« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

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lundi 5 septembre 2016

Des Astié survivront-ils ?


Ma famille paternelle est originaire de Conques (en Rouergue). Le plus lointain ancêtre de cette lignée que j’ai pu identifier s’est marié en 1671. Il appartient à la 11ème génération. Avant ça… des lacunes de registres BMS et des registres notariaux. Les recherches se compliquent. Même si je ne désespère pas de trouver les générations précédentes un jour, pour le moment, ça s’arrête là.

Pour ceux qui l’ignorent, j’ai un patronyme que l’on doit sans doute à saint Astier, ermite du Périgord : fils d’une famille romaine, né au VIème siècle à Puy-de-Pont (Périgord). La légende veut que, devenu ermite, il réalisa de nombreux miracles donnant au lieu une certaine renommée. Après sa mort, son tombeau attirant la dévotion des fidèles, une abbaye fut bâtie au VIIIème siècle, autour de laquelle s'est établie une cité, Saint-Astier. D’après les spécialistes, ce patronyme viendrait d'un nom de personne qui pourrait correspondre au germanique Asthari (ast = lance + hari = armée), mais qu'il faut plutôt sans doute rattacher au latin Asterius (dérivé de "aster" = étoile), popularisé par divers saints, notamment ledit ermite du Périgord cité plus haut.

Le patronyme est très fréquent dans l'Ardèche et la Drôme, ainsi qu'en Auvergne.
- on en compte un peu plus de 93 700 en France en 1700,
- 74 800 en 1800,
- 30 000 en 1900 [1].
Des familles plus ou moins célèbres portent ce nom (je n’aurai pas renié Alexandre Astier et toute sa famille s’ils avaient voulus être de mes cousins, par exemple). Pour la première fois j’ai rencontré ce « nom » en prénom : Astier Nicolas, récent vainqueur olympique en équitation (bien sûr, vous aurez remarqué comme moi que son prénom est un nom et que son nom est un prénom…).

Mais, chez moi, petite originalité : mon nom s’orthographie sans le R final : « Astié ». Ce qui fait toute la différence ! Cette variante est portée surtout dans le Tarn et le Lot-et-Garonne. Du coup le nom se fait plus rare :
- un peu plus de 7 100 porteurs en France en 1700,
- 3 300 en 1800
- et seulement 1 300 en 1900 ! [1]


Une partie de la famille Astié (la mienne) - générations 2 et 3 - à Saint-Astie(r) © coll. personnelle

Et c’est alors que je me suis demandé combien de temps encore notre « originalité patronymique » pourrait se perpétuer.

Que les épouses, filles, sœurs, mères me pardonnent, mais je ne parlerai pas d'elles dans cet article (elles apparaîtront à peine, voire pas du tout, dans les extraits d'arbre mis en illustration !).

Génération 1 :
Dans ma famille proche (ce que l’on appelle la famille « nucléaire »), il n’y a qu’un fils, mon frère, mais il n’a pas d’enfant. C’est cuit pour nous.

Génération 2 :
Mon père a eu quatre frères :
  • L’aîné de mes oncles a eux deux fils, mais un seul a donné deux fils à son tour.
  • Le second a deux fils et un petit-fils.
  • Le troisième deux fils et deux petits-fils.
  • Le dernier n’a eu qu'une fille. Adieu le patronyme. A moins qu'elle ne choisisse de donner son propre patronyme à ses enfants, ce qui est maintenant possible. A ma connaissance ce n’est pas le cas.
Extrait arbre généalogique Astié générations -1 à 3

Si on résume il y a eu 7 fils dans ma génération (n°1), qui ont donné eux-mêmes 5 fils (génération n°-1 !) nés entre 1995 et 2010. Soit, pour le moment, 5 chances que le patronyme se perpétue de notre côté.

Génération 3 :
Mon grand-père était fils unique. Cela réduit le champ des recherches.

Génération 4 :
Il faut donc remonter à la génération précédente pour trouver à nouveau des fils; enfin des fils qui ont survécu à la Première Guerre Mondiale. Cette génération de mon arrière-grand-père compte 8 fils. Parmi eux :
  • Augustin mon ancêtre direct, donc, 
  • Deux fils décédés en bas âges (9 semaines pour l’un et 5 ans pour l’autre),
  • Trois Poilus Morts pour la France,
  • Louis, né en 1877, marié en 1914; et François né en 1884, marié en 1904 puis en 1942.
Bon, là, on tombe dans « le trou noir de la généalogie » : cette génération qui est trop vieille pour être encore connue des vivants et trop jeune pour apparaître librement dans les archives communicables. Il me sera difficile de savoir s’ils ont eu des fils, ayant eux-mêmes enfanté des mâles - enfants à chercher.
Extrait arbre généalogique Astié générations 3 à 5

Génération 5 :
Que des fils : on en compte 6.
  • Augustin mon ancêtre.
  • Trois fils, Adrien, Jean François et Louis, tous mariés.
  • Deux autres enfants, Antoine et Benoît, nés en 1859 et 1861.
Tous sont susceptibles d’avoir eu des enfants. Adrien n'a eu que deux fils qui ont survécu : l'un marié en 1909 et l'autre en 1920 - enfants à chercher; Jean François a aussi eu deux fils mariés (en 1907 et 1919) mais ceux-ci n'ont eu apparemment que des filles; le dernier, Louis, n'a eu que trois filles. 
Les parents ont déménagé au moins 8 fois : je n'ai pas retrouvé la trace des deux derniers enfants et j'ignore quand ils sont décédés ni s'ils se sont mariés (et ont enfanté) - enfants à chercher.

 Extrait arbre généalogique Astié générations 5, 6 et descendantes

Génération 6 :
5 fils, dont mon ancêtre Pierre et son petit frère décédé en bas âge. Mes ancêtres commencent à avoir la bougeotte et il devient difficile de les pister suite à leurs déménagements respectifs et fréquents. J'ai ainsi pu trouver trace des mariages des trois autres fils à Conques (en 1835, 1853 et 1859), mais si l'un est resté sur place (et a eu une seule fille), les deux autres disparaissent des radars - enfants à chercher.

Extrait arbre généalogique Astié générations 5 à 7 et descendantes
Génération 7 :
Deux fils seulement, dont mon ancêtre direct, Augustin. Les pistes de recherche se réduisent enfin. Son frère Pierre n'a que des filles.
 Extrait arbre généalogique Astié générations 6 à 8 et descendantes

Génération 8 :
4 fils, dont mon ancêtre Antoine et un fils mort en bas âge. Restent deux pistes à explorer : Pierre et Pierre (sic) ! Pour le moment  je n'ai pas trouvé leurs décès en bas âges ni leur mariage jusque dans les années 1770. Les recherches continuent...
 Extrait arbre généalogique Astié générations 7 à 9

Génération 9 :
4 fils :
  • Mon ancêtre Pierre
  • Guillaume, peut-être décédé en 1734
  • Jean, peut-être décédé en 1731 
  • Georges
D'après les dépouillements des registres de Conques (1698/1760) deux des quatre fils seraient décédés à 30 et 23 ans (forte supposition grâce aux témoins même si la parenté n'est pas formellement prouvée), mais ils n'apparaissent pas dans les relevés des mariages de la paroisse. Je perds la trace de Georges après sa naissance et ne le trouve pas dans les dépouillements cités ci-dessus ou ceux du Cercle Généalogique du Rouergue ; il n'est pas cité dans le testament de son père en 1732 : sans doute est-il décédé avant cette date, mais où...? Je n'ai pas encore eu le temps de compulser tous les registres d'état civil, mais pour le moment mes recherches sont vaines.

 Extrait arbre généalogique Astié générations 9 à 11

Génération 10 :
Mon ancêtre Jean n’a qu’un frère, Charles. Comme Georges, lors de la génération précédente, je perds sa trace très rapidement.

Génération 11 :
Mon plus lointaine ancêtre connu, le fameux Antoine Astié.

Signature d'Antoine Astié lors de son mariage, 1671 © AD12

Trois autres enfants Astié apparaissent dans les registres de l'époque (sont-ce les sœurs d'Antoine ?) :
  • Jeanne née en 1647, décédée l'année suivante,
  • Jeanne née en 1655,
  • Catherine née en 1659.
Mais pas de fils !

Un long travail de recherche de généalogie descendante m’attend pour voir si mon patronyme si spécial (pour moi en tout cas) se transmettra encore à travers les âges…


[1] Source : Geneanet.
Merci à JP pour ses infos de généalogie descendante, lui qui est un lointain cousin... mais descendant d'une fille Astié !


vendredi 18 décembre 2015

Insultes prohibées

A force de lire des histoires bizarres sur l'origine des noms - en particulier ceux qu'on ne voudrait pas porter comme Nibard ou Gueunon - ça m'a donné envie d'aller voir s'il y en avait dans mon arbre. Las ! Rien de rien ! Ou tout juste un Soulard et un Cocu : pas de quoi casser trois pattes à un canard ! Quelle tristesse. Alors pour me venger de mes ancêtres qui n'ont reçu en héritage que des patronymes fort corrects, j'ai écrit un texte composé - presque - uniquement de leurs noms (facilement identifiables car ils apparaissent en majuscules).
Les patronymes n'ont pas d'orthographe, c'est bien connu, ce texte n'en a pas non plus (inutile d'alerter le Bescherelle), ce qui va très bien avec cette histoire tout droit sortie des âges.

Ambrogio Lorenzetti, Effets du bon et du mauvais gouvernement © Larousse.fr

Il y a fort fort longtemps :

Tel un PELERIN et son POULLAIN, BERTRAND le CLERC, tout GROS et GRAS qu'il était, marchait dans la VALLEE, les bras BALAND, à côté de son BEAU BODET du POITOU, juste FERRÉ, qui préférait la FRICHE des FOURRÉ DE LA LANDE aux ROCHER DUCHEMIN. Avisant la RIVIERE, il s'écria "SEBAULT !". Il voulait traverser mais, TROUILLARD, il avait peur de LABOUE et d'abîmer ses SOULIÉ. Il se GARDAT de tenter l'aventure. Sortant DESBOYS de BOULEAU et de SUREAU, il arriva au HAMEAU.

Par-dessus DESHAYES, il vit ALLAIN, LE JOLY BACHELIER, qui jouait au BALLON. Le TAVERNIER, nommé GUILLAUME, le regarda de BIAIS, puis lui dit BONJOUR et lui souhaita la BIENVENU. Il épousseta une MIETTE de FROMEN ou de MILLET de son GILLET, le dernier PATÉE de GORET au ROMARIN PESANT comme une PIERRE sur son estomac, tout en comptant sa MONET en bon LOUIS d'or. Sortant son COUTEAU, il découpa un PIGEON sur une PLANCHE, le farcit d'ANIS et l'arrosa de PINEAU avant de le cuir au CHALUMEAU. Un REZAU de QUENELLE entourait LE COCQ et LELIEVRE NOUÉ ensemble dans LE POT qui cuisaient. "Rien de DEBORDE DUFOUR" pensa-t-il. Satisfait, il se versa une BONNE rasade de PINARD. MICHELLE, avec qui il était en MENAGE, passait le BALLET dans les SALLES, tout en surveillant ses POUPIN JUMEAU, COLIN et GERMAIN, qui jouaient du HOCHET.

Plus loin GIRAUD, le BARBIER ROUX - BLANC comme un linge - livrait BATAILLE avec LE GRAND ETIENNE, MARECHAL FERRANT, pour lui faire une COUPPE sans l'ÉCORNÉ avec son outils TRANCHANT, comme la dernière fois où on lui avait DONNET le FERT pour le punir !

Près de la FONTAINE un GAILLARD, nommé PAUL CHIRAC, GUETTÉ LAPORTE de GREGOIRE le BAILLIF. Son NEPVEU HUBERT LAISNÉ avait un PACQUET CARRE pour sa BRU, un CADOS de NOEL : LAMOUREUX offrait un CHASLE à sa BEL amie.

Soudain le MESSAGER du PUISSANT DUC ANCELIN, précédé d'un PETIT PAGE, venu tout droit DUCHATEAU de la HAUTEVILLE, alerta la population : BERTRAND LECLERC, ANTOINE le BOTTIER, ALBERT le BOUVIER : tous s'approchèrent.
"- Le CHATELAIN a décidé LE DILHUIT JUIN année courante que le FELON, le JUDAS, nommé GUIBERT, n'ayant JAMAIS voulu mettre un GENOUST en terre devant le COMTE DAVID sera traîné derrière le cheval de LECUYER, DU GUÉ aux BORIES du MAS BRUN."
Mais le MUTIN s'était déjà BARRÉ ! TOUPLIN de CHEVALIER, VALET et COCHET partirent à sa recherche, DESMAREST DUBOIS DANIEL au GROZ CHASTEAUX, sans le CROISÉ. LE SEIGNEUR SERAIE très fâché.
"- JAY FAY le serment, les mains JOINTE et par LE ROY, de le MOUCHET à vue, lui et tout le pays, DELACOSTE à LAGARRIGUE !"

Le GRANDHOMME REDESSANT du FORTIN en JUILLET tout armé, la BREYSE dans les yeux. LAURENT LE BRETON et ROBERT LANGEVIN plaident pour l'apaisement.
Dans LE VERGER, un MERLE PELÉ PERCHER sur un POIRIER BRANCHU, siffle DESCHAMPS à un PAPILLON. LOISEAU VOLAND a un RAMEAU d'olivier dans le BECOT. L'ire du MARQUIS BAYSSE d'un coup.

En souvenir, SIMON LE PEINTRE immortalisa la scène. Ce que je METAIS décidé à voir, en venant DUPORT en GABARD : la CHARNIÈRE DELAPORTE DUMOULIN ne grinça pas. DURANT un long moment, j'observais LEBEAU tableau, sentant la SEVE de mes ancêtres...


Texte réalisé avec 91 des 1 313 patronymes de mon arbre.