« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

lundi 8 juin 2015

#ChallengeAZ : G comme Gros

Je ne sais pas si vous le savez, et si vous ne le savez pas ce n’est pas dramatique, mais Jules a quand même eu trois épouses.

Trois mariages en moins de 10 ans.

Il épouse en premier, Marie Victorine Eugénie Chanal Hugon, une « tisseuse en soie » d’un an son aînée (lui-même a 26 ans). Le père de son épouse était garde champêtre au Poizat : est-ce par cette proximité de métier qu’il l'a rencontrée ? Ensemble ils auront une (unique) fille, Blanche, née en 1903. Mais Jules devient veuf pour la première fois en 1905.

11 mois plus tard, Jules épouse Marie Joséphine Durafour, une veuve âgée de 37 ans. Elle décède deux ans plus tard, sans qu’ils n’aient eu d’enfant.

En 1910, il épouse sa troisième (et dernière) épouse, Marie Félicie Gros. Ensemble ils auront 6 enfants, dont ma grand-mère Marcelle Philomène.

Gros Marie, années 1930 © coll. personnelle

Le destin est étrange : à peu de chose près Marie Félicie aurait pu décéder à son tour en 1912 (quatre ans avant la naissance de Marcelle). En effet, dans les documents concernant Jules Assumel conservés aux archives départementales de l’Ain, une lettre écrite de la main de Jules nous apprend que Marie est gravement malade : « aujourd’hui j’ai ma femme au lit malade de l’albumine [ 1 ]. Le médecin a déclaré que c’était très grave. »

Si vous avez lu attentivement cet article, vous aurez sans doute remarqué comme moi que ses trois épouses se prénommaient Marie. Au moins, ça évite les situations compromettantes lorsqu’on confond les prénoms !

[ 1 ] L'albumine est la principale protéine du sang, soluble dans l'eau et fabriquée par le foie. Elle empêche la fuite de l'eau contenue dans le sang (plus précisément le plasma) vers les tissus, où elle est susceptible d'entraîner des œdèmes (collection d'eau dans les tissus). Un niveau inférieur à la normale d’albumine peut être un signe de maladie des reins ou du foie.

Merci aux Archives Départementales de l’Ain pour ces trouvailles.
Sources : état civil, état du personnel des eaux et forêts.

samedi 6 juin 2015

#ChallengeAZ : F comme fiche de plantation

Je ne sais pas si vous le savez, et si vous le savez ça tombe bien moi aussi, mais dans les greniers familiaux il y a des trésors.

A vrai dire, je ne sais pas bien si ma tante et sa cousine l’ont trouvé dans un grenier ou ailleurs, mais elles ont exhumé des outils de travail de Jules un peu particuliers. Ce sont des fiches qu’il a consciencieusement tenues, lorsqu’il s’occupaient des plantations, dans le cadre de son métier de garde des eaux et forêts.
Un peu obscures (absconses ?) pour les néophytes, ces fiches détaillent les numéros de parcelles, les dates de plantation, le type d’arbre planté et leur provenance. On voit en particulier des parcelles proches de la maison où il habitait, rue de la Gare, appelées "arboretum des Aireaux (ou Ayraults)" minutieusement détaillées.


Fiche de plantation © coll. personnelle

« Les Hauts Aireaux (partie à l’Est du chemin)
6 coupons de 20 ares chacun environ
20 ares de surface inutilisés (lisières)
[Croquis des parcelles]

Coupon n°1 – noyers d’Amérique, semis de 2 ans
Plantés en décembre 1926 – nombre : 80, espacement 5 m
Provenance des plantes – partie semis faits aux Ponts de Cé avec des [… ?] récoltés dans la région, partie cultivés [ ?] aux pépinières Delaunay à Angers.
Rembourrage d’arbres plantés partie au printemps 24, partie remplacé en décembre 1926.

Coupon n°2 - Liquidambar styraciflua, semis de 3 ans.
Plantés en décembre 1926 – nombre : 70, espacement 5 m
Provenance des plantes : pépinières Delaunay à Angers.
Rembourrage d’arbres comme ci-dessus.

Coupon n°2 - Liriodendron tulipifera, plants de 3 [… ?].
Plantés en décembre 1923 [ ?] – nombre : 79, espacement 5 m
Provenance des plantes : pépinières Delaunay à Angers.
Rembourrage d’arbres cordifolia (150) et le surplus en arbre comme.
Quelques remplacements à plusieurs reprises en cours des années suivantes. »

Ce qui est touchant, outre de voir des documents écrits de sa main, c’est de constater qu’aujourd’hui encore ces arbres plantés par mon arrière-grand-père sont toujours là, proches de la maison qu'il habitait au 47 rue de la Gare.

Vue aérienne des Ponts de Cé et de la parcelle des Aireaux © Google Maps


Lui a disparu, mais les arbres veillent toujours…

Merci à ma tante, à sa cousine et à Google « vu du ciel » pour ces trouvailles.
Sources : documents familiaux, Google Maps.



vendredi 5 juin 2015

#Challenge AZ : E comme élection

Je ne sais pas si vous le savez, et si vous ne le savez pas ce n’est pas si singulier, mais la Seconde République institue en 1848 le suffrage universel (vote de l'ensemble des citoyens, par opposition au suffrage censitaire qui est basé sur la fortune).

La majorité électorale, âge à partir duquel on peut voter et donc où l’on figure sur les listes électorales, est de 21 ans (jusqu’en 1974 où elle est abaissée à 18 ans). Ces listes, dressées par ordre alphabétique, indiquent pour chaque électeur : nom, prénom, profession, date et lieu de naissance, domicile.

Les listes sont diffusées en ligne quand elles ont plus de 100 ans (recommandations de la CADA (Commission d'accès aux documents administratifs) et de la CNIL (Commission nationale informatique et libertés) s'opposant à la diffusion sur internet de données concernant des personnes susceptibles d'être encore en vie).

Jules apparaît dans les listes électorales :
  •  des Neyrolles, en 1905. Il a le numéro 10. Il est nommé Assumel Jules et dit scieur, né au Poizat et domicilié aux Neyrolles.
  •  de Martignat, en 1910. Il a le numéro 7. Il est nommé Assumel Jules et dit garde forestier, né au Poizat et domicilié à Martignat.
  • de Condamine la Doye, en 1913. Il a le numéro 1. Il est nommé Assumel Lurdin Jules Joseph Eugène et dit garde forestier, né au Poizat et domicilié à Condamine.
Extrait Listes électorales de Condamine, 1913 © AD01 
  •  de Condamine la Doye, en 1914. Idem.

Là encore, cette source apporte des informations qui peuvent pallier au manque d’état civil : date et lieu de naissance, profession, parfois même la parenté. Cela peut être très pratique si on est dans une impasse.

Pendant une fraction de secondes, je m’étonnais de ne pas trouver les épouses de Jules [ 1 ] : bien sûr, les femmes n’y figurent pas avant la fin de la Seconde Guerre mondiale puisqu’elles ne reçoivent le droit de vote que par une ordonnance du 21 avril 1944 (seulement !). Les mineurs, les étrangers et les personnes privées de leurs droits civiques n’apparaissent pas non plus sur les listes électorales.

Merci aux Archives Départementales de l’Ain pour ces trouvailles.
Sources : listes électorales.

[ 1 ] Oui, il en a eu plusieurs : pour en savoir plus, rendez-vous le 8 juin !