Celui-ci, né en 1784, cultivateur propriétaire, apparaît sur les états des sections du cadastre napoléonien de Conques : il possède une vingtaine de parcelles dans la commune (1 bois, 3 châtaigneraies, 2 jardins, 2 sols et cours, 5 pâtures, 1 pré, 1 séchoir, 1 terre, 3 vignes, 3 bâtiments; pour un total imposable de 42,01 francs). Trois bâtiments sont construits :
- une grange et écurie, sur la parcelle 239 ;
- sa maison, parcelle 251, qui a 4 portes et fenêtres, classée dans la 8ème catégorie, elle vaut 4 francs.
- celle de la parcelle 252 en a 2 (10ème catégorie) et vaut 1 franc.
Une fois dans l’ancienne rue Droite, j’ai facilement reconnu les maisons 251/252 et, de l’autre côté de la rue, la parcelle 239 qualifiée de grange en 1840.
Le village de Conques est installé sur un site très accidenté. De nombreuses maisons appartiennent ainsi à deux propriétaires : l’un possède le premier étage ouvrant sur une rue haute, l’autre possède le rez-de-chaussée donnant sur une rue basse. C’est le cas de parcelle 252 : Jean Pierre Rols ne possède que le rez-de-chaussée ; l’étage, que l’on devine à gauche sur la photo, appartient à un autre propriétaire, François Bousquet.
Les rues étant étroites, il y a peu de recul pour prendre des photos ! De solides murs étayent parfois les constructions, comme on le voit côté 239. Cette grange a manifestement été transformée en habitation.
Déjà heureuse de cette visite, je ne me doutais pas de ce que j’allais trouver le lendemain aux archives…
Mon temps était compté, j’avais donc fait plusieurs listes de recherches à faire en priorité sur les cotes qui ne sont pas sur le site internet des archives départementales : listes de tirage au sort militaire, successions et quelques contrats de mariage dont j’avais mention par exemple… Le nombre de cotes est limité à 10 par demi-journée. Afin, de rentabiliser au maximum cette précieuse visite, je ne me suis pas contentée de récupérer les contrats de mariage visés mais j’ai consulté les liasses notariales en entier à chaque fois que j’en demandais une. J’ai ainsi fait des découvertes au hasard dans ces liasses.
C’est le cas pour l’acte concernant François Rols. Celui-ci est le père de Jean Pierre. Il est tantôt qualifié de marchand, vigneron ou propriétaire.
Le 9 messidor an XIII (28 juin 1805) il se présente devant Me Pierre Paul Flaugergues, notaire à Conques, avec Pierre Dalmon (est-ce le cultivateur né vers 1752, marié en 1800 avec Marie Servie ? Je pers sa trace après ce mariage – je n’ai pas trouvé d’autre Pierre Dalmon). Celui-ci possède la parcelle 237, qualifiée de "patus". Le patus désigne un terrain dépendant d'un bâtiment, destiné à ses commodités (cour intérieure, basse-cour, fumier, place) ; il peut être divis (appartenant à un seul propriétaire) ou indivis (plusieurs propriétaires en indivision, parfois la communauté des habitants). La parcelle 237 est donc une petite cour.
Souhaitant construire une bâtisse ou une grange sur une parcelle contigüe à celle dudit Dalmon, François Rols s'accorde avec son voisin pour avoir l’autorisation de "bâtir une muraille avec mortier, d'aplomb au roc, [au] nord, sur lequel ledit Rols élèvera la muraille à la hauteur qu'il jugera à propos, qui demeure et sera pour toujours à sa charge".
La question de l’eau étant de tout lieu et de tout temps une question cruciale, les deux parties s’accordent sur ce point :
Ledit Rols aura "toute faculté même de faire tomber les eaux du couvert du côté du patus dudit Dalmon qu'il recevra au moyen d'un canal pour les conduire dans la ruelle [...] qui sépare le patus sur lequel est bâti ladite grange d'avec d'autre patus restant audit rols. […] Ledit rols [pourra] recevoir [...] dudit dalmon les eaux qui découleront d'icelui sans aucune indemnité quelconque."
L’accord est très précis quant aux différentes possibilités des deux parties concernant cette muraille : ledit Rols "pourra faire placer des pierres saillantes dans le mur à construire du côté du patus de dalmon pour le soutien [dudit] canal ; et rols consent de son côté que dalmon ait la liberté de batir et faire construire un pilié sur la muraille du côté du patus de dalmon sur l'angle oriental de la grange dudit rols sur lequel il pourra placer des poutres et autres matériaux au cas il voulut augmenter sa maison sur ledit patus . Ledit dalmon sera tenu de laisser un jour pour l'emplacement [du] canal".
Or, cet accord entre voisins a lieu parce que François Rols fait bâtir une grange. Cette grange que l’on retrouve dans l’état des sections napoléonien au nom de son fils. Et que j’ai photographiée au début de ce mois (du moins son emplacement).
Et voici comment l’émotion ressentie sur place, dans le village, s’est trouvée doublée d’une autre devant un papier vieux d’un peu plus de 200 ans qu’a tenu et signé mon aïeul.