« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

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jeudi 31 décembre 2015

#Centenaire1418 pas à pas : décembre 1915

Suite du parcours de Jean François Borrat-Michaud : tous les tweets du mois de décembre 1915 sont réunis ici. 

Ne disposant, comme unique source directe, que de sa fiche matricule militaire, j'ai dû trouver d'autres sources pour raconter sa vie. Ne pouvant citer ces sources sur Twitter, elles sont ici précisées. Les photos sont là pour illustrer le propos; elles ne concernent pas forcément directement Jean François.

Les éléments détaillant son activité au front sont tirés des Journaux des Marches et Opérations qui détaillent le quotidien des troupes, trouvés sur le site Mémoire des hommes.

Toutes les personnes nommées dans les tweets ont réellement existé.
___ 


1er décembre
Séjour à Arnould.

Carte Gaschney-Anould
Ordre de bataillon n°93 : nomination.

2 décembre
Séjour à Arnould.
Ordre de bataillon n°94 : cassation.

3 décembre
Séjour à Arnould.

4 décembre
Séjour à Arnould.
Ordre de bataillon n°95 : rétrogradation.

5 décembre
Séjour à Arnould.

6 décembre
Séjour à Arnould.
On apprend que le repos est déjà terminé : départ demain avant l’aube.

7 décembre
Le bataillon quitte Arnould entre 6h et 6h30 et fait étape en automobile jusqu’au Collet.
Etape à pied du Collet à Gaschney où le Bataillon bivouaque et passe l’après-midi et la nuit.

8 décembre
Le Bataillon quitte Gaschney vers 7h et fait étape jusqu’à Mittlach où il cantonne jusqu’au soir.
A la nuit il relève dans le sous-secteur de Metzeral le 7e Bataillon de Chasseurs.
Trois compagnies sont en 1ère ligne : 1 en section au Camp Girard, 2 en réserve à Mittlach.

9 décembre
Aucune note pour ce jour.

10 décembre
Echange de quelques grenades vers 19h.
Un Boche très jeune portant une casquette a été tué sur le parapet de la tranchée ennemie.
Perte : 1 blessé par balle.
Ordre de bataillon n°96 : nominations.

11 décembre
Aucune note pour ce jour.

12 décembre
Journée assez calme.
Dans la matinée l’ennemi envoie quelques obus sur nos tranchées.
Perte : 1 Chasseur blessé par balle.

13 décembre
Pour réagir à l’action efficace d’un tir de notre artillerie, l’ennemi envoie sur nos tranchées du Kiosque environ 25 bombes et une dizaine d’obus.
Pertes : 2 Chasseurs blessés par éclat d’obus.
Ordre de bataillon n°97 : décorations.

14 décembre
Dans la journée activité par l’artillerie ennemie. De 14h à 15h arrosage de la région de Metzeral Est et Sud.
Dans la nuit échange assez vif de coups de fusil et de grenades.
Un avion boche (biplan DFW) venant de Kahlenwasen s’est dirigé dans la matinée vers Metzeral où il a lancé 3 bombes.
Biplan allemand DFW © akpool.fr.

15 décembre
Lutte assez vive de grenades et d’engins de tranchée dans la région du Kiosque.
Perte : 1 Chasseur blessé.
Ordre de bataillon n°98 : nominations et affectations.

16 décembre
Dans la matinée l’ennemi bombarde nos tranchées du Kiosque (20 obus de 105 environ).
Perte : 3 Chasseurs blessés par balle.

17 décembre
Entre 14h et 15h30 l’ennemi bombarde nos tranchées de la région du Kiosque.
Perte : 2 Chasseurs blessés par balle, 5 par éclat d’obus.

18 décembre
Journée et nuit calmes.
Un biplan boche survole dans la matinée la cote 664 : notre artillerie tire et il s’éloigne.
Perte : 1 Chasseur blessé par éclat de grenade.
Ordre de bataillon n°99 : nomination.

19 décembre
Dans la région du Kiosque et de 664 échange de grenades à fusil.
Perte : 1 caporal blessé par éclat de grenade.

20 décembre
Journée et nuit calmes.
Aucun événement à signaler.
Perte : 1 Chasseur blessé par balle.

21 décembre
L’ennemi lance plusieurs grenades à fusil sur nos tranchées de 664.
Ordre de bataillon n°100 : décoration.

22 décembre
J’apprends le décès de Jean Baptiste Menage, un copain du Bataillon, il y a 4 jours à l’hôpital de Gérardmer.
Vers 15h les boches bombardent nos tranchées du Kiosque et de 664.
Notre artillerie riposte sur les emplacements présumés de minenwerfer et de mitrailleuses à l’Est du Kiosque.
Devant les positions de Meryersbühl des mouvements sont aperçus dans la matinée (hommes espacés avec armes et bagages).
On voit se croiser environ 2 sections, probablement en cours de relève. Notre artillerie renseignée envoie des rafales.
Dans le sous-secteur de l’Oder on aperçoit des boches vêtus comme des chasseurs et coiffés de bérets ( ??) ; ils sont dispersés par le feu des sentinelles.
Perte : 1 chasseur tué d’une balle à la tête.
Ordre de bataillon n°101 : nominations.
Minenwerfer et servants © arbrebaz.fr

23 décembre
De notre tranchée du Kiosque on remarque une circulation assez active dans Muhlbach.
Le commandant du 53e bataillon confirme que des boches vêtus en chasseurs et coiffés de bérets gris ont été vus dans la région.

24 décembre
Journée et nuit calmes.
Aucun événement à signaler.
Perte : 1 Chasseur blessé.
C’est déjà le deuxième Noël loin des miens. On tâche de trouver un sapin pour la fête.
Soldats coupant un sapin, Noël 1914 © Gallica

25 décembre
Journée et nuit calmes.
Aucun événement à signaler.
Perte : 1 Chasseur blessé (éclat de grenade).
Ordres de bataillon n°102 et 1031 : rétrogradation et nominations.
Ce fut une réunion des plus gaies et des plus cordiales.
Noël 1915 © aquarelle E. Gabard

26 décembre
Journée et nuit calmes.
Aucun événement à signaler.

27 décembre
Vers 12h l’ennemi envoie sur le camp Girard une vingtaine d’obus de 77 et 105 sans produire de grands dégâts.
Entre 14h et 15h30 il bombarde violemment nos tranchées de 664 par une trentaine de projectiles de gros calibre.
Les tranchées sont sérieusement endommagées.
Pertes : 1 Chasseur tué ; 6 chasseurs blessés.
Ordre de bataillon n°104 : citation.

28 décembre
Vives actions d’artillerie dans la journée et dans la nuit de notre part sur l’Illienkopf. L’ennemi riposte sur 664 et ne produit que peu de dégâts.
Pertes : 1 sergent et 2 Chasseurs blessés.

29 décembre
L’ennemi bombarde sérieusement Metzeral par obus de gros et petits calibres pendant la journée et une partie de la nuit.
Le bombardement est particulièrement violent de 10h15 à 12h30 ainsi qu’à 20h.

30 décembre
De 10h à midi les tranchées de 664 du mamelon intermédiaire et du Kiosque sont soumises à un sérieux à un sérieux bombardement d’obus de gros calibres. Les tranchées subissent de nombreux dégâts. Les mitrailleuses boches battent les brèches.
Bombardement intermittent pendant le reste de la journée et de la nuit.
Perte : 1 sergent et 6 Chasseurs blessés.
Plus de 20 000 hommes ont disparu sur ces terres lors des combats de 1915. Combien en faudra-t-il encore ?

31 décembre
Journée et nuit calmes.
Aucun événement à signaler.
Perte : 1 Chasseur tué, 4 blessés.




Source complémentaire :

"Journal résumé de la guerre 1914-1918", par Jean Pouzoulet, caporal au 23e Bataillon de chasseurs alpins, AD Hérault
 

lundi 30 novembre 2015

#Centenaire1418 pas à pas : novembre 1915

Suite du parcours de Jean François Borrat-Michaud : tous les tweets du mois de novembre 1915 sont réunis ici. 

Ne disposant, comme unique source directe, que de sa fiche matricule militaire, j'ai dû trouver d'autres sources pour raconter sa vie. Ne pouvant citer ces sources sur Twitter, elles sont ici précisées. Les photos sont là pour illustrer le propos; elles ne concernent pas forcément directement Jean François.

Les éléments détaillant son activité au front sont tirés des Journaux des Marches et Opérations qui détaillent le quotidien des troupes, trouvés sur le site Mémoire des hommes.

Toutes les personnes nommées dans les tweets ont réellement existé.
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1er novembre
Dans le sous-secteur de Blancrupt les boches envoient sans résultat plusieurs bombes sur l’un de nos postes.

Une batterie ennemie de gros calibre tire 34 obus sur notre poste de Seraphin Henry.
Un de nos blockhaus est démoli sans qu’il y ait perte d’hommes.
Ordre de bataillon n°80 : attribution de la médaille militaire à deux soldats amputés suite aux combats.

2 novembre
Journée et nuit calmes dans les deux sous-secteurs. Aucun événement à signaler.
Un mois et demi que nous sommes dans ce secteur. Un mois et demi d’accrochages avec l’ennemi qui est là, tout proche.
Nous n’avançons pas. Nous ne reculons pas non plus. Mais combien de temps ça va durer comme ça ?

3 novembre
Dans le sous-secteur de Noirrupt les boches envoient dans la journée quelques obus sur la lisière du bois de Noirmont.
Nous faisons face au froid : la neige est déjà épaisse à cette époque de l’année.
Perte : 2 chasseurs blessés.
Ordre de bataillon n°81 : citations.

4 novembre
Journée et nuit calmes dans les deux sous-secteurs. Aucun événement à signaler.
Ce soir notre section va en renfort au-dessus de la Roche du Pin, sous la conduite d’un guide à travers la neige. Je suis en sentinelle double en avant des fils barbelés à 50m de nos tranchées dominant le grand ravin. Il y a bien 50cm de neige à cet endroit. Le matin, à la pointe du jour, nous devions nous retirer dans la tranchée par la chicane traversant le réseau. Mais pendant nos heures de factions, la neige tombée en abondance avait effacé la piste conduisant au passage des barbelés et impossible de pouvoir repérer l’endroit ! Le jour arrivait à grand pas et sur la neige avec nos costumes bleus foncés nous allions être vus de l’ennemi et tués comme des lapins. Enfin, à force de temps et à notre grande joie, on a trouvé le passage. Il faisait jour depuis un moment. Les boches devaient dormir et être engourdis par le froid, négligeant la surveillance des lignes (nous l’avons échappée belle). [ 1 ]
Bataille des Vosges © Delcampe
Pertes : 1 sous-lieutenant légèrement blessé à la tête et 4 chasseurs blessés.

5 novembre
Notre artillerie atteint d’un obus le clocher de la chapelle de Creux d’Argent.
Journée et nuit calmes.

6 novembre
Journée et nuit calmes dans les deux sous-secteurs. Aucun événement à signaler.
Ordre de bataillon n°82 : affectation.

7 novembre
Journée et nuit calmes dans les deux sous-secteurs.
Dans la nuit le 23ème Bataillon est relevé par le 30ème Bataillon de Chasseurs. Le mouvement s’effectue sans incident.
On est de retour à Gaschney : on retrouve notre bivouac de l’été dans le bois (mais cette fois sous la neige !).
Chasseurs 7ème BCA © Histoirémilitaria

8 novembre
Séjour du Bataillon à Gaschney.
Ordre de bataillon n°83 : citations.

9 novembre
Séjour à Gaschney.
Dans la nuit le Bataillon relève au sous-secteur de Braünkopf le 24ème Bataillon de Chasseurs.
Le mouvement se termine à 20h30 sans incident.

10 novembre
Journée et nuit calmes. Aucun événement à signaler.
Nous avons fait l’expérience des chiens sentinelles : un chien-loup de forte taille est dressé à cela devait avertir l’approche d’un ennemi ou d’une patrouille en grommelant doucement et prenant air agressif. Les postes les plus dangereux avec un champ de vue limité par la broussaille ou tout autre obstacle lui était affectés. Cela faisait surtout un emploi envié par tous pour la garde le jour de l’animal. Quelque temps après tout cela fut supprimé n’ayant sûrement pas obtenu le résultat désiré.

11 novembre
Journée calme.
Dans la nuit l’ennemi tire quelques coups de feu sur nos tranchées. Ces coups proviennent des maisons de Rospel.

12 novembre
Ordre de bataillon n°84 : nominations et mutations.

13 novembre
Journée et nuit calmes.
Des bruits de travaux ennemis sont entendus dans le Bois Noir.
Entre 3h et 3h30 un charroi de véhicules boches se fait entendre dans Muhlbach.

14 novembre
Journée et nuit calmes.
Aucun événement à signaler.

15 novembre
Journée et nuit calmes.
A 11h45 trois avions boches survolent nos lignes.
L’un d’eux vole très bas et lance quatre bombes sans résultat à proximité de nos tranchées de première ligne de la route de Muhlbach.
Ordre de bataillon n°85 : rétrogradation et mutation.

16 novembre
Journée et nuit calmes.
Aucun événement à signaler.
Ordre de bataillon n°86 : citations.

17 novembre
Dans la nuit l’ennemi tire à plusieurs reprises sur nos travailleurs sans les atteindre.
Il est constaté que les boches travaillent de nuit à Looch.
Vers 18h30 on entend plusieurs coups de mines dans le Bois Noir.
Ordre de bataillon n°87 : nominations.

18 novembre
Journée calme.
A la nuit une patrouille boche sort du Bois Noir et se dirige vers nos lignes. Elle est aussitôt dispersée par notre feu.
Ordre de bataillon n°88 : citations.

19 novembre
Journée et nuit calmes.
Installation dans nos tranchées de deux batteries de fusils. Travaux de sapes et aménagement des boyaux.
Ordres de bataillon n°89 et 90 : affectations et cassation du sergent Ours pour négligences répétées.

20 novembre
Journée calme.
Dans la nuit deux paquets de cartouches sont tirés avec la batterie de fusils. Une rue de Muhlbach est prise comme objectif.
On matin on observe un charriot chargé abandonné au point où le tir était dirigé.
Perte : 1 sergent légèrement blessé.
Ordre de bataillon n°91 : décoration
Muhlbach, 1919 © Gallica

21 novembre
Dans la journée l’ennemi envoie 10 obus de 77 sur nos tranchées de la rive droite de la Fecht.
Au Braunkopf un abri d’escouade est démoli par un obus qui n’occasionne aucune perte en homme.
Perte : 1 chasseur blessé.

22 novembre
Vers 10h l’ennemi bombarde le Braunkopf avec des obus de 105.
Un obus éventre notre abri à munitions qui contient la réserve des trois compagnies de gauche du sous-secteur.
Un autre abri qui se trouve à proximité et qui contient tous les pétards n’est pas touché.
L’explosion de l’obus détermine l’incendie du magasin et provoque ainsi sans accident la perte de toutes les cartouches, des fusées éclairantes et des bidons de poudre noire qui s’y trouvent enfermées.
Vers 11h15 un avion boche survole les lieux. Le magasin est à nouveau bombardé avec précision par 15 obus de 105.

23 novembre
Journée et nuit calmes.
Aucun événement à signaler.

24 novembre
Journée et nuit calmes.
Aucun événement à signaler.
Perte : 1 chasseur légèrement blessé non évacué.
Ordre de bataillon n°92 : remise de galons.

25 novembre
Aucune note pour ce jour.

26 novembre
Journée et nuit calmes.
Aucun événement à signaler.

27 novembre
Journée et nuit calmes.
Dans la nuit le 24e bataillon de chasseur relève au Braunkopf le 23e qui se rend à Gaschney où il bivouac.

28 novembre
Séjour à Gaschney.
Repos.

29 novembre
Le bataillon se rend de Gaschney à Gérardmer où il passe la journée.

30 novembre
Étape de Gérardmer à Anould.
Nous reprenons la marche
Arrivée à 11h.
Ordre général n°46 : souscription des Militaires à l’Emprunt de la Victoire.
"Le 25 novembre la France émet un grand emprunt pour subvenir aux dépenses de la Défense Nationale…
Tous ceux qui souscrivent rempliront leur devoir de bon Français…
Écrivez à tous ceux, parents et amis, que vous avez laissés derrière vous au pays natal…
Dites-leur que souscrire à l’emprunt c’est servir la France, c’est combattre pour elle avec vous.
J. Joffre"
Souscription pour la Victoire, 1915 © AD18



Source complémentaire :
"Journal résumé de la guerre 1914-1918", par Jean Pouzoulet, caporal au 23e Bataillon de chasseurs alpins, AD Hérault :

[ 1 ] Anecdote arrivée à J. Pouzoulet à la Tête du Faux.