« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

samedi 2 novembre 2024

B comme blessures

Affaire Sénat de Savoie contre JAY-GUILLOT


Dans les bois de Bérouze, Me DELACOSTE, le chirurgien, fit valoir qu’il n’était pas facile de procéder à la visite [autopsie] du cadavre sur la neige et dans les buissons où il était couché et plié. Le juge en convint et ordonna à un paroissien de prendre son cheval et de préparer un traîneau pour conduire le cadavre au bourg de Samoëns. Ce qui fut sur le champ exécuté : les témoins le mirent sur le traîneau et tous s’acheminèrent jusqu’au devant de la maison où s’assemble le conseil de la paroisse située près de la place du bourg. Ensuite le cadavre fut transporté dans la chambre pour que le chirurgien en fasse l’autopsie.

 

Blessures, création personnelle inspirée de V. Wagner

Toujours assisté comme on l’a dit ci-devant [c'est-à-dire hier à la lettre A de ce ChallengeAZ] le juge fit prêter serment à Me Noël DELACOSTE, le chirurgien, de procéder fidèlement à la visite du cadavre et de déclarer ensuite le genre et la cause de sa mort, avec toutes les circonstances qu’il croyait pourvoir être rencontrées, s’il avait perdu la vie avec arme ou autrement.

Non sans avoir, préalablement, rappelé l’importance du serment et les peines qu’encourent les parjures, « tant par les loix divines humaines que par la disposition des Royales Constitutions ».*

 

Me DELACOSTE, assisté de deux témoins, effectua l’examen et fit son rapport au juge. Plusieurs coups furent constatés :

- un à la tempe, de la largeur d’un petit doigt, et pénétrant jusqu’ à l’os, sans doute fait avec un couteau ou un stylet.

- au côté droit, une plaie à côté de l’oreille sans doute faite avec un instrument contondant comme une pierre ou un bâton.

- une autre « playe du costé droit de l’estomach ».

 

Le chirurgien pensait que ces trois blessures étaient chacune plus que suffisante pour avoir causé la mort au cadavre.

 

Il avait, par ailleurs, trouvé une douzaine de plaies dans la cuisse droite, toutes pénétrantes jusqu’au fémur ; lesquelles, ainsi que celle de l’estomac, avaient été faites avec un couteau ou stylet et avec le même instrument puisqu’elles étaient toutes de la même largeur.

Une autre plaie avait été trouvée au dessus du genou droit et deux contusions sur l’épaule gauche et « sur les humerusse de l’homme platte » [humérus de l’omoplate].

 

Le chirurgien pensait que, de toutes les plaies et contusions qu’il avait constatées, il n’y avait que celle de la tête et de l’estomac qui avaient pu causer la mort du cadavre, et provoqué l’écoulement de sang qu’ils avaient vu répandu dans la chemise, son manteau et sa culotte. 

 

Le juge ordonna ensuite à Me VUARCHEX de plier la gaine de cuir trouvée sur le cadavre dans du papier et de le cacheter en deux endroits différents avec son sceau, représentant trois poules et un chevron sur cire rouge**, pour en conserver l’identité.

 

Le cadavre fut ensuite inhumé dans le cimetière de la paroisse de Samoëns***.

 

 

 

 

 

 

* Pour mémoire ces Royales Constitutions sont un ensemble de textes régissant le droit privé en Savoie (voir intro de ce ChallengeAZ pour en savoir plus).

** Le juge DELAGRANGE décrit trois fois son sceau au cours de la procédure et chaque fois d’une manière différente. Il est donc difficile de se faire une idée précise dudit sceau, d’autant plus qu’il utilise des termes qui ne sont pas conformes aux lois de l’héraldique.

*** Selon l’instruction : il n’en est pas fait mention dans le registre paroissial des actes de sépultures de la paroisse.

 

 

 

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