« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

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vendredi 10 février 2023

Le mystère enfin résolu

Cet article fait suite au polar généalogique que j’ai commis lors du #ChallengeAZ 2020 (si vous ne l'avez pas encore lu, je vous conseille de suivre le lien parce que - spoiler - je vais résoudre le crime dans les lignes ci-dessous).

Cherchant vainement le décès d’Ursule Macréau, mon imagination s’est enflammée… au point de croire que – peut-être – son époux Henri l’avait assassinée.

 

Aujourd’hui j’ai enfin résolu ce mystère.

 

Pour vous resituer les protagonistes, Ursule est née en Bretagne en 1874. A la toute fin du XIXème siècle elle émigre en Seine et Marne où elle rencontre Henri Macréau. Ils se marient en 1900 à Tigeaux et auront 8 enfants. Ursule est l’arrière-grand-mère de ma mère. En 1948 Henri décède à Coulommiers : il est alors dit « veuf ». Mais d’Ursule, point de trace.

 

J’ai cherché en vain Ursule. Pendant des années j’ai tenté de la pister. Grâce aux actes de naissance de ses enfants, j’ai su qu’elle avait déménagé plusieurs fois dans des villages aux alentours de Tigeaux.

Mais après plus rien car il n’y avait plus de registre numérisé en ligne. Comme une éclipse, elle avait disparue. Je garde en tête cette image : où a bien pu disparaître Ursule ?

Papiers et loupe

Longtemps je suis restée bloquée en 1902, « limite du temps » des documents en ligne. Puis, petit à petit, de nouveaux versements m’ont permis d’en savoir un peu plus sur l’entourage d’Ursule, comme sur sa fille, la tante Paulette, restée une épine généalogique obscure pendant plusieurs années (voir l'article Comment trouver la tante Paulette).

En récoltant les actes de mariage de ses enfants, je devine qu’Ursule est encore vivante en 1926, 1934 et peut-être même en 1937.

 

L’étau se resserre : 1937/1948. Les recensements arrivent en ligne : ils me confirment la présence d’Ursule à Mortcerf, où elle s’est fixée avec son mari depuis 1911 jusqu’en 1936.

 

A nouveau une période creuse pour mes recherches… C’est alors que je commence à délirer doucement : j’imagine tout et n’importe quoi pour expliquer cette « disparition ». Ce sera le polar généalogique du ChallengeAZ 2020 cité plus haut. Henri aurait-il quelque chose à voir avec la disparition de sa femme ?

 

Régulièrement je consulte le site des archives départementales de Seine et Marne. Les communes ne sont pas toutes logées à la même enseigne : l’état civil de certaines ne s’affiche que jusqu’en 1912 tandis que pour d’autres on peut consulter les décès jusqu’en 1962. Les recensements en ligne progressent; ainsi je découvre en écrivant ces lignes que celui de 1946 à Mortcerf est désormais affiché. Mais le couple Macréau n'y figure pas.

 

C’est finalement l’enregistrement qui va apporter la réponse tant souhaitée. Comme l’explique le site des archives « La Régie de l’Enregistrement a été créée en 1791 : les actes notariés doivent être enregistrés par un receveur des impôts, c’est-à-dire transcrits sur un registre public, contre la perception d’un droit d’enregistrement.
Des tables spécifiques des décès permettent de contrôler les successions. À partir de 1825, elles sont remplacées par les tables de successions et absences.
Tenues alphabétiquement, elles fournissent, avec des variations selon la date, des informations sur la personne décédée (nom, prénom, âge, profession, domicile, date du décès), ses héritiers (nom, prénom, profession, domicile), ses biens (détail et localisation, valeur), la date de déclaration et du paiement des droits, et des observations éventuelles. 
»

L’intérêt de ce document, dans le cas qui m’occupe, est évidemment de signaler le lieu et la date du décès.

 

Une première salve 1814/1907 avait d’abord été mise en ligne ; j’attendais la seconde qui était prévue couvrir la période jusqu’en 1968.

 

Enfin je m’aperçois que ces documents sont en ligne. Je cherche dans plusieurs bureaux autour de Mortcerf, dernier domicile connu d’Ursule. Et c’est finalement la table de succession du bureau de Coulommiers qui m’apporte la clé du mystère : Ursule Macréau, née Le Floch, est décédée à Coulommiers le 29 octobre 1943.

 

Sans trop y croire je vais voir l’état civil et là : joie ! Les registres de décès y figurent. Je peux donc dans la foulée consulter l’acte tant convoité.

 

Ça y est ! J’ai trouvé le Graal ! Ursule est clairement identifiée : ses parents, sa date et lieu de naissance, son époux Henri Macréau. C'est bien elle.

 

Il reste quelques incohérences et questions non résolues dans ce document (mais heureusement, sinon ce ne serait pas drôle !).

 

Henri n’est pas présent au décès de son épouse. Sa résidence « est inconnue ». En effet, je perds sa trace après 1936. Où est Henri entre 1936 et 1948 ? Les recherches ne sont pas toutes épuisées...

 

Les deux témoins/déclarants du décès d’Ursule sont Maurice Edouard Druelle, économe, et Gaston Bertier. Ce dernier est le maire de Coulommiers (de 1941 à 1944 puis de 1947 à 1955). Il est ici présent en tant qu’officier d’état civil. Né à Meaux en 1881, il a reçu la Croix de Guerre comme « officier de haute morale […] opposant une résistance opiniâtre aux efforts des Allemands qui disposaient de forces bien supérieures » et a été nommé Chevalier (1921) puis Officier de la Légion d’Honneur (1932). Le premier, Maurice Druelle, est plus intéressant pour découvrir l’histoire d’Ursule. Il est donc dit « économe ». Croix de Guerre lui aussi, il est rappelé à l’activité en 1939 où il est « classé en affectation spéciale pour une durée indéterminée au titre de l’hôpital de Coulommiers ». Il est considéré comme démobilisé en juin 1940 (soit après l’armistice signé par Petain).

Avec ces informations j’ai déjà une bonne piste pour savoir où est décédée Ursule.

 

Dans l’acte, elle est dite décédée « en son domicile 7 rue de la Ferté sous Jouarre ». Or, pendant que je laissais mon imagination divaguer pour rédiger le ChallengeAZ, je ne cessais de me baser sur la réalité. Ainsi, au chapitre I je raconte comment j’ai découvert à quoi correspondait cette adresse du 7, rue de la Ferté s/Jouarre car Henri lui-même y est décédé en 1948. Il s’agit de l’hôpital de Coulommiers. Donc, comme son époux 5 ans plus tard, Ursule s’est éteinte en milieu hospitalier. D’où la présence de Maurice Druelle, sans doute économe de l’hôpital ; les employés d’hôpitaux servant souvent de déclarants des actes de décès.

 

Reste une petite incohérence :

  • Le domicile : lieu où l'individu a son principal établissement, c'est-à-dire son habitation principale ; 
  • La résidence : en droit civil, c'est le lieu où l'individu se trouve en fait. Contrairement au domicile, la résidence se veut temporaire.


L’acte de décès dit qu’elle a son domicile (donc sa résidence permanente) à l’hôpital. Donc, soit c’est une erreur, soit elle vivait depuis suffisamment de temps pour n’avoir d’autre adresse.

 

Bref, Ursule s’est éteinte à l’hôpital de Coulommiers, âgée de 69 ans. Où était son mari ? Je l’ignore. Peut-être était-il déjà lui-même hospitalisé ? Ou pas.

Mais pas de meurtre, ça c’est sûr. Ou presque.

 

 

 

vendredi 29 avril 2022

#52Ancestors - 17 - couple Macréau/Le Floch

 

- Challenge #52Ancestors : un article par semaine et par ancêtre -

Semaine 17 : Documentez votre généalogie (où sont les sources ?)

A l'occasion de cette dix-septième semaine du challenge #52Ancestors dont le thème est "Documentez votre généalogie", je reviens sur les sources qui m'ont permis d'écrire le polar généalogique lors du ChallengeAZ 2020. Vous ne l'avez pas lu ? Retrouvez ici cette histoire policière basée sur le travail de recherche que j'ai mené autour de mes ancêtres Henri Macréau et son épouse Ursule Le Floch.

___

 

L’intrigue du polar se base sur un travail de recherche rigoureux auprès d’un éventail de sources varié. 

Tout est parti de l’état civil, comme souvent en généalogie. Il m’a donné le squelette de l’histoire, comme il donne l’armature d’un arbre généalogique. Avant de commencer la rédaction je connaissais les dates de naissance et mariage d’Henri et Ursule. Mais j’ai trouvé le décès d’Henri seulement au cours de rédaction. Le chapitre I est assez véridique : la mention curieuse du "domicile" à Coulommiers et ma quête sur Google StreetView pour résoudre ce mystère. 

Pour étoffer ma généalogie comme mon histoire j’ai épluché les recensements. Ils m’ont servi pour reconstituer le parcours d’Henri : ses adresses successives ont été utilisées notamment dans le chapitre D. Et bien sûr les recensements m'ont été utiles lors de l’enquête préparatrice pour établir les liens entre les personnages ayant véritablement existé (voir le "making of : les personnages"). 

J’ai voulu faire des recherches sur l’enregistrement : les actes notariés doivent être enregistrés par un receveur des impôts, c’est-à-dire transcrits sur un registre public, contre la perception d’un droit d’enregistrement. Cela permet de donner des détails sur le patrimoine de nos ancêtres, et peut être une bonne alternative pour connaître la date d’un décès que l’on ne trouve pas dans l’état civil (ce qui était mon cas). Hélas l’enregistrement n’est pas en ligne en Seine et Marne pour la période qui m’intéresse, comme je le raconte dans le Chapitre H. Il ne me reste qu’à ajouter une visite aux archives départementales sur ma to do list ! 

Les fiches militaires m’ont servies pour reconstituer le parcours militaire de certains protagonistes, mais aussi pour les informations périphériques qu’elles contiennent : descriptions physiques, blessures (la mutilation de l’index de Georges Thiberville mentionnée au chapitre E fait partie de ces petits détails véridiques qui émaillent le récit), adresses successives, motifs d’ajournement (comme la claudication d’Henri par exemple, utilisée au chapitre N). 

Les archives judiciaires sont intéressantes pour donner des détails sur la vie de nos ancêtres, même si ce n’est pas forcément ceux que l’on veut connaître en premier (apprendre que son ancêtre a été un mauvais garçon n’est pas toujours facile). J’ai abordé cette source au chapitre V. Dans le cas présent je n’ai pas pu les consulter car elles ne sont pas en ligne en Seine et Marne, mais cela peut-être une bonne piste à explorer. 

Par contre, sur le site des archives départementales j’ai trouvé des monographies communales qui m’ont données quelques informations ayant permis d’étoffer le cadre de vie de mes ancêtres, d’en savoir plus sur les mariniers et les charretiers de Tigeaux, les briqueteries, etc... 

Autre source précieuse : la tradition orale. Cette source est abordée dans le chapitre T. Si vous avez la chance d’avoir des anciens dans votre famille ou dans votre entourage, n’hésitez pas à les interroger : même si vous n'apprenez que des anecdotes ou des souvenirs un peu flous, ce sont autant d’histoires qui font la vie de vos ancêtres. Et s’il y a eu plusieurs témoins d’un même événement, n’hésitez pas à les interroger tous : vous verrez comme le même souvenir peut se révéler différent selon les points de vue ! 

La tradition culinaire a été abordée au chapitre R. Là encore c’est une source "secondaire" mais elle permet de comprendre l’environnement de nos ancêtres. La cuisine est le reflet d’une région, de son agriculture, de ses traditions : appréhender les recettes locales c’est aussi découvrir un pan de la vie de nos ancêtres. 

Lors de ma formation de guide conférencière, j’ai étudié la lecture du bâti et du paysage. C’est ce qui m’a permis de faire la "visite" du quartier des Egyptes du chapitre P. Cette lecture du bâti m'appris beaucoup sur la région. C’est en voyant ce quartier où a vécu Henri que j’ai mesuré l’importance des briqueteries dans la région par exemple. 

La lecture d’ouvrages divers a nourri ma réflexion et m’a aidé à rédiger l'histoire : le chapitre D évoque l’émigration bretonne, les prénoms et leurs variantes ont été abordés au chapitre S tandis que les maisons de famille sont au cœur du chapitre O. Cartes postales anciennes et dictionnaire des métiers ont aussi participé à enrichir mon texte. Bref, quand les sources "généalogiques" viennent à manquer il reste bien d'autres ressources à approfondir. 



Et voilà comment j’ai utilisé de vraies sources pour une fausse histoire ! 



dimanche 26 janvier 2020

Comment trouver la tante Paulette ?

La tante Paulette fait partie de ces ancêtres du XXème siècle : tout le monde s’en souvient (un peu) mais l’a oubliée (un peu). On sait qu’elle a existé, mais on ignore quand elle s’est mariée, où elle est décédée, etc… Absorbée par ce fameux « trou noir de la généalogie » : les archives ne sont pas forcément accessibles et cela devient difficile de combler les trous de mémoire. Dans toutes les familles il doit y avoir une tante Paulette. Mais comment la retrouver ?


 © Pixabay

Ma tante Paulette à moi est la « tante Paulette » de tout le monde dans la famille, quelque soit la génération à laquelle on appartient. En vrai c’est la tante de mon grand-père, mais tous ceux qui sont arrivés après lui ont continué à l’appeler la « tante » même si elle n’avait plus vraiment ce rang par rapport à eux dans l’arbre généalogique.

  • Mai 2016
Création officielle de sa fiche dans mon logiciel de généalogie. Apparue tardivement par rapport à ses frères et sœurs, sans doute parce que je n’avais pas d’information concrète sur elle.
En effet, ma tante Paulette, je la cherche depuis longtemps (avant 2016, pour sûr !). Je suis bien obligée de croire la mémoire familiale quand on me dit qu’elle a vécu et s’est marié avec un certain Camille, car ledit Camille est le parrain de ma mère. Ces choses-là on s’en rappelle.
Après le décès de ma grand-mère j’ai hérité de photos et de lettres de la tante Paulette (c’est sans doute ce qui a provoqué la création de sa fiche sur mon logiciel). Mais c’est bien peu.

J’entreprends des recherches plus approfondies pour trouver la tante Paulette. Toute la famille de la tante est originaire de Seine et Marne. Mais elle déménage souvent : je fais des sauts de puce d’une commune à l’autre pour tenter de débusquer Paulette. En vain.

  • Les années passent.
La tante Paulette disparaît comme une silhouette sur une photo trop ancienne.

  • Avril 2018
Retour de la tante Paulette à l’occasion d’un article « #Généathème : j’ai fait parler une carte postale ».
Une carte qu’elle a écrite à mon arrière-grand-mère où elle dit « ma petite sœur » me laisse penser qu’elle est l’aînée de la fratrie. Mais le mariage des parents et les naissances de leurs enfants se suivent à un rythme si serré qu’il est difficile d’y caser une tante, même si d’aventure j’avais manqué une commune de résidence : mariage en 1900, premier-né en 1901 et déjà mon arrière-grand-mère Marcelle en 1902. Et les autres encore après : 1905, 1906, 1908, 1909, 1910.
Les registres en ligne, qui m’ont permis de progresser tant ces dernières années (recensements, naissances de la fratrie…) s’arrêtent là. Est-ce que « ma petite sœur » est simplement un nom affectueux qu’elle lui donne, bien qu’elle soit la cadette et non l’aînée ?

Régulièrement je vais voir sur le site des archives départementales si la ligne du temps n’a pas évolué : une nouvelle campagne de numérisation des actes d’état civil ? De nouveaux documents ? Mais non. La tante Paulette sait se faire désirer.

Sans compter que la mémoire familiale est capricieuse : on situe la tante tantôt à Saint-Ouen (Val d’Oise) ou peut-être Enghien (idem) tantôt dans le Sud. Le Sud ! Comment trouver un ancêtre dans « le Sud » ! Trop vaste, le Sud.
La tante brûle sous le soleil et moi je me consume dans mon brouillard.

  • Fin 2019
Un rebond, un frémissement.
L’INSEE met en ligne les décès de 1970 à nos jours. Je tente ma chance : une Paulette Henriette sort du chapeau. Pas assez d’informations pour prouver que c’est bien elle, mais pas assez non plus pour affirmer le contraire. Et surtout une surprise de taille : cette Paulette-là est née en 1912 ! Adieu droit d’aînesse ! Mais les registres de 1912 ne sont pas en ligne.

  • 12 décembre 2019
Je fais une demande d’acte de naissance auprès des services publics en ligne pour prouver que c’est bien « ma » tante Paulette. Les jours passent. En attendant je contemple l’année de décès : 2008. Est-ce que je la cherchais déjà en 2008 ? Peut-être. Est-ce que j’aurais pu la contacter si j’avais su qu’elle vivait encore ? Pas sûr qu’elle m’aurait aidée si j’en crois son caractère décrit comme « un peu difficile ».
Et où est-elle décédée cette Paulette-là ? A Broons (Côtes d’Armor) ! A moins de 50 km de Loudéac où sa mère est née avant d’immigrer en région parisienne. Les hasards de la vie, quand même… Bien sûr, aucune chance que j’aille la chercher par-là.Il faudra que je tente de savoir ce qu'elle faisait en Bretagne, mais d'abord je dois prouver que c'est bien elle.

  • 21 décembre 2019
Je tente ma chance et convoque la tante Paulette lors du récent « #RDVAncestral : la tante insaisissable ».  Mais même dans mon imagination, la tante Paulette n’est pas facile à débusquer.

  • Noël 2019
J’attends toujours l’acte demandé, mais c’est maintenant les fêtes… Patience.

Je me replie alors sur Camille, son époux. Il n’apparaît pas dans les relevés de l’INSEE. Je me rappelle une mention sibylline dans les papiers de famille, « sépulture de l'oncle Camille de juin 1949 », sans plus de détail. C’est pour cela qu’il n’apparaît pas dans les relevés de l’INSEE : ils ne commencent qu’en 1970.
Son fils unique n'apparaît non plus. Peut-être est-il encore vivant ? La famille fantôme…

  • 26 décembre  2019
Les jours passent à nouveau… J’ai peur que la piste se refroidisse, mais un autre rebondissement la garde tiède. Les archives de Paris mettent en ligne les fichiers des électeurs de Paris et du département de la Seine (c'est-à-dire Paris et plusieurs actuels départements limitrophes) pour la période 1860/1939. Pas question d’y trouver Paulette, qui n’est qu’une femme et n’a pas besoin de voter, mais Camille ?
Je trouve bien un « Camille Marie » domicilié à Saint-Ouen, rue des Rosiers, en 1938. Je veux confirmer que c’est bien « mon » Camille, mais dans le dernier recensement mis en ligne, daté de 1931, je ne trouve pas de rue des Rosiers : la rue était une impasse ! Banlieues nouvelles, rues nouvelles.
Et comme on n’est pas avare de surprises dans la famille, ce Camille-ci est né… au Mans (Sarthe). Mais est-ce bien lui ? Le Mans ! Je ne l’avait pas vu venir celle-là ! Cette fois je passe par le Fil d’Ariane, en insistant lourdement sur les mentions marginales car ce sont elles qui me diront si c’est « mon » Camille.

  • 31 décembre 2019
J’attends toujours Paulette, mais Camille arrive dans ma boîte aux lettres (et encore merci aux bénévoles du Fil d’Ariane de la Sarthe, plus rapides que les services officiels de l’administration). Mentions marginales : date et lieu de mariage (1937 à Saint-Ouen) avec la fameuse Paulette Henriette ; date et lieu de décès (1949 à Saint-Ouen) ! 
C’est bien mon Camille. C’est donc sans doute possible ma Paulette. Il ne me reste plus que la copie de l’acte de naissance pour le prouver.

  • 13 janvier 2020
L’acte de naissance demandé il y a un mois ne m’est toujours pas parvenu. J’appelle donc la mairie concernée qui me dit qu’il ne faut pas passer par ce service, mais demander directement chez eux, avec une copie de ma pièce d’identité en pièce jointe (sic). Je m’exécute aussitôt.

  • 26 janvier 2020
Toujours rien au courrier. Je n’ai plus guère de doute, grâce à l’INSEE et aux listes électorales, saupoudrés d’un peu d’entraide, j’ai sans doute débloqué une épine généalogique de plusieurs années. 

  • 27 janvier 2020
L'acte de décès de la Paulette Henriette arrive dans ma boîte aux lettres :

Paulette Henriette, tante par procuration trans-générationnelle, est enfin officialisée !

Mise à jour 31 janvier 2020 : l'acte de naissance de Paulette arrive dans ma boîte aux lettres... et surprise elle a été mariée quatre fois ! Cachotière la tantine. De nouvelles recherches en perspectives...


samedi 21 décembre 2019

#RDVAncestral : La tante insaisissable

- Mesdames !
J’arrivai en courant car j’avais peur qu’elle m’échappe encore une fois. L’une d’elle avait déjà la main sur la poignée de porte de la voiture.


Marcelle et Paulette © Coll. personnelle

Intriguée, les deux vieilles dames suspendirent leur geste et me regardèrent. D’évidence elles ne me connaissaient pas. J’hésitai un instant : elles se ressemblaient tant : les cheveux bouclés, les lunettes, le nez pointu, la bouche fine comme un trait… jusqu’au chemisier sur jupe droite ! Néanmoins celle de gauche avait les cheveux plus grisonnant que celle de droite : étant l’aînée, je supposai que c’était Marcelle, mon arrière-grand-mère et que l’autre était sa sœur, autrement dit c'était (enfin) mon insaisissable « tante Paulette ». Je l’avais tant cherchée. Elle était là.

Comprenant que mon silence devenant embarrassant, je les saluai à nouveau et me présentai… succinctement. Un peu ennuyée, je ne savais pas comment appeler la tante Paulette puisque dans mon entourage tout le monde l’appelait ainsi, mais s’ils n’étaient pas leurs neveux ou nièces stricto sensu. Madame Paulette faisait un peu « Madame Claude » si vous voyez ce que je veux dire… Bon sang ! Ça fait des années que tu la cherche et maintenant que tu l’as enfin trouvée tu risque de la laisser filer parce que tu ne sais pas comment l’appeler ! Mais secoue-toi donc, me sermonnai-je.
- Heu… pardon de vous demander cela, mais vous êtes bien Paulette, la sœur de Marcelle ici présente ?
- En effet…
- Excusez-moi d’arriver comme ça, mais je vous ai longtemps cherchée et…
- Ah ! oui, me coupa-t-elle, et pourquoi ?
Décidément, la tante Paulette faisait honneur à sa réputation acerbe et autoritaire.
- J’ai connu certain de vos proches : Camille votre époux (bon, je ne pouvais pas lui dire que c’était le parrain de ma mère), votre fils Jean, le fils de Marcelle André et son épouse Christiane… Enfin bref…
- Et vous me cherchiez pour …. ?
- Heu… Je sentais au fond de mes poches les photos et cartes postales la concernant. Aussitôt de bredouillai : J’ai quelques documents à vous remettre. Seulement j’ai eu du mal à vous trouver : les quelques informations que j’ai pu récolter étaient contradictoires. Vous permettez que je vous explique ?

Les deux sœurs s’échangèrent un coup d’œil et Paulette m’autorisa, d’un léger coup de tête, à continuer. Je réfrénai un soupir et repris la parole :
- Je ne trouvai pas votre acte de naissance, et donc votre ordre dans la fratrie, alors que j’avais découvert les sept autres frères et sœurs. Comme vos parents ont beaucoup déménagé, ça m’a fait voyager, mais bon.
Une mention au dos d'une photographie indiquait « sœur aînée de la mère d'André [Marcelle donc] », sans prénom, mais les dates de naissance de vos autres sœurs sont connues. Je n’ai pas trouvé votre naissance à Tigeaux ni Serris. Or vos parents se sont mariés en 1900, ont eu un fils en 1901 puis Marcelle en 1902 : j'avais donc écarté l'hypothèse que vous soyez soit l'aînée.
- Tu as bien raison : je ne suis pas l’aînée.
- Ouf. Cependant, dans une de vos cartes postales Paulette vous appelez Marcelle « ma petite sœur ». J’ai hésité à nouveau : est-ce un petit nom affectueux ou êtes-vous vraiment plus âgée ?
Silence de Paulette.
Je reprenais courageusement :
- Mais, contredisant cela, vous signez une autre carte « ta petite sœur » ! Je ne sais plus où j’en suis.
La bouche de Paulette s’étira légèrement. Je n’eus qu’une seconde pour me demander si c’était un sourire… ou autre chose :
- Alors : qu’as-tu fait ?
- J’ai dépouillé (plusieurs fois) les registres d'état civil, mais cela n'a rien donné. Par ailleurs, vous n'apparaissez jamais avec vos parents dans les listes de recensements. Pourquoi ?
- Ah ! Mais je ne vais pas tout te dire, ce serait trop facile !
Un peu dépitée, je repris :
- Une photo-carte postale vous représente, âgée de 17 ans : au verso votre adresse à Eaubonne. Vous habitez donc le Val d’Oise lorsque vous êtes adolescente alors que vos parents sont toujours en Seine et Marne.
- C’est vrai ! J’avais presque oublié !
La tante Paulette ne me facilitait pas les choses et restait avare en détail. Bon, autant pour moi...
- J’ignore la date et le lieu de votre mariage. De Camille, je n'ai même pas une photo. Je n’ai pas trouvé sa fiche matricule qui aurait pu m’indiquer une adresse. Ma mère pense que vous avez habité à Saint Ouen et/ou à Enghien avec Camille votre époux. Puis peut-être dans le Sud ensuite. Mais j’ai complètement perdu votre trace… C’est pourquoi je suis heureuse de vous voir aujourd’hui !
- Je vois qu’en effet que tu as beaucoup d’informations sur moi… Un peu beaucoup. Je me demande comment tu as eu ces cartes postales qui ne t’étaient pas destinées par exemple.
Je retins mon souffle.
- Je n’ai pas pour habitude de me confier à n’importe qui, mais tu as l’air d’être une fille sérieuse et d’y tenir, alors voilà… Elle ouvrit la portière de la voiture. Je ne suis pas l’aînée de la famille, mais la dernière !
Elle s’engouffra dans le véhicule où Marcelle l’attendait et elles démarrèrent en trombe.

J’en restai pantoise. La dernière ? Cela la faisait naître probablement en 1912, le dernier enfant que j’avais trouvé étant de 1910. Comment n’avais-je pas eu cette intuition ? Pourquoi voulais-je à tout pris la placer en tête de fratrie ? Je me précipitai sur le site des archives de Seine et Marne et là je crois que je trouvai la réponse. Il ne manquait qu’un seul registre : celui de 1912 !


samedi 18 mai 2019

#RDVAncestral : A l'école !

En arrivant à Cocherel (petite bourgade de Seine et Marne actuelle), je demandais mon chemin pour me rendre chez les Bachelier – mes ancêtres à la XIIème génération. Presque à chaque fois on me regardait d’un air bizarre, on chuchotait une fois que j’avais le dos tourné, sans parler du couple qui refusa carrément de me répondre ! Je me demandais bien ce qu’il se passait : qu’avaient fait mes ancêtres pour subir cet opprobre de la part de leur communauté ? Finalement j’arrivais enfin à trouver leur maison et j’y fus accueillie à bras ouverts. Cela me changeait de l’atmosphère pesante qui avait accompagnée mon entrée dans le bourg.

Après les salutations et diverses politesses d’usages, j’osais raconter mon arrivée et l’accueil plutôt froid, pour ne pas dire hostile, que j’avais reçu dès lors que je prononçais leur nom.
- C’est à cause de moi ! répondit une petite voix tranquille.
Je me penchais de l’autre côté de la table pour apercevoir son auteur : une petite fille haute comme trois pommes, qui jouait silencieusement avec une poupée de chiffon.
- Mais non, ma chérie : ce n’est pas ta faute, rassura la voix chaude de sa mère Jeanne.

Ma surprise devait se lire sur mon visage. Pierre et Jeanne échangèrent un regard puis Pierre prit la parole :
- Nous avons décidé d’instruire notre fille, de lui faire apprendre ses lettres et un peu les chiffres. Nous pensons que le savoir c’est important.
- Et pas que pour les garçons, appuya Jeanne.
- Et c’est là l’origine du problème ?
- Beaucoup ne partagent pas notre point de vue : ils disent que la seule chose que les filles doivent savoir c’est tenir leur ménage et satisfaire leur mari. Même le curé y a fait allusion lors d’un prêche à l’église. Désormais, même ceux qui nous soutenaient auparavant n’osent plus le faire ouvertement.
- Ah ! Je comprends mieux maintenant…


Alphabet méthodique © crdp-strasbourg.fr

Jeanne enchaîna tristement :
- Apprendre aux filles c’est apprendre au diable. Seule l’éducation religieuse est permise. De toute façon elles sont sottes et n’y comprendraient rien. C’est ça qu’on nous dit. Et encore, des fois c’est pire : si elles sont savantes elles deviennent vaines, voire lascives et dangereuses !
Jeanne regarda sa petite fille qui, dans l’innocence de sa jeunesse, n’avait rien de tout cela.
- Les filles passent de la domination du père à celui du mari. Ou alors  c’est le couvent ! Pas d’autre alternative possible, confirma Pierre.
- Moi je ne veux pas de cela pour ma fille : je veux qu’elle soit instruite et qu’elle trouve un mari qui l’appréciera pour cela aussi. Et pas juste une servante pour s’occuper des gosses et balayer sa cuisine.
L’intention était louable, mais l’époque ne s’y prêtait guère. Rencontrer une féministe au XVIIème siècle était déjà curieux, mais un féministe encore plus ! Parce que bien sûr, rien ne pouvait se faire sans la volonté du mari. Et de toute évidence, celui-ci était tout acquis à cette cause ; ce qui me fit bien plaisir moi qui, tous les jours ou presque, assistais au lent grignotage des droits des femmes un peu partout dans le monde.

- Mais alors, qu’allez-vous faire ?
- Nous cherchons un cours paroissial qui voudrait l’accepter parce que, bien sûr, le curé de notre paroisse de veut pas en entendre parler. Peut-être à Vendrest, d’où je suis originaire et où ma famille est connue et respectée.
- J’espère qu’ils l’accepteront car cela fait déjà une heure de marche pour y aller, plus encore pour Anne et ses petites jambes. Parce qu’on ne pourra pas l’accompagner : il y a trop de besogne ici. Elle devra y aller seule, souligna Jeanne.
- En attendant, nous avons commencé à l’éduquer nous-mêmes, reprit Jeanne dans un souffle, surveillant la porte au cas où une oreille indiscrète passerait par là.
- Je suis moi-même un peu instruit : oh ! pas un savant hein ? Mais je sais mes lettres, alors je me sers des citations de la bible utilisées lors des offices par le curé, comme ça on ne peut rien me reprocher ! expliqua Pierre.
Un petit air de défi éclairait son visage.

J’admirais ces parents qui, seuls, contre tous, voulaient absolument éduquer leur fille. Quitte à prendre des risques, à être mis à l’écart de leur communauté. Combien de siècles avaient-ils d’avance ? Au XVIIème siècle près de 90% des femmes étaient illettrées. Et encore, dans les 10% restant il y avait surtout des citadines bien nées et vivant déjà dans un milieu sinon cultivé au moins instruit.
Je ne sais pas s’ils trouvèrent enfin une école pour accueillir et éduquer leur fille, mais une chose est sûre : à 18 ans, lors de son mariage, elle savait parfaitement signer son nom et peut-être bien plus encore...

Signature Anne Bachelier, Cocherel, 1673 © AD77

On est alors en 1673. C’est la plus ancienne signature féminine de mon arbre.


samedi 20 avril 2019

#RDVAncestral : Au bureau de placement

J’ai rendez-vous aujourd’hui avec Ursule Le Floch, épouse Macréau. C’est ma « dernière » (ou la première : tout dépend dans quel sens on navigue dans l’arbre) ancêtre bretonne ; celle qui s’est exilée en région parisienne. Je suis curieuse d’entendre la propre version de cette expérience vécue par mon ancêtre.

Elle m’a donné rendez-vous devant l’église de Tigeaux, en Seine et Marne. Je la trouve debout près du portail, perdue dans ses pensées, indifférente à la vie de la place et au passage des badauds autour d’elle. Il me faut lui presser légèrement le bras pour la ramener à la réalité.

- Ah ! Vous voilà ! J’étais ailleurs, je le crains dit-elle un peu gênée.
Sous l’embarras, elle tordait ses mains, pressant un joli petit sac légèrement usé. Ayant pitié de mon ancêtre et de son pauvre réticule qui risquait de ne pas survivre au traitement qu’il subissait, je proposais à Ursule de s’installer dans un troquet tout proche. Une limonade bien fraîche l’ayant remise de ses émotions, Ursule commença à me raconter son histoire :

- Nous sommes nombreux, nous les Bretons, à être venus à Paris. Les familles ont beaucoup d’enfants là-bas, dans la très catholique Bretagne, en particulier dans les campagnes. La petite taille des exploitations agricoles ne peut nourrir toutes les bouches. Pour beaucoup c’est l’indigence, voire la misère. Il faut donc se résoudre au départ pour trouver un emploi. C’est ce que j’ai fait.

Quand j’ai débarqué à Paris, je m’en souviens comme si c’était hier. En sortant de la gare, la tête me tournait : je n’avais jamais vu tant de monde. Pourtant ma ville d’origine, Loudéac, dans les Côtes du Nord, est une grande ville déjà : près de 6 000 habitants. Mais là… Rien à voir. Heureusement ma sœur aînée m’attendait. Elle était à Paris depuis près d’une année alors forcément elle était habituée et s’est moquée gentiment de moi. Pour ne pas lui donner une raison de me ridiculiser encore plus, j’ai pris une grande inspiration et je me suis jetée tête la première dans la foule, à sa suite. Nous avons presque dû nous battre pour monter dans un tramway à chevaux qui était bondé. Nous étions très serrées et je n’avais pas l’habitude d’une telle proximité, mais je me suis mordue la langue pour ne pas laisser échapper une plainte. Ma sœur avait l’adresse d’un bureau de placement dans le quartier des Halles. 

Je n’ai pas vraiment eu le temps d’admirer le paysage, les grands immeubles tout en hauteur, ou celui tout rond de la Bourse du commerce : tout ce qui m’importait c’était de garder un minimum de place sans me faire écraser les pieds ni perdre mon bagage. Je serrais si fort les lanières de mon sac que j’en avais mal aux mains ! Enfin ma sœur donna le signal pour descendre : ouf ! 

Nous sommes entrées et avons attendu notre tour. Ça a duré près de deux heures avant que nous soyons reçues : pendant ce temps-là j’ai eu le temps d’observer (discrètement, hein ?, je ne suis pas une commère) les autres personnes qui attendaient. La salle était pleine de filles à l’air triste assises sur leurs bancs. Certaines avaient les joues creuses et les yeux caves : elles sentaient la misère à plein nez. Je les plaignais les pauvres : elles avaient peu de chance de trouver un emploi ici. Et une femme sans homme, sans soutien, dans la capitale, ça finit bien vite dans la rue, si vous voyez ce que je veux dire… L’une d’elles, un peu mieux mise, s’est moquée de moi : elle m’a dit qu’on ne me prendrait pas, parce qu’on cherchait de la viande plus fraîche !

- De la viande ? demandais-je.
- C’est le nom qu’on donne aux jeunes filles qui veulent se placer. Sans doute voulait-elle dire que j’étais déjà trop âgée. Les patrons aiment quand leurs servantes sont jeunes : ils peuvent les façonner à leurs goûts. Mais en même temps il faut avoir de l’expérience : c’est une équation difficile à résoudre ! Quand mon tour est venu, ma sœur m’a poussée en avant. Je me suis retournée horrifiée, voyant qu’elle ne m’accompagnait pas, mais ça aurait été mal vu – ça je l’ai compris plus tard – si je n’étais pas capable de parler à un patron, comment pourrais-je remplir toutes les tâches qui m’incomberaient par la suite ?

J’ai eu de la chance. J’ai plu au recruteur parce que j’étais la seule à porter un chapeau – toutes les autres étaient en cheveux – et que ma robe était propre et pas usée comme certaines. Je n’avais travaillé que chez une seule famille, les Le Ho, des amis de la paroisse qui étaient boulangers. Enfin, chez leur fils surtout. Or il se trouve qu’il a déménagé et n’a pas voulu m’emmener avec lui (enfin, je crois que c’est sa future femme qui ne voulait pas trop que je vienne). En tout cas ils ont été assez gentils pour écrire une lettre de recommandation où ils faisaient mon éloge. C’est comme ça que le soir même j’ai été engagée comme servante. 

La jeune servante, v.1900/1910, Henry Caro-Delvaille © dezenovevinte.net

- Franchement, vous n’auriez pas préféré vivre chez vous, en Bretagne ? demandais-je.
- Ah ça non ! Mon père était dur. Et travailler aux champs, c’est le bagne. Notez que domestique c’est pas beaucoup mieux. Il me fallait trimer de sept heures à vingt deux heures : préparer à manger, brosser les habits, nettoyer les chaussures, astiquer les cuivres, repasser… Je n’avais pas un moment pour souffler. Il y avait un dîner par semaine avec des invités, je devais rester jusqu’à leur départ, parfois à deux ou trois heures du matin. Je me rattrapais pendant les courses : je rognais un quart d’heure par-ci par-là pour admirer les devantures des magasins.
Et puis brutalement mon patron est décédé : un arrêt cardiaque a dit le médecin. On ne m’a pas gardé : il a fallu que je retrouve une nouvelle place. Mais cette fois, je me suis faite embaucher comme cuisinière, c’est quand même moins fatiguant. Et puis, dans ta cuisine, t’es presque ta propre patronne… Enfin, presque, tu vois ?

J’acquiesçais : la cuisine était son royaume, tant que le patron ne se piquait pas de régenter cet espace-là comme le reste de la maison.

- C’est ainsi que je suis arrivée ici à Tigeaux. Là, pour sûr, c’est la campagne : 200 habitants, plus d’arbres et de bêtes que d’hommes ! dit-elle en riant. C’était une bonne place, reprit-elle redevenant sérieuse. Et puis… c’est là que j’ai connu mon époux ajouta-t-elle dans un souffle, rougissante comme une jeune fille. Ou plutôt comme une jeune mariée car les épousailles avaient été célébrées il y a peu. J’ai quittée ma place de cuisinière pour le suivre. Fini la domesticité : c’est le retour à la terre. Mais je ne regrette rien.
- Pas même votre Bretagne natale ? demandais-je, insistant encore sur ce déracinement.
- Des fois, pour sûr. Ma maison, ma famille. Et surtout ma sœur jumelle que j’ai laissée là-bas… La voilà presque triste maintenant.

Après un grand soupir (pour se donner du courage, ou chasser ses idées noires ?), elle dit :
- Mais bon, c’est la vie ! Y a pas de regret à avoir : c’est comme ça ! Et finalement c’est un mal pour un bien puisque maintenant j’ai trouvé le bonheur et puis ma belle-famille m’a fait bon accueil : j’ai pas à me plaindre. D’autres que moi ont eu des expériences bien plus difficiles sans doute… Allez, c’est pas tout, mais il faut que je rentre maintenant. C’est que j’ai un bout de chemin avant de retrouver ma maison.

Je la remerciais et la regardais partir, quand tout à coup elle se retourna vers moi :
- Merci à vous ! Je n’avais jamais raconté ça à personne. Chez nous, on est plutôt des taiseux. Je suis contente d’avoir pu parler avec vous. Au revoir !
Elle me fit un signe d’adieu avec la main et en un instant elle disparut. C’est ainsi qu’elle me quitta, sans remord ni regret, ma petite Bretonne courageuse, pour reprendre le cours de sa vie d’exilée.


jeudi 11 octobre 2018

Les enfants inconnus

Marie Louise Gibert se situe 5 générations avant moi. Elle vivait en Seine et Marne, où elle est née en 1845 à La Chapelle sur Crécy. En 1866 elle épouse Théodore Macréau. Je ne leur connais que deux enfants : Albert né en 1867 à Guérard et Henri (mon ancêtre direct) né en 1874 à Meaux. Par contre, je leur connais au moins 5 domiciles différents : La Chapelle sur Crécy, Guérard, Meaux, Tigeaux, Serris, tous situés dans un rayon de 25 km environ. Je perds ensuite sa trace car il n’y a plus d’archives numérisées en ligne après 1902/1912 (selon les communes) et j’ignore donc la date et le lieu de son décès. Au fur et à mesure des années, elle est dite manouvrière,  journalière, domestique ou sans profession. Son époux est manouvrier puis charretier.

Grâce à un long dépouillage des listes nominatives de recensement, j’ai pu suivre la trace de Marie Louise :
Commune de La Chapelle s/Crécy (canton de Crécy la Chapelle) :
- en 1846, en 1851, en 1856, en 1861.
Commune de Guérard (canton de Coulommiers) :
- en 1866 et en 1872.
Elle n'apparaît pas à Meaux dans le recensement de 1876 (son fils y est né deux ans auparavant : la famille a donc déjà déménagé), ni à Tigeaux (leur prochaine destination) ; par conséquent il me manque une adresse supplémentaire entre 1874 et 1881 où je la retrouve à nouveau.
Elle (ré)apparaît à Tigeaux (canton de Rozay en Brie) :
- en 1881, 1886, en 1891, en 1896, en 1901 et en 1906.
Puis la dernière adresse connue : elle apparaît cette fois à Serris (canton de Crécy La Chapelle) :
- en 1911.

Mais ce ne sont pas les multiples déménagements de la famille qui m’ont interpellée : c’est la composition du foyer, détaillée de façon précise par les agents recenseurs.
- en 1846, en 1851, en 1856, en 1861 (de 1 à 16 ans) elle habite avec ses parents et ses frères et sœurs (on voit la famille s’agrandir au fur et à mesure des recensements) ; ce qui est tout à fait normal.
- en 1866, Marie Louise a 21 ans. Elle habite cette fois chez ses beaux-parents (elle s’est mariée en mars et le recensement est de mai) mais son mari n'est pas cité : son travail l’a-t-il éloigné ?
- en 1872. Elle habite cette fois avec son époux et leur fils Albert âgé de 5 ans.
- en 1881. Elle est journalière. Elle habite avec son époux et leurs deux fils Albert (14 ans, vacher) et Henri (7 ans, vacher).
- en 1886. Même chose.
- en 1891 (mois de mai). Elle est sans profession. Elle habite avec son époux et son fils Henri âgé de 16 ans. L’aîné a alors 24 ans et a quitté le foyer familial (il remplit en fait ses obligations militaires : il est sous les drapeaux jusqu’en octobre 1891, date à laquelle il est envoyé « en congés » en attendant de passer dans la réserve, ce qui sera effectif le 1e novembre). Mais le cas étrange de Maie Louise commence ici : dans le foyer « familial » l’agent recense également 2 jeunes enfants : Croisy Gaston (8 mois) et Janvoile Louis (4 mois). Ils sont dits « nourrissons » et « sans profession » (sic). Et dans les recensements suivants on va retrouver ce phénomène, avec des enfants différents.
- en 1896. Marie Louise est dite manouvrière. Elle habite avec son époux et son fils Henri âgé de 22 ans et 3 jeunes enfants : Dangues Marcel (3 ans), Dangues Léontine (2 ans) et Guilmet Lucienne (6 mois).
- en 1901. Elle habite avec son époux (Henri s’est marié en 1900), sa nièce Gibert Lucie (âgée de 11 ans) et 2 autres enfants : Guilmet Andrée (4 ans) et Longchamps Henriette (7 mois).
- en 1906. Elle habite avec son époux et son petit-fils (son fils et sa bru ne sont pas cités : ils demeurent à Serris avec leur autre fille).
- en 1911. Elle a 66 ans et veuve depuis 5 ans : elle habite désormais chez son fils Albert et sa bru Marie. Comme je l’ai dit plus haut, je perds sa trace ensuite.

Marie Louise a donc accueilli 7 enfants « non identifiés », plutôt des bébés (le plus âgé a 4 ans), entre 1891 et 1901, alors qu’elle demeurait à Tigeaux.

Pouponnière © numelyo.bm-lyon.fr

J’ai tenté de pister tous ces enfants qui ne font pas partie de la famille : aucun ne naît dans la commune (ni ne décède, du moins dans les années proches). En élargissant la recherche, cela me donne :
- un Croisy Gaston né le 24/7/1890 à Marles en Brie (canton de Rozay), matricule militaire n°60.
- Jeanvoile Louis, Dangues Marcel n’ont pas été trouvés, ni par leur naissance, ni par leur fiche militaire en Seine et Marne actuelle ou dans l’ancienne circonscription de la Seine. Sont-ils décédés en bas âge ? Ont-ils déménagés ?
- Guilmet Lucienne, Dangues Léontine, Guilmet Andrée n’ont pas été trouvées non plus.
- une Longchamp Henriette est née à Melun en 1900.

Je ne les ai pas trouvés non plus parmi les enfants assistés de la Seine, qui regroupent les enfants trouvés, abandonnés ou  orphelins ; les moralement abandonnés (dont les parents ne peuvent assurer moralement ou matériellement l’éducation) ; les secourus (dont les parents sont aidés financièrement).

Les mentions du recensement étant très lapidaires, difficile de savoir si les Gaston et Henriette trouvés sont bien ceux que je cherchais.

Aucun lien ne semble relier ces enfants à la famille Gibert - ou Macréau (hormis la nièce mentionnée en 1901 et le petit-fils en 1906). Pourquoi ceux-ci habitent-ils chez le couple Macréau, je l’ignore, mais les liens de famille clairement stipulés les écartent du cas particulier des autres enfants qui demeurent au foyer. Pour ceux-ci, on ne retrouve jamais leurs patronymes dans un acte concernant la famille Macréau, en tant que parents, amis ou témoins. Ils ne semblent donc pas faire parti de leurs proches.

Étant donné que ces enfants sont toujours très jeunes, et qu’ils « disparaissent » vite (on ne les retrouve jamais dans deux recensement successifs), j’ai pensé que Marie Louise était peut-être nourrice d’enfants, bien que ce métier ne soit jamais mentionné dans les documents la concernant.
Elle serait ce que l’on appelle une « nourrice au loin », c'est-à-dire  qu’elle emmène le nourrisson chez elle, à la campagne (tandis que les  « nourrices sur lieu » viennent habiter dans la famille de l'enfant). Si tel était le cas elle aurait dû, pour pouvoir exercer, présenter un certificat constatant que son dernier enfant vivant était âgé de 7 mois à 2 ans maximum, afin de pouvoir allaiter le nourrisson accueilli (l’usage du biberon étant encore très marginal). En général, les nourrices ne s’occupaient que d’un seul bébé à la fois ; théoriquement en tout cas, car on connaîtra des dérives : de nombreux cas de nourrices s’occupant de plusieurs enfants en même temps ayant été signalés. En effet, pour chaque enfant dont elles s’occupaient, les nourrices percevaient un salaire. La misère régnant dans les campagnes entraîna des abus avec l’accueil de plusieurs enfants pour obtenir un salaire plus important.

Or les conditions de ce métier ne correspondent pas vraiment aux informations trouvées sur Marie Louise :
- son fils le plus jeune a 16 ans la première fois qu’elle accueille des enfants : elle n’allaite donc plus depuis bien longtemps !
- elle reçoit plusieurs enfants en même temps.
- certains sont beaucoup trop âgés pour entrer dans le cadre de ces nourrices allaitantes (3 ou 4 ans).

J’en reviens donc à mon point de départ : qui sont ces enfants inconnus ? Est-ce qu’elle fait partie d’un cas exceptionnel, accueillant plusieurs enfants, d’âges variés, un peu comme  une assistante maternelle d’aujourd’hui ? Dans ce cas, elle devait avoir adopté le biberon ou au autre système d’allaitement similaire, puisque la majorité des enfants n’étaient pas sevrés. Et avoir sans doute une vache ou une chèvre, puisque le couple n’était pas agriculteur (exceptée sur une courte période où Marie Louise est dite journalière tandis que son époux est toujours charretier, mais cela se passe avant l’arrivée des enfants). Et que sont devenus ces enfants par la suite ?

En bref, beaucoup de questions soulevées par ces recensements successifs, quelques hypothèses mais bien peu de réponses !



dimanche 30 septembre 2018

#Centenaire1418 pas à pas : septembre 1918

Suite du parcours de Jean François Borrat-Michaud : tous les tweets du mois de septembre 1918 sont réunis ici.

Ne disposant, comme unique source directe, que de sa fiche matricule militaire, j'ai dû trouver d'autres sources pour raconter sa vie. Ne pouvant citer ces sources sur Twitter, elles sont ici précisées. Les photos sont là pour illustrer le propos; elles ne concernent pas forcément directement Jean François.

Les éléments détaillant son activité au front sont tirés des Journaux des Marches et Opérations qui détaillent le quotidien des troupes, trouvés sur le site Mémoire des hommes.

Toutes les personnes nommées dans les tweets ont réellement existé.
___ 

1er septembre
[JMO Ière armée] Nous tentons toujours de franchir le canal du Nord, mais la résistance ennemie est très active. Nous faisons une cinquantaine de prisonniers, mais de violentes contre attaques reprennent les secteurs que nous avons pris.

2 septembre
[JMO Ière armée] Violente réaction de l’ennemi pendant la nuit sur tout le front. Pendant la journée un détachement parvient à franchir la Somme. Les mitrailleuses ennemies rendent très difficile le débouché de l’attaque ainsi que sa progression et nous font subir de sévères pertes. Autour de nous le paysage est dévasté.

Dans la Somme, village bombardé, 1916 © Gallica

3 septembre
[JMO Ière armée] Pendant la nuit, activité de l’artillerie ennemie sur nos premières lignes. Au cours de la journée, nous avons progressé et fait des prisonniers. L’ennemi réagit violemment par son artillerie et ses mitrailleuses.

4 septembre
[JMO Ière armée] Pendant la nuit l’ennemi commence, devant nos reconnaissances offensives, un mouvement de repli. De vifs combats se déroulent entre le Canal du Nord et la Somme. Nous passons le canal, l’ennemi offrant peu de résistance. Nous faisons 300 prisonniers.
Retrait du front et transport par camions vers à Rogy (5 km au SE de Conty) où nous pouvons enfin jouir d’un repos bien mérité.

Carte Breuil-Rogy

5 septembre
Cruellement éprouvé, le bataillon se réorganise rapidement.

6 septembre
[JMO Ière armée] Nous apprenons avec joie que ceux qui continuent à se battre sur le front progressent d’environ 10 kilomètres par jour. Les brigades britanniques sont à leur tour retirées du front et remises à la disposition de la IVème Armée Britannique. 4 groupes lourds viennent les remplacer.

7 septembre
[JMO Ière armée] Partout l’ennemi est refoulé et les troupes françaises passent la Somme et le Canal du Nord.

8 septembre
Repos.

9 septembre
Je change d’affectation : et pour la première fois depuis le début de la guerre je ne rejoins pas un Bataillon de Chasseurs Alpins ! En effet je passe au 81è RAL (Régiment d’Artillerie Lourde), stationné dans la région de Châtres en Seine et Marne.

Carte Rogy-Châtres

10 septembre
Pendant ces quelques jours de repos, mes nouveaux camarades me brossent un portrait de leurs actions depuis 1914. Eux aussi ont beaucoup voyagé, et même en Italie comme nous.

Mise en batterie d'artillerie lourde © picclick.fr

11 septembre
Si l’artillerie lourde avait été négligée avant 1914, elle a fait ses preuves depuis et ses groupes se sont fait remarquer à de nombreuses occasions.

12 septembre
Conformément aux ordres du colonel, nous revoyons le matériel d’artillerie et le matériel automobile. C’est un peu une découverte pour moi !

13 septembre
Nous sommes dotés de 155 GPF ou du 145-155 Saint-Chamond modèle 1916. Les premiers sont des canons de 155 mm « Grande Puissance Fillloux », les seconds des canons de 145-155 mm. Tous ont été conçus au cours de la guerre.

Canon de 145-155 Saint-Chamond © clausuchronia.wordpress.com

14 septembre
Il faut voir la dextérité du groupe avec ce matériel extrêmement lourd des changements rapides qui comptent parmi les beaux exploits de la guerre.

15 septembre
Nous recevons l’ordre de faire mouvement et de se rendre dans la journée à Villeneuve au Châtelet où nous cantonnons.

16 septembre
Étape de Villeneuve à Torcy le Grand où nous cantonnons.

17 septembre
Départ à 3h du matin pour Moutier en Der. On est à peine arrivés, qu’à 23h on reçoit l’ordre de partir immédiatement pour Rosnes par St Dizier et Bar le Duc. Tout le régiment fait mouvement.

Carte Châtres-Rosnes

18 septembre
Le cantonnement prévu à Rosnes est reportés à La Tuilerie Neuve, sur les hauteurs de Rarécourt.

Carte Rosnes-Rarecourt

19 septembre
Le chef d’escadron et les commandants de batterie vont reconnaître des positions dans le bois de la Chalade et prennent contact avec le général américain Aultman, commandant la Ière Armée Américaine.

Général Aultman © Wikipedia

20 septembre
Dans la matinée une section par batterie monte en position, l’autre montera de nuit.

21 septembre
Vers10h le groupe est prêt à tirer. Il est rattaché à la Ière Armée Américaine et fait partie du sous groupe commandé par le colonel Donnet du 87ème RAL.

22 septembre
Dans la matinée, ordre du colonel Donnet de prendre les mesures nécessaires pour effectuer la mise en batterie au cours de la nuit du 22 au 23 d’un groupe de G.P.F. américains dans le bois de la Chalade.

La Chalade © argonne1418.com

23 septembre
La mise en batterie s’est faire dans la plus grande difficultés au cours de la nuit. Elle s’est terminée à 8 du matin. La rapidité avec laquelle tout ce travail a été effectué nous vaut une lettre de remerciement et de félicitations du général Aultman.

24 septembre
Dans la journée un brigadier de la deuxième batterie est blessé par le feu de l’ennemi.

25 septembre
Appuyés efficacement par le régiment, nos alliés enlèvent Montfaucon et Vauquois ainsi que tout le formidable réseau de tranchées vieux de quatre ans.

26 septembre
A 5h30 l’armée américaine attaque et nous participons suivant l’exécution du programme qui nous a été fourni par le colonel Donnet. Au total 1 316 coups ont été tirés. La 1ère batterie tient le record avec 259 coups tirés entre 5h30 et 10h, soit un coup toute les 95 secondes !

27 septembre
Conformément aux ordres donnés par le colonel Donnet des officiers vont à la recherche d’un observatoire avancé. De leurs côtés, les batteries continuent les tirs : 450 coups tirés.

28 septembre
Le lieutenant Moreau prend le commandement de la 1ère batterie, en remplacement du capitaine Bouquet qui part à l’école élémentaire d’observation comme instructeur. Tirs exécutés : 201 coups.

29 septembre
Reconnaissance des positions de batterie de 75 ordonnée par le colonel Donnet. Tirs exécutés : 403 coups.

Artillerie © argonne1418.com

30 septembre
A 14h, ordre du colonel Donnet de mettre hors batterie pour rejoindre le point où le colonel Blanchet rassemblera le 81ème. Tout le groupe est à la Tuilerie Neuve pour 22 heures.