« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

samedi 15 décembre 2018

#RDVAncestral : La rencontre

En ce 30 janvier 1734 nous avons eu une frayeur. Louise Merlet, épouse Fortin donne naissance à son quatrième enfant. Déjà, quatre ans plus tôt, elle avait perdu un enfant : baptisé à la maison par la sage-femme ordinaire car en danger de mort, le bébé n’avait pas vécu. Il avait été enterré, sans même recevoir de prénom.

Dans une tragique répétition, l’accouchement auquel j’assiste est très difficile. La sage-femme prend à nouveau la décision de baptiser l’enfant à la maison. L’inquiétude gagne tous ceux qui se serrent dans la petite maison de La Tremblay, près de Cholet.

La sage-femme a emmailloté le nourrisson tandis que des proches s’occupent de la mère épuisée. Elle entre dans la pièce commune avec un paquet de linge dans les bras. Je m’approche : je m’aperçois avec stupeur qu’il ne s’agit pas de linge mais du bébé ! Il est si petit. Il a à peine la force de pleurer. J’ai froid tout à coup. Comme une douche glacée qui coule tout au long de mon échine. Avec mon regard et mon savoir « moderne » je sais ce qui peut arriver aux prématurés du XVIIIème siècle. Mon premier réflexe est de me dire qu’il va passer avant le point du jour. Ne sachant comment être utile, je vais machinalement remettre une bûche dans la cheminée.

Mais rapidement je me rends compte que les autres personnes présentes dans l’assistance ne partage pas mon angoisse. Eux, ils sont dans l’espoir. Certains prient à voix basse. D’autres se joignent dans une communion de confiance. C’est le cas, et je le remarque maintenant, d’André et de Marguerite. André se nomme Fortin lui aussi, comme le père de l’enfant, mais je ne sais pas s’ils ont un lien de parenté. Marguerite est la nièce de la nouvelle accouchée et porte le nom de Coeffard.

Tous les deux n’ont cessé de se rapprocher aux cours des heures passées. André est toujours près de Marguerite. Prévenant, il lui a apporté un châle quand elle a eu froid, un morceau de pain quand elle a eu faim… De timides sourires de part et d’autres ont été échangés. Tout en pudeur et en discrétion.

Marguerite, la cousine du nouveau-né donc, a depuis longtemps été choisie pour être la marraine du bébé. J’ai pu parler un peu avec elle et elle se faisait une joie d’avoir été élue pour occuper ce rôle primordial dans la vie de ces hommes et de ces femmes du XVIIIème siècle. Mais va-t-elle pouvoir occuper ce rôle pendant longtemps ? Le doute est permis.

J’ai tenté d’en savoir plus sur André, intrigué par son paronyme, identique à celui de François, le nouveau père du jour : sont-ils frères ? Cousins ? Au moment où Marguerite Merlet épouse Coeffard, sœur de Louise et mère de Marguerite (vous me suivez ?), allait me répondre, nous avons été interrompues, le dénouement de la naissance étant proche. Je n’ai donc pas pu satisfaire ma curiosité.

Finalement le bébé est né. Mais fragile. D’où la décision de la sage-femme. D’un sac en toile, elle sort les instruments nécessaires au baptême du fragile nouveau-né : une bible, un crucifix, un cierge, un bassin propre, un linge et une fiole d’eau bénite. Les parrain et marraine sont invités à se rapprocher. Le cierge allumé leur est donné. Ce sont André et Marguerite (la jeune). André se tient près de Marguerite, un peu plus que nécessaire peut-être… Le bébé est vivement démailloté. Respirer semble l’épuiser. Il ne pleure toujours pas. Seuls ses petits points sont crispés. La sage-femme est expérimentée : la cérémonie est expédiée hâtivement, mais sans oublier aucune étape nécessaire au salut de cette âme fragile. La sage-femme s’adresse au parrain :
- Nommez cet enfant.
- Je le nomme André.
Elle verse par trois fois l’eau bénite sur le front de l’enfant, tout en faisant un geste de croix. L’eau versée sur la tête de l’enfant tombe dans le bassin : la sage-femme veille à la jeter dans le feu après la cérémonie, avec le linge qu’elle a utilisé pour essuyer la tête du nouveau-né. Elle termine en prononçant les paroles sacramentelles : « Je te baptise au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit ». Et adroitement emmaillote le bébé à nouveau avant de le rapporter à sa mère.

Georges de la Tour, Le nouveau né © reproduction-grands-peintres.com

Je remarque que pendant cette cérémonie un peu particulière André a regardé davantage la marraine que son filleul. Tiens ? Une histoire commencerait-elle ?


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Retour de nos jours : j’épluche les registres de baptêmes. Je trouve celui d’un autre bébé nommé André Fortin, en 1741. Il est le fils d’André Fortin et de Marguerite Coeffard – et mon ancêtre direct. Les deux protecteurs spirituels du premier bébé André ont donc finit par se marier.

Se sont-ils rencontrés au baptême de 1734 ? Etaient-ils déjà mariés ? Hélas des lacunes dans les registres ne me permettent pas de répondre à cette question. Ils semblaient proches mais était-ce juste l’effet de cette cérémonie particulière et éprouvante ou est-ce que cela datait déjà d’avant ? Un des nombreux mystères généalogiques que je ne suis pas en mesure de résoudre pour l’instant…


jeudi 6 décembre 2018

#Centenaire1418 : 5 ans de guerre

De juillet 2014 à novembre 2018 j'ai suivi le parcours "pas à pas" de mon arrière-grand-père Jean-François Borrat-Michaud pendant la Grande Guerre. Tous les jours j'ai tweeté sa guerre sur le compte @jfbm1418, ou du moins ce que j'ai pu en reconstituer (ou imaginer un peu quand les sources me faisaient défaut !); publications rassemblées tous les mois sur ce blog.

Je lui ai aussi dédié le ChallengeAZ 2018 : une autre façon de témoigner des événements qu'il a vécu il y a 100 ans.

En ultime hommage, je publie cette synthèse des 5 années qu'a passé Jean-François sous les drapeaux :


Les flèches vous permettent de naviguer à votre guise. Vous pouvez mettre en plein écran cette animation interactive en cliquant sur les trois points en bas à droite.


vendredi 30 novembre 2018

#ChallengeAZ : Z comme zombie

Lien vers la présentation du ChallengeAZ 2018
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Septembre 1919

Le jour de la victoire me paraît tellement loin : 10 mois déjà. Et pourtant il m’a fallu encore servir mon pays, rester sous les drapeaux, tandis que les autres repartaient chez eux petit à petit. L’attente, l’envie de revenir au pays, de revoir les miens. Et en même temps la crainte paradoxale de retrouver une vie « normale ». Combien de temps encore, en entendant un bruit, un claquement, je me jetterai au sol, les mains protégeant ma tête, rempart ridicule contre un obus qui ne tombera pas ?

Et puis enfin le jour de la libération : le 13 septembre je reçois mon ordre de démobilisation officiel. La première partie du voyage dans un wagon à bestiaux. Une bête pendant 5 ans j’avais été, une bête je restai. L’amertume était dans mes bagages.

La fin du voyage fut plus confortable, dans un véritable train de voyageurs. J’aurai pu descendre du train à la gare de Samoëns, mais je suis descendu à la station précédente : j’avais besoin de marcher un peu seul. De respirer à nouveau l’air de mon pays. De voir apparaitre, petit à petit, l’ombre bienfaisante du Criou surplombant de son sommet protecteur la ville de mon enfance. De mon innocence.

Retour à Samoëns...

J’étais vivant.
Après tout ce que j’avais vécu, j’étais vivant. Alors que tant d’autres étaient morts. Je n’arrivais pas à y croire…
Je me sentais étrangement léger : pour une fois que je marchais sans barda complet sur le dos, seul et non en colonne, et la vie au bout du chemin…

Est-ce que j’ai été chanceux ? Ou était-ce seulement le hasard ? Dans ma tête tout se mélangeait : le bruit assourdissant des canonnades et celui des chansons joyeuses des soldats, la boue des tranchées et le bien-être d’une douche après plusieurs semaines passées en premières lignes. Les horreurs que j’ai vécues se voient-elles sur mon visage ? Ne vais-je pas effrayer ma mère et mes sœurs ? Ai-je l'air d'un zombie ou ai-je repris figure humaine ? Comment dire mes cauchemars : le bruit des obus, les cris dans les tranchées ?
Que reste-t-il de l’enthousiasme des premiers jours de la guerre ?

Autour de moi, tout m’étonne : les arbres debout et non pas fracassés, la verdure, les maisons couvertes de leur toit, les oiseaux qui chantent.

Tout en cheminant je respire de grandes goulées d’air pur. Pas de risque de s’intoxiquer ici. Pas d’odeurs nauséabondes de cadavres pourrissant. Je me prends la tête entre les mains : il faut arrêter de penser à tout cela. C’est fini maintenant !

J’aperçois enfin le clocher, celui-là même qui a sonné le tocsin, annonçant la folie sur la terre, un jour d’été. Brisant mon enfance.

Enfin à la maison ! Une boule de chagrin immense m’oppresse. Un lourd sanglot crève dans ma gorge.
Au dernier moment, je n’ose pas rentrer et me couche près de la haie. Je me laisse aller à cette tristesse trop lourde qui me dévaste.
Je pleure longtemps, sans bruit, bouleversé d’avoir retrouvé le monde qui m’avait vu heureux, avant, et que je croyais avoir perdu à jamais.
On m’a jeté dans un enfer que je ne méritais pas. C’est ce qui me blesse le plus : cette injustice qui m’a été faite.
Quand la peine et la douleur accumulées depuis si longtemps se sont taries, je peux enfin me relever.

J’hésite toujours à entrer. Je me sens sale, souillé jusqu’aux os, incapable de me réinstaller dans ce monde si paisible. Si différent de celui que je viens de quitter. Devant la fontaine, je me débarbouille. Par habitude, je vérifie qu’il n’y a pas de cadavre flottant dans l'eau. Je respire un peu mieux quand je réalise qu’il n’y en a pas dans ces lieux protégés.

Je pousse finalement la porte de la maison. L’émotion est si grande de me retrouver là que je ne sais même plus si c’est un silence ému ou des cris de joie qui m’accueillent. Peut-être les deux.
Enfin je peux embrasser ma mère et mes sœurs, mais j’ai peur de goûter le sang de la bataille dans leurs baisers et de voir dans leurs rires le crâne des morts.

Le soir, à table, ma mère me demande :
- Alors ces Allemands, à quoi ils ressemblent ? Ils sont si vilains qu’on le dit ?
- Ils ressemblent à tout le monde, que je réponds.
- Bon ! Soupire-t-elle. 
Elle n’en demandera pas plus et tant mieux. Elle a retrouvé son fils, c’est tout ce qui compte. Et puis quoi lui dire ? Comment décrire l’indicible ?

Il m’a fallu plusieurs jours pour reprendre pied dans l’univers silencieux, protégé du village.
Plusieurs jours pour perdre l’habitude de rentrer la tête dans les épaules et d’attendre l’obus qui va tomber.

Pour se débarrasser de l’expérience de l’absurdité de la mort de masse, de l’impossibilité de faire son deuil en l’absence de corps à enterrer et de tombe où se recueillir, d’un sentiment d’intense culpabilité comme si je vivais à la place d’un autre, grâce au sacrifice d’une autre vie.

C’est la fin de la guerre mais est-ce pour autant que les villes et villages détruits vont renaître ? Est-ce que les mères vont sécher leurs larmes ? Est-ce que les orphelins vont cesser d’être orphelins, les veuves d’être veuves ? Est-ce que les cauchemars vont cesser ? Ces cris d’une violence interminable qui me jettent au bas du lit sans pouvoir me réveiller vont-ils cesser ?
Comme un enfant il faut tout réapprendre. Il faut se dépouiller de son identité de soldat, si chèrement acquise, et reprendre sa place de la vie civile ; faire le deuil de ses amis disparus, déchiquetés sous ses yeux ; accepter la compagnie des vivants : ceux qui n’ont pas connus les combats et qui savent encore ce que rire et danser signifie.

La paix est là, on ne tue plus. Après cinq ans d’attente, de peine, d’ajournement et de terreur, la voilà. Sommes-nous dignes d’un tel bonheur ?

J’espère en tout cas qu’on pourra dire que c’est la fin de toutes guerres. La Der des Der.


jeudi 29 novembre 2018

#ChallengeAZ : Y comme ypérite

Lien vers la présentation du ChallengeAZ 2018
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L’ypérite est un gaz chimique infligeant de graves brûlures, notamment aux yeux, à la peau, aux lèvres, aux poumons. Il peut traverser les vêtements et les chaussures. Ce gaz peut être mortel, mais il est surtout fortement incapacitant, notamment à cause des lésions importantes infligées au niveau respiratoire qui peuvent rester incurables.

Expérimenté pendant la Première Guerre mondiale, il connaîtra une belle carrière puisqu’on l’a utilisé aussi pendant la Seconde, des conflits coloniaux ou au Moyen-Orient. On l’appelle aussi « gaz moutarde ». Ce nom lui vient du fait que, sous une forme impure, il avait une odeur proche de celle du célèbre condiment de Dijon. Mais pendant la Première Guerre Mondiale on le nomme rapidement « ypérite » car il a été utilisé pour la première fois par les Allemands dans le secteur de la ville d’Ypres en Belgique en avril 1915. Ce jour-là, poussé par le vent, le nuage jaune et verdâtre dérive vers les lignes alliées. Chez les Français, c'est la débandade, les corps de centaines de soldats asphyxiés se mêlent aux milliers d'agonisants. Cette première attaque aux gaz intoxique des milliers de soldats qui mourront dans les heures suivantes. 

Attaque au gaz © icrc.org

Rapidement, différents types de masques seront mis au point, tant côté alliés qu'allemand, de même que des systèmes de veille et d'alerte, et les attaques seront de plus en plus coûteuses et de moins en moins efficaces, à quantité de gaz et munitions égales.

Les premiers essais de ce gaz datent du XIXème siècle, notamment par des chimistes travaillant pour l’entreprise allemande Bayer. Ayant constaté son efficacité, les Français ne furent pas en reste et mirent au point un procédé qui permettait d’en fabriquer… trente fois plus rapidement que le produit allemand. 

L'usage des gaz « vénéneux » suscitera bien l'indignation de nombreux groupes et personnalités dans tous les camps, néanmoins la course aux armements se traduira par une production continue et massive d'armes chimiques de ce type. Il faudra attendre 1993 pour que soit signée la Convention sur l'interdiction des armes chimiques visant l'interdiction et la destruction de ces armes… Sans grand effet toutefois comme on peut le voir aujourd’hui encore régulièrement aux informations.

D’après les sources compulsées, Jean-François a rarement eu l’occasion d’être confronté aux gaz. On ne trouve en effet ce type d'attaque particulière que rarement au cours de ses campagnes :

- Le 31 août 1915 Jean-François combat avec le 23ème BCA au Combekopf, un massif des Vosges. Lorsque tout à coup (extrait du "pas à pas" d'août 1915) :
« Soudain un obus est tombé tout près avec un bruit mou, très différent du vacarme habituel.
On a aussitôt ressenti des démangeaisons dans le nez, puis la gorge.
- Les gaz ! Les gaz !
J’ouvre rapidement mon sac et trouve le masque placé sur le dessus, comme c’est recommandé.
D’autres mettent plus de temps à le trouver et le fixer. On les entend crier, suffoquant sous la brûlure des poumons.
Ils s’étouffent sur place, sans qu’on puisse les secourir.
Jusqu’à la nuit c’est un bombardement puissant sur toutes nos positions de première ligne, positions arrière et jusqu’aux camps éloignés qui subissent aussi l’effet des obus asphyxiants.
Vers 17h l’ennemi attaque. Il emploie des liquides enflammés et les gaz asphyxiants.
Nous apprenons dans la suite qu’il nous a enlevé une tranchée au Col du Linge. » [1]
Le JMO du 23ème indiquera à cette date « Pertes : 8 tués, 11 blessés, 1 disparu ».

- Le 13 octobre 1917 dans les tranchées de la Marne.

- Le 22 décembre 1917 sur le front italien.

- Le 18 juin 1918 sur le plateau au-dessus de Cerfroid (Aisne). 

- Le 5 juillet 1918 un obus à ypérite tombe sur la popote des officiers, aux pieds du Chef de Bataillon. Le masque est gardé toute la nuit au poste de commandement. La désinfection du terrain et du matériel sont exécutés le lendemain au petit jour. Le Chef de Bataillon de Fabry-Fabrègues est évacué pour brûlures, ainsi que 9 gradés ou Chasseurs.

- Le 21 août 1918, alors qu’il se trouve dans la Somme, dans le secteur de Montdidier, le JMO indique : « Pendant la nuit tirs de harcèlement par obus toxique et explosifs. Toute la région est ypéritée. Journée calme. Faible activité de l’artillerie ennemie, mais nous constatons que partout l’infanterie ennemie reste vigilante. »

On notera qu’entre temps, le verbe « ypériter » est passé dans le vocabulaire courant, alors qu’en 1915 on disait simplement gaz asphyxiant, obus à ypérite ou « hypérite » (sic).

Pendant longtemps ma mère a cru que son grand-père avait été gazé car, lorsqu’elle allait le voir (elle avait une dizaine d’années et lui un peu plus de 60), il restait toute la journée à regarder par la fenêtre, sans bouger pendant des heures. Or, d’après mes recherches, non seulement il n’a été que très peu confronté à ce type d’attaque mais d’autre part, après la guerre, il deviendra camionneur et déménageur, ce qui ne correspond guère avec les séquelles provoquées par le gaz. Cependant, nous ne saurons jamais à quoi il pensait toute la journée, le regard dans le vide. Ses vieux démons l’auraient-ils rattrapés ?

[1] Version légèrement romancée, mais basée sur des témoignages de soldats donc fortement probable.