« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

lundi 29 juin 2015

#ChallengeAZ : Y comme y penser

Je ne sais pas si vous le savez, et si vous ne le savez pas, ça n’a rien d’étonnant, mais j’y pense souvent, à Jules.

A Jules et à ceux qui sont entre lui et moi.
A Jules et à tous ceux qui l’ont précédé.

Jules et son dernier fils Roger, vers 1923

En voyant ce cliché, je pense à la transmission entre génération. Avec les renseignements recueillis au cours de mes recherches, j’approche l’existence de mes ancêtres, de façon plus ou moins précise. Je ne les ai pas connus, et pourtant ils me sont devenus familiers. Pauvres ou riches, lettrés ou non,  morts jeunes ou centenaires, j’exhume petit à petit de feuillets anciens ces vies qui ont tous un point commun : ils me sont apparentés.

Ils sont mon héritage.

Merci à la passion généalogique qui m’anime.
Source : photo coll. personnelle, état civil, actes notariés et toutes ces sources qui font revivre mes ancêtres.

samedi 27 juin 2015

#ChallengeAZ : X comme xylophage

Je ne sais pas si vous le savez, et si vous le savez c’est tant mieux, mais en tant que garde des eaux et forêts, Jules a dû rencontrer un certain nombre d’insectes xylophages. 

Trace d'insectes xylophages © tabolive, fotocommunity.fr

Ces insectes, dont les larves et parfois les adultes, creusent sous l'écorce ou dans le bois des galeries caractéristiques pour se nourrir.  Il en existe des genres et des espèces très nombreuses et plus ou moins spécialisés : certains ne consomment que le bois d'une seule essence, ou uniquement le tronc, les branches ou les racines, d'autres ne consomment que le bois brûlé ou le bois détrempé, etc... Si certains ont un impact désastreux chez les humains, en consommant des planches, poutres ou divers gros objets en bois et faisant des ravages dans les maisons ; d’autres au contraire jouent un rôle vital en augmentant la vie bactérienne du sol, contribuant à une régénération forestière naturelle, plus rapide et efficace. C’est ce que l’on appelle aujourd’hui une gestion écologique des forêts.

Est-ce dans les années 1920 on y était déjà sensible ? Je n’ai malheureusement pas beaucoup de détail sur cet aspect du travail de Jules.

Mais il avait d’autres activités, dont le souvenir est parvenu jusqu’à nous :
Jules faisait le soir la tournée des bords de Loire pour surprendre et verbaliser les braconniers.

Et il allait parfois beaucoup plus loin : domicilié avec sa famille à la maison forestière, rue de la Gare aux Ponts de Cé (Maine et Loire), il se rendait à Brioude (Allier) pour aller chercher des saumons qu'il vidait de leurs œufs. Il les disposait sur des baguettes comme des perles roses et les baignait par un arrosage continuel. Son jeune fils Robert eut d’ailleurs un jour le bras cassé par le moteur du système d'arrosage.

Merci à la tradition orale familiale.
Source : tradition orale familiale.


vendredi 26 juin 2015

#ChallengeAZ : W comme wagon et instants fugaces

Je ne sais pas si vous le savez, et si vous le savez c’est vraiment bizarre, mais quand Jules a déménagé de l’Ain vers le Maine et Loire, il a pris le train.
Wagon © hampage.hu

La famille Assumel-Lurdin est arrivée en Anjou grâce au chemin de fer. Jules avait enveloppé ses deux petits garçons, Robert et Raymond (âgés de 2 et 3 ans), dans sa grande cape et les avait installés pour dormir dans les filets à bagages du wagon.

Marie, son épouse, en arrivant en Anjou avait déclaré : "Au moins ici, il n'y a pas de neige...". Mais... il y eut les crues !!!
La famille habitait aux Ponts de Cé, en bord de Loire (cf. article F comme fiche de plantation), fleuve sujet aux débordements réguliers. Jules installait alors un caillebotis sur des parpaings. Les meubles étaient remontés. Mais il n’y avait plus de chauffage ! Les objets tombés au sol (à l’eau !) étaient récupérés après la crue. L'eau était puisée d'un côté et jetée de l'autre. Jules conduisait les enfants en barque à l'école jusqu'au bout de la rue inondée. Un jour, il dut se raccrocher à un arbre pour que la barque ne soit pas emportée. Une autre fois, conduisant sa fille Blanche à son travail, il eut si peur qu'il dut y renoncer.

Les fils de Jules avaient pour mission de ramener dans leur charrette des copeaux à brûler pour fumer les anguilles. Un jour, les roues de la charrette restèrent coincées entre les rails du tramway. Le conducteur mécontent descendit pour "râler après les enfants" [ 1 ].
Dans "Le Pré Rond" il y avait une seule entrée. Les gosses allaient, après l'école, y garder les biques… mais ils jouaient souvent au lieu de les surveiller. Pourtant gare à eux si les biques s'échappaient dans le jardin ou le pré du voisin ou si l'une d'elles se blessait aux pies dans les épines ! Marie, l’épouse de Jules, trayait les biques. Le lait était consommé en soupe.

Le dernier-né, Roger, à peine âgé d’une dizaine d’années, jouait l’été avec un voisin venu en vacances aux Ponts de Cé, prénommé Daniel. Natif d’Angers, il avait le même âge que lui. Ensemble ils s’étaient lancé un défi original : le premier à devenir pape ! Roger devint simple curé de paroisse, puis aumônier des prisons, mais n’accéda jamais à la fonction suprême de l’Eglise catholique. Son ami Daniel, lui, passa totalement à côté du challenge puisqu’il devint acteur. Son nom était Gélin. Daniel Gélin.

Le plus beau souvenir de Marcelle : les soirées autour du fourneau. Jules et Marie, ses parents, chantant à deux voix, à la veillée, en famille.


[ 1 ] Terme fort poli utilisé par ma grand-mère Marcelle.


Merci à la famille pour ces souvenirs, ces fugaces instants de la vie qui s’évaporent comme un murmure dans le vent.
Source : tradition orale familiale.