Comme je suis un peu en avance, je m’enhardis derrière le comptoir en bois : les outils s’étalent, bien rangés : je les effleure à peine du bout des doigts. Deux paires de pinces de cordonnier, trois marteaux de cordonnier, les formes et petits outils nécessaires à un cordonnier, un grand poids de coupe, des fers et barres, quinquaille et clous. Plus loin encore une paire de pince et un marteau. Trois tranchants de cordonnier sont côte à côte : l’acier en a été affûté de multiple fois rendant les lames plus fines qu’une feuille de papier, mais encore parfaitement coupantes. Quant aux manches, ils ont été polis par l’utilisation de plusieurs générations. Sur l’un d’eux on distingue à peine une initiale très vieille, à moitié effacée, J.M. (Jean, le grand-père de mon hôte). Quarante formes de souliers attendent qu’on les manie avec respect et amour du métier. Et dans le coin, tout au bout, s’entassent les peaux : cent seize livres de cuir [il s'agit de livres de poids, et non de monnaie] ainsi qu’un cuir fort, sans doute réservé à l’usage de la fabrication des semelles.
Blog généalogique, souvenirs d'aïeux de Conques (Rouergue) à Samoëns (Haute-Savoie), en passant par l'Anjou, la Bretagne, l'Ain, la Suisse . . .
« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »
- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches
samedi 20 mai 2017
#RDVAncestral : de cordonnier en cordonnier
Comme je suis un peu en avance, je m’enhardis derrière le comptoir en bois : les outils s’étalent, bien rangés : je les effleure à peine du bout des doigts. Deux paires de pinces de cordonnier, trois marteaux de cordonnier, les formes et petits outils nécessaires à un cordonnier, un grand poids de coupe, des fers et barres, quinquaille et clous. Plus loin encore une paire de pince et un marteau. Trois tranchants de cordonnier sont côte à côte : l’acier en a été affûté de multiple fois rendant les lames plus fines qu’une feuille de papier, mais encore parfaitement coupantes. Quant aux manches, ils ont été polis par l’utilisation de plusieurs générations. Sur l’un d’eux on distingue à peine une initiale très vieille, à moitié effacée, J.M. (Jean, le grand-père de mon hôte). Quarante formes de souliers attendent qu’on les manie avec respect et amour du métier. Et dans le coin, tout au bout, s’entassent les peaux : cent seize livres de cuir [il s'agit de livres de poids, et non de monnaie] ainsi qu’un cuir fort, sans doute réservé à l’usage de la fabrication des semelles.
Chapeau ! Pas facile de donner une vie ou un contexte à ces énumérations qu'on trouve parfois dans les actes notariés.
RépondreSupprimerD'accord avec Pierre-Louis,ce #RDVAncestral, plein de vie, est très réussi et bien documenté.
RépondreSupprimerJe confierais bien mes souliers chez ce cordonnier.
-Ayant quelques cordonniers parmi mes ancêtres Angevins,je suis entrée avec bien du plaisir dans la boutique de Pierre-Joseph...
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