Blog généalogique, souvenirs d'aïeux de Conques (Rouergue) à Samoëns (Haute-Savoie), en passant par l'Anjou, la Bretagne, l'Ain, la Suisse . . .
« Un soir, sur un chemin familier qui
m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette
terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent,
rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure.
J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous
sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et
dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles,
autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur
accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité,
n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce
murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie
de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »
Originaire de Haute-Savoie, Jean-François est presque naturellement affecté à un corps d’Alpins. On les appelle Bataillon de Chasseurs Alpins ou Bataillon de Chasseurs à Pied.
Les Chasseurs Alpins sont des soldats spécialisés dans le combat en milieu montagneux. Cette unité a été créée en 1888.
Dans les années 1830 une troupe d’élite à vocation temporaire est créée pour tester une nouvelle arme, la carabine Delvigne-Pontcharra : on la nommera bataillon provisoire de Chasseurs à pied. Mais, remplissant plusieurs missions avec succès (notamment la bataille de Sidi Brahim en 1845), on la fit perdurer plutôt que de la dissoudre. Le premier bataillon de Chasseurs à pied était né. Les Alpins constituent la plus ancienne subdivision de l’infanterie, après les régiments de ligne.
Parallèlement, à la fin des années 1850, les royaumes indépendants d’Italie (pas encore réunifiés) sont une menace à la frontière française. D’autant plus que les Italiens se sont dotés d’une troupe spécialisée dans le combat en milieux montagnard. Les Français se doivent de pouvoir répondre à une de leurs attaques : ils créent donc une troupe de montagne en 1888. 12 des 31 bataillons de Chasseurs à pied sont choisis pour assurer cette mission (en 1916 ils prennent l’appellation de bataillons de Chasseurs Alpins).
En général, ces bataillons agissent en tirailleurs à l’avant de l’infanterie. Profitant de leur expérience en milieu accidenté, ils se postent à couvert et peuvent viser l’ennemi, contrairement à l’infanterie de ligne qui attaque de matière compacte, en formation serrée.
Selon la tradition, au tout début, les chasseurs étaient les seuls soldats de l'armée française auxquels on demandait de savoir lire et écrire. On disait d’eux qu’ils étaient les meilleurs tireurs et les meilleurs sportifs.
1915 sera l’année la plus difficile pour les Alpins : regroupés au sein d’une « Armée des Vosges », ils mènent des attaques aussi héroïques que meurtrières sur les sommets vosgiens. Par exemple, le Braunkopf saigna le 11ème BCA, tandis que le Lingekopf sera le sinistre « Tombeau des Chasseurs » du 22ème BCA. Au total le conflit a fait plus de 80 000 morts dans leurs rangs.
Mais leur bravoure leur vaut le surnom de « Diables noirs » donné par les Allemands. Du côté français, on les surnomme plutôt les « Diables bleus » en raison de la couleur de leur uniforme.
La protestation des Chasseurs est le chant de base des Chasseurs à pied :
I.
Nous sommes trente mille braves,
Au képi sombre, au manteau bleu,
Et nous voyons même les Zouaves
Derrière nous courir au feu.
Vous qui voulez qu’on nous supprime,
Qu’avez-vous à nous reprocher ?
En guerre, en paix, notre seul crime
C’est d’avoir su trop bien marcher.
Ne touchez pas au Corps d’Elite,
Chasseurs, Chasseurs, pressons le pas,
Qu’on nous fasse marcher plus vite,
Mais qu’on ne nous supprime pas.
REFRAIN
Encore un carreau d’ cassé...
V’là l’ vitrier qui passe,
Encore un carreau d’ cassé
V’là l’ vitrier passé...
II.
Essayez de nous suivre au pas,
Voyez un peu notre démarche,
C’est notre Bataillon qui marche.
Allons, ne vous essoufflez pas ;
C’est le clairon qui nous entraîne,
Notre clairon, c’est notre amour.
Fi du Biffin qui lent se traîne,
Trébuchant derrière un tambour.
Place aux Chasseurs, la route est large,
La route qui mène au combat,
Vous les verrez pousser la charge,
Si vous ne les supprimez pas.
REFRAIN
III.
Visez-vous à l’économie
Des cinq milliards qu’on dût verser ?
Nous vous offrons tous notre vie
Pour vous les faire rembourser !
Si vous tenez au drap garance,
Qui coûte autant sans valoir mieux,
Notre sang versé pour la France
Rougira nos pantalons bleus.
A nous les coups de main dans l’ombre
Qu’il faut exécuter tout bas,
Notre tenue n’est pas trop sombre
Pour qu’on ne la supprime pas.
REFRAIN
IV.
Vous avez vu nos frères d’armes
Tomber au loin pour leur pays ;
Vous leur avez donné vos larmes,
Épargnez donc leurs vieux débris.
Serez-vous plus durs que la guerre ?
Ne voulez-vous pas ménager,
Aux Chasseurs dormant sous la pierre,
Quelques Chasseurs pour les venger ?
Que le canon Krupp nous décime,
Il a sur nous droit de trépas ;
Et, s’il le peut, qu’il nous supprime,
Mais vous, ne nous supprimez pas.
REFRAIN
V.
(Strophe d’après la Grande Guerre)
Vous avez vu la Grande Guerre
Faire de nous des Diables Bleus.
Ce nom, ceux qui le lui donnèrent,
Allez, s’y connaissaient un peu...
Sur tous les fronts, Verdun, la Somme,
Plus de cent fois renouvelés,
Nos Bataillons, comme un seul homme,
Devant la Mort se sont dressés...
Chez nous pas de paroles vaines,
Les Chasseurs de Driant sont là,
Qu’à leurs tombeaux on nous enchaîne,
Mais qu’on ne nous supprime pas...
REFRAIN
(Les strophes en italique ne sont pas chantées dans cet extrait).
Le refrain s’expliquerait par le fait que les « vitriers » dont il est question est le surnom donné aux chasseurs en raison du sac à dos en toile cirée qui brillait au soleil les faisant ressembler de loin à des vitriers.
Bonjour Mélanie, Très intéressante étude de cette arme dont je ne connaissais pas tous ces détails. En particulier, le refrain de cette chanson que je chantais gamine : la mémoire était parvenue jusqu'à moi, mais pourquoi ? En tout cas, une belle lecture ce matin.
Merci pour ton commentaire. J'ai aussi souvent chanté ce refrain quand j'étais enfant, sans savoir à quoi cela faisait référence ni que (sans doute) mon AGP l'avait sûrement chanté lui aussi ! #Psychogénéalogie bonjour ! 😉 Mélanie - Murmures d'ancêtres
Un démarrage du ChallengeAZ en fanfare, au son du cor ! Ça me ramène à mon premier article du ChallengeAZ de 2013, consacré aux "Alpini" ;-)
RépondreSupprimerBonjour Mélanie,
RépondreSupprimerTrès intéressante étude de cette arme dont je ne connaissais pas tous ces détails.
En particulier, le refrain de cette chanson que je chantais gamine : la mémoire était parvenue jusqu'à moi, mais pourquoi ?
En tout cas, une belle lecture ce matin.
Merci pour ton commentaire.
SupprimerJ'ai aussi souvent chanté ce refrain quand j'étais enfant, sans savoir à quoi cela faisait référence ni que (sans doute) mon AGP l'avait sûrement chanté lui aussi ! #Psychogénéalogie bonjour ! 😉
Mélanie - Murmures d'ancêtres