A la découverte
de nouvelles sources, tel est le sujet du généathème du mois. Pour sortir des
sempiternels registres paroissiaux, voire notariaux pour les plus audacieux,
sortez de votre zone de confort, nous conseille Sophie de la @gazetteancetres,
et explorez des sources inédites dans vos recherches.
Alors j’ai fait
un premier recensement rapide des sources que j’ai déjà compulsées :
environ 80 documents différents ! Ma zone de confort est plutôt large. Je
refais le même dénombrement, mais cette fois de façon exhaustive : je
monte à plus d’une centaine. Et tout cela en tenant compte du fait que j’habite
une région où aucun de mes ancêtres n’apparaît, ce qui fait que je suis
entièrement dépendante des documents de famille ou disponibles sur internet.
Donc, en attendant les pièces concernant la justice, par exemple, absolument
jamais en ligne (en tout cas dans « mes » départements) et qui
seraient, elles, véritablement inédites, je vous propose un tour d’horizon -
presque complet - des sources que j’ai pu voir, avoir, utiliser pour constituer
ma généalogie (en gras dans le texte) [1]. Évidemment, dans ces documents, il y
a une grande part de hasard : les mises en lignes qui varient d’un
département à l’autre, une trouvaille inattendue dans un registre, un
généanaute qui vous indique une piste à suivre et, bien sûr, la vie même de mes
ancêtres qui m’a amenée à explorer différents types de documents parce qu’ils y
ont eu recours eux-mêmes au cours de leur existence.
Des sources, des sources, des sources... © Coll. personnelle
A noter : tous les mots suivi d’un
astérisque* font l’objet d’une définition dans la page Lexique de ce blog.
Évidemment c’est
par là que l’on commence en général. Je ne reviendrais pas sur l’intérêt des
registres paroissiaux ou d’état civil (dit BMS*
ou NMD*), les fondamentaux. Mais
lorsque ceux-ci font défaut, on a parfois la chance de trouver un document qui
peut pallier à son absence : les bans,
un certificat de mariage ou un consentement parental peuvent remplacer
un acte de mariage introuvable par exemple. Glissé entre deux pages des
registres BMS/NMD ils peuvent nous indiquer éventuellement la date et le lieu
du mariage, la raison de l’absence des parents qui habitent loin mais donnent
leur consentement (vous avez remarqué ? les parents ne demeurent pas au
même endroit que leur enfant : vous qui les avez cherché si longtemps en
vain : en voilà l’explication…).
Pour
reconstituer la famille, les actes notariaux sont précieux bien sûr : contrats de mariage, testaments et codicilles sont les plus fournis en détails. Parenté, lieux
d’habitation, fratrie… mais pour
reconstituer la vie de la famille il existe aussi les dispenses de consanguinité*, reconnaissance
de dot (utile en particulier si le contrat de mariage est lacunaire), les successions… Si les enfants mineurs se
retrouvent orphelins vous pouvez découvrir une demande de tutorat ou de procuration
rédigée chez un notaire ou, comme c’est mon cas, dans les papiers de famille,
une convocation du conseil de famille.
Votre ancêtre a été blessé ou tué à la guerre : ses enfants ont peut-être
été déclaré pupille de la Nation
(j’en ai parlé ici).
L’état civil de
vos ancêtres est lacunaires : un petit tour par la presse, catégorie « état
civil », qui vous annoncent naissances, mariages ou enterrements. Les
papiers de famille ne sont pas à négliger alors fouillez votre grenier et ceux
de votre parenté : faire-part de
décès, livret de famille, certificat de décès, demande de congés maternité… Toutes ces
sources ne sont peut-être pas égales en importance, mais peuvent étoffer votre histoire
familiale.
Les documents
officiels qui recensent les populations vous donneront des indications :
situation familiale, domicile, âge, profession, etc… Les plus connue sont les listes nominatives (couramment appelées
recensements). Attention documents légèrement rébarbatifs et parfois « bourrés »
d’erreurs : à recouper avec d’autres sources pour être sûr !
Il faut toujours
garder à l’esprit que pour tous les documents il y a la lecture
« positive » (celle que vous voyez) et la « négative »
(celle qui est sous-entendue, mais non écrite). Ainsi, personnellement j’ai
aussi découvert dans les recensements, en creux, des disparités régionales dans
les façons de vivre (voir ici).
Mais ces listes
nominatives ne sont pas seules : il existe aussi, pour la Savoie (au sens
large) par exemple, les capitations
espagnoles*, mandements* ou état des âmes*. Dans la même veine, j’ai
également trouvé un rôle d’imposition*
en Aveyron.
Autre témoignage
« physique » : les tombes.
Et comme les documents papier, il y a ce qu’elles disent et ce qu’elles ne
disent pas. Les coutumes funéraires différentes selon les régions (plaques de
porcelaine, couronnes de perles…). Et on peut aussi tomber (sans mauvais jeu de
mot) sur un non-dit criant : à la recherche de la tombe d’un de mes
ancêtres d’une génération proche, je m’aperçois finalement que sa veuve n’a
jamais fait inscrire son nom sur sa tombe et qu’elle l’a mis là où il y avait de
la place afin de ne pas prendre une nouvelle concession, c'est-à-dire dans le
caveau de sa grand-mère à elle ; ce qui révèle beaucoup de choses sur
l’entente dans ce couple, n’est-ce pas ?…
Bon, si vous
avez de nobles aïeux, d’autres que vous ont sûrement déjà travaillé sur votre
branche patricienne : explorez la bibliographie,
armorial, notices généalogiques en tous genres. Mettez-vous à l’héraldique* :
blason*, sceau*, cachet*, seing manuel*…
(voir ici). Cela faisait aussi partie de la vie de nos ancêtres. Et si, pour beaucoup, tout
cela est aujourd’hui tombé en désuétude, leur importance autrefois n’est plus à
démontrer.
Au-delà de la
reconstitution de la vie familiale, il y a ce que j’appelle la « vie
intime ». Ce sont ces petites choses de rien mais qui, mises bout à bout,
font une vie. Si vous en avez la possibilité (et la chance) ne négligez pas la
mémoire familiale orale. Les souvenirs d’enfance, même s’ils sont brouillés,
même s’ils sont inventés (je n’ai jamais eu d’ancêtre corse, contrairement à la
légende familiale, comme je l’ai expliqué ici)
sont tellement précieux.
Dans les papiers
de famille j’ai aussi retrouvé en vrac des cartes
d’identité (inestimables : adresses, photos, signatures, etc…), cartes de communion, fiche dentaire, menus de fiançailles et de mariage, carte SNCF famille nombreuse, relevés
bancaires, plan et devis pour la
construction d’une nouvelle maison…
Dans la presse ou
revues spécialisées j’ai relevé des anecdotes, comme un concours de fabrication de ski remporté par mon arrière-grand-père (voir ici).
Si vous avez de
la chance, vous possédez des photographies :
outre les visages de vos aïeux, vous pouvez distinguer leurs vêtements, leurs
coiffes (comme ici). Et si vous vous demandez encore pourquoi ils ne sourient
pas, ceinturent le bébé ou font reposer leurs bras sur une balustrade, faites
un petit tour par ici.
Et puis, il y a
les signatures. En particulier quand
la photographie fait défaut (ou n’a pas encore été inventée), c’est souvent la
seule trace directe qui nous relie à notre ancêtre, les textes étant souvent
rédigés par les curés, notaires ou autres intermédiaires. Mais les signatures,
c’est eux. En vrai.
Pour les hommes,
les documents militaires peuvent être source de nombreuses informations. Elles
peuvent compléter, confirmer ou pallier une lacune. Les plus connues et les
plus fournies sont les fiches matricules,
couramment mises en ligne à partir de 1867 ou 1872. Mais avant ces documents il
y a aussi les listes de contingents,
les conseils de révision qui apportent
leurs lots d’informations. En Haute-Savoie j’ai trouvé une autre source de
recensement militaire : la consigne
des mâles*.
C’est avec tout
cela que j’ai su que très peu de mes ancêtres ont fait la guerre car la plupart
ont été dispensés, pour soutien de famille ou problèmes physiques (voir ici). Étonnamment, celui qui avait des yeux, je cite, « orangés très verdâtre » n’a pas été renvoyé dans ses foyers. Pourtant
je trouve personnellement que c’est un bon motif !
Si votre ancêtre
a fait une/des guerre(s), il est possible de suivre son parcours grâce à son livret militaire (si vous avez la
chance de le posséder), les Journaux de
Marches et d’Opérations qui détaillent les actions des régiments au jour le
jour (comme je le fais avec mon arrière-grand-père : #Centenaire1418 pas à pas) ou un dossier de carrière
conservés aux archives nationales par exemple. Il a accompli un acte de
bravoure ? Cherchez le diplôme de la citation
à l’ordre de l’armée. Il a été blessé ? Adressez-vous aux archives
médicales de l’armée (SAHMA) qui en
conserve peut-être une trace.
- La vie scolaire et professionnelle
Les générations
précédentes ont tout gardé ? Tant mieux. Pour ma part, je me suis bien
amusée à lire le bulletin de notes
de ma mère… Les diplômes, eux, sont soigneusement conservés : Certificat d’Étude, Brevet d’Enseignement
Commercial, etc…
Mais même s’il
n’a pas été à l’école, il y a de fortes chance pour que votre ancêtre ait eu un
métier (voire probablement plusieurs). Sauf, bien sûr, s’il était mendiant,
mais dans ce cas aussi vous aurez peut-être l’occasion de le savoir (voir le RDVAncestral dédié).
Là encore, les
papiers de famille peuvent vous fournir attestation
de travail, bulletin de paye, certificat de travail, diplôme de société récompensant
« les bons et loyaux services » de votre aïeul. Lettre de nomination, lettre de licenciement, pension d’invalidité, véritable
dossier de carrière peut-être… Si
vous avez une grand-mère qui garde tout, vous en saurez beaucoup…
Aux archives
aussi on peut trouver des détails sur la carrière d’un ancêtre, notamment s’il
a été employé par une administration qui gardera la trace de son dossier.
Dans le Journal
Officiel vous pourrez trouver nomination,
avancement ou pension.
Les archives
notariales regorgent d’informations les biens de vos ancêtres : acte d’achat ou d’acquis, acte d’état*, bail*,
ferme ou affermage*, arrentement*, cense*, cession*, donation*, échange*,
licitation*, vente*, subrogation*, partage, prêt, quittance*, rente*,
chastail* (cheptel). Votre ancêtre a pu faire une déclaration officielle (portant sur l’expertise à laquelle il a
procédé par exemple) ou mettre son/ses bien(s) en hypothèque. Enfin, après son décès on peut trouver une demande d’inventaire suscitée par ses
créanciers ou sa veuve, voire l’inventaire
lui-même et alors là c’est le Graal : toutes les possessions de votre
aïeul sont soigneusement détaillées, jusque dans leur état d’usure ; ce
qui donne de précieuses indications quand à leur niveau de vie ; voir ici).
Les avis dans la
presse peuvent compléter certains de ces documents, comme l’annonce d’une vente posthume.
Vos ancêtres
n’étaient pas seuls. Il y avait plein de gens autour (qui étaient les ancêtres
d’autres personnes, mais ça c’est une autre histoire). Bref, ils avaient une
vie sociale !
La plupart du
temps, ils ont passés des accords avec des voisins, des amis des parents. En
général, cela se faisaient devant notaires : c’est pourquoi en épluchant
leurs minutes on trouve tout un tas d’obligation*,
promesse*, transaction*, transport*, etc…
Ils pouvaient
s’engager dans la vie de leur paroisse : faire partie d’une confrérie* ou d’un syndic*, surveiller les comptes
de fabrique*, instituer une fondation*,
commanditer une nomination d’expert
pour établir l’état de la maison curiale ou présider à la nomination de main d’œuvre pour faire faire des travaux dans la
paroisse. Peut-être faisaient-ils partie de ces assemblées d’hommes qui
participaient aux délibérations
paroissiales, ou délibération des
habitants, ou bien étaient-ils désignés par ces assemblées lors d’un contrat de permission qui les
autorisaient à faire quelques tâches ou donner une somme d’argent à la
paroisse.
Plus tard, ils feront
peut-être partie des rédacteurs du cahier
de doléance de leur paroisse (voir ici). Et plus tard encore seront-ils inscrits sur les listes électorales (mais n’y cherchez
pas les femmes… enfin, pas tout de suite !). Comme les recensements
celles-ci peuvent confirmer des informations… ou vous embrouiller en vous en donnant
d’autres, même pas toujours véritables ! A vous de tout vérifier.
Dans les
registres paroissiaux on peut trouver des mentions qui sortent de l’ordinaire
grâce à des curés bavards : règlement
de compte, phénomènes climatiques extraordinaires, visite pastorale,
inauguration de cloches, etc… (voir ici ou là et bien d’autres sur le blog…). Ces événements qui ont été vécus par vos
ancêtres et ont, peut-être, influencés le cours de leurs vies.
La presse est
aussi assez prolifique en matière de fait divers : écroulement de la corniche de l’église, vol de lapins appartenant à
votre ancêtre, inauguration d’une usine où
il va travailler, etc…
C’est souvent
savoureux, toujours divertissant.
Enfin, tout
autour de vos ancêtres, il y a… tout le reste !
Les cartes et
plans vous donneront une idée plus ou moins précise (selon les époques) des
paroisses (cartes de Cassini) et/ou
des possessions de vos ancêtres : mappes
sardes en Savoie (voir ici) ou plans cadastraux napoléoniens
(mais bon, tant que les matrices – où sont inscrits les noms des parcelles et
leurs propriétaires – ne seront pas numérisées, les plans mis en ligne ne
servent servent pas à grand-chose ; les
archives, si vous vous nous lisez…).
Les dictionnaires historiques et géographiques
locaux vous donneront un aperçu de la paroisse/commune de votre ancêtre.
Attention toutefois : gardez à l’esprit qu’ils ont été rédigés à une
certaine époque et qu’il ne faut pas tout prendre au pied de la lettre (genre
une mention lapidaire « cette commune n’a aucun intérêt » !).
Ils permettent néanmoins de situer l’environnement dans lequel a évolué votre
ancêtre (à un instant T, donc), de se faire une idée sur l'histoire, l’altitude,
les cultures. En d’autres termes, de brosser un portrait « paysager » ;
que vous pourrez compléter avec les cartes postales anciennes qui vous
montreront architecture, costumes et coutumes…
Bref, une
multiplicité de sources qui donneront un supplément d’âme à votre généalogie.
[1] Et je ne
vais parler là que des sources que j’ai rencontrées au cours de mes recherches,
mais il y en a tellement d’autres…