« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

dimanche 1 décembre 2024

Epilogue

Affaire Sénat de Savoie contre JAY-GUILLOT


La servante des JAY, Claudine VUAGNAT, fut relaxée suite à l’enquête. Elle continua à vivre à Samoëns où elle se maria avec Pierre BUFFARD. Ensemble ils eurent trois enfants. Elle s’éteignit à Samoëns en 1790, à l’âge de 67 ans.

 

Le chanoine CHOMETTY fut lui aussi relaxé. Il résigna [abandonna sa charge] en mars 1748 (lors de sa fuite, en fait). Relaxé dans cette affaire il fut, après les faits, nommé curé de Vercieu (Isère), où il mourut en 1763, à 53 ans.

 

 

Epilogue

Quant à mes ancêtres, l’épais dossier du Sénat de Savoie ne raconte pas comment les suspects principaux de cette affaire tragique furent arrêtés (ou se sont rendus ?). 

Je note la curieuse absence dans ce dossier du frère de Françoise GUILLOT, qui était procureur en Tarentaise (comme on l'a vu très brièvement à la lettre T de ce ChallengeAZ) : n'est-il pas intervenu en faveur de sa sœur et son beau-frère ? N'est-il pas devenu leur conseil ? Mais le pouvait-il seulement (je ne suis pas assez connaisseuse du système judiciaire savoyard de cette époque pour pour le dire) ? Par ailleurs, il nous manque un épisode (l'arrestation) : qui peut dire ce qu'il s'est passé à ce moment-là ?

Quoi qu'l en soit, de toute évidence, les JAY ont passé un certain temps en prison. Puis, comme on l’a vu hier à la lettre Z de ce ChallengeAZ, François JAY et son épouse Françoise GUILLOT furent graciés par Sa Majesté le Roi de Sardaigne, souverain de Savoie, par lettres patentes du 11 avril 1749 (requête de grâce présentée devant le Sénat le 8 juillet suivant et entérinée le 12 dudit mois). Leur libération a dû intervenir dans la foulée.

Ils retrouvent ensuite leur vie à Samoëns. Cinq ans plus tard, ils donnent naissance à leur troisième enfant (Jeanne Antoinette) ; suivi d’un dernier en 1760, mon ancêtre Jean François.

Visiblement ils ont réussi leur vie. Si, au moment des faits, ils ne possédaient que 200 livres de biens meubles (selon l’inventaire visible à la lettre R de ce ChallengeAZ), une trentaine d’années plus tard, ils dotent leurs enfants de 200 à 300 livres chacun, en plus du linge, objets quotidiens et bestiaux. En 1777 ils sont qualifiés de bourgeois.

Je les vois apparaître régulièrement dans les sources, comme les recensements de la paroisse (« Consigne de la communauté de Samoëns », dite aussi gabelle du sel) jusqu’en 1787.

Trois de leurs quatre enfants se marieront et auront une descendance (leur fille aînée est l’ancêtre d’Antoine DENERIAZ, le skieur alpin champion olympique à Turin en 2006.).

Françoise GUILLOT meurt en 1778 à l’âge de 52 ans. Elle n’a pas connu son premier petit-fils, né 4 mois après son décès, mais son époux connaîtra cinq de leurs petits-enfants.

Malade, François JAY rédige un testament en février 1787. Cependant, il survit à sa maladie puisqu’il est recensé en décembre de la même année.

Je perds la trace de François après ce dernier recensement de 1787. Il y est toujours dit maçon mais possède aussi quelques bestiaux (dont un cochon qu’il sale, d’où sa présence dans ce recensement lié à la gabelle). Il vit alors avec deux de ses enfants, Claude (resté célibataire) et Jean François - mon ancêtre -, ainsi que sa belle fille (épouse de Jean François) et sa petite-fille (enfant du couple). Il a alors 69 ans.

J’ignore où et quand il est décédé. Je sais seulement qu’il est dit « défunt » en 1825 (lors du second mariage de Jean François), mais ce n’est guère étonnant : il aurait eu 107 ans s’il vivait encore à cette date !

 

Sans le hasard d’une lecture sur un blog de généalogie* je n’aurais pas imaginé cette histoire, totalement invisible dans les sources traditionnelles de généalogie (N/M/D).

 

Après l’étude de cet épais dossier de procédure, il reste quelques non-dits : les relations pour le moins « peu orthodoxes » qu’entretenait Françoise GUILLOT avec son voisinage… Comment les JAY se sont-ils réinsérés dans la paroisse après ces événements violents ? Comment le couple a-t-il pu survivre à une telle histoire sans imploser de l'intérieur ? Quelle a été l’attitude des voisins à leur égard ? Etc...

Les sources et la généalogie sont pleines de mystères…

 

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Je remercie chaleureusement Paul CHEMIN, bénévole au Fil d’Ariane du département de la Savoie, qui a été photographier le dossier pour moi aux archives de Savoie (près de 200 clichés tout de même !), ainsi que les lettres de grâce.

Pour celles et ceux qui l’ignorent, le Fil d’Ariane est une association d’entraide généalogique : si vous ne pouvez vous déplacer dans un dépôt d’archives, un bénévole va prendre en photo le document souhaité pour vous. Basé sur l’entraide, c’est totalement gratuit. N’hésitez pas à faire appel à eux !

Demandes à déposer à l’adresse https://www.entraide-genealogique.net/

 

 

 

* Merci à Estelle qui a attiré mon attention sur le fonds du Sénat de Savoie lors du ChallengeAZ 2019 sur son blog « Sur la piste de mes ayeuls ».