« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

vendredi 11 décembre 2015

Laurent est-il Roland ?

Le moyen le plus sûr de progresser dans ma recherche généalogique, est de repérer la génération supérieure dans un acte de mariage. Par exemple, lorsque Marguerite Thiberge se marie (avec Pierre Le Masson en 1653 à Morannes - 49), elle est dite fille de Laurent Thiberge et de Marie Roger. Grâce à cette indication de filiation j'identifie rapidement son acte de naissance en 1626, toujours à Morannes.

Mais là où cela se gâte, c'est à la génération des parents, Laurent et Marie. En compulsant les registres, je m'aperçois que Marguerite est la seule fille de Laurent Thiberge et Marie Roger. Par contre, Roland Thiberge et Marie Roger ont, à la même époque, cinq enfants (nés entre 1614 et 1636). Il n'y a pas d'acte de mariage aux noms de Laurent/Marie ni Roland/Marie (pas de registre de mariage antérieur à 1617 à Morannes). Ayant déjà trouvé plusieurs couples homonymes au fur et à mesure de mes recherches, j'avais donc abandonné là cette piste, ne pouvant pas prouver que Laurent était en fait Roland.

Reprenant aujourd'hui mes investigations, je commence par chercher l'acte de décès de Laurent : rien.
Un coup d’œil sur Geneanet pour voir ce qu'il s'y dit : 5 généalogistes font figurer ce couple dans leurs arbres, dont deux donnent une date de décès pour Laurent. Chic ! Je vais voir aussitôt à la date du 30 avril 1653 à Briollay : et là je trouve l'acte de décès... de Roland !

Un acte de décès peu ordinaire, d'ailleurs :

Acte de décès multiple, Briollay, 1653 © AD49

"Le 1 et le 2 jour du mois de may furent inhumés en le cimetiere
de briollay ceux dont les noms suivent cy apres s'estant par un funeste
accident noyés dans les eaux sur ledit marais de cette paroisse
de briollay
en premier Jean bochier, perinne huet, la veusve --- --- ---
deux fils de tourteau dont je ne sais les noms, Mathurine nai--
catherinne plessis, la fame dEstienne Sale et son fils age environ qu--
Louise Sale, Roland Tiberge Anthoine Gautier, René preau--
christophle beron, Jacques solber, Jean Roger, Francoise pichonneau
Adam bastau et sa fame perrine Matiguone, Magdeleine pinson, Mag--
Masse, Marie Morillon Julien Maubert et sa fame Pierre Geslot
et sa fame, Jeanne Chevrier la veusve le Masson et Jacque le
Masson son fils, Mathurin closier, René Ritouet, Isabel Au[diot]
veusve feu Giles Ritouet, Jean Landais perrine olivier, Jean lig---
et sa fille, Jean olivier et barthelemy son fils, louise colombeau
Jacqe claire, ---- piron et son fils René piron,

C'est donc une quarantaine de personnes qui se sont noyées ce jour-là. Et le fameux Roland compris. On n'a pas de détail sur ce "funeste accident", mais l'on sait que - plus tard - un bac traversait la Sarthe (grâce au Dictionnaire historique de Célestin Port, édité en 1876), rivière qui borde des parcelles nommées "Les Marais" : s'il existait déjà à cette époque, c'est peut-être ce bac qui s'est renversé provoquant cette noyade massive.

En élargissant un peu la recherche, près d'une vingtaine de généalogies incluant le couple Roland/Marie supplémentaires ressortent. Ils confirment le décès dudit Roland et les naissances trouvées dans les registres, dont celle de "ma" Marguerite.

Alors : Laurent est-il Roland ? Comment le savoir ?

Je fais le tour de tous les actes concernant les possibles frères et sœurs de Marguerite : leur père est toujours prénommé Roland. Idem pour l'acte de décès de Marie Roger, dite veuve de Roland Thiberge en 1670. En bref, c'est seulement dans les actes de naissance et de mariage qu'il est nommé Laurent.

C'est l'acte de décès d'une sœur de Marguerite (prénommée Madeleine) qui laisse penser que Laurent et Roland sont la même personne : en effet l'un des deux témoins est Pierre Le Masson. Si ses liens de parenté ne sont pas précisés, on reconnaît néanmoins la signature de l'époux de Marguerite.

J'adopte donc Roland (et tous ses enfants)... jusqu’à preuve du contraire !





7 commentaires:

  1. J'approuve cette décision mûrement réfléchie, ! En généalogie une grande prudence est nécessaire mais souvent l'intuition nous conduit sur le bon chemin.

    RépondreSupprimer
  2. Un cas intéressant. Les deux prénoms se ressemblent mais sont quand même assez différents. Roland une seule fois, ça peut être une erreur, mais Roland plusieurs fois, ça devient significatif. Je me suis donné comme règle absolue de ne jamais tirer de conclusion sans preuve. Avez-vous vérifié l'identité des parrains et marraines et leurs liens de parenté avec les enfants ? Non seulement pour le couple qui vous intéresse, mais aussi pour ses frères et soeurs présumés des deux côtés ? Très souvent, cet exercice permet de mieux identifier les parents. Bonne chance :-)

    RépondreSupprimer
  3. Il faut prendre son temps pour la réflexion, revenir et ensuite l'intuition se concrétise tout doucement. Mais il n'empêche, sans preuve totale, il faut écrire le différent sur la fiche de l'individu.
    et ....surtout ne pas oublier de mettre ses sources.

    Respectueusement, Catherine.

    RépondreSupprimer
  4. J'ai souvent trouvé cette confusion entre Laurent et Roland dans les registres du Morbihan. Elle portait sur le nom de famille et donnait lieu en plus à de multiples variantes orthographiques : Lorent, Lorand, Rolland... Cette dyslexie est peut-être due à la prononciation locale.
    http://gw.geneanet.org/mahelblonde_w?lang=fr&m=NOTES&f=varia#a_1

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. bonjour,
      habitant près de Briollay, je vous joins un extrait racontant un peu l'histoire de ce naufrage :
      Briollay, un naufrage catastrophique
      30 avril 1653 : journée d’épouvante à Briollay. Le lendemain avait lieu à Angers l’installation de Michel Gohin, maire, suivie de nombreuses réjouissances. 42 habitants (20 hommes et 22 femmes, dont 24 habitants de Morannes) venus de Précigné, de Morannes et d’autres paroisses, s’étaient embarqués sur la Sarthe, à destination de la ville d’Angers. Avec les prés inondés, un fort courant secouait le bateau et l’entraînait. Heurtant peut-être un tronc d’arbre et devenu incontrôlable, il chavira. Tous les passagers se noyèrent. Retrouvés les jours suivants, leurs corps furent inhumés dans le cimetière de Briollay de l’époque.

      Extrait du livre « Briollay » de Louis Maucourt (2006)
      cordialement lalie 49

      Supprimer
    2. Merci pour ce texte complémentaire !
      Voici les circonstances du drame éclairées.

      Supprimer