« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

samedi 29 mars 2014

Une ferme en Haute-Savoie


Les archives nous permettent de mieux connaître la vie de nos ancêtres. En voici une autre : la découverte de l'habitat traditionnel. A travers cette présentation de la ferme traditionnelle savoyarde, on peut appréhender (un peu) la vie quotidienne autrefois. 

Bien sûr, selon les vallées, on constate des différences, dues aux matériaux utilisés par exemple. Mais les fermes restent soumises à des contraintes identiques, notamment de pentes et de climat. Je prends comme exemple ici une ferme de la vallée du Giffre (Haute-Savoie).

Ferme savoyarde, coll. personnelle


La ferme traditionnelle s'organise toujours de la même façon :

  • Parfois une (des) cave(s) en (semi) sous-sol. Lieu(x) de stockage ou abris pour les chèvres et/ou cochons.
  • Un rez-de-chaussée où se répartissent l'habitation et les étables (vaches, chevaux) de part et d'autre d'un mur de refend.
  • Un premier étage où se trouve la grange. 
  • Des bâtiments annexes (grenier, parfois four ou cabane à outils).

Maquette ferme savoyarde (fermée), coll. personnelle

Maquette ferme savoyarde (ouverte), coll. personnelle


On utilise la pente à bon escient : on ouvre la grange à l'arrière (façade Nord) pour charger le foin, l'entrée se fait par la façade Est, on habite le côté le plus éclairé et chaud (l'adret, la façade Sud).

Comme partout ailleurs, l'architecture traditionnelle utilise les matériaux locaux : la pierre (notamment pour les soubassements) et surtout le bois. Le bois se trouve sur place, il constitue une bonne isolation et un bon maintien de la neige.

On remarque le débord du toit, qui permet de lutter contre le climat, en l'occurrence de se protéger de la neige. Ce toit débordant aménage aussi un espace de stockage ou de travail à l'abri des intempéries.

La toiture est à deux pans. La couverture est en bois : ancelles ( =  planches en bois, mesurant 80 cm de long sur environ 30 cm de large et simplement posées sur le toit, retenues par des perches et pierres placées dessus) ou tavaillons ( = planches en bois mesurant 40 cm de long sur environ 15 cm de large et clouées).

Les animaux dessous et à l'arrière, le foin au-dessus : l'habitation est bien isolée. 

Chaudrons dans la cheminée, située dans la "cuzna" (la cuisine), coll. personnelle


Haut du conduit de cheminée, où on fait fumer le jambon ou les saucisses, coll. personnelle


Grange et conduit de cheminée en bois (à l'étage), coll. personnelle


La grange est très vaste, car les bêtes sont à l'étable une grande partie de l'année : il faut donc disposer de foin en conséquence. On y abrite aussi le matériel agricole et on y bat le blé en cas de mauvais temps.

Pierre à évier (sous la fenêtre, à l'extérieur), coll. personnelle


"Pèle" (pièce principale), coll. personnelle

C'est la pièce à vivre, où la famille se retrouve (parfois à plusieurs générations) et parfois y dort.


Courtine (courette abritée à l'Est), coll. personnelle
 
C'est l'entrée de la maison : habitation à gauche, écurie à droite. Elle est abritée : on peut aussi y travailler.


"Écurie des vaches", coll. personnelle


Détail façade, coll. personnelle


Annexes : on craint les incendies du bâtiment principal, c'est pourquoi les objets de valeurs sont stockés dans des bâtiments annexes. 

Cabane à outils, coll. personnelle

Inutile de rappeler la valeur des outils, notamment dans les périodes anciennes. Souvent fabriqués sur place, ils étaient parfois transmis de générations en générations.


Grenier, coll. personnelle

Le grenier contient les grains (la récolte de l'année) au rez-de-chaussée et les objets précieux de la famille à l'étage : habits du dimanche, papiers importants...

Four, coll. personnelle


Détail façade, travail du bois, coll. personnelle



Photos réalisées à la ferme éco-musée du Clos-Parchet à Samoëns. 

dimanche 23 mars 2014

Ligne de vie

La ligne de vie, késako ?
Si vous êtes adeptes des blogs de généalogie, et en particulier celui de Sophie Boudarel "la Gazette des ancêtres", vous le savez parfaitement, et sans doute en avez vous-même rédigées (voir son article à ce sujet ici).
Pour les autres, il s'agit d'un tableau recensant toutes les informations trouvées sur un ancêtre. Il permet de valider la cohérence de l'ensemble, ou au contraire de déceler des anomalies, et pourquoi pas, d'aiguiller les recherches futures.
J'ai testé à mon tour, sur quelques ancêtres et, très honnêtement, je ne suis pas très convaincue de l'utilité de faire ce travail (désolée Sophie !). En particulier lorsqu'on s'éloigne dans le temps et que le tableau se réduit comme peau de chagrin vu la (pauvre) somme des informations trouvées.

Mais comme je n'aime pas gâcher le travail effectué, j'ai cherché à utiliser ce tableau. En lisant un article de Sophie à ce sujet dans le Revue Française de Généalogie (pp 43/46 du n°209), j'ai découvert la frise chronologique animée.
Maïwenn Bourdic, sur son blog D'aïeux et d'ailleurs, a testé la version Timeline JS (voir ici).
Personnellement, j'ai testé la version MyHistro.


J'ai choisi de suivre la vie de Jules Assumel Lurdin. J'ai déjà parlé de mon arrière-grand-père dans l'article Sévère ou touchant sur ce blog. Grâce à un important dossier trouvé aux archives de l'Ain, j'ai pu récolter un somme d'informations assez conséquente. J'ai ajouté quelques mentions sur l'histoire nationale, pour rappeler le contexte.
Vous pouvez consulter ici le résultat : la ligne de vie de Jules Assumel *

Mes impressions sur MyHistro :
  • les +
- Facilité d'utilisation pour créer les "événements" et les assembler dans "l'histoire" (un simple glisser-déposer et ils se classent tout seuls dans l'ordre chronologique).
- La cartographie (bien qu'un peu volumineuse) qui permet de visualiser d'un coup d’œil les lieux cités.
- On peut mettre une date inconnue (jour et mois), mais il faut mettre une année (ou une période).
- Une nouvelle façon de présenter sa généalogie.
  • les -
- On ne connaît pas les dimensions (fixes) de l'image qui accompagne l'événement : c'est parfois difficile à adapter.
- On est obligé de mettre un lieu (même si on ignore où l'événement s'est produit).
- L'impossibilité d'ordonner plusieurs événements d'une même période.


Bien sûr, il existe d'autres éditeurs similaires (Dipity, Time Rime, Tiki Toki . . .).
Globalement, je trouve le résultat de MyHistro plutôt sympa. Et vous qu'en pensez-vous ? Avez-vous testé la frise chronologique ?

Après Prezi (voir ici la présentation de ma généalogie version Prezi), voici une autre façon de présenter sa généalogie. En particulier lors des réunions de familles, où on se demande souvent comment faire passer, de manière attrayante et ludique, la masse d'information que nous avons collectée.



* Je n'ai pas réussi à l'intégrer directement dans le blog (si quelqu'un a le mode d'emploi, je suis preneuse).


mardi 18 mars 2014

Un, deux, trois . . .

Parmi les documents complémentaires que peut consulter un généalogiste, il y a les listes de recensement.

Autrefois appelées listes nominatives des habitants d'une commune, y figurent tous les habitants résident habituellement dans la commune (qu'ils soient présents ou non au moment du recensement); exception faite des hôtes de passage, des militaires, marins, détenus, élèves internes, etc . . . qui sont comptés à part. Ces derniers évoluent un peu au fil du temps (disons que la liste se précise) : les ouvriers étrangers à la commune occupés aux chantiers temporaires, les individus exerçant des professions ambulantes . . . Mais globalement l'esprit reste le même.

Leur consultation permet de confirmer (ou non) la présence d'un ancêtre dans une commune. Mais ces documents sont aussi émaillés de multiples mentions qui peuvent nous fournir des détails complémentaires : le lieu précis d'habitation (hameau, rue), le métier, l'âge . . . Selon les époques, on peut trouver aussi des observations complémentaires, la nationalité, le nom du patron pour les ouvriers ou employés, etc . . .

Entre les lignes, on peut déceler aussi quelques us et coutumes locales.

Ainsi dans les listes nominatives de recensement de Saint Amand sur Sèvre (Deux-Sèvres), que ce soit en 1866, 1901 ou 1906, on s'aperçoit que les familles vivent souvent à deux ou trois générations sous le même toit, accompagnées de leurs domestiques.

Recensement famille Gabard, 1901, AD79

Prenons l'exemple de la famille Gabard, qui réside dans un hameau de la commune, La Gidalière :
  • Les Gabard apparaissent en 1866, le foyer est composé des parents, leurs sept enfants, et un domestique et un berger. Soit 11 personnes sous le même toit. Gabard Pierre est qualifié de "fermier, chef de ménage". 

  • En 1901, le foyer est composé des parents, des enfants, du grand-père (veuf) et des domestiques : trois "garçons domestiques à gages", âgés de 24 à 32 ans, et d'une "fille servante à gages" âgée de 18 ans. Soit 11 personnes. Gabard Célestin (fils de Pierre, comptabilisé au recensement de 1866) est aussi qualifié de "fermier, chef".

  • En 1906, le grand-père est décédé, mais il y a trois enfants de plus. Il y a toujours trois domestiques hommes (dont deux déjà présents au recensement précédent) et une servante (différente de celle de 1901). Soit 13 personnes.

Grâce à au registre de 1901 de la même commune, on voit que la famille Roy est la seule à habiter le hameau de La Cornulière (contrairement à La Gidalière, par exemple, composé de cinq foyers, dont les Gabard). Le foyer est composé des parents, trois enfants, dont le fils aîné marié, son épouse, leur petite fille âgée de 10 mois, et deux garçons domestique à gages. Soit 9 personnes. Roy François est qualifié de "fermier, chef".

Dans les listes nominatives de recensement de Seine-et-Marne, on suit assez facilement les différentes générations de la famille Macréau. Contrairement à ceux des Deux-Sèvres, ils vivent en cellule familiale restreinte, en général les parents et les enfants seulement. Néanmoins, on relève quelques curiosités, qu'on ne peut pas toujours expliquer :

  •  Le couple Macréau/Fouchy est recensé à Guérard (hameau du Grand Lud) : en 1836 ils habitent avec leur fille Louise; en 1841 et 1846 avec leur fille et leur fils Léon; de 1851 à 1861  il n'y a plus que Léon (la fille est mariée ou décédée); en 1866 avec leur bru mais Léon son époux n'est pas mentionné (sa trace n'a pas été retrouvée); de 1872 à 1886 ils habitent tout les deux et en 1891 et 1896 Etienne Macréau est seul puisque son épouse Angélique Fouchy est déjà décédée.

  • Le couple Macréau/Gibert est recensé à partir de 1866 au Grand Lud de Guérard (Marie Louise habite avec ses beaux-parents, Léon n'est pas présent), en 1872 ils habitent seuls avec leur fils Albert. On perd leur trace ensuite. On les retrouve à Tigeaux à partir de 1881 où ils habitent avec leurs deux enfants Albert et Henri; idem en 1886. Mais à partir de 1891, à leur domicile, vivent aussi des jeunes enfants : 2 en 1891, 3 en 1896 et 1901. On ne sait pas qui sont ces enfants, âgés de 4 mois à 8 ans. Seule une fillette a des liens familiaux connus : elle est la nièce de Marie Louise Gibert. Enfin, en 1906, ils vivent avec leur petit-fils (mais la génération intermédiaire, Macréau/Le Floch, n'est pas mentionnée; on ne sait pas où ils résident).


     Recensement famille Macréau, 1906, AD77  

    • Le couple Macréau/Le Floch est recensé en 1901 à Tigeaux. Comme vu précédemment leur fils vit avec ses grands-parents en 1906, mais eux n'ont pas été trouvés. En 1911 on les retrouve à Mortcerf avec leurs 6 enfants. L'un d'eux est dit né à Serris en 1906, ce qui nous apprend (enfin) où ils étaient à cette date (confirmé par les listes de recensement de Serris). On ignore toujours pourquoi leur fils aîné, âgé de 5 ans, habitait avec ses grands-parents et non avec ses parents en 1906.

    Ces précieuses sources sont, comme tous les documents anciens, à prendre avec précaution toutefois. Ainsi les âges donnés ne se vérifient pas toujours exactement. De même l'orthographe des noms peut varier. Par exemple mes ancêtres Borrat-Michaud sont recensés à Samoëns (Haute-Savoie) sous le nom Michaud (en 1866), Borrat-Michaud (en 1896), mais Méchond (en 1911) !

     

    mardi 11 mars 2014

    #Généathème : M comme métier

    Ma généalogie compte 241 métiers différents. Comment n'en choisir qu'un ?

    Il y a les métiers "rares", c'est-à-dire pratiqués que par une seule personne (164).
    Il y a les métiers au nom poétique : maréchal en œuvres blanches, par exemple (forgeron fabricant des outils tranchants).
    Il y a les métiers exclusivement féminins : mercière, ouvrière lapidaire, lingère . . .
    Il y a les métiers "héréditaires" : praticien, cordonnier, concierge des prisons . . .
    Il y a les métiers mystérieux, au sens variant selon les époques : travailleur, vacheron, "sans" . . .

    Mais puisqu'il faut en choisir un, ce serait vigneron.
    • C'est le métier le plus pratiqué par mes ancêtres
    • C'est (probablement) le métier pratiqué par mon plus lointain ancêtre éponyme
    • C'est un métier "inter-branches" : pratiqué par mes ancêtres paternels et maternels 


    Vignes, PhotoPin

    Moi qui n'y connais rien en vin : un comble !

    Mes ancêtres se répartissent sur quatre terroirs principaux :
    • l'Anjou 
    Vers l’an 600, l’historien Grégoire de Tours est le premier à évoquer les vignes de l’Anjou. Au XIIème siècle, les rois Plantagenêt donnent un sérieux coup de pouce aux vins d’Anjou en leur ouvrant la Cour d’Angleterre et les marchés de l’Europe occidentale. À l’origine, la vigne, entre Saumur et Angers, longe la vallée de la Loire puis s’étend entre coteaux du Layon et Saumurois. En 1883, le phylloxéra ronge les trois-quarts du vignoble. Cette crise entraîne néanmoins une véritable mutation : la replantation privilégie les meilleurs terroirs du Saumurois, du Layon, de l’Aubance et des Coteaux de la Loire.

    Pierre Clavier, les Bougard, vignerons sur plusieurs générations à Pellouailles-les-Vignes (la bien nommée * ) au XVIIème.
    Marin Frémont, vigneron à Cornillé-les-Caves au XVIIème.
    Pierre Clavier, les Galland, Guillaume Le Mesle, Jean Merceron, Mathurin Repussard, René Rohault, les Vaugoyau, vignerons à Villevêque aux XVII et XVIIIème.
    Pierre Flon, Urbain Lecuyer, vignerons à Andard au XVIIème.
    Michel Le Tessier, vigneron au Plessis-Grammoire au XVIIème.
    Jean Lochet, les Peulier, vignerons à Brain-sur-l'Authion aux XVII et XVIIIème.

    • l'Ain
    L'existence de la vigne en Bugey est relatée dès le Ier siècle après J.C.. Les Romains favorisèrent son développement en trouvant des débouchés à Rome, mais en concurrençant les vins italiens. L'arrachage des vignes ordonné par l'empereur Domitien stoppa le développement dans la région. Ce n'est qu'au Moyen-Age, sous l'impulsion des moines que la vigne va réapparaître. Ces derniers, grâce à leurs connaissances agronomiques approfondies, sélectionnèrent des terroirs de qualité qui furent exploités jusqu'au XVIIIème siècle. Secteur de Cerdon : Vignoble situé sur de très fortes pentes exposées au sud à des altitudes parfois élevées (plus de 500m). On y produit toujours du vin aujourd'hui : un vin mousseux rosé. 

    Louis Bolliet, Jean Claude Barbier Colomb, Jean Baptiste Guilin, Nicolas Mollie, vignerons à Cerdon aux XVII et XVIIIème. 

    • la Seine et Marne
    "Le vin de Brie n'est bon que pour les domestiques" Cette opinion de Boileau ne découragea pas la culture de la vigne sur les coteaux de la Marne jusqu'à la fin du XIXème siècle. Ils sont issus de deux plants : le plant de Brie (ou meunier) robuste  qui mûrissait de bonne heure, et le gouais à maturité tardive, acide et sans bouquet. Ce sont des vins blancs pour la plupart; ponctuellement on trouve du vin rouge. L'ensoleillement n'étant pas suffisant pour permettre aux raisins rouges d'atteindre la pleine maturité. La proximité de Paris favorisa le développement des vignes et autres productions vivrières. Guérard était une des paroisses de Brie comprenant la plus grande étendue de vigne. Le vin de Guérard était très réputé dans la région. C'est la construction du chemin de fer, en permettant d'acheminer vers Paris le vin de Bourgogne, qui ruina les vignerons de Guérard. Le Phylloxera donna le coup de grâce.

    Les Becqué, les Couteau, les Gaudin, les Gibert, Nicolas Pottier, Pierre Raoult, vignerons à La Chapelle sur Crécy aux XVII et XVIIIème.
    Louis Cardon, Pierre Grandhomme, vignerons à La Celle sur Morin au XVIIème.
    François Beguin, les Bourjot, les Brunet, les Martin et Gaudin, les Testard et Hochet, les Leclerc et Pochet, les Lucas, les Macréau (sur six générations), Denis Marest, les Meheux, les Nicaise, les Noel, les Paveau, Jean Petit, les Thomeret, vignerons à Guérard aux XVII, XVIII et XIXème.
    Les Mercier, vignerons à Saint Augustin au XVIIIème.

    • l'Aveyron
    Au IXème siècle, tout commence à Conques avec la fondation du monastère par des moines venus de Bourgogne et les premiers greffons de Mansois qu'ils apportent avec eux dans la région. Jusqu’à la Révolution, l’église et la bourgeoisie de Rodez se partagent la majorité de la propriété des vignes. Après, les paysans continuent à cultiver ces vignes et à développer le vignoble, seule culture permettant de valoriser les coteaux. Les pieds sont implantés sur des petites surfaces, de pente plus faible, aménagées par l’homme et soutenues par des murets de pierre. Le vignoble aveyronnais connaît son apogée au milieu du XIXème siècle, puis le phylloxéra, l’exode massif, les guerres, l’arrachage des vignes mettent un terme à l’expansion du vignoble. 

    Les Alary, Etienne Amagat, les Astié (ancêtres éponymes, sur trois générations), les Bonnefous, les Cussac, Jean Labro, les Mas, les Raolz, les Rols, Antoine Reboux, vignerons à Conques aux XVII et XVIIIème.


    Difficile d'imaginer précisément les vies et conditions de travail de ces vignerons à travers les âges et les régions. Néanmoins, on peut esquisser un tableau, commun à tous les vignerons sans doute :
    La véritable année viticole commence en mars car on attend la fin des gelées, qui peuvent détruire les bourgeons jusqu’à la fin mai, pour tailler la vigne, une taille courte qui assure la qualité en limitant la quantité. Le vigneron n’a ni cheval ni charrue, et il pioche sa vigne à la main (il faut attendre les années 1880 pour voir apparaître les vignes bien alignées sur fil de fer). Ces travaux de taille, le vigneron donne, de la fin mars à début avril, un premier labour. Ce travail extrêmement pénible s’effectue à la houe. 
    Début mai, le vigneron fiche les échalas, pieux de bois de chêne ou de châtaignier, longs d’1,45 m environ, destinés à soutenir la vigne et à maintenir les grappes éloignées du sol. Les échalas plantés, le vigneron donne un second labour, plus léger, qu’il appelle le binage, et qui est terminé à la fin du mois de mai. 
    Puis la vigne fleurit, courant juin, les grains commencent à se former, le verjus grossit rapidement et, dans le courant de juillet, de toute façon avant la moisson des grains, le vigneron donne un troisième labour : on dit qu’il rebine ou encore qu’il tierce ; ce travail a pour but essentiel de débarrasser la vigne des mauvaises herbes. Si la saison est très humide un quatrième labour peut être nécessaire en septembre, avant les vendanges, pour permettre une maturation plus parfaite des raisins. 
    Si la vigne a été épargnée, le vigneron vendange fin septembre ou début octobre. Coupeurs et hotteurs parcourent alors la vigne. Les coupeurs, serpette à la main (le sécateur n’apparaît pas avant 1840 et se généralise tardivement), emplissent les paniers et les vident dans leurs hottes. Les hotteurs emplissent alors les bachoues, grandes hottes placées sur le dos des ânes, ou des cuves plus grandes transportées dans des charrettes en direction du cellier ou du pressoir.

    Ce métier de vigneron était l'activité principale pour certains, mais une activité temporaire ou annexe pour d'autres : un certain nombre d'entre eux sont en effet alternativement qualifiés de laboureurs, tonneliers, cultivateurs, mais aussi sabotiers ou couvreurs. Enfin, certains sont également marchands.


    * C'est Clemenceau qui, en 1919, fit rajouter "les Vignes" au nom de Pellouailles en remerciement de son effort de guerre. En effet, le vignoble de la commune fut entièrement destiné à la consommation des poilus; le vin devenant le pilier du moral des soldats dans les tranchées.