« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

mercredi 11 juin 2014

#ChallengeAZ : J comme jumeaux

Je compte 8 paires de jumeaux parmi mes ancêtres directs (dont 2 paires mixtes garçons/filles). Ce qui n’est pas énorme pour 3 201 aïeux : 0,24 %. J'en compte 52 paires sur la totalité de ma généalogie (7 656 personnes), soit 0,67 %. 

Jumeaux © A.Geddes

On reste néanmoins en-dessous de la moyenne nationale. Historiquement, en effet, environ 1 grossesse sur 80 donne naissance à des jumeaux, soit 1,25 % (1).

Sur les 52 paires, 24 sont des jumelles (filles/filles), 9 sont des jumeaux (garçons/garçons) et 19 sont mixtes (garçons/filles).

Bien sûr, on connaît tous la distinction entre vrais et faux jumeaux : les premiers sont issus d'un seul et même œuf, tandis que les seconds proviennent d’une gestation identique, mais de deux ovules fécondés par deux spermatozoïdes.
Chez ces derniers, les jumeaux « dizygotes », il n’y a entre eux que les similitudes que l'on peut rencontrer entre n'importe quels frères et sœurs. Du fait qu’ils se développent grâce à deux placentas séparés, comme deux enfants nés de deux grossesses différentes, ils peuvent être de sexes différents. La prédisposition génétique qui favorise leur venue est à rechercher du côté maternel, puisque le père n'influence en rien la double ovulation originelle.
Chez les vrais jumeaux, « monozygotes », c’est la cellule œuf qui se sépare en deux, formant ainsi deux embryons qui ont le même patrimoine génétique. Si l'ovule se divise moins de trois jours après la fécondation, les jumeaux se ressembleront davantage à la naissance (poids et taille) que si l'ovule fécondé se divise plus tard. Les jumeaux monozygotes sont souvent très ressemblant physiquement. Mais en prenant de l'âge, ils peuvent se différencier, à la suite des choix personnels comme la nourriture, les activités physiques et intellectuelles... ainsi que des expériences de vie.

Dans nos sociétés modernes, on voit augmenter le nombre des grossesses multiples, notamment à cause de l'utilisation à grande échelle des médicaments pour lutter contre l’infertilité.

Les causes de la gémellité sont encore mal connues aujourd'hui (hormis ce phénomène moderne) ; en particulier pour les jumeaux monozygotes.

Enfin, littéralement, le terme jumeau se réfère à tous les individus (ou l'un de ceux-ci) qui ont partagé le même utérus au cours d'une même gestation. Les triplés (ou quadruplés) sont donc 3 (ou 4) jumeaux. Je n’ai pas encore trouvé de grossesse triple (ou davantage) dans ma généalogie.

En généalogie, il est difficile de distinguer, d'après les actes d'état-civil, les faux des vrais jumeaux ; hormis les grossesses mixtes, qui sont obligatoirement des faux jumeaux.

Chez moi, on naît jumeaux majoritairement en automne et hiver : 6 paires de jumeaux nés en septembre, novembre, décembre et 7 en janvier. Avril, juin et août ne sont pas propices : seulement 2 paires pour chacun de ces mois.
Lorsqu’on connaît leur âge, les mères ont le plus souvent la trentaine (19 cas). Les plus jeunes ont 21 ans et la plus âgée 45.
C’est en Maine et Loire qu’il y a le plus de jumeaux : 24 paires (mais c’est le département où j’ai retrouvé le plus d’ancêtres ; ce n’est donc pas très significatif) ; suivi, très loin derrière, par les Côtes d’Armor : 7 paires.
C’est au XVIIème que les jumeaux sont les plus nombreux chez moi (28 paires). Seulement 2 paires au XIXème. Le Floch Ursule (née en 1874) est mon ancêtre jumelle la plus proche de moi : c’est mon AAGM.

Rares sont les jumeaux qui ont eu des jumeaux : Sur les huit paires de jumeaux (chez mes ancêtres directs), on compte à nouveau des jumeaux dans la descendance de Rattier Françoise (elle a eu des jumelles) et de Bouguié Joseph et Quero Marie (à la deuxième génération : leurs petits-fils donnant eux-mêmes naissance à des jumeaux).
Rattier Laurent et Barbot Jacquine ont deux paires de jumeaux : dans la première paire on compte notre ancêtre Françoise (citée ci-dessus) ; dans la seconde paire l’un des deux enfants décède 11 jours plus tard.
Ces Rattier sont prospères en matière de gémellité : après les deux paires citées ci-dessus, notre ancêtre Françoise donne elle-même naissance à des jumeaux, ainsi que la sœur de Laurent (une fille baptisée par la sage-femme en péril de mort, décédée le lendemain et un fils est mort-né non prénommé). Soit 4 paires en deux générations.

René et Jacques Girard, nés en 1682 à Nueil les Aubiers (79), sont qualifiés de frère « gemeaux ». Le rédacteur de l’acte a aussi ajouté un « S » au patronyme (« Girards ») et il précise qu’ils sont nés le même jour (heureusement, du reste, notamment pour la mère !).

Les grossesses gémellaires restes des grossesses à risques et la mortalité infantile des jumeaux est aussi importante : sur les 52 paires, une voit les deux bébés mort-nées (elles ne seront d’ailleurs pas prénommées), trois autres voient l’un des deux bébés aussi mort-nés, et une douzaine de bébés meurent en bas âge (mais tous ces enfants n'ont pas été suivis systématiquement : d'autres sont peut-être aussi décédés en bas âge sans que je ne le sache). Par contre, aucune de nos mères de jumeaux n’est décédée des suites de couches gémellaires.

Les jumeaux décédés ne dérogent pas à la règle des prénoms (comme les enfants uniques) : Maugars René et Le Bouvier Urbanne donnent naissance à des jumelles, Renée et Jeanne, nées en 1654 ; elles décèdent toutes les deux quinze jours plus tard. Deux ans après ils donnent naissance à une fille, à nouveau prénommée Jeanne (notre ancêtre).
Après trois enfants uniques, Le Mercier Etienne et Goguelet Jacquine donnent naissance à des jumelles Marguerite et Catherine en 1679 : elles décèdent rapidement (6 semaines). La naissance suivante est à nouveau gémellaire : Jean et Catherine nés en 1682 (Catherine décède à 6 mois). Suivront deux enfants uniques nées en 1684 et 1686, Catherine (la troisième donc), notre ancêtre, et Magdelaine.

Cinq couples ont deux paires de jumeaux parmi leurs enfants, dont Boissinot François et Albert François qui donnent naissance à deux paires de jumeaux successives, à deux ans d’intervalle. Un seul de ces enfants survivra. Neuf enfants (uniques) suivront ensuite.
Picard Pierre et Babin Fare ont cinq enfants, dont deux paires de jumeaux nés après notre ancêtre Marie Anne.

Bref, si j'avais voulu une grossesse multiple, les chances auraient été assez minces (moins que la moyenne nationale). Néanmoins j'aurai probablement donné naissance à une - seule - paire de filles, en hiver, dans ma décennie d'âge qui est en train de se terminer. Peut-être qu'elles et moi on aurait survécu. Mais surtout j'aurais dû vivre au XVIIème siècle en Maine et Loire.
En gros, c'est raté !


(1) Mathieu Vidard, Les jumeaux, émission La tête au carré sur France Inter, 31 mars 2011

mardi 10 juin 2014

#ChallengeAZ : I comme images de successions

Sur les sites des archives départementales, sont parfois publiés en ligne les tables ou les registres de successions. 
A partir de 1791, les bureaux de l’Enregistrement recensent tous les décès qui ont lieu dans le département. Ainsi chaque bureau, dont la circonscription sera généralement le canton, dresse des séries de tables de décès et de successions acquittées; remplacées en 1825 par des tables de déclarations de successions. La déclaration de succession et l’acte de mutation après décès, sont dressés dans les six mois - en moyenne - suivant le décès d’un individu laissant un actif successoral (des biens meubles ou immeubles).


Déclaration de mutation, Roy François, 1817, AD85
(cf. transcription plus bas)

Pour les généalogistes, ils permettent de rentrer dans l’intimité de nos ancêtres et de toucher du doigt leurs conditions de vie, au travers de leur patrimoine.

Prenons ici l'exemple des successions récoltées aux archives de Vendée, dont j'ai dressé un bref inventaire. Ils sont constitués de deux types de documents : les tables, d'une part et les registres eux-mêmes. 
Les tables comprennent :
- des détails sur le défunt (nom, prénom, profession, domicile et date de décès), 
- des détails sur la succession (biens meubles et immeubles, héritiers et valeurs des biens), 
- la date d'enregistrement de la mutation (par laquelle on retrouve le détail de la succession dans les registres). 
En fonction des années, on peut aussi avoir des renseignements complémentaires :
- sur d'éventuels scellés et tutelles, 
- des observations diverses. 
Les registres, quant à eux, mentionnent :
- la date d'enregistrement, 
- la personne déclarante, 
- les autres personnes au nom de qui elle agit (s'il y a plusieurs héritiers), 
- le nom du défunt et la date de son décès, 
- les détails de la succession et leur valeur, 
- les droits à payer pour ladite succession
- la confirmation "sincère" du déclarant
- son éventuelle signature (ou la formule rituelle qui l'en déclare incapable).

Exemple : Registre de déclaration de mutation, suite au décès de Roy François, 1817 (photo plus haut) :
« Du 24 juillet 1817
Est comparu françois Roy, Métayer, demeurant commune de la pommeraye
Faisant tant pour lui que pour jean Mathurin Roy, son frère, Lequel
Déclaré que par le décès de françois Roy, Leur père, décidé susdite commune
Le 9 Fer 1817, il leur est échu des meubles, effets et bestiaux estimés
Suivant L’état remis quatre cent cinquante trois francs cinquante Cmes 453.50
Droit à 25 fcs Reçu un franc quinze Centimes……………………………1.15
Point d’ymmeubles
Ce que le comparant a affirmé sincère aux peines des droits et a dit ne savoir
Signer »   

Les détails contenus dans les registres sont assez succincts en général (du moins pour ce qui concernent mes ancêtres vendéens) : les meubles ou bestiaux sont rarement listés précisément. Le plus prolixe en la matière est celui de Jeanne Robin en 1840 : "la succession est composée du mobilier propre, à savoir :
1) un lit composé de son bois, paillasse, coëte, traversin, matelas, estimé à 20 francs.
2) un coffre estimé à 3 francs.
3) deux draps estimés à 4 francs.

Total 27 francs"

On notera tout de même quelques successions particulières :
  • celle de Pierre Coutand en 1815. La case Observation porte la mention suivante : par acte du 18/8/1809, passé devant Chenuau, notaire aux Epesses, "ledit Coutand a tout abandonné à ses enfants à la charge de le nourrir". Le détail de ce legs n'a pas été trouvé sur les registres de déclaration de mutation (Pouzauges). 
Par contre l'acte de cession figure bien parmi les minutes notariales ( * ) : "comme son grand äge ne lui permet plus de s'occuper de son travail ordinaire et que [ses enfants] pierre et jeanne coutand sont ses deux apuis [ ?] ayant déjà beaucoup aidé a sa subsistance et entretien par le fruit de leur labeur, il a par ces presentes de sa libre volonté, du consantement et agrément formel [ ?] des dits françois et henri coutand ses deux autres enfants, ( ... ) declare leur cedder et abandonner entout droit de propriété, le tiers pour lequel il étoit fondé dans la communauté générale qui a existé entreux jusqu'à ce jour, et généralement cedder et abandonner auxdits pierre et jeanne coutand et par moitié entreux tous ces biens meubles et effet mobilier de quelque ( ... ) quil soient qui sont tant dans sa demeure que partout ailleurs, que lesdits pierre et jeanne coutand declarent bien connoitre sans qu'il soit besoin d'en faire plus ample designation, lequel tiers du mobilier cidessus ceddé est estimé en temts que de besoin seroit soixante francs."

  •  celle  de François Coutand (fils du précédent) en 1843 : Il n'y a pas de détail sur les héritiers et la succession, mais la case "Numéro du sommier douteux sous lequel l'article a été relevé" est remplie avec le n°944. 
Sur ce sommier sont consignés l'existence de droits impayés ou fraudés (mais ces registres ne sont pas conservés aux archives). Quand le contrôleur a réuni les preuves de l'exigibilité d'un droit ou lorsque le contrevenant se reconnaissait débiteur de l'impôt, l'article était annulé et reporté sur le "sommier des droits certains". A l'inverse, si la réclamation est non fondée ou s'il n'y avait pas de preuves suffisantes pour engager des poursuites, l'article était annulé.
  • celle de Louise Poisbleau en 1839 : un certificat d'indigence a été délivré le 29/1/1840; de ce fait il semble qu'il n'y ait pas d'héritage, et donc pas de déclaration sur le registre de mutation : à la date de la déclaration des successions est apposé la mention "néant". La case des biens déclarés est laissée vierge.  

Sur la quinzaine de successions vendéennes identifiées, le montant des successions va de . . . rien (certificat d'indigence de Louise Poisbleau) à 1 740 francs : Rose Godet déclare en effet 340 francs de biens meubles et une borderie valant 1400 francs. Elle qui n'était que domestique lors de son mariage en 1782 ! On remarquera que son époux, décédé 13 ans auparavant, ne déclarait que des biens meubles (pas d'immeuble), pour une valeur de 430 francs (pourtant dit "feu propriétaire" lors du mariage de son fils en 1824).

( * ) Vive les archives "multi-séries" en ligne !

lundi 9 juin 2014

#ChallengeAz : H comme héritage

Autrefois les biens se transmettaient de générations en générations : je pense, par exemple, à la ferme de la Gidalière, dans les Deux-Sèvres, transmise durant près de cinq générations, soit de la Révolution jusqu’au début du XXème siècle – la disparition des registres antérieurs à la Révolution nous empêchant de savoir s’ils occupaient les lieux plus avant.

Découverte dans le grenier © Brunor

Mais aujourd'hui, avec la dispersion géographique des membres du foyer, les maisons de famille se raréfient. De ce fait, dans nos époques modernes, on n’hérite pas toujours des biens matériels de ceux qui nous ont précédé comme autrefois. Dans ce cas, nos ancêtres nous transmettent-ils autre chose ?

L'exploration des archives nous permet de connaître la vie de nos aïeux, alors que le patrimoine de nos ascendants - et leur souvenir même, bien souvent - s'est perdu dans les fils du temps. Contrats de mariage, inventaires après décès et autres documents nous font entrevoir leur existence : la maison, la ferme, les meubles, les terres (si on a de la chance).

Mais si la curiosité nous fait fouiller sans vergogne dans l'intimité de nos ancêtres lointains, c'est n'est pas aussi aisé lorsque l'on a connu les personnes.

En effet, les générations proches (parents, grands-parents) nous ont parfois transmis des objets ou des papiers de famille : bijoux, médailles, photos, lettres, journaux intimes. Mais alors, lire la correspondance privée de ses grands-parents c'est autre chose que déchiffrer un acte notarié ! Je me souviens de lettres qui nous étaient revenues après le décès de ma grand-mère (parce qu'elles nous concernaient) : lors de leur lecture, je me suis presque sentie "de trop". Soudain, on ressent un sentiment d'intrusion dans la vie privée, l'impression bizarre d'écouter aux portes.

Alors que c'est finalement le sens de toutes nos recherches généalogiques : en savoir le plus possible sur ceux qui nous ont précédés. Est-ce la différence entre l'Histoire et l'histoire (la grande et la petite) ? L'héritage peut alors se révéler pesant. Sans compter qu'on ne sait jamais sur quoi on peut tomber : révéler des secrets de famille de gens que l'on connaît est toujours délicat...

Enfin, l'héritage peut-il être immatériel ? Est-on l’héritier de tous ceux qui nous ont précédés ? Est-ce que les actes ou traits de caractères de nos ancêtres ont une influence sur nous aujourd’hui ? C’est ce que suggère la psychogénéalogie (bien que cette thèse ne soit pas admise par tous) : par exemple, une génération ayant souffert de difficulté financière va enseigner la « rigueur budgétaire » à ses enfants, qui vont l’inculquer à leur tour aux leurs. Et c’est ainsi que la transmission se fait de génération en génération.

Dans quelle mesure nous influencent-ils véritablement (s’ils le font) ? Au-delà de la deuxième génération (celle des grands-parents) peut-il y avoir transmission, alors même qu’on n’a pas, ou peu, connu les personnes ? Les souvenirs se perdent si vite : on en fait chacun l'expérience très souvent.

En dehors d’une pensée émue quand j’entends un patronyme qui fait partie de mon arbre, des lieux où mes ancêtres ont vécu, suis-je influencée par tous ceux dont j’ai connaissance aujourd’hui (et ceux que je n’ai pas encore découvert) ?

samedi 7 juin 2014

#ChallengeAZ : G comme généalogie

« Ces papiers ne sont pas des papiers, mais des vies d’homme, de provinces, de peuples [ ... ]. Nous ressentons le sourd prolongement des émotions de ceux que nous ne connûmes pas. »
Michelet


Arbre, © randocroquis

Tombée dedans un peu par hasard, mais impossible de s’en sortir. Est-ce l’ombre tutélaire de tous ceux qui nous ont précédés ? Est-ce simplement le goût de l’enquête ? Est-ce pour répondre à cette fameuse question : d’où viens-je ?

Est-ce les liens avec l’histoire (en tant qu'historienne de formation) ? Le plaisir de fouiller soi-même dans les registres (même si le contact avec les vieux papiers est relatif aujourd’hui avec les registres numérisés en ligne !), visiter les villages où a vécu notre lointaine famille, retracer l'histoire de ses ancêtres dans la Grande Histoire… Un peu tout à la fois sans doute.

Le goût de l'inconnu : qu'est-ce que l'on va découvrir ? De grandes espérances : aller le plus loin possible dans le temps, voir apparaître petit à petit des villages, des métiers, des hommes  - des vies en somme.

Lorsqu'on ne peut pas se déplacer dans les régions lointaines de nos ancêtres, la mise en ligne progressive des archives permet de progresser dans nos recherches. Cela donne aussi envie de découvrir le plus de documents possibles : en plus des traditionnels actes de naissances, mariages et décès (auxquels les généalogistes son historiquement habitués), d'autres sources viennent étoffer nos valises : matricules militaires, documents notariés (contrats de mariage, ventes, inventaires après décès...), presse ancienne. Elles donnent du corps à nos arbres, de l'épaisseur à leurs vies.

Avec la mise en ligne des arbres, le partage, la mise en commun, des cousins (des vivants, ceux-là !), plus ou moins éloignés, se sont manifestés : drôle d’impression d’appeler cousin quelqu’un qu’on ne connaît pas, mais qui a pourtant un petit quelque chose de particulier (des liens familiers/familiaux !).

Quand on commence, on ne peut jamais dire quand une généalogie va se terminer, ni ce que l'on va trouver. En tout cas, pour le moment, pas de lourd secret de famille débusqué. Pas véritablement d’ascendance noble ou célèbre (on ne sait pas pourquoi, mais il paraît que ça fait toujours plaisir d’en découvrir) ; quelques liens éloignés avec certaines personnalités, sans plus. 

Au final, juste l’image d’un petit peuple, humble, travailleur, menant leur existence à travers les joies (mariages, naissances, transmission d’un patrimoine qui a prospéré...) et les vicissitudes de la vie (pertes d’enfants, deuils, maladies, déménagements...).

En tout cas, fière d’en faire partie et de leur redonner vie, en quelque sorte, grâce à ces recherches et à leur diffusion par le blog.


vendredi 6 juin 2014

#ChallengeAZ : F comme frontière

Au début, tout va bien. Les registres sont en ligne (ou pas) et on progresse tant bien que mal. Mais un jour, tout change : vous avez des ancêtres à l’étranger ! 


 
Frontière © Passionmilitaria
 
En Suisse en l’occurrence. Et là, ça se complique. Car les archives ne sont pas accessibles pour les Français. Mon premier ancêtre Suisse est Joseph Borrat-Michaud, né en 1863 à Champéry (Valais).

Alors c’est la fin ? Dès le milieu du XIXème ? Si vite ? Comment faire une croix sur tout un pan de sa généalogie ? Quand on est passionné, c'est trop difficile ! Bon quand on tombe en "fin de branche" vers 1590, que les registres ont disparu, on peut l'accepter plus facilement. Mais là . . .

Il faut bien se rendre à l'évidence : je n'ai pas le bon passeport. Après plusieurs mois d’impasse (et de vaines recherches pour tenter de contourner cet obstacle), un mail salvateur : un contact avec l’association généalogique locale, l'AVEG (Association Valaisanne d'Etude Généalogique). Grâce à leurs relevés, ils ont d’un coup débloqué 10 générations en m'envoyant la filiation de Joseph jusqu'au milieu du XVIIème siècle. Un grand merci à eux qui permettent de progresser si bien. Le seul bémol, c’est qu'ils ne m'ont transmis que la liste des événements, mais je n'ai pas vu (ni possédé) les actes eux-mêmes. Dommage.

Quelle idée d’avoir traversé la frontière ?

Autre frontière : celle du temps. 
Et celle-ci est souvent infranchissable : plus on s’enfonce dans le temps, moins on a de matière. Et c’est alors la disparition des registres qui nous empêche de progresser. Lorsqu’on est au XVIème siècle, on peut comprendre.
Lorsqu’on est à la Révolution, c’est plus frustrant. C’est le cas pour la branche Deux-Sèvres/Vendée car les registres ont souvent été détruits à cette période. Cela provoque d'affreuses trouées blanches dans mon arbre cylindrique.

Arbre cylindrique Astié/Borrat-Michaud, coll. personnelle

Mais là, il y a peu de chance qu'un mail vienne me débloquer miraculeusement. Et ce n'est plus une question de passeport...

En fait, j'ai pris de trop mauvaises habitudes : consulter les registres des XVI et XVIIème siècles. Du coup, m'arrêter à la Révolution, c'est comme avoir une bouteille quand on a soif, mais pas de décapsuleur ! Tu sens bien qu'ils sont là, quelque part, mais tu n'as aucune chance de les trouver.

Mais finalement, savoir se confronter aux limites d'une passion, n'est-ce pas passer un cap... une frontière ?

jeudi 5 juin 2014

#ChallengeAZ : E comme enfants

Quelques réflexions sur les enfants dans ma généalogie :

Classe de Corzé, 1894, AD49

  • Enfants nombreux : 
Le record du nombre d’enfants pour une seule union est détenu par Galand Jacques et Belu Renée, qui ont eu 17 enfants, nés entre 1678 et 1701 (sur une période de 23 ans, donc) à Villevêque (49), soit un enfant tous les 16 mois en moyenne. On remarque qu'ils ont encore un enfant en 1701, l'année même où leur fils aîné Jacques se marie.
Houdebine René, quant à lui, a eu 19 enfants en 3 unions, à Ménil (53) ; 4 avec Chalumeau Renée, nés entre 1651 et 1656 ; 11 avec Belin Marie, nés entre 1659 et 1678 ; 4 avec Patry Marie nés entre 1683 et 1694.

  • Enfants nés : 
C’est le mois de mars qui voit le plus de naissances (567 enfants nés dans ce mois, soit 11,07 %). A contrario on naît le moins en août (315 naissances, soit 6,15 %).

  • Enfants morts :
Sur les 8 enfants de Cousseau Jean et Cherbonneau Marie, nés entre 1700 et 1713 au Boupère (85), 6 sont décédés en bas âge : Perrine est décédée à 1 jour (c'est celle qui a le moins vécu), Mathurine est décédée à 2 ans (c'est celle qui a le plus vécu, si l'on peut dire). Les autres sont décédés dans les semaines qui ont suivi leur naissance.

  • Enfant trouvé : 
Deschalon Catherine est dite "donnée" (dans son acte de mariage à Oyonnax (01) en 1687), ce qui semble signifier qu'elle a été donnée après sa naissance. L’acte de naissance n’a pas été trouvé.

  • Enfants illégitimes : 
On en compte trois dans notre généalogie :
Borrat-Michaud Joseph Auguste est l'enfant "illégitime" de Borrat-Michaud Justine, né à Champéry (Suisse) en 1863 (selon son acte de mariage à Samoëns (74) en 1893). Le père n'est pas connu. On notera que Justine a eu deux autres enfants illégitimes avant lui : Pierre Frédéric Borrat-Michaud, né en 1844 de père inconnu, et Louis Auguste, né en 1850, fils de Pierre Julien Rey-Mouroz son compagnon (mais ils ne sont pas mariés).
Duchemin Simone est née, en 1657, hors mariage, "extra matrimonium" comme le précise son acte de mariage à Guérard (77); fille de Simone Testard, dans son acte de naissance en effet il n'y a pas de mention du père. Par contre, lors de son mariage, son père Nicolas Duchemin (qui lui a donné son nom de famille) est nommé.
Guibé Jacques est qualifié de "bastard" dans son acte de mariage (1640) et celui de son fils (1674). Il serait né en 1612 (selon son acte de décès), mais on le peut pas le vérifier : il n'y a pas de registre de naissance antérieur à 1615 à la Coulonche (61).

mercredi 4 juin 2014

#ChallengeAZ : D comme disparu

Tout généalogiste doit fatalement faire face à cette situation : tout d’un coup votre ancêtre disparaît. Impossible de le retrouver.

Par exemple Augustin Daniel, né à Angers, résidant à Angers, n’apparaît pas dans les registres militaires ; contre toute logique ! Difficile en effet d’échapper au recensement de l’armée. D’autant plus que l’on sait qu’il a bien été militaire (photo à l’appui).

C’est en 1872 que la Troisième République institue le service militaire obligatoire, ainsi que le recensement systématique, par classe d’âge, de tous les jeunes gens âgés de vingt ans. Ce recensement s’effectue sur le lieu de résidence du jeune homme, lorsqu’il a 20 ans donc.

Or, pour en revenir à Augustin, on sait qu’il naît à Angers en 1888 (recensement militaire en 1908, donc) et qu’il réside toujours à Angers en 1912. Comme il est introuvable dans les registres militaires d’Angers en 1908, cela signifierait qu’il a déménagé, avant de revenir ensuite à Angers. On sait que ses parents y habitent au moins jusqu’en 1895. On les retrouve ensuite en région parisienne, à Ivry, en 1912, mais on ignore la date de leur déménagement.

Il faut alors jouer les Sherlock Holmes pour tenter de percer ce mystère : mais où est Augustin ? C’est la fiche militaire de son frère (qui, lui, a bien été recensé en Anjou) qui nous donne une piste : son adresse nous indique qu’il habite aussi Ivry en 1908. Bingo ! Augustin réside bien à Ivry lorsqu’il a été recensé pour le service militaire.

Mais maintenant c’est son numéro matricule qui a disparu ! (à cause d’une page de registre déchirée : cf. article Généathème de janvier).

Tout ça pour ça ! Bon, je ne désespère pas : maintenant que j’ai retrouvé Augustin, je voudrai retrouver sa fiche militaire. Je suis un peu à court d’idée. L’idéal serait de trouver un double des tables alphabétiques où la page ne serait pas déchirée...

Finalement, ce cher Augustin résume à lui seul ce qu'est la généalogie : une enquête vers le passé, faite de succès, d'attentes et, parfois, d'échecs ou d'impasses. Mais ces derniers ne gâchent pas le plaisir de chercher !