Lien vers la présentation du ChallengeAZ 2018
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Le Kiosque c’est le nom du lieu où Jean-François a probablement cru mourir. En fait il n'a été "que" gravement blessé.
Depuis un an, c'est-à-dire sa première affectation, Jean-François combat au sein du 23ème BCA (pour plus de détails, voir la lettre B), dans « l’armée des Vosges ». Début décembre 1915, il est de retour sur la ligne de front près de Metzeral (il y avait déjà combattu en juin). Du 15 au 24 juin 1915, en effet les combat détruisirent quasi-intégralement la vallée de Munster (près de Colmar) où se trouve la ville de Metzeral et saigna les armées : 5 000 à 7 000 morts français et autant du côté allemand. L’enjeu était de reprendre l’Alsace, alors allemande, comme la Moselle, depuis 1871 (voir la lettre L).
En décembre 1915, l’ennemi est si proche que l’on peut le distinguer à l’œil nu : ainsi le 10 décembre on peut lire dans le JMO (voir la lettre J) : « Un Boche très jeune portant une casquette a été tué sur le parapet de la tranchée ennemie. » ou le 22 : « On voit se croiser environ 2 sections, probablement en cours de relève. ».
Extrait carte d'état-major Metzeral/Le Kiosque © AD68
Jean-François est basé dans les tranchées du Kiosque, situées au Nord Est de Metzeral. Il subit plusieurs bombardement, comme le 13 décembre : « l’ennemi envoie sur nos tranchées environ 25 bombes et une dizaine d’obus. Deux Chasseurs [sont] blessés par éclat d’obus ». Le largage de bombes (obus de gros et petits calibres) est quotidien, mais le bataillon subit aussi des attaques à la grenade ou à la mitrailleuse. Les tranchées subissent de nombreux dégâts. Ces tirs de harcèlement ont lieu indifféremment dans la journée (matin, après-midi, soirée) mais également la nuit. Le JMO fait état de pertes régulières parmi les Chasseurs, qu’ils soient blessés ou tués.
Le 28 janvier 1916, l’ennemi envoie dans la journée une trentaine d’obus de 105 sur les tranchées du 23ème. Jean-François en recevra un éclat, lui provoquant une « plaie pénétrante dans la région claviculaire gauche sans lésion osseuse ». Il est évacué pour faire soigner sa blessure.
A la date du 28 janvier figure dans le JMO, après le détail des combats du jour, la mention suivante : « Pertes : 1 Chasseur tué par grenade à fusil, 1 Chasseur blessé ». Si son nom n’est pas mentionné, je suppose qu’il s’agit là de mon arrière-grand-père (peut-être).
Grâce au SAMHA (Service des Archives Médicales et Hospitalières des Armées), j’ai retrouvé la trace de Jean-François après sa blessure. Je sais qu’il a été transporté par l’ambulance alpine n°2/64. Celle-ci est stationnée dans la mairie-école de Mittlach, à quelques kilomètres de Metzeral. Ce que le service des armées nomme « ambulance alpine » est un poste de secours qui accueille une cinquantaine de médecins, infirmiers, brancardiers… Bref un hôpital de campagne (l’utilisation du terme ambulance pour définir le véhicule d’évacuation n’est que plus tardive). Le massif des Vosges en comptera 6 au total. Initialement conçu comme un lieu d’accueil des blessés venant du front, il a pour fonction de les trier, de remettre sur pieds ceux qui peuvent l’être et de stabiliser les plus gravement touchés avant de les transférer vers les hôpitaux de campagne situés à l’arrière.
Toutefois, en raison des conditions climatiques, notamment en hiver, le rôle de l’ambulance va évoluer. En effet, les cols devenant impraticables à cause de la neige, il est impossible de transférer les blessés. Les soins et les traitements sont donc administrés parfois directement sur place. A Mittlach, suite à de très violents bombardements et à la destruction partielle des parties hautes de la mairie-école, l’ambulance s’est retranchée au sous-sol du bâtiment. Elle a aussi installé des infrastructures creusées dans le sol alentour. Elle fonctionnera pendant toute la guerre.
Extrait du registre des carnets de passage et entrées de l'ambulance alpine n°2/64 © SAMHA
Finalement Jean-François est évacué dès le 29 janvier par l’ambulance 2/58. Cependant, il disparaît ensuite des radars : le SAMHA n’a pas pu le suivre davantage et ignore vers quel hôpital à l’arrière il a été emmené et soigné.
Quoi qu’il en soit, cette blessure devait être sérieuse car il est resté éloigné du front jusqu’au mois de juillet. Par ailleurs, une pension à hauteur de 10% sera proposée en sa faveur après la guerre, suite à cette blessure. Néanmoins elle ne l’handicapera pas profondément puisque, à court terme, il revient se battre sur le front, et à plus long terme il exercera les professions de camionneur (années 1920) et de déménageur (1934).
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