« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

mardi 26 novembre 2019

#ChallengeAZ : V comme vétilleux

Jean Avalon était vétilleux. C'est-à-dire minutieux ascendant procédurier si vous préférez. 

Car s’il n’hésitait pas à faire crédit à ses clients (cf. lettre B), le crédit n’est pas illimité. Ainsi, en 1694, il intente un procès aux héritiers d’un de ses débiteurs à présent décédé, à qui il a prêté « argent, viande de boucherie denrées, pain, vin et autres choses baillés en diverses fois [en 1692 et 1693] pour subvenir aux grandes et urgentes nécessités de la famille a cause du rigoureux temps ». Rappelons que cette époque est le temps des grands froids, des hivers rigoureux et des famines qui s’en suivent. Mais un sou est un sou : et hop, un procès !

Dans son inventaire il se trouve deux « liasses de procès » montrant que Jean a intenté des actions en justice à l’encontre des membres de la bonne société de sa ville d’Entraygues (un avocat par exemple). Il n’y a malheureusement aucun détail sur ces documents : ni date, ni cause, ni somme en jeu (si tel était le cas). On sait seulement que la première liasse contenait 8 pièces, la seconde 19.

Justice © freepik.com

On dénombre également une dizaine d’appointements de condamnation* en faveur de Jean, ou de son épouse, contre diverses personnes de la ville, dont des membres plus ou moins éloignés de sa famille (ou de la mienne !). Pour certaines les procédures sont faites contre les héritiers, les créanciers d’origine étant décédés sans avoir acquitté leurs dettes. Je n’ai hélas pas de détails sur ces affaires : elles sont simplement recensées comme les autres documents conservés par Jean.  Il faudrait que je déménage à Rodez pour aller explorer les séries judiciaires (séries B pour l’Ancien Régime, L pour la Révolution et U pour par la période post-révolutionnaire) afin d’en savoir davantage. Par contre les montants sont généralement indiqués : cela va de 4 livres, pour la plus petite somme due, à un ensemble de pièces qui s’élève à 599 livres à devoir « en argent ou blé ».

Cependant Jean pouvait aussi être visiblement très oublieux de la loi car parmi ses 400 actes, un document le met en cause, lui : c’est la protestation** en 1679. Le consul de la ville proteste contre le non paiement de la taille par Jean Avalon (épisode que j'ai raconté dans l'article A vendre !).

Procédurier comme il l’était, les archives judiciaires ont peut-être gardé d’autres affaires le condamnant lui… mais qui n’apparaissent pas dans son inventaire (et on peut le comprendre). Alors, voyons-nous un seul côté de la médaille ou Jean était-il simplement désireux de récupérer ce qui lui était dû, quitte à en passer par la justice s’il le fallait (ce qui peut être légitime) ?


* Appointement : Jugement qui met fin à un procès.
** Protestation : Déclaration formelle, juridique (devant notaire par exemple), par laquelle on s'élève contre quelque chose qu'on refuse d'accepter.


1 commentaire:

  1. De par mon expérience, je pense que ce côté procédurier est assez standard parmi nos ancêtres...

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