« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

samedi 21 juin 2014

#ChallengeAZ : S comme santé (et maladie)

La santé (et la maladie) touchent nos ancêtres, bien sûr. On les voit confrontés à ces phénomènes au travers des archives, de façon plus ou moins claire.


 
Chirurgie © Encyclopédie Diderot


Plusieurs de mes ancêtres exercent des métiers dans le domaine de la santé : 
  • Apothicaire (Bénavent Jean, à Conques, 12) ou maître apothicaire (Bel François, à Taninges, 74). Les apothicaires sont les "ancêtres" des pharmaciens. Ils préparaient et vendaient des drogues et des médicaments. Au Moyen-Age, ils vendaient du sucre (alors produit exotique et rare, vendu comme épice ou médicament - pour lutter contre le rhume par exemple). Ils appartenaient à la corporation des épiciers. La distinction entre les deux professions ne se fera qu'au XVème siècle. La formation est essentiellement pratique et le métier s'apprend au contact d'un apothicaire confirmé qui transmet son savoir. C'est au XVIIIème qu'ils prennent le nom de pharmaciens. Ils obtiennent alors l’exclusivité de la préparation des remèdes (au grand dam des épiciers).


  • Praticien (Mommaton Simon, à Entraygues, 12). Les Regourd Pierre et son fils Etienne, en Rouergue, sont praticiens tous les deux. Le fils est dit marchand 30 ans plus tard. Il épouse une fille d'apothicaire (Bénavent Marie, à Conques, en 1672). Le praticien est le médecin qui soigne les malades (par opposition à ceux qui se consacrent à l'étude théorique ou aux recherches en laboratoire).

La maladie frappe mes aïeux : on la voit ou on la devine. 
  • Alombert Goget François est décédé en 1775. Selon l'acte « Il est décédé à Villers les Bois "où il est venu pour peigner le chanvre, s'y est trouvé saisi d'une maladie delaquelle après avoir été muni des sacrements il est mort" (copie de l'acte de décès reçu par le curé de Lalleyriat, 01, qui "certifie avoir couché mot à mot sans avoir ni ajouté ni diminué l'acte mortuaire"). »


  • Merlan Jeanne (décédée à 80 ans en 1725 à la Chapelle sur Crécy, 77), Coquet Marie (décédée à 56 ans en 1726 à la Chapelle sur Crécy) et Bremond Claude (décédée à 38 ans en 1668 au Pin, 79) sont décédées des suites de maladie, mais "après avoir reçu les sacrements de l'Église". On ignore de quelles maladies il s’agit ; quelque chose de suffisamment long sans doute, pour qu'elles aient eu le temps de faire appel à un prêtre pour recevoir l’extrême onction.
 
  • Daburon Aubin décède le 20 juin 1626 à Bauné, 49, après 6 de ses enfants, tous décédés à moins d'un mois d'intervalle, âgés de 5 à 20 ans. On sait que la peste sévit en Anjou à cette période : c'est sans doute la cause de ces morts multiples. De la même manière, Ouvrard Magdelaine est dite "morte de contagion" le 28 septembre 1640 à Villevêque, 49 ; et son époux Pierre un mois plus tard. La peste est de retour.

Enfin une pensée émue pour Amagat Marianne qui a son premier enfant en 1759 à Conques; mais la naissance se passe mal : "le chirurgien a baptisé par un pied un enfant de Pierre Martin et Marianne Amagat et puis la tiré mort, lequel a été enseveli". On remarque la présence d'un "chirurgien" (et non la matrone ou sage-femme habituelle) : l'accouchement a donc dû être long et difficile pour qu'on fasse appel à un ce type de médecin. En on comprend pourquoi : l'enfant se présentait par le siège, les pieds en avant. La mort du nouveau-né a dû être pressentie avant l'expulsion car le baptême a lieu alors que le bébé n'est pas encore complètement né. En effet, une fois sorti, la mort a été constatée. (cf. article du blog Hélas monsieur…).


vendredi 20 juin 2014

#ChallengeAZ : R comme relis-le encore !

Comme Pénélope, cent fois sur le métier remettez votre ouvrage : lisez et relisez encore et encore !


Vase grec, Pénélope et Télémaque, © StudyBlue


Car on manque toujours quelque chose.

Récemment encore (mardi dernier, pour tout dire) je relisais les actes de mariages que j'avais récoltés, à la recherche des mentions de contrats de mariages - en vue d'un recensement exhaustif. Quand soudain, une phrase me saute aux yeux, dans l'acte de mariage de Théodore Macréau et Marie Louise Gibert (1866, La Chapelle sur Crécy, 77) : "Permission de mariage délivrée par le Général commandant la subdivision de Seine et Marne le 1er février."

Bon sang ! j'ai ce document depuis 2009 et je n'avais pas vu ça !

En plus, c'est la première fois que je rencontre ce type de mention au cours de mes recherches. C'est une mention un peu énigmatique, et je n'ai pour l'heure aucune idée de l'endroit où chercher des informations sur ce nouveau document. Mais cela ouvre de nouvelles pistes. Si j'ai bonne mémoire, je crois avoir lu que les soldats se devaient d'obtenir la permission de leurs supérieurs pour se marier. Cela signifie donc que Théodore était soldat en 1866. Né trop tôt (1840) pour apparaître dans les registres militaires en ligne, je n'avais pour l'heure aucune information sur sa vie de soldat (ou d'officier ?).

Ni une ni deux, je recherche ce point de droit sur internet : "Aucun militaire ou employé aux armées de terre et de mer ne peut se marier en France, et même hors de France, sans rapporter une autorisation spéciale de ses chefs. Aux termes des décrets en date des 16 juin, 3 et 28 août 1808, cette autorisation est accordée : par le Ministre de la guerre, aux officiers de tout genre en activité de service; par les conseils d'administrations des corps respectifs, aux sous-officiers et soldats (etc.)." Pourquoi, me direz-vous ? "Le motif de ce décret ( ... ) avait été d'empêcher que les officier ne pussent contracter des mariages inconvenants, susceptibles d’altérer la considération due à leur caractère." ( * )

Et voilà, au hasard d'une relecture, une nouvelle fenêtre s'ouvre, des questions fleurissent : quel type de document chercher ? où chercher ? ... (un arbre à questions vient de pousser subitement : voir l'article du challenge AZ sur ce blog Questions qui nous questionnent).

J'ai pris cet exemple parce qu'il est récent, mais je dois avouer que cet épisode m'est déjà arrivé : mention marginale oubliée dans le coin d'un page, acte trouvé après une deuxième ou troisième lecture des registres, blocage délié grâce à un témoin négligé... Bref, même si vous croyez avoir bien dépouillé tous vos actes, n'hésitez pas à relire, on ne sait jamais !
 

( * ) De l'état civil et des améliorations dont il est susceptible, M. Hutteau-D'Origny, 1823, consultable sur Gallica ici.




jeudi 19 juin 2014

#ChallengeAZ : Q comme questions qui nous questionnent

La généalogie c'est le jeu des mille questions.

Arbre à questions © FranceInter


La première d'entre elles : qui sont mes ancêtres ? C'est elle qui nous fait entreprendre cette aventure à travers les âges, les pages, les images...

Mais très vite, une question en amène une autre : Quel métier exerçaient-ils ? Quelle a été leur vie ? Où ont-ils vécu ? Où sont-ils passés (cf. article du présent Challenge AZ D comme disparu) ? ...

Questions qui restent parfois sans réponse.
Questions qui apportent leurs lots de surprises.
Questions sans fin (comme la généalogie).

Le manque d'archive se mêle à notre vision "moderne" :
Pourquoi Assumel Lurdin Louis Marie, tailleur d’habits, devient-il soudain cultivateur ?
Pourquoi les parents donnent-ils toujours les mêmes prénoms à plusieurs enfants de la même fratrie ?

Certaines questions se retrouvent sans doute chez tous les généalogistes : pourquoi une famille déménage-t-elle soudain ?
Par exemple, pourquoi Astié Augustin Pierre Jean déménage-t-il d’Aveyron en Anjou (dans les années 1870), avant de revenir en Aveyron (1882/1886) et de redéménager en Anjou (1888/1895), pour finir sa vie en région parisienne (1908/1914) ?

D'autres questions auront sans doute leurs réponses un jour, notamment lorsque je pourrai accéder aux archives correspondantes.
Par exemple, pourquoi le certificat de bonne conduite a-t-il été refusé à Roy Joseph Auguste lorsqu’il était dans l’armée ? Une simple consultation de son dossier militaire peut (ou pas... ) répondre à cette question.

Mais si ces questions peuvent paraître frustrantes (notamment lorsqu'elles restent sans réponse), elles sont le fruit de notre curiosité (et de notre imagination peut-être aussi parfois !). Elles sont surtout notre moteur : ce sont elles qui nous font avancer.

mercredi 18 juin 2014

#Challenge AZ : P comme préservez vos photos !

Mes photos les plus anciennes datent de 1871, soit une soixantaine d’années après le début des premières recherches sur la photographie par Niepce et une quarantaine d’années après l’invention « officielle » de la photographie (1839).

Photographe ambulant, © BM Lyon

Elle représente la famille Rols : Alexandre Rols, Marie-Anne Puissant son épouse et Élisabeth, leur fille aînée (alors âgée de trois ans). C'est un portrait fait en atelier. La famille est assise, devant une toile tendue (elle ne semble pas peinte). Le temps de pause est alors encore relativement long : près d'une minute. C'est sans doute pourquoi ils sont assis. Le plus souvent, un repose-tête était habilement dissimulé afin d'aider à tenir la pause. Chacun des deux parents tient fermement les bras de la petite fille afin qu'elle ne bouge pas et que le cliché soit net (cf. article Toile et balustrade sur ce blog). Ce cliché a sans doute été pris à Angers car le couple y habite, au moins depuis 1868.

Sur un certain nombre de clichés anciens faits en ateliers, on retrouve les accessoires classiques comme la toile peinte en arrière-plan, les fauteuils à accoudoirs ou fausses balustres qui sont un prétexte pour s’appuyer et tenir la pause sans bouger. Amusez-vous à les repérer !

Ces clichés anciens ouvrent une fenêtre sur époque très lointaine de la nôtre : cette époque où l'image était encore peu répandue. Cette époque où l'on se faisait beau pour figurer sur le cliché. Cette époque où on allait se faire photographier dans les ateliers ou, au contraire, les photographes ambulants venaient jusqu'à vous. Cette époque où les photos étaient aussi un vecteur d'information avec les clichés illustrant des événements, grands et petits (mariages, inondations, grandes expositions, fêtes locales... ). Cette époque où les clichés étaient édités en carte postale.

Les photos anciennes, c'est un moyen unique de mettre un visage sur ce qui n'était auparavant qu'une liasse d'archives ou une accumulation de dates. Soudain, ils sont là. Palpables. Presque réels. En l'absence d'information complémentaire, c'est aussi une façon d'en savoir plus sur la vie de nos ancêtres : la façon dont ils étaient habillés, les lieux où ils ont vécu, etc . . .

Parfois, on a la chance d'avoir l'histoire qui s'est transmise avec la photo. Je pense à ce portrait de Marcelle Assumel Lurdin, ma grand-mère, réalisé chez un photographe en 1934, qui la représente de trois quart dos. Cette photo fit, paraît-il, beaucoup parler car le haut du dos est dénudé : ô scandale !

Mais parfois les photos restent muettes : qui donc est ce moustachu à côté de Papy ? Et ce petit, là à gauche ? Silence. Alors, on ne le dira jamais assez : faites attention à vos photos anciennes. Si vous en avez, prenez en soin. Et, pendant qu'il est encore temps, interrogez vos anciens pour identifier les personnes en présence, les lieux, les événements photographiés. Car avoir une photo ancienne, c'est bien, savoir ce qu'elles racontent, c'est mieux.

Aujourd'hui nous pouvons prendre des dizaines de photos par jour (pour les plus addicts), presque sans y penser. Bien sûr, ce ne sont pas tous des chefs d’œuvre, mais elles reflètent notre vie quotidienne . . . Comme nos photos anciennes finalement.

Mais pensez à vos AAPE (arrière-arrière-petits-enfants), lorsqu'ils feront leur généalogie : classez et identifiez vos photos pour qu'ils ne galèrent pas comme nous aujourd'hui !