« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

lundi 5 mars 2018

Pension de guerre

Je connais Modeste Boissinot depuis longtemps : elle fait partie des premiers ancêtres dont j’ai été photographier les actes directement sur place (avant la mise en ligne des registres sur internet). C’était mon premier « voyage généalogique », en l’occurrence dans les Deux-Sèvres. A Saint-Amand-sur-Sèvre pour elle, mais aussi dans les communes limitrophes du département ou de la Vendée voisine pour d’autres. Elle est mon ancêtre à la 8ème génération (sosa n°230). Au fur et à mesure des années, j’ai complété les informations que j’avais récoltées sur sa vie :
- Actes de naissance/décès,
- 3 mariages,
- 4 enfants trouvés,
- domiciles,
- emploi,
- etc…

Mais il reste des zones d’ombres, bien sûr…
Je sais donc qu’elle est donc née aux Châtelliers-Châteaumur (Vendée) en 1766. A partir de 1789 elle s’est installée à Saint-Amand avec son premier époux Jacques Barret, qui était de la paroisse. De lui elle a eu deux enfants. Mais il décède pendant les guerres de Vendée, en 1793 semble-t-il. Bien que mère de deux jeunes enfants de 2 et 4 ans, elle attend 8 ans pour se remarier.
En 1801 elle épouse François Bertrand (mon ancêtre direct) dont elle a deux enfants nés en 1803. Mais dès 1804 elle se retrouve à nouveau veuve avec 4 enfants à charge (16, 14, 1 ans). A ce moment-là je sais qu’elle est bordière à Saint-Amand, mais j’ignore si elle s’occupe seule de la borderie ou si elle est en association avec quelqu’un d’autre ; dans cette hypothèse cela ne peut pas être son père (décédé en 1803), ni son beau-père (décédé en 1801), je ne lui connais pas de beau-frère (mais cela ne signifie pas qu’il n’y en a pas) et quand à ses frères ils semblent être restés en Vendée. Peut-être y a-t-il des personnes extérieures à la famille, comme des domestiques ou valets de ferme ? En 1812 son fils aîné, âgé d’environ 22 ans, est dit cultivateur : peut-être travaillent-ils alors ensemble ?
Après le décès de son deuxième époux, elle attend 13 ans pour se marier une troisième fois, en 1817, avec Louis Marie Foulonneau qui est domestique ; ses enfants ont alors 28, 26 et 12 ans. Elle est dite fermière. Son fils aîné s’est marié en 1812, sa fille peut-être vers 1820 (ou avant ? date non connue), mais les deux petits sont sans aucun doute encore avec elle. Cette ultime union restera sans postérité semble-t-il, ce qui n’est gère étonnant : elle a désormais 50 ans.
Elle décèdera au bourg de Saint-Amand à 72 ans, en 1839.

C’est beaucoup et peu à la fois. Les archives paroissiales de Saint-Amand ont disparu et celles de la période révolutionnaire sont largement lacunaires. Sur le site des archives départementales, il n’y a pas de recensement en ligne antérieur à 1836 pour ladite commune, pas de tables de succession ou d’archives notariales : ma marge de manœuvre pour dénicher des informations supplémentaires reste donc assez mince.

Cependant, au hasard de mes lectures de blogs généalogiques, voilà que je retrouve la trace de Modeste Boissinot grâce Raymond Deborde (@RayDeborde), auteur du blog L’arbre de nos ancêtres. Raymond a été directement aux archives éplucher (courageusement) les registres de veuves ou blessées suite aux guerres de Vendée. Et voilà qu’il y a déniché ma Modeste !

Revenons sur le contexte : en 1812 Jacques Barret, fils de Jacques Barret et de Modeste Boissinot se marie (avec une femme aussi prénommée Modeste, soit-dit en passant…). Dans son acte de mariage il est dit que son père est décédé à Saint-Amand en 1793. Comme il n’y a pas de registre antérieur à l’an VI (1798) dans cette commune, je n’ai pas trouvé le décès de Jacques père. Je ne connais pas les circonstances de son décès, mais je n’ignore pas que la période est fort troublée dans ce pays à cheval sur la Vendée, les Deux-Sèvres et le Choletais… Je soupçonne donc les guerres de Vendée, mais sans preuve.
En 1804, c’est Modeste elle-même qui déclare le décès de son deuxième mari. C’est un fait assez rare pour une femme (action en général « réservée » aux hommes). Déjà, je m’étais dit que c’était une femme de caractère. Le fait que je n’ai pas trouvé d’homme dans son entourage pour gérer la ferme avec elle va d’ailleurs dans ce sens.

Lorsque le roi Louis XVIII arrive au pouvoir en 1814, il crée une commission afin de récompenser les soldats qui lui ont été fidèles, notamment pendant les guerres de Vendée. Parmi les survivants, beaucoup sont devenus « nécessiteux » car, blessés pendant les combats, ils ne peuvent plus travailler. Il reste aussi beaucoup de veuves, dont les époux ont été tués au combat, voire des blessées lorsqu'elles se sont elles-mêmes battues (voir l'article de Raymond). Les demandeurs/demandeuses étaient souvent dans une situation précaire, dans le besoin, voire carrément « indigentes » ou « pauvresses » pour les veuves n’ayant plus d’homme dans leur entourage pour les aider.

C’est probablement le cas de Modeste : elle a 25 ans lors du décès de Jacques, deux enfants de 3 et 4 ans, pas de famille proche. Lorsque la commission se met en place, elle a 48 ans, est veuve en secondes noces et deux ou trois enfants à charge.

La commission adresse l’ordonnance royale aux maires, qui sont chargés d’établir les dossiers de demande de pension. Après examen, ces pensions sont accordées (ou non). J’ignore cependant comment les maires ont établi leurs listes : Y a-t-il eu un appel général par voie d’affichage ou autre ? Est-ce que les prétendant(e)s se sont manifestés d’eux-mêmes ?
Bref, je n’ai guère été étonnée d’y voir apparaître Modeste : dans une situation précaire, mais sans doute non dénuée de caractère, elle a fait valoir ses droits. Comme les autres, elle a rédigé (ou fait rédiger car il semble qu’elle soit illettrée) une demande manuscrite relatant les états de services de son défunt mari, un extrait de registre de baptême, un certificat d’indigence certifié par le maire, et différents papiers notamment militaires. [1]

Raymond a compulsé deux types de registres, réalisés par arrondissements (chacun classés et renseignés un peu différemment) :
- Le premier vient du Ministère de la Guerre et s’intitule « État nominatif de trois cent soixante quinze veuve de Militaires de l’Armée vendéenne et femmes blessées auxquelles sa Majesté* a accordé des pensions par ordonnance » (* il s'agit de Louis XVIII)
- Le second s’intitule « État de propositions pour pensions annuelles à accorder aux veuves des militaires blessés de l’armée vendéenne ».

Ces documents nous apprennent différents éléments :
- que Modeste demeure toujours à Saint-Amand.
- que les rédacteurs des registres n’étaient pas trop regardants sur l’orthographe des patronymes (Baret pour Barret et Birssinot pour Boissinot !),
- que Jacques était simple soldat (mais du côté du roi donc),
- que Modeste était déclarée « indigente »,
- que Jacques est décédé à Luçon (et non à Saint-Amand comme je le croyais jusque-là),
- que la demande de pension de Modeste a été « brevetée », ce qui signifie probablement qu’elle a été acceptée : elle touchera 40 francs. Les a-t-elle reçus ? Ça c’est une autre histoire. Théoriquement les pensions ont été versées à partir de 1818. Mais, au fil des ans et des nombreux changements de régimes politiques, les dossiers ont souvent été classés sans suite ou le versement suspendu. Par ailleurs, une ordonnance de 1823 vient corriger le premier texte et impose que les veuves ne soient pas remariée. Or à cette date Modeste s’est déjà remariée deux fois ! Finalement, en 1832 Louis Philippe, souverain arrivé au pouvoir avec la Monarchie de Juillet (1830/1848), a complètement supprimé ces pensions. [1]


40 francs à l'effigie de Louis XVIII,1818 © coinshome.net

Par ailleurs, on découvre que Jacques est décédé à Luçon : cette petite ville qui se situe dans le Sud du département de la Vendée a connu trois batailles au cours de l’année 1793, en juin, en juillet et en août. Chacune de ces batailles a vu la victoire des républicains, avec un nombre élevé de blessés et de morts (notamment la dernière qui en comptabilise à elle seule plusieurs centaines). Dans les documents compulsés par Raymond, on dénombre 30 veuves dont les époux sont tombés à Luçon. Ces documents ne comportent néanmoins pas assez de détails pour savoir quand exactement est décédé Jacques. Je ne l’ai pas trouvé figurant sur les registres de décès de Luçon, notamment après la bataille d’août où le directeur de l’hôpital déclare un grand nombre de décès. J’ignore également le sort de Modeste, dont le mari s’est visiblement battu du côté des républicains, dans ce pays de chouans : en a-t-elle souffert ? Cela reste un mystère.

Est-ce pour cela que Modeste a attendu 8 ans avant de se remarier ? Parce qu’elle n’était pas bien vue ? Ou simplement parce qu’il n’y avait plus beaucoup d’hommes à marier au pays, vue l’hécatombe provoquée par le conflit (François a 7 ans de moins que Modeste et il est originaire de Combrand, situé à une dizaine de kilomètres de Saint-Amand).

En 1804, ledit François deuxième époux a bien fait une déclaration de succession (déclarée le premier germinal an XIII) mais seules les tables sont en ligne sur le site des archives départementales et je n’ai pas de détail quand aux biens transmis ni aux héritiers.
Lors de ses troisièmes épousailles, un contrat de mariage a été rédigé par Modeste et Louis Marie, devant Me Roy le 10 février 1817 (enregistré le 20) : l’époux apporte en dot 500 francs, tandis que l’épouse apporte 940 francs ! Ce qui est, reconnaissons-le, assez loin de l’idée  que je me faisais de « l’indigence » déclarée cinq ans plus tôt.
Je ne l’ai pas trouvée elle-même lors de son décès en 1839 (lacunes 1834/1840 des tables de succession), ni aucun testament qu’elle aurait pu rédiger : je ne sais donc pas qui a hérité de ses biens, et la valeur de ceux-ci.

Quoi qu’il en soit, grâce à Raymond, j’ai pu lever un coin du voile sur la fin du premier époux de Modeste… même s’il reste encore bien des questions sans réponse.



[1] Source Demandes de pensions des soldats vendéens

mercredi 28 février 2018

#Centenaire1418 pas à pas : février 1918

Suite du parcours de Jean François Borrat-Michaud : tous les tweets du mois de février 1918 sont réunis ici.

Ne disposant, comme unique source directe, que de sa fiche matricule militaire, j'ai dû trouver d'autres sources pour raconter sa vie. Ne pouvant citer ces sources sur Twitter, elles sont ici précisées. Les photos sont là pour illustrer le propos; elles ne concernent pas forcément directement Jean François.

Les éléments détaillant son activité au front sont tirés des Journaux des Marches et Opérations qui détaillent le quotidien des troupes, trouvés sur le site Mémoire des hommes.

Toutes les personnes nommées dans les tweets ont réellement existé.
___ 

1er février
On nous donne lecture de la citation du 51e Bataillon à l’Ordre de l’Armée : «  Ordre de la Xe Armée n°325. Le Général commandant la Xe Armée cite à l’ordre de l’armée le 51e bataillon de chasseurs : après être venus s’installer en face de l’ennemi sur une position difficile qu’il a dû organiser sous un bombardement violent et continu, s’est élancé brillamment à l’attaque sous les ordres du Commandant de Fabry Fabrègues, le 30 décembre 1917. A enlevé tous ses objectifs, faisant 550 prisonniers, prenant 2 canons, 4 mortiers, 16 mitrailleuses et un matériel important. » QG, le 18 janvier 1918, le Général commandant la Xe Armée, signé Maistre.

Citation ordre Xème armée

2 février
Reconnaissance des positions italiennes dans la région Est de l’Asiago.

3 février
Repos.

4 février
On repart !

5 février
Préparatifs de départ.

6 février
Le mouvement est retardé.

7 février
Une somme de 100 francs et une lettre de félicitation du Général commandant l’artillerie a été attribuée à la compagnie de mitrailleuses qui a abattu dans la nuit du 26 au 27 janvier dernier un avion ennemi.

8 février
On fait mouvement sur Thiene. Nouveau cantonnement du bataillon. Départ de Cartigliano à 7h. Itinéraire : pont de bateaux de Nove, S. Romano, Schiavon, Fosse, Mason Vicentino, Breganze, Thiene. Arrivée à 15h.
Carte Cartigliano-Thiene

9 février
Installation dans les cantonnements.

10 février
Repos.

11 février
Exercices. Marche par compagnie.

12 février
Ordre de bataillon n°186. Le sous-lieutenant Gautherot est affecté à notre compagnie.

13 février 
Exercices divers. Évolutions de compagnie et de bataillon.
J’ai froid. Je commence à tousser.

14 février 
La fatigue s’est accumulée, sans que je m’en aperçoive.
Je tousse de plus en plus. Cela me fatigue beaucoup.

15 février 
Exercices de cadres sur le fonctionnement des liaisons.
Ma respiration se fait sifflante. Marius Bosc, un camarade originaire de Saint-Etienne, qui a été infirmier, dit qu’elle ressemble à une tombée d’obus ! Il essaye de me soulager comme il peut…

16 février 
Revue du 4ème groupe par le Lieutenant Colonel Quinat. Remise de décorations.

17 février 
Repos. Je suis épuisé.

18 février 
Marche militaire. Je crache mes poumons tous les 10 mètres.

19 février 
Le froid n’arrange pas les choses. Je ne vais toujours pas mieux.

20 février 
La fièvre ne me lâche plus. J’ai si chaud qu’on se croirait en plein été !
La tête me tourne.

21 février 
Reconnaissance de cadres dans la région de Mare (secteur de Lusiana).

22 février 
Chaque quinte de toux me laboure comme une salve de 75 sur le no man’s land.
Je tiens à peine debout.

23 février
Je respire de plus en plus difficilement.

24 février
Le lieutenant de notre Compagnie, Martin, est nommé à titre définitif. Le bataillon fera mouvement demain, le 4e groupe allant occuper les cantonnements du 5e groupe. Préparatifs de départ.

25 février
Le bataillon quittera Thiene demain pour se rendre à Preara à la place du 14e Bataillon.

26 février
Mouvement de Thiene à Preara.
Heureusement l’étape du jour est courte. Je n’en peux déjà plus.
Carte Thiene-Preara

27 février
Installation dans les cantonnements. Très affaibli, je vais voir le toubib : « C’est terminé pour vous Borrat-Michaud ! A force de tousser comme ça vous allez nous faire repérer par nos ennemis ! On vous envoie vous soigner à l’arrière. Allez, oust ! ».
J’apprends en même en temps mon changement d’affectation à la 10ème Cie, mais ce n’est pas tout de suite que je verrai mes nouveaux camarades : je suis évacué du front et envoyé à l’hôpital.

28 février
Je suis évacué dans un hôpital de fortune en arrière-ligne. Un médecin m’examine rapidement et lâche un rapide : « Infiammazione e gonfiore dei dotti polmonari ». Je ne suis pas sûr de comprendre : je me tourne vers mon voisin de lit. « Bronchite » me répond-il. « Quelle chance tu as : tu vas voir de belles infirmières italiennes ! »


mercredi 21 février 2018

#Généathème : Le cabinet de curiosités

L’histoire pourrait commencer ainsi :

On célèbre la joie aujourd’hui. Une naissance inespérée. La mère s’est bien remise de ses couches. On a fait venir parents et amis pour admirer le nouveau-né, Nicolas. Les aînés du premier lit paternel sont là aussi. Et près de cheminée, il y a Pierre. Le vieillard de 72 ans reste assis là. Isolé. Il est heureux, mais reste incrédule. Il regarde Magdelaine, son épouse. Il n’arrive pas à croire à son bonheur. Elle est rayonnante, inondée du bonheur de sa récente maternité et de sa jeunesse ; elle qui n’a que 34 ans.
Déjà, lorsqu’ils se sont mariés, il y a 7 ans, il ne pensait pas à la joie qui lui procurerait cette nouvelle union…

Mais, comment en est-on arrivé là ?

Nicolas Rouault est mon ancêtre à la VIIIème génération (sosa n°154). Il est né en 1764 à Villevêque (Maine et Loire) du second mariage de son père Pierre. Celui-ci a épousé (en 1715) en premières noces Andrée Lemele, dont il a eu quatre enfants, puis Magdelaine Saulnier (en 1757) dont il a eu trois enfants. Nicolas est le dernier-né.

Jusque là rien de très anormal. Je poursuis donc mes recherches en remontant (facilement) d’une génération, le curé ayant aimablement renseigné l’identité des parents dans l’acte de mariage de Nicolas. Je m’intéresse à Pierre Rouault (sosa n°308). Celui-ci est aussi le dernier-né mais d’un premier lit cette fois. De la même manière l’identité de ses parents est indiquée (dans ses deux mariages). Pas de doute possible donc : son père, René, a épousé Perrine Dalibon, dont il a eu 5 enfants. Mais Pierre n’a quasiment pas connu sa mère car elle est décédée deux ans après sa naissance. Trois ans plus tard René s’est remarié avec Louise Repussard, - il fallait sans doute s’occuper des enfants, âgés de 5 à 13 ans - dont il a eu cinq autres enfants.


Extrait arbre famille Rouault

Mais ici les choses se compliquent : comme je viens de l’indiquer, la parenté de Pierre ne semble faire aucun doute car elle est très détaillée dans ses deux actes de mariages. Or Pierre est né en 1692. Marié la première fois en 1715, il a 22 ans. Mais lors de son second mariage en 1757 il a 64 ans ; ce qui n’est pas si mal. Or son épouse, Magdelaine Saulnier, elle, n’a que 27 ans, soit 37 ans d’écart ! S’ils ne détiennent pas le record dans mon arbre (eh non, j’ai mieux ailleurs…), ils obtiennent tout de même la médaille d’argent. Cependant, si vous vous rappelez le début de l’article, Pierre a eu trois enfants de son second mariage. C'est-à-dire qu’il a été père à 65, 67 et 72 ans !!! Bon là, pas de discussion possible : il gagne haut la main la médaille d’or du père le plus âgé de ma généalogie.

Donc, lorsque notre petit Nicolas est né, son père avait 72 ans ! Autant vous dire que mon logiciel de généalogie clignote de partout : « alerte ! alerte ! ». Pour un peu il se mettrait à sonner. En tout cas, c’est trop vieux pour lui, 72 ans, et il me le fait savoir. Bon, j’avoue que moi aussi je tique un peu. Alors je reprends tous les actes. Mais je ne décèle aucune anomalie. Je pense à frère homonyme éventuellement et je reprends la lecture des registres page après page pour être sûre de ne pas avoir loupé un frère. Cependant, comme la mère de Pierre, Perrine, est décédée 2 ans après sa naissance, cela ne laisse guère de place pour un frère plus jeune. Rien on plus avant. J’examine à nouveau tous les actes en ma possession sur les trois générations concernées, détaillant les témoins, m’intéressant particulièrement aux membres de la famille, mais là aussi tout semble concorder.

Rien à faire : il semble bien que Pierre ait été père, pour la dernière fois, à 72 ans ! [*] A l'âge où, donc, il aurait pu être arrière-grand-père. A-t-il profité des joies de la paternité (sa septième paternité) me direz-vous ? Un peu ma foi : il est décédé en 1776, âgé de 83 ans… Ce qui n’est pas si mal non plus, soit-dit en passant.
Nicolas, quand à lui aura davantage connu sa mère, qui décède alors qu’il est âgé de 28 ans et qu’il est lui-même marié depuis trois ans. Ses filles n’auront pas cette chance : l’année suivante, en 1794, il suit sa mère dans la tombe – il avait 30 ans seulement : les petites n’ont que un et deux ans. Comme quoi, la question d’âge n’est pas héréditaire…


[*] Si quelqu’un trouve une preuve contredisant cette thèse, qu’il n’hésite pas à se manifester…