Affaire Sénat de Savoie contre JAY-GUILLOT
Au cours des investigations, il apparu que le Révérend CHOMETTY avait joué un rôle dans cette affaire. Or, en tant qu’ecclésiastique, il ne pouvait être jugé par le tribunal laïc. L’avocat fiscal général prit donc sa plume :
« A nos seigneurs,
Il résulte, suite à la
procédure faite par le Sieur juge de Samoëns à sujet d’un meurtre commis à la
fin du mois de janvier, sur la personne du nommé Vincent REY soldat dans le
régiment de Séville, que le Révérend Nicolas CHOMETTY chanoine de la collégiale
dudit Samoëns se trouve impliqué dans ce délit avec François JAY et la
Françoise GUILLOT sa femme. Et comme ledit juge de Samoëns ne peut pas être
compétant à l’égard dudit ecclésiastique, et qu’il ne convient pas de faire
différentes procédures sur le même fait, le vice fiscal requiert, à ce qu’il
plaise au Sénat, de commettre le Sieur juge mage, et en cas d’absence ou d’empêchement
le Sieur son lieutenant, qui sont les juges naturels des délits communs contre
les ecclésiastiques.
Lettre signée par Monsieur DUFRESNEY
Par cette demande, le juge mage* fut donc requis de poursuivre la procédure.
Horace-Victor SCLANDI SPADA, le Président du Sénat de
Savoie, émit un décret énonçant que, suivant la demande de l’avocat fiscal
général, le juge mage de Faucigny soit commis dans cette affaire - et en cas
d’absence ou d’empêchement son lieutenant à sa place - pour procéder, en l’assistance
de l’avocat fiscal provincial.
« Fait à Chambéry
au bureau du Sénat le vingt quatre février mil sept cent quarante huit. »
Ce fut donc Me RAMBERT qui reprit le dossier après le juge DELAGRANGE, à partir du 24 février, suivant le décret du Président du Sénat de Savoie.
Deux jours plus tard, le juge mage fut encouragé à poursuivre la procédure. Si toutefois l’official [prêtre délégué par un évêque pour exercer en son nom des fonctions de juge] souhaitait reprendre l’affaire, ce serait au juge mage d’aller chez lui avec l’avocat fiscal, et son greffier, et il reviendrait audit official à interroger les témoins et dicter leurs dépositions à son greffier et à celui du juge mage. Néanmoins l’avocat fiscal général pensa que cette instruction resterait inutile parce que le tribunal de l’officialité de Genève n’avait fait aucune démarche dans ce sens.
« Au reste vous verrez ce qui a déjà été fait qu’il y aura encore d’autres choses à faire, c’est à dire de suivre un peu les accusés après leur fuite pour savoir ce qu’ils disent. »
L’histoire de la soutane d’été du Révérend CHOMETTY (voir la lettre H de ce ChallengeAZ) revint dans la procédure puisqu’il paraissait qu’il la portait immédiatement après la découverte du cadavre, sans doute pour qu’on ne vit pas le sang qui était sur celle d’hiver. « C’est un fait à éclaircir. »
« Chambéry le 26 février 1748,
Votre très humble très
obéissant serviteur DUFRESNEY »
L’avocat fiscal de la province de Faucigny s’adressa à son tour à son juge mage, puisqu’à l’occasion du meurtre commis, plusieurs particuliers de Samoëns (notamment les nommés François JAY et la Françoise GUILLOT, mariés, et le Révérend Nicolas CHOMETTY, chanoine de la collégiale) étaient soupçonnés et qu’ils se trouvaient évadés ante inquisitionem [avant l’enquête]. Or la peine qu’ils pouvaient encourir était non seulement corporelle mais aussi ensuivie de la confiscation de leurs biens.
Il proposa donc de commettre Me BIORD notaire collégié, ou
tel autre notaire résident rière Samoëns,
pour procéder à l’annotation [état et inventaire des biens saisis
et marqués par l’autorité de justice sur un criminel ou sur un accusé] des
biens meubles et immeubles, effets et bestiaux desdits mariés JAY. Et comme les
effets et biens dudit Révérend CHOMETTY se trouvaient sur le territoire de la Taninges,
il demanda de commettre Me MONTANT, notaire collegié résident en ce lieu-là,
pour procéder de même à l’annotation, en l’assistance du syndic ou de Me
JACQUIER.
« Signé par Monsieur
PRESSET substitut avocat fiscal provincial »
* Pour se remettre en mémoire les rôles attribués aux différents juges de Savoie, voir la rubrique « Pour en savoir plus » de l’intro de ce ChallengeAZ.
Ça en fait du beau monde tout ça !
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