« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

mercredi 5 février 2014

Exploit ou fantôme ?

Barbot Marie, épouse de Pillet Jacques, décède au Plessis Grammoire (49) le 18 frimaire an VIII (soit le lundi 9 décembre 1799).
Décès Barbot Marie, AD49

"Aujourdhuy octidi dix huit frimaire lan huitieme de la republique
francaise une et indivisible sur les huit heures du matin
Par devant moy laurent flon agent minicipal de la commune
du plessis grammoire canton de pellouaille departement de maine et loire
ont comparu en la maison commune le citoyen jean barbot cultivateur agé de
quarante neuf ans, et louis gougeon aussi cultivateur, tous les deux domiciliés de
foudon en cette commune ledit gougeon agé de quarante huit ans, ledit barbot
pere de la defunte marie barbot, et ledit gougeon oncle deladitte deffunte, lesquels
m'ont declaré que marie barbot femme de jacques pillet, agée de vingt deux ans
est decedée d'hyer sur les sept heures du soir dans son docimile sis a foudon, sur
cette declaration apres mettre assuré dudécès deladite marie barbot femme dudit 
jacques pillet jay redigé le present acte, que les dits jean barbot et louis
gougeon ont declaré ne scavoir signer
fait en la maison commune du plessis grammoire les jours mois et an
cy dessus"

Jusque-là, rien d'anormal, si ce n'est le jeune âge de la défunte.

Mais là où cela se corse, c'est qu'elle donne encore naissance à deux filles en 1800 et 1803 !

- Marie née le 17 brumaire an IX (soit le 8 novembre 1800) :


Naissance Pillet Marie, AD49

"Du dix septieme jour du mois de brumaire l'an neuf
de la République française.
Acte de naissance de marie pillet née le
seize brumaire a quatre heure du matin fille
de jacques pillet cabaretier et de marie barbot sa femme 
demeurant a Ingrande
Le sexe de l'enfant a été reconnu être femelle
Premier témoin, Pierre maurice chabain aubergiste agé de
quarante ans domicilié a Ingrande
Second témoin, perrine avrillaud veuve mathurin davy agé de cinquante
six ans demeurant commune de la chapelle grande tante de lenfant
Sur la requisition à nous faite par ledit jacques pillet pere de lenfant
Et ont declarés ne scavoir signer fors ledit chabain qui
a signé avec Nous
Constaté suivant la loi, par moi jacques jean du dieu richard maire de la
commune d'Ingrandes faisant les fonctions d'officier public de l'était civil."

- Félicité née le 24 germinal an XI (soit le 14 avril 1803) :

Naissance Pillet Felicité, AD49

"Du vingt quatrieme jour du mois de germinal l'an onze
de la République française.
Acte de naissance de felicité pillet née le
jour d'hier a quatre neuf heure du soir fille
de jacques pillet cabaretier et de marie barbot son
epouse de cette commune
Le sexe de l'enfant a été reconnu être femelle
Premier témoin, jean pellé aubergsite de la commune de montrelais
Second témoin, felicité mercier fille majeure proprietaire de cette
commune
Sur la requisition à nous faite par marie jeanne denion epouse rené rousseau
[...] pour absence du pere
Et ont signes fors laditte femme rousseau qui ne le sait
Constaté suivant la loi, par moi jacques jean du dieu richard maire de
Ingrandes faisant les fonctions d'officier public de l'était civil."

C'est pas fort, ça peut-être ??? 

Bon, l'histoire se complique encore car en 1808 Jacques a (encore) déclaré le décès de Marie Barbot; mais elle est qualifiée de cousine (et non d'épouse) et "fille de confiance" (= gouvernante, servante attitrée selon D. Chatry).

De plus, lors du décès de Jacques Pillet (en 1810), il est dit "mary de Marie Barbot"; ce qui laisse supposer qu'elle est toujours vivante. D'ailleurs elle l'est toujours en effet lors du mariage de Marie Pillet (celle née en 1800).


Bon je ne crois pas trop aux fantômes qui ressuscitent, donc on serait plutôt en présence d'homonymes (de nombreux homonymes). Mais la coïncidence est troublante, tout de même : deux couples homonymes à quelques kilomètres de distance. Cela prête à confusion. 
Je me suis d'ailleurs laissée avoir, heureuse de trouver l'acte de décès de Jacques Pillet longtemps cherché sans succès. Mais il faut bien se rendre à l'évidence. En rédigeant cet article, je m'aperçois enfin que les parents dudit Jacques sont mentionnés dans son acte de décès de 1810 et ne correspondent pas à ceux de "mon" Jacques. Comme quoi, on ne lit jamais assez les actes qu'on a sous les yeux. Les deux "filles posthumes" n'appartiennent donc pas à "mon" couple Barbot/Pillet.

Adieu exploit ! Adieu fantôme !
. . . Il ne me reste plus qu'à chercher à nouveau le décès de Jacques.

2 commentaires:

  1. Juste une petite précision : le jour indiqué dans le premier acte est "octidi" et non lundi. Le calendrier révolutionnaire avait même modifié les appellations des jours, les mois étant divisés en décades et non plus en semaines.

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    1. Oui, merci de m'avoir rafraîchi la mémoire. Je ne parvenais pas à déchiffrer et comme ce jour était un lundi...

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