« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

samedi 6 juin 2015

#ChallengeAZ : F comme fiche de plantation

Je ne sais pas si vous le savez, et si vous le savez ça tombe bien moi aussi, mais dans les greniers familiaux il y a des trésors.

A vrai dire, je ne sais pas bien si ma tante et sa cousine l’ont trouvé dans un grenier ou ailleurs, mais elles ont exhumé des outils de travail de Jules un peu particuliers. Ce sont des fiches qu’il a consciencieusement tenues, lorsqu’il s’occupaient des plantations, dans le cadre de son métier de garde des eaux et forêts.
Un peu obscures (absconses ?) pour les néophytes, ces fiches détaillent les numéros de parcelles, les dates de plantation, le type d’arbre planté et leur provenance. On voit en particulier des parcelles proches de la maison où il habitait, rue de la Gare, appelées "arboretum des Aireaux (ou Ayraults)" minutieusement détaillées.


Fiche de plantation © coll. personnelle

« Les Hauts Aireaux (partie à l’Est du chemin)
6 coupons de 20 ares chacun environ
20 ares de surface inutilisés (lisières)
[Croquis des parcelles]

Coupon n°1 – noyers d’Amérique, semis de 2 ans
Plantés en décembre 1926 – nombre : 80, espacement 5 m
Provenance des plantes – partie semis faits aux Ponts de Cé avec des [… ?] récoltés dans la région, partie cultivés [ ?] aux pépinières Delaunay à Angers.
Rembourrage d’arbres plantés partie au printemps 24, partie remplacé en décembre 1926.

Coupon n°2 - Liquidambar styraciflua, semis de 3 ans.
Plantés en décembre 1926 – nombre : 70, espacement 5 m
Provenance des plantes : pépinières Delaunay à Angers.
Rembourrage d’arbres comme ci-dessus.

Coupon n°2 - Liriodendron tulipifera, plants de 3 [… ?].
Plantés en décembre 1923 [ ?] – nombre : 79, espacement 5 m
Provenance des plantes : pépinières Delaunay à Angers.
Rembourrage d’arbres cordifolia (150) et le surplus en arbre comme.
Quelques remplacements à plusieurs reprises en cours des années suivantes. »

Ce qui est touchant, outre de voir des documents écrits de sa main, c’est de constater qu’aujourd’hui encore ces arbres plantés par mon arrière-grand-père sont toujours là, proches de la maison qu'il habitait au 47 rue de la Gare.

Vue aérienne des Ponts de Cé et de la parcelle des Aireaux © Google Maps


Lui a disparu, mais les arbres veillent toujours…

Merci à ma tante, à sa cousine et à Google « vu du ciel » pour ces trouvailles.
Sources : documents familiaux, Google Maps.



vendredi 5 juin 2015

#Challenge AZ : E comme élection

Je ne sais pas si vous le savez, et si vous ne le savez pas ce n’est pas si singulier, mais la Seconde République institue en 1848 le suffrage universel (vote de l'ensemble des citoyens, par opposition au suffrage censitaire qui est basé sur la fortune).

La majorité électorale, âge à partir duquel on peut voter et donc où l’on figure sur les listes électorales, est de 21 ans (jusqu’en 1974 où elle est abaissée à 18 ans). Ces listes, dressées par ordre alphabétique, indiquent pour chaque électeur : nom, prénom, profession, date et lieu de naissance, domicile.

Les listes sont diffusées en ligne quand elles ont plus de 100 ans (recommandations de la CADA (Commission d'accès aux documents administratifs) et de la CNIL (Commission nationale informatique et libertés) s'opposant à la diffusion sur internet de données concernant des personnes susceptibles d'être encore en vie).

Jules apparaît dans les listes électorales :
  •  des Neyrolles, en 1905. Il a le numéro 10. Il est nommé Assumel Jules et dit scieur, né au Poizat et domicilié aux Neyrolles.
  •  de Martignat, en 1910. Il a le numéro 7. Il est nommé Assumel Jules et dit garde forestier, né au Poizat et domicilié à Martignat.
  • de Condamine la Doye, en 1913. Il a le numéro 1. Il est nommé Assumel Lurdin Jules Joseph Eugène et dit garde forestier, né au Poizat et domicilié à Condamine.
Extrait Listes électorales de Condamine, 1913 © AD01 
  •  de Condamine la Doye, en 1914. Idem.

Là encore, cette source apporte des informations qui peuvent pallier au manque d’état civil : date et lieu de naissance, profession, parfois même la parenté. Cela peut être très pratique si on est dans une impasse.

Pendant une fraction de secondes, je m’étonnais de ne pas trouver les épouses de Jules [ 1 ] : bien sûr, les femmes n’y figurent pas avant la fin de la Seconde Guerre mondiale puisqu’elles ne reçoivent le droit de vote que par une ordonnance du 21 avril 1944 (seulement !). Les mineurs, les étrangers et les personnes privées de leurs droits civiques n’apparaissent pas non plus sur les listes électorales.

Merci aux Archives Départementales de l’Ain pour ces trouvailles.
Sources : listes électorales.

[ 1 ] Oui, il en a eu plusieurs : pour en savoir plus, rendez-vous le 8 juin !


jeudi 4 juin 2015

#ChallengeAZ : D comme domicile

Je ne sais pas si vous le savez, et si vous ne le savez pas vous allez vite le savoir, mais du fait de ses différentes nominations (notamment en tant que garde forestier), Jules va changer plusieurs fois de domicile.

Selon les sources, il est parfois difficile de le localiser. Ainsi, rien que pour l’année 1905, il est successivement dit « scieur aux Neyrolles » (acte de décès de son épouse, en juin) et « cultivateur au Poizat » (dans sa lettre de nomination au poste de garde forestier à Samognat, en octobre).
En fait, on ne peut se fier ni au métier ni à la localisation donnée par les sources, sans un certain recoupement. Ainsi, on l’a vu (cf. article A comme Assumel Lurdin), le métier de lapidaire exercé alors qu’il avait une vingtaine d’année, n’est qu’une activité secondaire, hivernale. De même, nommé garde forestier à Samognat, il n’habitera jamais cette commune.

Une seule source permet d’être sûre de ses différentes résidences : les recensements. Appelées listes nominatives de population, elles ont été dressées de manière systématique à partir de 1836, tous les 5 ans (sauf pendant les années de guerre). Elles indiquent, pour chaque commune, par rue et par foyer, les noms et prénoms des habitants, leur profession, leur place dans le ménage (chef de famille, épouse, fille, fils, domestique...) et, parfois même, l'âge, l'année et le lieu de naissance, la nationalité, les infirmités ou la religion.

Jules apparaît ainsi dans les listes de recensement du Poizat :
  • en 1896 (il a 20 ans). Il habite Monent avec ses parents, ses trois frères et sa sœur. Il est dit lapidaire.
Extrait du recensement du Poizat, 1896 © AD01
  • en 1901 (il a 25 ans). Il habite Le Replat avec sa mère, ses trois frères et sa sœur (son père est décédé en 1897). Il est lapidaire et patron. Il emploi probablement son frère Joseph âgé de 19 ans.
Il déménage ensuite et apparaît dans les listes de recensement aux Neyrolles :
  • en 1906 (30 ans). Il habite au "Village d'en bas" avec sa fille Blanche (dite née en 1906 aux Neyrolles, mais sa mère est décédée en 1905 : c’est une erreur du rédacteur – ou de son informateur – elle est née en 1903, et au Poizat, en fait [ 1 ]). Il est scieur (son patron se nomme Carrier).
Enfin, on le voit dans les listes de recensement à Martignat :
  • en 1911 (35 ans). Il habite à Grande Rue (Sur Muret) avec son épouse et sa fille Blanche (correctement dite née en 1903 au Poizat, cette fois, « fille »). Il est dit de nationalité française, garde forestier et « époux ».

Lorsqu’il déménage en Anjou dans les années 1920, on perd sa trace dans ce type de source. D’abord parce qu’il n’y a pas de recensement de la population en ligne en Maine et Loire. Et puis parce que de toute façon il n’y a pas de document postérieur à 1911 en ligne car les instances décisionnaires (CADA - Commission d'accès aux documents administratifs - et CNIL - Commission nationale informatique et libertés) s’opposent à la diffusion sur internet de données concernant des personnes susceptibles d'être encore en vie.

[ 1 ] D’où l’importance de bien toujours recouper les sources et ne de pas prendre pour argent comptant un document, tout officiel qu’il soit.

Merci aux Archives Départementales de l’Ain pour ces trouvailles.
Sources : recensements, état civil.

mercredi 3 juin 2015

#ChallengeAZ : C comme candidature

Je ne sais pas si vous le savez, et si vous le saviez il fallait me le dire, mais en tant que garde des eaux et forêts, dépendant du Ministère de l’Agriculture, Jules Assumel-Lurdin figure régulièrement dans les documents dudit Ministère conservés aux archives départementales de l’Ain (une trentaine de documents ont été trouvés à ce jour). 

Ces documents consistent notamment en correspondance échangée entre des maires, Préfets, conservateurs des eaux et forêts, etc… au sujet de Jules et de cet emploi.

Ainsi une lettre du conservateur des eaux et forêts, datée du 11 octobre 1904 et adressée au Préfet de l’Ain, signale que la candidature de Jules au poste de garde forestier communal a été agréée.

Correspondance, archives du Ministère de l'Agriculture © AD01


« Mâcon, le 19 octobre 1904

Le Conservateur des Eaux et Forêts
A Monsieur le Préfet de l’Ain
A Bourg
En réponse à votre lettre du 18 octobre courant, j’ai l’honneur de vous faire connaître que la candidature de M. Assumel du Poizat, à un emploi de garde forestier communal a été agréée par décision du 22 septembre dernier.
Vous avez bien voulu également vous intéresser à d’autres candidats plus anciens et non moins méritants, mais M. Assumel sera proposé aussitôt que les circonstances le permettront.
Pour le conservateur en tournée
L’inspecteur régional délégué »

Il faudra néanmoins attendre le 31 octobre 1905 pour qu’un poste se libère et qu’il soit nommé à Samognat (à 25 km du Poizat où il résidait jusqu’alors).

C’est le début du parcours de Jules en tant que garde forestier qui commence. Il a alors 29 ans.

Merci aux Archives Départementales de l’Ain pour ces trouvailles.
Source : état du personnel des eaux et forêts.

mardi 2 juin 2015

#ChallengeAZ : B comme brigadier

Je ne sais pas si vous le savez, et si vous le savez c’est tant mieux, mais différentes sources peuvent indiquer le métier exercé par nos ancêtres.

Extrait du recensement de Martignat, 1911 © AD01

Ainsi, on peut retracer la carrière tout au long d’une vie. Dans le cas de Jules Assumel Lurdin, on le voit successivement être :
  • lapidaire (recensement de 1896 – 20 ans). Sous entendu "ouvrier lapidaire" : tailleur de pierres précieuses (sauf le diamant : travail réservé au diamantaire). Pour en savoir plus sur ce métier voir l’article Mes arrière-grands-parents étaient lapidaires. C’est une activité saisonnière.
  • lapidaire et patron (recensement de 1901  – 25 ans). Plus étonnant, en 1901 il est dit patron : il semble employer son jeune frère, de six ans son cadet.
  • cultivateur (fiche militaire 1896 – 20 ans ; acte de mariage de 1902 – 26 ans).
  • scieur (acte de décès de sa première épouse et liste électorale de 1905 – 29 ans ; recensement et acte de mariage de 1906 – 30 ans). C’est peut-être aussi une activité annexe au métier agricole qu’il exerce avant et après.

A partir de 1905 on le voit évoluer comme garde forestier, avec différents grades ou appellations :
  • garde communal des eaux et forêts (J.O. de 1908 – 32 ans). 
Le garde des eaux et forêts est responsable d’une circonscription territoriale appelée "triage". Il y surveille et aménage la forêt. Il s’occupe du marquage des arbres à couper, de leur coupe même et replante des arbres. Gardiens de la nature, il veille à la protection de la faune et la flore. Ainsi il lutte contre le braconnage, le vol de bois, ou la cueillette d'espèces protégées ou menacées. Il veille à la bonne application des lois concernant la gestion et la protection des forêts. Il assure la police de la nature et de l’environnement en qualité d’agent assermenté. À ce titre, il est habilité à constater les infractions en forêt (procès-verbal). Il travaille sous l’égide du ministère de l'agriculture (ou aujourd’hui de l’ONF). Les qualités nécessaires à cet emploi sont l’endurance physique pour se déplacer dehors par tout temps (ce qui fera défaut à Jules, comme on le verra dans l’article S : rendez-vous le 22 juin !), le sens de l’observation et le sens des relations humaines pour s’entretenir avec les usagers de la forêt (propriétaires, chasseurs…) et les autorités locales.
  • garde communal (fiche militaire 1909 – 33 ans).
  • garde forestier (acte de mariage et liste électorale de 1910 – 34 ans ; recensement de 1911 – 35 ans ; liste électorale de 1913 et 1914 – 37 et 38 ans ; acte de décès de 1929 – 53 ans).
  • garde domanial des eaux et forêts (J.O. de 1920 – 44 ans ; fiche militaire 1921 – 45 ans).
  • brigadier domanial (J.O. de 1921 – 45 ans).
  • garde des eaux et forêts (presse de 1928 – 52 ans).

Merci aux Archives Départementales de l’Ain, Wikipedia et à Gallica pour toutes ces trouvailles.
Sources : recensements, fiche militaire, état civil, JO, presse en ligne, listes électorales.

lundi 1 juin 2015

#ChallengeAZ : A comme Assumel-Lurdin

Je ne sais pas si vous le savez, et si vous ne le savez pas ce n’est pas très grave, mais Jules Assumel Lurdin est donc le fil conducteur de ce ChallengeAZ.

Jules Assumel Lurdin, années 1920 © coll. personnelle


Il est né le 15 février 1876 au Poizat (Ain). Son père, François, est cultivateur. Il est alors âgé de 32 ans. Son épouse et mère de Jules, Marie Antoinette Zélia Berrod, est aussi dite cultivatrice. Quelques années plus tard, en 1896, François est dit meunier au Moulin Menant, hameau du Replat, commune du Poizat.

Moulin Meunant © coll. personnelle


Le couple a déjà trois enfants lorsque Jules voit le jour :
- Louis Xavier, né en 1867.
- François Emilien, né en 1870.
- Marie Justine, née en 1873.
A son baptême Jules porte aussi les prénoms de Joseph Eugène.
Un dernier enfant viendra compléter la famille : Joseph Eugène né en 1882.

Le Poizat est une petite commune de l’Ain, à une cinquantaine de kilomètres de Bourg en Bresse, haut perchée à un peu moins de 1200 m d’altitude. La commune est située sur un plateau incliné au Nord, largement boisé. Le lac de Silans forme sa limite Nord. On y cultive du blé, de l’orge, de l’avoine, du foin, un peu de chanvre. Le commerce de bois de sapin, de bois de chauffage et de construction occupe une place importante.
Les dictionnaires historiques étant précis, en 1907, « L’effectif moyen des animaux est d’à peu près 7 chevaux, 1 âne, 5 taureaux, 20 bœufs, 300 vaches, 70 élèves bovins, 4 béliers, 15 brebis, 10 moutons, 15 agneaux, 25 porcs, 15 chèvres. ». La commune comptait alors 519 habitants. Le bourg est dit « bien bâti ; l’église postérieure à la Révolution est belle, large et bien proportionnée. »

Jules a été principalement garde forestier. Il a vécu dans l’Ain jusqu’à l’âge de 45 ans, dans différentes communes, mais jamais guère éloignées de son lieu de naissance. Il se maria trois fois et aura sept enfants au total. Ensuite, il déménagera en Anjou  (on verra pourquoi dans des articles futurs) où il terminera sa vie, assez jeune, à 53 ans.

C’était mon arrière-grand-père.

Merci aux Archives Départementales de l’Ain pour ces trouvailles.
Sources : photo coll. personnelle, carte postale ancienne, dictionnaire historique Pommerol, état civil.


dimanche 31 mai 2015

#Centenaire1418 pas à pas : mai 1915

Suite du parcours de Jean François Borrat-Michaud : tous les tweets du mois de mai 1915 sont réunis ici. 

Ne disposant, comme unique source directe, que de sa fiche matricule militaire, j'ai dû trouver d'autres sources pour raconter sa vie. Ne pouvant citer ces sources sur Twitter, elles sont ici précisées. Les photos sont là pour illustrer le propos; elles ne concernent pas forcément directement Jean François.

Les éléments détaillant son activité au front sont tirés des Journaux des Marches et Opérations qui détaillent le quotidien des troupes, trouvés sur le site Mémoire des hommes.

Toutes les personnes nommées dans les tweets ont réellement existé.
___ 

1er mai 

Séjour à Granges. 
Matin : exercice de combat de la Compagnie, déploiement, attaque d’une position, sous le feu de l’Infanterie ou de l’artillerie. 
Soir : exercices de détails.

2 mai
Séjour à Granges.
Matin et soir : repos.
Ordre de Bataillon n°38 : citation à l’ordre de la Brigade pour le sergent Ruffier d’Epernoux pour courage et énergie.

3 mai
Séjour à Granges.
Matin : marche de 20 km environ, sac et tenue de campagne complète. Soir : exercice de détail.

4 mai
Séjour à Granges.
Matin : service en campagne. Soir : exercice de détail.
Ordre de Bataillon n°39 : mutations.

"Au champ d'honneur, les coquelicots
Sont parsemés de lot en lot
Auprès des croix; et dans l'espace
Les alouettes devenues lasses
Mêlent leurs chants au sifflement
Des obusiers.


Nous sommes morts
Nous qui songions la veille encor'
À nos parents, à nos amis,
C'est nous qui reposons ici
Au champ d'honneur.


À vous jeunes désabusés
À vous de porter l'oriflamme
Et de garder au fond de l'âme
Le goût de vivre en liberté.
Acceptez le défi, sinon
Les coquelicots se faneront
Au champ d'honneur."


JohnMcCrae a écrit «Au champ d’honneur» il y a 100 ans, le 3 mai 1915 au cours de la Deuxième bataille d’Ypres

5 mai
Séjour à Granges.
Matin : exercice de Bataillon. Soir : travaux de propreté.
Ordre de Bataillon n°40 : décorations d’un caporal et deux chasseurs pour leurs belles conduites au feu et leurs graves blessures.

6 mai
Séjour à Granges.
Matin : service en campagne, installation d’une grand’garde, sentinelles. Soir : exercices de détail.

7 mai
Séjour à Granges.
Matin : déploiement de la Compagnie, marche d’approche, attaque d’une position ennemie sous les feux de l’infanterie et de l’artillerie combinés. Soir : exercice de détail.

8 mai
Séjour à Granges.
Matin : service en campagne, école de compagnie, déploiement, formations diverses d’approche. Soir : travaux de propreté.
Ça y est ! On repart au front !
Le Bataillon doit se tenir prêt à quitter Granges demain dans la journée ; des ordres ultérieurs seront donnés.

9 mai
Le Bataillon a quitté Granges et a été transporté en automobile au Collet. Départ : 15h30. Arrivée au Collet : 18h.
Le Bataillon, sous le Commandement du Capitaine Loire, est rassemblé dans une prairie à l’Est du Collet.
Trajet Granges / Le Collet
Relève du 297ème Régiment d’Infanterie au Sillackerwasen. Relève effectuée sans incident.
1ère et 2ème compagnies montent en première ligne.
3ème et P.M. en 2ème ligne.
4ème, 5ème et 6ème compagnies : nous restons en réserve.
Nous revoici sur les lieux des terribles combats de mars.
La disparition de mon ami Désiré me revient en pleine figure.
Je me décide à écrire à sa mère. Je lui dis qu’il n’a pas souffert. Je n’en sais rien, bien sûr, mais je ne peux pas lui raconter l’horrible réalité telle que je l’ai vécue.

10 mai
Le 23ème Bataillon de Chasseurs coopère à la défense du Sillacker.
Mêmes emplacements que la veille.

11 mai
La 6ème compagnie est détachée à Schiessloch.
Un peloton au Sud Ouest de Steinabruck, une section à Burgkoepfle, une section en réserve.
Pour les autres unités du Bataillon, mêmes emplacements.

12 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements.

13 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements.
Ordres de Bataillon n°41 et 42 : promotion, mutation et nominations.

14 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements.
La 3ème Compagnie est désignée pour relever une compagnie du 63ème Bataillon de chasseurs sur les pentes de l’Altmattkopf (1 blessé).
Sommets autour de Metzeral © aak-ansichtskarten.de

15 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements.
1 blessé.

16 mai
Défense du Sillacker.
Relève des Compagnies.
Nous (ceux de la 5ème) nous relevons la 2ème Compagnie à 12h.
La 4ème compagnie relève la 1ère à 20h.
Relève effectuée sans incident.

17 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements.
Des tirs continus de mitrailleuses ou de canons ennemis.
Une grande attaque se prépare. Pour cela, on entreprend des travaux sur toute la ligne, du Braunkopf à l’Altmattkopf : parallèles de départ, boyaux, abris, etc.
C’est une tâche pénible, dangereuse, mais indispensable, malgré les pertes régulières. [ 1 ]
Cette nuit deux de nos camarades ont été tués.

18 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements.
Ordre de bataillon n°43 : décoration.
En venant ici, je croyais que je verrai des soldats en perpétuelle alerte…
Je ne vois en fait que des travailleurs, terrassiers, bûcherons, charpentiers, ne tirant que peu de coups de fusil.

19 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements.
Fureur des supérieurs qui ont surpris le chasseur 1ère classe Delord en train de dormir à son poste.

20 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements. 1 blessé.
Ordre de bataillon n°44 : rétrogradation du chasseur Delord qui, étant guetteur, somnolait au lieu d’assurer rigoureusement son service.
La sanction ne s’est pas fait attendre !
Ordre de bataillon n°45 : nominations diverses. 

21 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements.
Ordre de bataillon n°46 : citation.
Entouré sur toute sa lisière par un important réseau de fils de fer, le bois très touffu dissimule entièrement les organisations ennemies.
D’après les observations faites de l’Altmattkopf, il est cloisonné intérieurement par d’autres réseaux et paraît insuffisamment organisé. [ 1 ]

22  mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements. 1 blessé.

23 mai
Défense du Sillacker.
Relève des Compagnies.
La 1ère compagnie relève la 4ème à 20h.
La 2ème compagnie nous relève (ceux de la 5ème) à 12h.
Relève effectuée sans incident. Un blessé.

24 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements. 

25 mai
Aucune note (jour non mentionné [ 2 ]).

26 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements. Un blessé.
On nous a promis du réconfort :
"Un quart de pinard tous les jours pour soutenir le moral des troupes" qu'il a dit le capitaine ! 

27 mai
Défense du Sillacker.
La 4ème compagnie relève la 3ème à 20h. Relève effectuée sans incident.
Mêmes emplacements pour les autres unités.
Ordre de bataillon n°47 : promotions et mutations.

28 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements. Un blessé.
Le courrier arrive. Le sait-il, ce soldat, qu'il porte dans sa sacoche le bien le plus précieux du champ de bataille ?
Bureau de poste sur le front champenois, 1915 © centenaire.org
29 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements. Deux blessés.

30 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements. Un tué, trois blessés.

31 mai
Défense du Sillacker.
Mêmes emplacements. Deux blessés, un tué.


[ 1 ] A. Bohly
[ 2 ] Dans le JMO du 23ème BCA