« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

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vendredi 26 mai 2023

Une drôle de vente

Lors de mon séjour aux archives de Rodez, j’ai trouvé une série de document concernant Jean Chivalié, mon sosa 130, charpentier à Conques (12).

 

Tout d’abord une vente passée le 24 avril 1792 devant Me Flaugergues Pierre Paul (3E31 242). Jean Chivalié achète à Pierre Antoine Flaugergues* juge de paix du canton demeurant à la Paraquie, de St Cyprien (commune voisine de Conques), par une « vente pure et simple à titre de propriété irrévocable sans retenues ni réservation aucune […] une maison de haut et bas avec basse court, jardin et cloaque** de l’autre côté de la rue [...] comme aussi des meubles et effets qui sont actuellement dans ladite maison sauf un coffre […] qui se trouve placé à la cave de ladite maison […] avec toutes ses entrées, issues et servitudes [… ], quitte de toutes charges [et sans] hypotheque quelconque ».

Vente Flaugergues-Chivalié, 1792 (extrait) © AD12
Vente Flaugergues-Chivalié, 1792 (extrait) © AD12

 

Le lieu de la maison n'est pas mentionné mais d’après ses confronts il doit s’agir d’une maison à Conques : elle est située entre une rue publique, le fossé de la ville, une grange appartenant au sieur André Baurs et des jardins appartenant à Mr d’Humières et au sieur François Labro.

 

L’acquéreur dit « avoir une parfaite connaissance » que la maison est « en mauvais état ».

Il achète cette maison « moyennant  la somme de onze cent livres ». Pour cela il verse un acompte de 200 livres « présentement payé », sous la forme d’une charretée de vin valant 100 livres que ledit requéreur doit lui délivrer et 100 autres livres « en bonnes espèces de cours » ; les 900 livres restantes à raison de 100 livres par an « le premier terme d’aujourd’hui en un an ainsi à continuer année par année jusqu’à l’entier paiement » avec un intérêt de « trois livres pour cent », taux augmenté à 5% en cas de défaut de paiement.

 

Curieusement, il fait cet achat « pour son ami élu ou à élire » ; cette formulation étrange sera expliquée dès le jour suivant.

 

Le lendemain en effet, 25 avril 1792, il repasse devant le même notaire (3E31 242). Celui-ci le nomme alors Jean Sivalié au lieu de Chivalié (nom qu’il gardera désormais dans tous les actes rédigés par ce notaire). « Ayant acquis par acte du jour d'hier devant nous notaire soussigné une maison jardin, patus***, basse cour et cloaque pour lui ou son ami, de Me Flaugergues de La Paraquie, [il] a par le présent acte élu le sieur André Baurs bourgeois habitant dudit Conques ici présent et acceptant pour recueillir partie de la maison. […] Laquelle dite partie de maison consiste en une cour, chambre, galetas, galerie, jardin, escalier mitoyen ».

André, ou Jean André Baurs est un propriétaire de Conques, alors âgé de 33 ans. Quelques années plus tôt, en 1786, il est dit greffier de la temporalité de la ville (= juridiction du domaine temporel).

 

Donc la maison achetée la veille est revendue pour moitié le lendemain par cet « acte d’élection ». Il n’est pas étonnant de voir, à Conques, des propriétaires de demi-maison. En effet, la ville est établie sur un site en très forte pente : de nombreuses maisons ont un propriétaire pour le haut de la maison, donnant sur une rue haute, et un autre pour le bas, donnant sur une rue basse.

 

« Laquelle dite élection de ladite partie de maison faite moyennant le prix de quatre cents livres »; ledit sieur Baurs a payé « tout présentement » audit Sivalié cent livres « en bonne espèces de cours, compte vérifié reçu et retiré par ledit Sivalié » en présence de témoin, le reste à payer en « 6 termes égaux de cinquante livres chacun le premier desquels en sera d’aujourd’hui et en an ainsi a continuer année par année jusqu’à l’entier et effectif payement » avec un taux d’intérêt de 3%, passant à 5% en cas de défaut de paiement.

 

Différents travaux sont prévus dans cet acte. La questions des écoulements des eaux étant toujours primordiales entre voisins, il est « convenu entre les parties que les eaux pluviales ou autres qui se rassembleront dans la basse cour restante audit Sivalié seront sorties d'icelles au moyen d'un aqueduc construit et entretenu à frais commun desdites parties.

Comme aussi a été convenu que ledit sieur Baurs réparera la porte de la cour qui leur manque [dans] ladite basse cour et fera construire une fenêtre grillée [grillagée] uniquement pour donner le jour et de l'air a ladite cave.

[Il] sera tenu aussi de faire une grille sur la fenêtre de la chambre donnant sur ladite basse cour et [au-dessus de] ladite cave.

De même [il est] convenu que les degrés mitoyen sus énoncés servant d'entrée aux deux parties de maison sera entretenu à frais commun, ainsi que la porte d'entrée. »

 

Comme est clair pour tous que la « porte de maison vendue audit sieur Baurs est en très mauvais état et menace […] ruine […] ledit Sivalié consent que ledit sieur Baurs jouisse de ladite porte de maison ».

 

Trois mois plus tard, le 20 juillet 1792, il revient chez le même notaire pour une obligation (3E31 242). Jean Sivalié se fait prêter 300 livres par le sieur Biart, « prêtre chanoine du chapitre de Conques ». En réalité c’était plutôt un ancien chanoine, les ordres religieux ayant été dissous en 1790 (même si les chanoines ont continué d’assurer leurs fonctions jusqu’en février 1791). Bref, les deux hommes concluent un « vrai et admirable prêt, tout présentement fait audit Sivalié par ledit sieur Biart en bonne espèces de cours » reçu au vu de tous,  notaire et témoins. Somme qu'il promet de rembourser « de jour en jour et à sa volonté toutefois sans intérêt ».

Fait-il ce prêt afin de rembourser la somme due pour l’achat de la maison ? Peut-être. Mon ancêtre devra en tout cas se dépêcher de rembourser ses dettes car l’ex-chanoine, alors âgé d’environ 75 ans, décédera deux ans plus tard.

 

Le 9 septembre 1792, il vient cette fois devant Me Flaugergues (3E31 242) affirmant avoir « reçu du sieur André Baurs bourgeois habitant dudit Conques ici présent et acceptant la somme de trois cents livres pour l'entente [passée] en l'acte du 25e avril dernier retenu par le notaire soussigné ». C’est donc le reste de la dette due par André pour l’achat de la maison.

 

Tous ces protagonistes sont décédés lors de la création du cadastre napoléonien. Mais en analysant les propriétés de leurs descendants j'ai peut-être retrouvé l’emplacement de la maison achetée en 1792 : le fossé de la ville à gauche, la rue, les jardins de Labro et d'Humières au Nord, les bâtiments Baurs, la ruelle. Peut-être que cette maison correspond à la parcelle 102, appartenant à Jean Antoine, le fils de Jean Chivalié ?

Extrait cadastre napoléonien Conques © AD23
Extrait cadastre napoléonien Conques © AD23

 

* Les deux Flaugergues ne semblent pas être de la même famille.
** Réceptacle des eaux sales, des eaux ménagères.
*** Terrain dépendant d'un bâtiment, destiné à ses commodités (cour intérieure…).

 

 

samedi 30 novembre 2019

#ChallengeAZ : Z comme zen

Je me demande toujours si, avant de commencer cet inventaire en 1701, Me Salvetat savait qu’à un moment il allait ouvrir une armoire et tomber sur près de trois cents documents. D’ailleurs tomber est bien le terme : les documents se sont-ils écroulés sur le plancher dès l’ouverture des portes de l'armoire ? Étaient-ils bien rangés ou tous en vrac sans dessous-dessus ? J’aurai aimé être une petite souris pour voir la scène. Me Salvetat a-t-il été aussi surpris que moi ? Ou cette situation faisait-elle partie de son quotidien ?

En tout cas, en ce qui me concerne c’est une situation inédite. J’ai bien quelques ancêtres comptabilisant plusieurs documents notariés mais 400, non !

Ces 400 actes ont été un drôle de cadeau. Et (oserai-je le dire ?) presque un cadeau empoisonné : beaucoup d’informations, mais qui sont restées largement parcellaires. Plus d’une fois je me suis dit « mais où donc ai-je lu ceci ? » sans pouvoir trouver la réponse. J’ai fait tellement de tableaux de synthèse qu’il me faudrait un tableau de synthèse pour en faire la synthèse !

Parfois ce Jean Avalon m’a épuisé… mais céder à la tentation de s’arrêter, de faire une coupure plus ou moins longue est une très mauvaise chose : difficile de reprendre le cours ensuite lorsqu’on a rompu le fil, oublié (ou mélangé) le chemin parcouru. Du coup j'ai été presque "à temps plein" sur cet ancêtre depuis près d'un an !

Vous présenter cette masse d’information n’a pas été tous les jours facile ; j’espère que vous avez pu me suivre et que vous ne vous êtes pas perdu en cours de route.

En tout cas une chose est sûre : si vous trouvez 400 documents pour un seul de vos ancêtres et que vous voulez éviter la crise de nerf, allez vite prendre un cours de yoga pour apprendre à rester zen !

Zen © artmajeur.com

Jean Avalon m'a emmené très loin. Un chemin dont je ne soupçonnais absolument pas l'existence le jour où j'ai découvert son nom pour la première fois. Et maintenant que je crois que je vais m'accorder une petite pause dans la vie de Jean Avalon... Avant d'y revenir sans doute...


vendredi 29 novembre 2019

#ChallengeAZ : Y comme y a encore des questions

Bien sûr il reste beaucoup de questions en suspend… que même 400 documents n’ont pas réussi à résoudre.

  • La première est : pourquoi ? Mais pourquoi tous ces documents pour un simple marchand boucher ?

  • La deuxième : est-ce que les documents que je n’ai pas (encore) trouvés permettraient de répondre à toutes ces questions ?
                   
  • La troisième : est-ce que Jean apparaît encore de nombreuses fois dans les fonds que je n’ai pas dépouillés systématiquement ? J’en ai trouvé une petite vingtaine au hasard de mes recherches mais je n’ai pas fait de fouille méthodique par peur d’être noyée sous la masse. Peut-être que je reprendrai ça, à petite dose, quand je me serai désintoxiquée.

Questions © depositphotos.com

Mais surtout, à travers ces archives, Jean apparaît comme un homme plein de contradictions. J’ai déjà eu l’occasion d’en parler à travers les billets précédents, ainsi :
- Jean est un marchand influent, parfois élu consul de sa ville, traitant avec la bourgeoisie et même les comtes d’Entraygues, mais il ne sait pas écrire. Et il ne sait probablement pas lire, bien qu’il possédât des livres en français et en latin.
- Il s’est fait confisquer un chaudron pour non paiement de la taille par le consul Brunet, mais (pas rancunier) c’est à lui qu’il va confier la tutelle de ses enfants mineurs après son décès.
- Il manie beaucoup d’argent, notamment grâce aux documents notariés, aux maisons, boutiques et domaines possédés, mais il semble vivre chichement, son intérieur comme ses vêtements étant souvent qualifiés de vieillis ou d’usés.
- Il est parfois très patient dans le recouvrement de ses dettes (une quinzaine d’années par exemple), mais il n’hésite pas à faire un procès quand il a décidé de récupérer son dû.

Mais qui était cet homme ???


jeudi 28 novembre 2019

#ChallengeAZ : X comme x ou les oublis des notaires

Je ne veux pas jouer les enfants gâtées, mais parmi les 400 actes de Jean Avalon il y quand même quelques oublis ou lacunes fâcheuses.

Bon je ne parle pas de fonds entiers qui ne sont pas en ligne (mais qui le seront peut-être un jour puisque « seuls » 12 000 registres ont été numérisées alors que la collection départementale en compte plus de 30 000)… Même si pour le moment cela me prive de plusieurs centaines de documents. Il y a aussi quelques années manquantes dans certains fonds en ligne et ce sont plusieurs tranches de vie qui avaient l’air importantes qui se sont évanouies… ce qui m’a bien fait rager ; mais ainsi va la généalogie.

"Je crois que j'ai oublié quelque chose..."

Le notaire responsable de l’inventaire après décès, Me Salvetat, qui a mis plusieurs jours à tout recenser, a laissé passer quelques informations dans sa minutieuse liste : ainsi plusieurs pièces n’ont pas de date, ou bien le nom du notaire a été oublié. Difficile de chercher un document sans date et sans notaire, surtout quand on sait que le fonds notarial de la ville d’Entraygues contient 213 références, allant de un seul à une trentaine de folio (c'est-à-dire de 5 à 40-45 vues en moyenne) juste pour la période qui m’intéresse  (plus de 2 200 pour la totalité du fonds en ligne sur cette ville) ! De temps à autre la pièce n’a pas de résumé ou pas de somme, ce qui brouille ma vue d’ensemble.

Parfois il y a bien ces renseignements, mais je ne trouve pas le document à la date donnée (ni un peu après ou un peu avant, des fois qu’il y aurait eu quelques mélanges).

Une cinquantaine de pièces n’apparaissent pas dans l’inventaire, mais sont citées dans le partage qui a suivi quelques mois plus tard : je ne comprends pas cet oubli (ou cette apparition miraculeuse).

J’aurai aussi bien aimé que Jean garde des documents d’autant précieux pour moi que les registres BMS de son époque sont en grande partie lacunaires : je pense à ses contrats de mariage par exemple, le testament de sa première épouse (si elle en a fait un), les documents similaires concernant ses enfants… Bref, tout un pan de sa vie qui m’échappe. Et ce, malgré 400 actes !


mercredi 27 novembre 2019

#ChallengeAZ : W comme waouh la jolie vaisselle

Dans l’inventaire de Jean Avalon, on trouve un certain nombre de pièces de vaisselle. Là aussi elles illustrent le paradoxe de cet homme, dont j’ai déjà eu l’occasion de parler. 

Ainsi on recense de la vaisselle destinée à des personnes plutôt aisées :
- 2 aiguières en étain
- 14 assiettes dont 4 en étain
- 14 écuelles, dont 12 en étain
- 6 gobelets en étain
- des plats et pots en étain
- 1 étui de noix de muscade
- 1 salière
- 1 petit mortier à piler le sel et autres

Mais on compte aussi :
- 1 vieille bouteille
- 1 courge à tenir le vin
- 1 cuillère de fer
- 3 fourchettes de fer
- un vieux poêlon en fer et trois autres petits aussi en fer, usés
- 1 petite pelle en fer pour la poêle 
- des pots en fer
- 2 seaux de bois cerclés de fer
- 1 méchant et vieux soufflet pour le feu  
- 1 grande pierre à tenir l'huile (jarre ?)

L’éclairage était assez succinct : une vieille lanterne en fer blanc, deux lampes, un chandelier en fer blanc et deux autres en laiton et, plus curieusement, une "petite lampe d’église".

W. Willem Claesz Heda, Nature morte (détail) © hiveminer.com

La vaisselle d’étain est caractéristique des tables bourgeoise du XVIIème siècle. Or Jean possède presque le service complet. Évidemment on n’a pas de détail : ces pièces étaient-elles sculptées par exemple ou toutes simples ? Par contre, elle ne semble pas être en mauvais état, ou cabossées, parce qu’on ne trouve pas la précision usées ou vieillies pour les décrire (comme c'est le cas pour ne nombreuses autres objets de la maison).
La salière était souvent un objet ostentatoire, même si dans le cas présent on ne peut pas l’affirmer par manque de description de l’objet.
Par contre l’étui de noix de muscade est beaucoup plus rare : en effet les épices restent longtemps un produit de luxe et le fait que Jean en possède un « étui » peut laisser supposer qu’il en consomme régulièrement. Était-ce pour lui-même ou pour assaisonner les produits de boucherie ? L’histoire ne le dit pas.

Mais par ailleurs cela ne l’empêche pas d’avoir de la vaisselle en fer (moins chic) et surtout des pièces dites méchantes, usées ou vieilles.



mardi 26 novembre 2019

#ChallengeAZ : V comme vétilleux

Jean Avalon était vétilleux. C'est-à-dire minutieux ascendant procédurier si vous préférez. 

Car s’il n’hésitait pas à faire crédit à ses clients (cf. lettre B), le crédit n’est pas illimité. Ainsi, en 1694, il intente un procès aux héritiers d’un de ses débiteurs à présent décédé, à qui il a prêté « argent, viande de boucherie denrées, pain, vin et autres choses baillés en diverses fois [en 1692 et 1693] pour subvenir aux grandes et urgentes nécessités de la famille a cause du rigoureux temps ». Rappelons que cette époque est le temps des grands froids, des hivers rigoureux et des famines qui s’en suivent. Mais un sou est un sou : et hop, un procès !

Dans son inventaire il se trouve deux « liasses de procès » montrant que Jean a intenté des actions en justice à l’encontre des membres de la bonne société de sa ville d’Entraygues (un avocat par exemple). Il n’y a malheureusement aucun détail sur ces documents : ni date, ni cause, ni somme en jeu (si tel était le cas). On sait seulement que la première liasse contenait 8 pièces, la seconde 19.

Justice © freepik.com

On dénombre également une dizaine d’appointements de condamnation* en faveur de Jean, ou de son épouse, contre diverses personnes de la ville, dont des membres plus ou moins éloignés de sa famille (ou de la mienne !). Pour certaines les procédures sont faites contre les héritiers, les créanciers d’origine étant décédés sans avoir acquitté leurs dettes. Je n’ai hélas pas de détails sur ces affaires : elles sont simplement recensées comme les autres documents conservés par Jean.  Il faudrait que je déménage à Rodez pour aller explorer les séries judiciaires (séries B pour l’Ancien Régime, L pour la Révolution et U pour par la période post-révolutionnaire) afin d’en savoir davantage. Par contre les montants sont généralement indiqués : cela va de 4 livres, pour la plus petite somme due, à un ensemble de pièces qui s’élève à 599 livres à devoir « en argent ou blé ».

Cependant Jean pouvait aussi être visiblement très oublieux de la loi car parmi ses 400 actes, un document le met en cause, lui : c’est la protestation** en 1679. Le consul de la ville proteste contre le non paiement de la taille par Jean Avalon (épisode que j'ai raconté dans l'article A vendre !).

Procédurier comme il l’était, les archives judiciaires ont peut-être gardé d’autres affaires le condamnant lui… mais qui n’apparaissent pas dans son inventaire (et on peut le comprendre). Alors, voyons-nous un seul côté de la médaille ou Jean était-il simplement désireux de récupérer ce qui lui était dû, quitte à en passer par la justice s’il le fallait (ce qui peut être légitime) ?


* Appointement : Jugement qui met fin à un procès.
** Protestation : Déclaration formelle, juridique (devant notaire par exemple), par laquelle on s'élève contre quelque chose qu'on refuse d'accepter.


lundi 25 novembre 2019

#ChallengeAZ : U comme unique

Certains actes sont uniques… par :
  •  le type : on a vu hier à la lettre T que 64 actes sur les 400 trouvés n’apparaissent qu’une seule fois. Cela va d’une rétrocession à un cadastre ou une protestation à « un gros paquet ou liasse de papiers inutiles » (sic).
  • le plus long : celui qui bat tous les records c’est l’inventaire après décès : 64 pages, battant de loin le partage des biens (« seulement » 29 pages) et je ne parle même pas du testament (3 pages).
  • le plus court ne fait qu’une seule page : c’est l’affermage par Pierre Mommaton « d’une sienne boutique située dans la place publique » à Jean Avalon en 1678 pour une durée de deux ans et un montant de quatre livres.
  • le mois : juin 1694, Jean Avalon va huit fois chez le notaire (deux fois le dimanche 6 juin, une le 9, une le 10, une le 15, une le 21 et à nouveau 2 fois le dimanche 27).
  • la comtesse : Blanche de Castrevielhe, épouse De Montvallat, comtesse d’Entraygues et d’autres lieux signe un acte pour mon boucher (elle en signe plusieurs en fait, mais comme c’est la comtesse, elle est unique).
  • la ruche : la signature la plus joliment tournée, avec ruche à la clé, est celle de Me Carrie.
Signature de Me Carrie, obligation de Jean Avalon, 1694 © AD12
  • le fantôme : Jean Avalon, concerné par tant d’actes, est le fantôme de cette sélection car il ne sait pas signer. Jamais je ne le vois…

Enfin, Jean Avalon lui-même est unique ! car compter 400 actes à son actif c’est unique (en tout cas en ce qui me concerne). Unique est ce nombre de transcriptions que j’ai fait pour lui. Mais multiple est le nombre de tableaux que j’ai dû réaliser pour m’y retrouver (classement par dates, par notaires, par types d’actes, par ceux trouvés, ceux qui ne sont pas en ligne, etc…) !


samedi 23 novembre 2019

#ChallengeAZ : T comme types d'actes

A partir des trois actes que sont le testament, l’inventaire après décès et le partage des biens de Jean Avalon, j’ai donc découvert 400 actes. Ils sont très variés : j’en dénombre plus d’une centaine de types différents. Parmi eux 64 ne se retrouvent qu’une seule fois et 18 de plus en deux exemplaires. Certains sont dits « extraits de … » (de vente, de cession, etc…) : est-ce une expression ou est-ce que Jean Avalon ne possédait pas le document en entier ?

Les documents les plus nombreux sont les obligations : 204 au total. Certaines portent une précision type « brassade de bois » ou « pipe de vin », mais cela reste assez rare hormis pour le « chaptail » plus souvent nommé.

« Obligations » de Jean Avalon

Les ventes représentent 35 documents et, en général, on sait de quoi il retourne car le bien vendu est presque toujours précisé (maison, vigne, terre, etc…).

« Ventes » de Jean Avalon

7 documents font référence à des contrats de mariage, 8 à des quittances ou 11 à des liasses de procès et des appointements de condamnation (voir lettre V). Plus rare, on mentionne le cadastre d’Entraygues (rappelons que nous sommes à la fin du XVIIème siècle : Napoléon et son célèbre cadastre n'est pas encore passé par là) ou le « rolle des aumônes » : Jean y apparaît comme donateur, pour deux quarts de seigle ; il ne signe pas (comme d’habitude).



* Le sens d’un mot vous échappe ? Rendez-vous sur la page Lexique de généalogie de ce blog pour le découvrir !


vendredi 22 novembre 2019

#ChallengeAZ : S comme somme

Sur les 400 actes retrouvés concernant Jean Avalon, 63 n’ont pas de somme connue - dans l'état actuel de mes recherches. 25 sont exprimés en natures (bois, blé, vin, etc…), ce que je ne sais traduire en valeur pécuniaire.

Pour ceux que j’ai pu dénicher, la plupart se situe sous les 50 livres (156 actes), un gros tiers entre 100 et 300 livres et près d’une quinzaine au-delà.

En dessous de 50 livres ces sommes correspondent à la vente/l’achat d’animaux, de terres, de legs aux prêtres obituaires de la ville, de « marchandises prises dans la boutique », etc… Ces informations proviennent essentiellement de l’inventaire réalisé après le décès de Jean Avalon et je n’ai trouvé que peu de ces documents d’origine dans les fonds en ligne. Pour beaucoup j’ignore même quel est la raison de la dette/créance.

Au-delà de 100 livres on retrouve la trilogie terres/animaux/viande de boucherie.

La moyenne des sommes connues est de 78 livres (1 415 euros).


Montants des actes concernant Jean Avalon

Parmi ces 400 actes notariés, la plus petite somme connue due à Jean Avalon est de 3 livres, dette contractée par Gaspard Marc pour de la viande « puisée dans la boutique dudit Avalon ». Le notaire et la date ne sont pas connus (c’est un acte « de seconde main » ; pour en savoir plus sur ce point voir la lettre L). Ce qui équivaut à un peu moins de 55 euros.

En ce qui concerne les montant les plus élevés on distingue une dette de 500 livres, d’une part, qui est en fait un agglomérat de dettes dues à l’origine par Benoît Comby, paysan d’une paroisse voisine, et de plusieurs membre de sa famille (père, épouse, oncle). Cette dette est passée de main en main par « transport » depuis le contrat de mariage de Comby fils en 1664 jusqu’à finir par échoir à Jean Avalon en 1693.

Et, d’autre part, un extrait de vente de Pierre Gineston à Jean Avalon, pour une valeur de 750 livres, datée de 1689. Malheureusement l’acte en question n’a pas été trouvé, j’ignore donc ce que mon ancêtre a acheté à son lointain cousin (bien sûr : voyez la lettre G), avocat et digne représentant de la haute société d’Entraygues ; je sais juste que cela concerne « un chay » mais l’acte d’origine recelait sans doute davantage de détails sur cette vente.



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jeudi 21 novembre 2019

#ChallengeAZ : R comme richesse

Jean Avalon fait partie de la bourgeoisie d’Entraygues, est parfois élu consul de sa ville, traite ses affaires avec d’autres bourgeois, voire même la comtesse comme on l’a vu dans les lettres précédentes. Bref, il brasse de l’argent. Mais combien ?

Outre le fait qu’il est difficile de le savoir, il faut choisir un instant T : évidemment sa fortune n’est pas la même au début et à la fin de sa vie.

Si on choisi la fin de sa vie, on voit que dans son testament il lègue à ses enfants la somme de 4 000 livres chacun. A son aînée déjà mariée, il avait donné par contrat de mariage 1 000 livres, des meubles et du linge (dont la valeur n’est pas quantifiée). Ce qui fait au plus bas (sans le mobilier) 10 000 livres pour les dots.

On sait que deux de ses trois enfants nés du premier lit deux sont morts en bas âge. La troisième reste incertaine à cause de lacunes des registres, mais comme elle n’apparaît pas dans son testament on peut supposer qu’elle est décédée avant 1700 ; a-t-elle eu le temps de se marier (et d’être dotée) ? Nous l’ignorons.

Lors du partage de ses biens après décès, quatre lots sont faits (trois pour ses enfants et un pour son gendre), soit un total de 14 295 livres (partie en mobilier/immobilier et partie en obligations).

Ce qui nous fait, avec les dots, 27 295 livres (à minima), soit environ 495 162 euros actuels, légués à ses enfants. N'oublions pas que nous sommes en 1700. Même s'il est difficile d'apprécier le niveau de vie (qui change selon les régions), on peut noter que le salaire d'un ouvrier ou paysan est à cette époque de 100 à 300 livres par an, le revenu bourgeois se situant entre 5 000 et 20 000 livres par an. Une famille de quatre personnes, pour assurer sa simple subsistance, dépensera environ 90 livres. [1] Évidemment les chiffres cités plus haut rendent compte une situation financière à un instant T, pas d'un revenu annuel, que je n'ai aucun moyen de connaître, mais cela nous donne quand même une petite idée du rang que pouvais tenir Jean Avalon.

Richesse © pixabay

Par ailleurs, dans les 312 actes notariés dont le montant est connu, Jean Avalon a brassé 24 499 livres. Somme à laquelle on pourrait rajouter les règlements en nature (bois, blé, récoltes, etc…) mais dont la valeur n’est pas forcément convertie en monnaie et reste donc inconnue. Parfois c’est de l’argent dépensé (lorsqu’il achète une maison par exemple), souvent c’est de l’argent qui vient rembourser une créance !

C’est donc l'équivalent de 444 439 euros qui sont entrés ou sortis de sa poche au cours de sa vie, via les actes notariés. A minima encore une fois.

Si on extrapole (en prenant la moyenne des actes dont le montant est connu, multipliée par 400), ce montant pourrait grimper jusqu’à 31 408 livres, soit 569 776 euros. Mais j’ai peut-être l’imagination un peu fertile…

Bref, si dans l’état actuel de mes recherches il m’est impossible de définir véritablement le montant exact de son « compte bancaire », je crois tout de même pouvoir dire que Jean Avalon était riche.


[1] Source : Jean Sgard : L'échelle des revenus, éd. Garnier frères, 1982


mercredi 20 novembre 2019

#ChallengeAZ : Q comme quinze ans ou plus

Jean Avalon est riche. Mais il n’a pas forcément de monnaies sonnantes et trébuchantes : il s’agit plutôt de monnaie virtuelle (voir l’article d’hier, ce que j’ai appelé la « fortune de papier ») ! Rassurez-vous pas de carte bleue visa master gold, et encore moins de bitcoins, mais des actes notariés : dots, promesses d’achats, obligations, transports, testaments, etc…* C’est sans doute ce qui explique que Jean ait gardé précieusement tous ces documents : c’était sa fortune.

Par exemple, en août 1689, un contrat d’accord portant une dette en faveur dudit Avalon précise que Jean souhaite retirer 60 livres sur les 150 que lui doit Guillaume Puech : celui-ci s’engage à les lui payer sous trois ans.

Mais avoir une créance et se la faire payer, ce n’est pas la même chose. Les débiteurs ne font pas forcément les bons payeurs. Afin de recouvrer ce qu’on lui doit, il existe plusieurs options pour Jean : il peut intenter des procès. J’en compte un certain nombre parmi les liasses de documents inventoriés.

La dette peut être « transportée » sur une autre personne : X doit 40 livres à Jean ; X fait un transport sur Y (qui lui devait lui-même 40 livres à X) et c’est maintenant Y qui doit les 40 livres à Jean ; X est libéré de sa dette. Vous me direz, Jean n’a toujours pas reçu ses 40 livres, mais peut-être que Y sera meilleur payeur que X. C’est pourquoi, parmi les 400 actes recensés, certains ne concernent pas directement Jean, mais X et Y et leur accord d’origine. J’ai recherché ces documents de « deuxième (voir de troisième) main » afin d’en savoir plus sur la nature de l’arrangement originel, en particulier dans le cas de lacunes des fonds notariés.

Pour reprendre l’exemple précédent l’histoire commence en 1685 quand le sieur Vidal de la Coste fait un contrat de cession à Guillaume Puech pour une valeur de 60 livres. En parallèle, toujours en 1685, ledit sieur s’engage à payer à Jean Avalon la même somme. Deux ans plus tard la dette a « glissée » : elle est passée directement de Guillaume Puech à Jean Avalon. Et, visiblement, elle n’est pas encore payée en 1689 puisque Jean la réclame dans ledit contrat d’accord.

Enfin il y a la famille. Quand on ne peut payer soi-même, on fait appel à l’argent de la famille. Ainsi en 1693 Pierre Dangles doit 120 livres à Jean Avalon : il fait une « cession » devant notaire où il transporte les 120 livre sur la dot offerte par Marguerite Campredon, veuve de Jean Louis Lavaur, à Françoise Lavaur sa fille et épouse dudit Dangles. Vous avez suivi ? En fait Pierre se sert de la dot promise par ses beaux-parents pour payer Jean.

Parfois la situation se complique car l’un des débiteurs est décédé. Par exemple en 1694 Jean Belloc transporte les 80 livres qu’il devait à Jean Avalon à prendre sur Louise Franque (sa belle-sœur) veuve de Jean Bosc puisque ledit feu Bosc devait la même somme à Antoinette Franque son épouse. Oui, je sais, moi aussi ça m’a fait un peu mal à la tête quand j’ai épluché tous ces documents et que j’ai dû reconstituer le fil des filiations.

Parfois il faut du temps pour recouvrer sa dette : quinze ans ou plus… Ainsi Antoine Vialade, qui devait 340 livres à Jacques Pervenquieres en 1671, finit par les devoir à Jean Avalon… en 1691 ! L’histoire ne dit pas quand la dette fut enfin réglée.

Longtemps, longtemps... © pixabay

Par ailleurs, quand on hérite de ses parents, on ne reçoit pas (toujours) que des meubles : on peut aussi hériter des dettes. Nombreux sont les documents qui précisent que la somme est due par les héritiers du créancier originel.

Comme on l’a vu hier, la dette est un des fondements des relations sociales et on sait que tout sera fait pour quelle soit payée (les dettes irrécupérables restent finalement assez marginales). Bref, tout vient à point à qui sait attendre…


* Le sens d’un mot vous échappe ? Rendez-vous sur la page Lexique de généalogie (>lien) de ce blog pour le découvrir !


mardi 19 novembre 2019

#ChallengeAZ : P comme pauvreté

L’inventaire après décès de Jean Avalon révèle un intérieur bien triste : il y a assez peu de meubles, la plupart des pièces (mobilier, linge ou vaisselle) inventoriées sont dites vieilles, usées ou « méchantes ». Il n’y a pas de superflu, pas d’objet de décoration (tableaux…), de bijoux… Le lit remplis de plumes et la vaisselle d’étain sont le seul luxe qu’on s’est offert. Autant dire pas grand-chose.

Pauvreté ? © pxhere.com

On ne peut pas dire pour autant que Jean était pauvre, c'est-à-dire qu’il n’avait pas de quoi subvenir aux besoins de sa famille, mener une vie décente. Sans parler de pauvreté chronique, d’une véritable indigence qui mène à la famine et à la mendicité, peut-on parler pauvreté temporaire ? Même si la grande majorité de l’argent détenue par Jean se trouve sous forme d’obligations ou de dettes à recouvrer, son cas n’est tout de même pas comparable à un laboureur dépendant de la qualité et de l’abondance d’une récolte, des liens de servitude vis-à-vis de son propriétaire, bref de ceux qui ne possèdent rien et son t à la merci du moindre « accident de la vie » comme on dit aujourd’hui.

A aucun moment de sa vie Jean en semble être dans une situation de faiblesse, de dépendance, d'humiliation, caractérisée par la privation des moyens, pas plus que de puissance et de considération sociale : argent, relations, influence, pouvoir, qualification technique, honorabilité de la naissance, capacité intellectuelle, liberté et dignité personnelles. Il ne vit pas au jour le jour, n'ayant aucune chance de se relever sans l'aide d'autrui. Cette situation de pauvreté s’applique aux frustrés, aux laissés-pour-compte, aux asociaux, aux marginaux. [1] Or, par les liens qu’il entretient, le statut des personnes avec qui il traite ses affaires, on voit bien que Jean n’appartient pas à cette catégorie de personne, même de façon temporaire.

De plus, même si la moitié de la fortune de Jean ne semble être que de papier, c’est aussi une protection, comme une assurance face aux incertitudes de l’avenir. En effet si la dette peut jouer contre le débiteur (lorsqu’elle ne peut pas être honorée), l’éthique qui entoure ces relations en fait aussi une assurance : même si on met longtemps à payer sa dette (on peut attendre jusqu’au décès de la personne et, s’il le faut, la transférer sur ses héritiers), on a en général l’assurance qu’elle sera bien honorée.

Du coup, ces relations de crédit et de dette sont au fondement de la cohésion sociale. Parce que la dette traverse les générations, parce que la dette n'est assignée sur aucune terre précise, elle est la meilleure assurance contre les crises économiques. Dans cette société d’Ancien Régime la dette est « naturelle » : en ville, commerce alimentaire et loyer sont les sources majeures de crédit (on se rappelle que Jean est boucher et qu’il a lui-même fait crédit de viande). Les historiens estiment que plus de la majorité des hommes et des femmes ne vit qu'en empruntant et en signant des reconnaissances de dettes. [2] Donc, « la fortune de papier » est bel et bien une fortune réelle.

Ce qui nous ramène à l’intérieur bien modeste de Jean Avalon et qui peut surprendre chez un homme qui a possédé plusieurs maisons, boutiques, granges – et même un « domaine » complet – et qui a brassé une certaine masse d’argent. On trouve là une autre contradiction, qui vient s’ajouter à celle de l’instruction (Lettre I) ou des vêtements (Lettre J).


[1] Source : M. Mollat : Les pauvres au Moyen-Age, Hachette, 1978
[2] Source : L. Fontaine : Pauvreté, dette et dépendance  dans l’Europe moderne, Les Cahiers du Centre de Recherches Historiques, 2007


lundi 18 novembre 2019

#ChallengeAZ : O comme ordre

L’inventaire après décès (64 pages) et le partage des biens (29 pages) de Jean Avalon sont les premiers documents où j’ai trouvé recensés des actes notariés. L’inventaire en compte 263, dûment cotés ; le partage 32 de plus (189 sont cités dans les deux documents). Soit 313 actes dans les placards de Jean.

Ordre ou désordre ? © istockphoto.com

Mais si Jean Avalon gardait soigneusement tous les actes le concernant de près ou de loin, on ne peut pas dire que le classement soit sa priorité. En effet il n’y a pas de tri par date, par notaire ou par type de document : tout est mélangé. Ils sont fourrés dans « larmoire haut du susdit garderobe du coste droit », avec « deux vieille napes de table ». Notons au passage qu’il a fallu plusieurs jours pour inventorier tous ces documents.

Je me demande souvent comment faisait Jean : avait-il un ordre "personnel" dans tous ces documents apparemment en vrac ? Et lorsqu'il avait besoin d'un acte précis, savait-il où le chercher ? Ou était-il obligé d'écumer pile après pile pour trouver son aiguille dans la botte de foin ?

Pour ma part, afin de pouvoir traiter cette masse d’information, j’ai essayé de les mettre dans l’ordre : j’ai fait des tableaux et effectué plusieurs types de tris à partir de ceux-ci : par dates, par notaires, etc… C’est ainsi que je me suis aperçue que certains actes se succèdent deux jours de suite (voire même deux par jour parfois) : vous souvenez-vous du calendrier des actes de la lettre F comme fréquence ?

Au fur été à mesure de l’avancée du dépouillement, les tableaux évoluaient : 263 références au début, puis les 313 de la première salve (voir la lettre L), puis 400. Des couleurs pour ceux qui ont été trouvé, dépouillés, pas en ligne… Puis vint le moment où je cherchai une information précise : mais dans quel tableau était-elle déjà ? De quelle couleur ? J'avoue, parfois je me suis laissée déborder, même avec tout l’ordre possible !


samedi 16 novembre 2019

#Challenge AZ : N comme notaires

Jean Avalon n’est pas spécialement fidèle à un seul notaire. En effet, au travers des 400 actes le concernant, on recense six notaires principaux, 64 actes dont le notaire n’est pas cité et une catégorie « divers », c'est-à-dire des notaires qui ne reviennent pas assez souvent pour les prendre en compte dans une catégorie propre (chacun ayant rédigé de 1 à 7  actes seulement) : ces 13 notaires « divers » totalisent 32 actes. 

Synthèses des notaires

Néanmoins, Me Albespy (prénom inconnu) est sans conteste le notaire qui revient le plus souvent, avec près d’un quart des actes à son actif. Il intervient non seulement comme notaire mais aussi comme greffier dans 6 appointements de condamnation et/ou sentences (à moins que ce soit un homonyme : ces actes n’ont pas été trouvés). Cependant cela ne signifie pas que j’ai mis la main sur tous ses actes. En effet, sur le site des archives départementales en ligne, il y a ses minutes de 1676 à 1697, mais avec des lacunes pour les années 1683/1685, 1689 et 1693.Par ailleurs, pour les années présentes, il m’est souvent arrivé de ne pas trouver l’acte recherché.

Me Jean Jacques Salvetat, avec 65 actes, est le notaire que j’ai le plus lu. En effet, il est le rédacteur - entre autres - du testament (3 pages), de l’inventaire après décès (64 pages) et du partage des biens (29 pages) de Jean Avalon. Actif de 1691 à 1718, il couvre les dernières années de la vie de Jean Avalon (décédé pour mémoire en janvier 1701).

Me Laurens (prénom inconnu) est concerné par 55 actes. Malheureusement, je ne l’ai pas trouvé parmi les fonds mis en ligne. Trois Laurens apparaissent : deux à Requista et le dernier à Millau (soit à une centaine de kilomètres de la ville d’Entraygues où réside Jean). Mais il semble bien qu’aucun de ces trois Laurens ne soit celui que je recherche.

Même chose pour Me Miquel dont un est établi à Balsac, un à Lanhac et le dernier à Rodez. Le « mien » serait un Jean, établi à Entraygues et dit décédé lors du mariage de sa fille en 1673.

Me Antoine Soulié (concerné pour 45 actes), actif de 1689 à 1693, est sans doute l’un de mes ancêtres, oncle par alliance de Jean Avalon (il compte plusieurs homonymes, mais les autres sont plutôt dans le commerce).

Enfin, Me Pradel, le dernier des « notaires prolixes », n’apparaît pas du tout parmi les fonds mis en ligne, même si on le trouve régulièrement comme témoin sur différents actes.

On notera au passage que certains notaires sont organisés en études puisque, bien que regroupés sous un même nom, l’écriture peut changer radicalement d’un acte à l’autre, preuve d’une deuxième (ou plus) paire de mains.


vendredi 15 novembre 2019

#ChallengeAZ : M comme mobilier et immobilier

En plus des outils (voir lettre H) l’inventaire après décès de Jean Avalon mentionne le mobilier et l’immobilier qu'il possédait.

Les meubles sont composés de :
- plusieurs « dressoirs à deux armoires », une « garderobe à 3 ou 4 armoire dont une vide », une garderobe fermée à clé et un vieux dressoir ;
- des tables, dont une dite vieille, une longue et une petite table à deux battants (j’ignore la forme qu’avait ce meuble : les deux battants désignent-ils des portes ? ou des plateaux/rallonges ?) ;
- pour s’assoir trois bancs dont un usé, trois tabourets, une vieille chaise, une « chaise à tenir  le sel » qui n’est pas vraiment une assise mais plutôt un coffre où l’on mettait le sel sur lequel on pouvait s’assoir (généralement ce meuble était situé au plus près de la cheminée pour tenir le sel au sec), une vieille « escabete » (escabelle ?) ;
- plusieurs maie à pain et des « madies »*
- dans la cheminée une grande plaque de fer attachée au foyer et une paire de landiers*.
- la literie est composée de « deux lits garnis », un lit rempli de plumes, deux paires de rideaux de lit couleur de musc, une vieille courtepointe verte, deux coussins de plumes, un vieux matelas de laine, plusieurs paires de draps généralement usées ou vieux, « vingt linceuls toille de pays partie demy uzes », un bois de lit sans fond, un vieux tour de lit, un rideau de lit gris, un « mechant carrau [=coussin carré] de plume » ; dans la chambre de madame : une courtepointe rouge, un vieux matelas de laine, deux vieilles couvertes blanches, un coussin de plume, deux bois de lit, un rideau de lit gris, ; au galetas : un méchant bois de lit sans couchette. Cela fait beaucoup de lits, mêmes s’ils sont usés ;

Enfin, le notaire a signalé la présence d’une caisse fermant à clé vide et une autre pleine (essentiellement de draps usés).

En ce qui concerne l’immobilier Jean Avalon possédait une maison, située rue Droite, la petite boucherie dans la même rue (sans doute située au rez-de-chaussée du bâtiment abritant la maison), un « chay » rue Esquerre - aujourd’hui rue du Collège - (un divisé en trois lors du partage, ou trois dans la même rue, ce n’est pas précisé), la « maison Fougalle » située entre la porte supérieure et la rue Esquerre, un cazal*, une grange et une étable rue Del Pourtanel. Estimation de leurs valeurs : 1 321 livres (soit un peu moins de 24 000 euros).

Entraygues, rue Droite © mascoo.com

Pour ce qui des terres, elles sont réparties dans plusieurs paroisses à Entraygues et aux alentours. On y trouve des champs, prés, vignes, nogarettes, chastaignals, une chenevière, des bois, un jardin, un tronçon de couderc, un domaine complet situé dans une paroisse voisine. Estimation des terres : 4 707 livres (soit un peu plus de 85 000 euros).


 Synthèse de l'immobilier divisé en quatre lots, selon le partage des biens de Jean Avalon


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jeudi 14 novembre 2019

#ChallengeAZ : L comme liasses

Si on considère les 400 actes notariés concernant Jean Avalon cela doit représenter quelques liasses d’archives. Et encore : je ne les ai pas tous trouvés, loin de là. Souvent je le regrette, parfois j’en suis heureuse parce que les chercher puis les transcrire n’a pas été une mince affaire et si j’avais trouvé les 400 j’y serai peut-être encore…

En bref, sont cités :
- 263 actes mentionnés dans l’inventaire (dont 189 le sont aussi dans le partage),
- 32 de plus cités uniquement dans le partage,

- par ailleurs, j’en ai trouvé 18 de plus, au hasard des dépouillements des registres (parce que oui, en plus de tout cela je me suis aussi amusée à feuilleter les minutes notariales !),
Soit 313 actes (première salve).

Sur ces 313 actes j’en ai véritablement déniché 53. Ces 53 actes m’ont cités 87 actes supplémentaires (deuxième salve) :
- 82 actes de « seconde main » - actes cités dans les 53 actes dépouillés – dont 4 seulement ont pu être trouvés et transcrits.
- 5 actes « troisième main » - cités dans les actes de seconde main-
Total : 400 actes cités. 57 trouvés et dépouillés.

Origine des actes

Ainsi sur les 400 actes cités, seuls 57 ont été réellement trouvés ; ce qui me laisse de la marge…

Synthèse des 400 actes

Jean avait une copie de la plupart de ces actes : j’aurais aimé savoir comment elles se présentaient, physiquement parlant je veux dire. Étaient-ce des papiers volants entassés en vrac ? Jean avait-il un système de classement (en tout cas l’inventaire après décès les présente sans ordre apparent : ni par date ni par notaire, ni par type, ni par somme) ? Les avait fait-il relier ? Étaient-ils en caisses, en « dossiers » ? Et la question essentielle : pourquoi a-t-il gardé toutes ces liasses d’archives (ou inversement pourquoi les autres ancêtres ne les ont-ils pas conservées eux aussi) ?