandit en Corse où son père est gendarme. Il est l’aîné de 6 enfants. Bien sûr, je n’ai pas de détails sur son enfance. Etait-elle heureuse ? Je l’ignore. Cependant, brusquement à 16 ans il décide de devancer l’appel et de s’engager dans l’armée. Qu’est-ce qui a provoqué cette décision ? Voulait-il juste « voir du pays » ? Y a-t-il eu un conflit qui a provoqué ce départ précipité du domicile familial ? En tout cas, s’il y a eu des désaccords avec ses parents, ils ont dû s’apaiser car ils ont eu de nombreuses relations par la suite.

 

Bref, il s’engage. En 1867. Sa fiche militaire a été trouvée en Aveyron avec la classe 1871.  Il y a là un mystère que je n’ai pas résolu pour l’instant : y a-t-il une trace de son engagement volontaire en Corse ? Avec une classe de 1867 ? Le Fil d'Ariane m'a dit qu'il n'y avait pas ce type de document pour cette période.

Sa fiche aveyronnaise m’apprend qu’il a les cheveux et les yeux châtains foncé, les sourcils noirs, le nez et le front ordinaire, le menton et le teint rond (sic), la bouche moyenne, le visage ovale. Cette fiche doit faire partie du recensement ordinaire des jeunes garçons à leurs 20 ans. Du coup elle comporte quelques curiosités : son métier est caporal au 32ème de ligne et son lieu de résidence est Kœnigsberg en Prusse – où il est prisonnier !

 

Fiche matricule d'Augustin (détail) © AD12
 

 

Comme il sera ensuite gendarme (à l’image de son père), je sais aussi par son dossier qu’il mesurait 1,71 m, qu’il est de culte catholique.

Il y est confirmé qu’il était engagé volontaire ; ce qui a été rendu possible par les lois du 21 mars 1832 et 1er février 1868.

 

Rappelons rapidement les étapes de la réquisition militaire auxquels sont soumis les jeunes hommes : la conscription (service militaire obligatoire) a été mise en place sous la Révolution ; tous les hommes de nationalité française âgés de 20 ans sont astreints à un service militaire obligatoire de cinq années. Selon différentes lois, des remplacements peuvent être possibles. A partir de 1818, l'armée se recrute désormais en priorité par engagements et tirages au sort, avec faculté de remplacement et de nombreuses exceptions (dispensés, soutiens de famille, ajournés ou réformés…). La durée du service militaire actif est de six années pour les appelés et de huit années pour les engagés volontaires.

 

La loi Soult du 21 mars 1832 (mentionnée plus haut dans le dossier d’Augustin) maintient ce système tout en réduisant de huit à sept ans la durée du service pour les engagés volontaires.

La seconde loi dont il est question dans le dossier, est la loi Niel du 1er février 1868 : elle supprime l’exonération (qui permet d'éviter le service militaire en versant à la Caisse de dotation de l'armée une somme servant à payer les rengagements d'anciens militaires) et rétablit le remplacement. Elle abaisse la durée du service de sept à cinq ans, mais maintient les soldats dans la réserve pendant quatre ans.

 

Donc Augustin s’est engagé pour 7 ans. Il est incorporé au 32ème régiment d’infanterie de ligne où il arrive le 3 octobre 1868 comme soldat de 2ème classe.

 

Le 7 juin 1870 Augustin est nommé caporal, de 2ème classe d’abord puis de 1ère classe en août. Le caporal est le plus haut grade militaire de la catégorie des hommes du rang (groupe de base de l’armée). Il commande une escouade, groupe variant entre une dizaine et une vingtaine d'hommes. Il est souvent l'adjoint du sergent et le remplace parfois. La classe n’est pas un grade mais une distinction. La première classe est de plus haute distinction que la seconde.

En octobre 1672 il est nommé sergent. C’est le premier grade de sous-officier de l’armée. Il est le plus souvent chef de groupe (une dizaine d’hommes), éventuellement secondé par le caporal.

 

En 1873 Augustin sera remis soldat 2ème classe par circulaire du 25 août (j’en ignore la raison). D’autant plus qu’il a eu un certificat de bonne conduite.

 

Il a fait campagne contre l'Allemagne, du 19 juillet 1870 au 19 juin 1871. Pas de blessure ni de décoration signalée.

 

La guerre de 1870 :

Cette guerre s’inscrit dans la montée des nationalismes, en particulier allemand, du XIXème siècle. Bismarck veut se débarrasser de ses ennemis, l’Autriche et la France. Pour provoquer les Français, il pousse le cousin du roi de Prusse à se porter candidat au trône d'Espagne. S'il était élu, la France serait cernée par une coalition ennemie, ce qu'elle veut absolument éviter. Elle s'oppose à cette candidature. Par une pernicieuse manipulation Bismarck transforme cette question diplomatique mineure en camouflet pour la France. Se sentant outragés, les Français déclarent la guerre à la Prusse 19 juillet 1870, bien que l'armée ne soit pas prête. L’armée allemande, mieux organisée et mieux entraînée, a permis la victoire de la Prusse et de l'Allemagne malgré un armement plus faible.  

La guerre de 1870 s'est déroulée autour d'étapes clés, comme la bataille de Sedan en septembre) ou le long siège de Paris. La bataille de Sedan conduit à la chute de Napoléon III, et à la proclamation de la République le 4 septembre. Le siège de Paris, quant à lui, dure du 20 septembre 1870 jusqu'à la fin de la guerre. Près de deux millions de Parisiens se voient alors pris au piège, pauvrement défendus par quelques dizaines de milliers de soldats, dans un siège très dur. Il s'achève le 28 janvier 1871 avec la signature de l'Armistice.

La défaite de la France lors de la guerre de 1870 peut s'expliquer par différents facteurs, notamment le manque d'organisation, l’excès de confiance des dirigeants militaires et le déséquilibre des forces militaires présentes. Outre la défaite de l’Alsace-Lorraine, une lourde dette de guerre, la défaite française marque aussi la chute du Premier Empire et la mise en place de la Troisième République et une grave animosité entre Français et Allemands, menant indirectement aux deux grands conflits mondiaux du XXème siècle.

 

Augustin a été fait prisonnier le 29 octobre 1870. J’en ignore les circonstances exactes. Peut-être était suite au siège de Metz qui a eu lieu du 20 au 28 (le 32e y a apparemment participé) ? En l’absence de dossier plus complet, difficile à dire. Les occasions ne manquaient pas hélas : près de 50 000 Français ont été faits prisonniers pendant ce conflit. Il est resté en détention jusqu’au 19 juin 1871, soit 8 mois.

 

Je ne peux qu’imaginer cette période de sa vie, la captivité : un voyage en train vers la Prusse sans doute pénible. Son arrivée à Kœnigsberg (ou Königsberg aujourd’hui Kaliningrad, situé dans une enclave Russe isolée entre Pologne et Lituanie), des infrastructures plus ou moins insalubres, le froid, la faim, les vermines et les maladies, sans oublier les exactions de leurs gardiens, les travaux forcés parfois.

 

L’armistice a été signé le 28 janvier mais Augustin est déclaré en campagne (et prisonnier) jusqu’au 19 juin 1871 : est-ce le temps qu’il a fallu pour rapatrier les détenus en France ?

 

Bref, sans dossier individuel, je n’en saurai pas plus. Peut-être pourrait-on le trouver dans une des listes et quelques dossiers individuels qui sont conservés dans la sous-série GR Yj Prisonniers de guerre français et étrangers, 1792-1874, au Service Historique de la Défense ? Pour le moment il n’y a pas d’inventaire en ligne sur les prisonniers de guerre. Habitant trop loin, je ne peux pas m’y rendre.

 

C’est la limite à mes recherches pour le moment. Bien sûr, si quelqu'un veut y aller pour moi, je ne dis pas non... ;-)

 

 

 

 

vendredi 18 novembre 2022

#52Ancestors - 46 - Antoine Mas

 - Challenge #52Ancestors : un article par semaine et par ancêtre -

Semaine 46 : Cimetières et tombes

 

A l'occasion de cette quarante sixième semaine du challenge #52Ancestors dont le thème est "cimetière et tombes", je reviens sur les tristes (et nombreux) voyages d’Antoine Mas au cimetière.


On le sait, la période qui précède la Révolution française est une période de calamités agricoles : mauvaises récoltes, faim, froid, disettes… puis Révolution. Bien peu ont échappé à ces fléaux (en général, ils seront bientôt rattrapés et auront des ennuis jusqu’au cou…).

A Conques (12), si je n’ai pas de détails particuliers sur cette période, je vois bien que les registres paroissiaux débordent d’actes de sépultures.

Est-ce que la configuration du village a beaucoup changé par rapport à aujourd’hui ? Je l’ignore. Cependant aujourd’hui le cimetière est coincé entre l’abbaye et… le vide. Conques est en effet un village niché à mi-pente d’une grande colline (petite montagne ?) au cœur d’une vallée encaissée [*]. Il n’est pas très grand. Entouré d’un petit muret ; paisible lieu de repos et d’éternité.

 

Vue aérienne de Conques © B.Rousset via survoldefrance.fr

Lieu que la famille Mas a fréquenté de (trop) nombreuses fois. Antoine Mas (mon sosa n°132) a épousé Françoise Pradel - ou Pradellis/Pradelly - (sosa n°271) en 1775. Il est couvreur (il est même dit « Maître couvreur » en 1789 ; ce qui me fait penser qu’il ne devait pas être le plus pauvre parmi les plus pauvres), demeurant à Conques, rue des Rocs [**]. Ensemble ils ont eu 9 enfants… Et ils en ont enterré 8 ! Presque aussi régulièrement que Françoise mettait des enfants au monde (soit à peu près tous les deux ans), Antoine allait ensuite les enterrer au cimetière !
Le plus jeune a vécu 13 jours, le plus vieux 87 ans (mais il est resté célibataire). Seul mon ancêtre directe, Jean Antoine a survécu à cette hécatombe et a eu une descendance.

Antoine a donc accompagné ses enfants au cimetière en :
  • 1781 : décès de Françoise (âge inconnu)
  • 1783 : décès d’Antoine âgé de 2 semaines
  • 1785 : décès de Catherine âgée de 11 mois
  • 1789 : décès d’Antoine âgé de 13 jours
  • 1792 : décès d’Anne âgée de 13 ans
  • 1794 : décès de Marie âgée de 4 semaines
  • 1818 : décès de Marie Jeanne âgée de 31 ans
  • 1883 : décès d’Antoine âgé de 87 ans

On le voit, deux parviendront tout de même à l’âge adulte (Marie Jeanne et Antoine) mais, restés célibataires, ils ne donneront pas de descendance. A vrai dire, Antoine père ne connaîtra pas le décès de son (troisième) fils Antoine, car il meurt avant lui, avant 1833.

Le paradoxe de l’histoire est que j’ignore quand exactement Antoine père est décédé : je perds sa trace entre le décès de Marie Jeanne en 1818, où il est présent, et celui de son épouse en 1833, où il est dit décédé. Le voir si souvent au cimetière pour les autres et ne pas le trouver lui…

Si autrefois la mortalité infantile était courante, et si aujourd’hui elle est effrayante, comment ces parents ont-ils vécu le décès de la quasi-totalité de leurs enfants ? C’est une chose que nous ne pouvons imaginer à leur place, à leur époque. Mais la tristesse a bien dû habiter dans une maison de la rue des Rocs à Conques…


[*] Ce qui explique l’origine de son nom : la conque.
[**] Du moins je le suppose : l’adresse donnée est en partie sous une tâche d’encre !

 

 

 

vendredi 11 novembre 2022

#52Ancestors - 45 - Famille Desjoncherets

 - Challenge #52Ancestors : un article par semaine et par ancêtre -

Semaine 45 : Une histoire de fantôme

 

Parfois les liens généalogiques sont ténus. Ainsi la famille DESJONCHERETS : je l’ai reconstituée sur trois générations. Et pourtant je n'ai trouvé aucun acte paroissial les concernant.

Famille Desjoncherets sur trois générations


Au centre le couple Jean DESJONCHERETS et Louise BASSIN.

Heureusement j’ai pu découvrir leur contrat de mariage*. Il a été passé le 7 janvier 1601 à La Ferté-Macé (Orne) devant Me Chatterret ( ?). Très difficile à déchiffrer, je crois pouvoir discerner que la future mariée reçoit de son père (?) du "linge et [… ?] robes et coussins, ung coffre de bois de chesne [ ?] fermant a clef, neuf [ ?] le tout a lusage et ladite fille, ung pot, deux assiettes plates, deux ecuelles [… ?] le tout destain, une vache [… ?] ou le veau apres elle, ainsi que deux brebis [… ?]."

 

Le bilan n’est pas brillant pour la compréhension de la dot, mais la parenté des mariés est donnée ; ce qui m’a permis de compléter la génération supérieure : François DESJONCHERETS et Jeanne GEOFFROY ( ?) pour le fiancé, Marin BASSIN et Julienne GALLIENNE pour la fiancée. Lui est de La Sauvagère, elle est originaire de « Champgray » (peut-être Champsecret ?) demeurant à présent à La Sauvagère.

Je n’ai pas plus d’information sur cette génération (la XVème pour moi).

 

Ce couple central a eu 6 enfants, vraisemblablement nés à La Sauvagère. Je descends de deux d’entre eux, Nicole et Jacqueline : Nicolas LOUVEL, le descendant de Nicole 5 générations plus tard, épousera la descendante de Jacqueline à la 4ème génération, Anne GERMAIN.

J’ignore quand sont nés et décédés Jean et Louise. Je ne sais pas quel métier exerce Jean mais je sais qu’il est dit "honnête homme" dans les contrats de mariage de ses enfants Renée et Jullien. Je peux le suivre sur les différents actes notariés grâce à sa « signature » : en fait une simple marque mais qu’il reproduit à l’identique sur les différents documents où on lui demande de s’identifier.

La marque de Jean DESJONCHERETS, 1645


Je n’ai trouvé aucun acte de naissance ni de mariage des 6 enfants du couple DESJONCHERETS / BASSIN. Il n’y a pas de registre paroissial antérieur à 1687 à La Sauvagère.

 

Je n’ai aucun document sur les couples que forment Nicole et Jacqueline DESJONCHERETS (respectivement épouses FOURE et GERMAIN) mes ancêtres directes. Je ne les connais que par leurs enfants :

  • Le contrat de mariage de Renée FOURE, mentionnant ses parents, passé en 1653.
  • La présence de Jacques GERMAIN au contrat de mariage de sa sœur Julienne, dans lequel ses parents sont cités, et au bas duquel on reconnaît sa signature.

 

Grâce à des actes notariés je sais que Nicolas GERMAIN, l’époux de Jacqueline, est marchand. Cependant il ne paraît pas lettré car il ne signe pas : comme son beau frère Noel FOURE il ne fait qu’un dessin comme marque. Cependant son fils Jacques, lui, a une belle signature (il écrit son nom et son prénom en toutes lettres).

Marques de Noel FOURE (1653) et Nicolas GERMAIN (1645)


Bref, voilà trois générations fantômes, qui n’apparaissent que grâce à quelques mentions ténues dans des actes notariés.

 

 

 

* Je remercie ici titep48 qui a déposé sur Geneanet contrats de mariage et actes notariés (ces documents n’étant pas en ligne sur le site des archives départementales).

 

vendredi 21 octobre 2022

#52Ancestors - 42 - Antoine et Benoît Astié

 

- Challenge #52Ancestors : un article par semaine et par ancêtre -

Semaine 42 : Perdu

 

J’ai perdu deux enfants. Bon, entendons-nous bien, pas des enfants à moi : des enfants à Pierre Jean Astié et Geneviève Mas (mes ancêtres à la VIème génération). Antoine et Benoît. Je les ai perdus.

Reprenons : Pierre Jean et Geneviève se marient à Conques (Aveyron) en 1850. L’année suivante Geneviève donne le jour à un enfant, Augustin Pierre Jean (de qui je descends). C’est Jean Antoine Mas, le grand-père, qui fait la déclaration de sa naissance, car le père est absent, il est « gendarme à pied à la résidence d'Ajaccio » (c’est le début de l’enquête corse – voir ici).

Rapidement Geneviève rejoint son mari. On peut les suivre dans les différentes affectations corses de Pierre Jean (Ajaccio, Appietto, Péri) grâce aux naissances de ses enfants suivants :

  • Adrien (1853)
  • Jean François (1855)
  • Louis (1857)
  • Antoine (1859)
  • Benoît (1861)

Par Brigitte (du blog Chroniques d'antan et d'ailleurs) j’ai obtenu son dossier de gendarme. Je vous passe les détails de sa carrière qui ne sont pas l'objet de cet article. Le 6 mars 1870 Pierre Jean rédige une lettre, adressée au ministre de la guerre, pour demander sa mise à la retraite, après 25 ans de service (ce qui lui sera accordé en avril).

Comme demandé dans sa lettre, il revient en Aveyron. Il s’installe avec sa femme et au moins un de ses enfants à Aubin à une trentaine de kilomètres de Conques (présence attestée en 1873).

J’ai réussi à pister la famille dans les recensements :

- en 1866 à Péri. Il est gendarme, chef de ménage, demeure au n°78 (sans doute la gendarmerie) avec 7 autres gendarmes et leurs familles. Il habite avec son épouse (prénommée Rose) et 4 de leurs enfants, dont les deux derniers Antoine (7 ans) et Benoît (5 ans).

C’est la dernière fois que j’ai la trace des deux petits.


 

Pierre Jean quitte sans doute la Corse en 1870 (il n'apparaît pas dans le recensement de 1872), suite à sa demande de mise à la retraite. On sait qu'en 1873 la famille habite Aubin (Aveyron) grâce à la fiche matricule d'Adrien, mobilisé alors qu’il résidait chez ses parents.

Il n’y a pas de registre de recensement à Aubin antérieur à 1876.

- en 1876. Il habite Aubin, dans le village de Nauquières, avec son épouse, ses fils (Jean) François et Louis.

Et ainsi de suite jusqu’à son décès. Mais pas les petits.

 

Curieusement il apparaît dans le Bulletin des lois de la République Française, n°1584, 1870. Je dis curieusement car il est indiqué :

  • Position actuelle des titulaires : dans ses foyers
  • Domicile des titulaires : Compiègne (Oise)

Très curieux car la famille n’a jamais eu de contact avec l’Oise en général et Compiègne en particulier. Est-ce une confusion entre Con-ques et Com-piègne ?

La famille n’a pas été trouvée dans le recensement de 1872 à Compiègne.

 

Les deux enfants n’ont pas été trouvés dans les recensements militaires. J’ai cherché leurs décès, en vain : ni à Péri, ni à Aubin, ni à Compiègne. Ils ne sont jamais cités dans les actes d’état civil de leur fratrie. Ils ne sont pas présents aux décès de leurs parents. Aucune trace des deux enfants.

 

Je les ai perdus !

 

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 Edit 2023 :

Les enfants sont-ils décédés sur le chemin du retour entre la Corse et l'Aveyron ? J'ai tracé sur une carte des chemins possibles empruntés par la famille pour ce voyage, en train ou à voiture/pieds. Puis j'ai recensé toutes les tables de décès/succession/absences ou, à défaut lorsqu'elles ne sont pas en ligne, les tables de décès d'état civil. 


Avec Jean Pierre, cousin à la recherche des deux enfants avec moi, nous avons compulsé... de nombreux documents. Hélas, toujours en vain.

Les deux enfants nous échappent encore...