Sur les 3 724 actes (naissances, mariages et décès) dont nous disposons à ce jour, 269 signatures ont été identifiées. Quelques actes portent d'autres signatures mais on ne sait pas à qui les attribuer : au marié ou au père du mariés, lorsqu'ils portent le même prénom, par exemple.
Détail d'acte de mariage, AD79
Cela représente 7,22 %. Parmi elles, 50 sont des signatures féminines (soit 18,58 % des 269 signatures).
Bien sûr, nous aujourd'hui nous apposons nos signatures sur toutes sortes de documents, et sans même y penser, puisque l’illettrisme est devenu relativement rare dans nos sociétés modernes (7 % de la population française en 2013 tout de même). Mais pour nos ancêtres, il en allait tout autrement.
C'est l’ordonnance de Fontainebleau, en 1554, puis l’ordonnance civile
d’avril 1667, qui vont rendre obligatoire l’apposition d’une marque
autographe du nom propre d’abord sur les actes notariés, puis sur les
actes des registres paroissiaux. Dès lors, c’est une
nouvelle conception de l’individu et de son identité qui s’affirme : la
reconnaissance d’un être singulier, unique, parfaitement identifiable.
La plus ancienne signature date de 1605 : François
Legarré, signe l’acte de naissance de sa fille. Il habite Clefs (Maine
et Loire). Il n’y a pas de mention de métier : on ne sait pas quelle
profession il exerçait.
Par ailleurs, mon plus lointain ancêtre éponyme, Antoine Astié, signe son acte de mariage à Conques (Aveyron, en 1671), comme évoqué lors du premier article de ce challenge : A comme Astié).
Ces signatures sont toujours agréables à découvrir car elles rendent moins impersonnels
les actes d'état civils : on a alors l'impression de rencontrer
"vraiment" nos ancêtres. De plus, cela montre, ou plutôt laisse deviner, leur degré d'instruction : sait écrire, ou pas, manie facilement la plume, ou pas.
Ainsi certaines signatures sont
tremblotantes (Goret Pierre en 1704 ou Baud Jean Marie en 1813), et on
devine que la plume n’est pas un objet usuel chez quelques uns de nos
ancêtres.
Dibon Pierre, signe son acte de mariage à Villevêque (Maine et Loire) en 1659 : il écrit son nom en majuscule d’imprimerie et inverse le N (И) comme le font parfois les enfants qui apprennent tout juste à écrire. Apportons d'ailleurs ici une nuance : celui qui signe ne sait pas forcément lire et écrire : il peut avoir simplement appris à écrire son nom et le reproduire, sans plus (en particulier lorsque l'écriture est malhabile).
Les illettrés signent aussi ! Plus rarement, il est vrai. Dans ma généalogie, seuls les curés de La Coulonche et La Sauvagère (Basse Normandie) font en effet apposer une marque à ceux qui ne savent pas écrire. Le curé note alors, à côté d’une croix : « la marque deladitte anne guibé » (acte de mariage, 1768).
Certains ancêtres signent un acte (par exemple le mariage), mais pas les suivants (par exemple les naissances de ses enfants), sans que l'on puisse l'expliquer. De même, on pourrait penser que lorsque le père signe, ses enfants le feront aussi; ce qui n'est pas toujours le cas : ce n'est pas parce qu'il est sensibilisé lui-même à l'écriture et l'instruction qu'il voudra (ou pourra) transmettre cela à ses enfants.
On ne signe pas forcément son nom exact (sans même parler de l'orthographe des patronymes qui évoluent) : Borrat-Michaud Joseph signe ses actes « Michaud Joseph ». Chaillou Cécile, épouse de Puissant Noël, signe « Cécille Chaious femme Puissant ».
Aucun de mes aïeux
n'accompagne, ou ne remplace, sa signature d'un signe distinctif, comme
on peut en voir parfois (clé, ciseaux, encre de marine... ).
La signature de Guespin René, en 1653, est la plus alambiquée et décorée de fioritures; mais il est sergent royal et il a, lui, l’habitude de l’écrit de part sa fonction (on le voit d’ailleurs témoin dans de nombreux actes au fil des registres).