« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

mercredi 22 novembre 2023

S comme Sages-femmes

On trouve de nombreuses références aux sages-femmes dans les registres de Conques.

Sage-femme, J. Ruff © BIU Santé Médecine

Selon le dictionnaire de l’Académie Française en 1694, « On appelle ainsi celle dont le métier est d'accoucher les femmes », avec pour étymologie « Sage » dans le sens d'habile.

Les sages-femmes rurales sont généralement des femmes ayant une expérience personnelle des accouchements. Elles portent assistance aux autres femmes au moment de leur accouchement. Leurs formations sont très diverses essentiellement basées sur la transmission individuelle et sur une connaissance empirique grâce à leur propre expérience de la maternité. Dans les milieux urbains des formations plus « professionnelles », institutionnalisées, existent aussi.

Sous l'Ancien Régime, sage-femme est un métier, et plusieurs ordonnances royales, en particulier sous Louis XIV, exigent que toutes les communautés de village choisissent une sage-femme et décident de percevoir une contribution pour payer leurs gages comme pour les maîtres d'école.

La sage-femme se doit d’être « vertueuse » et de bonne moralité, car elle peut être amenée, en cas d’urgence, à administrer le baptême. Elles reçoivent pour cela une « formation » de la part du curé. Aussi, les conciles exigent des sages-femmes qu’elles aient « un témoignage de catholicité ou du curé ou de l’évêque [et] qu’elles [soient] approuvées par l’évêque ou son vicaire ». En cas de baptême administré par les sages-femmes, elles devaient trouver au moins deux personnes qui soient témoins du baptême qu’elles administrent, afin que le curé puisse les interroger lorsque l’enfant sera porté à l’Église pour officialiser le baptême.

 

Dans les registres de Conques, je compte quatre sages-femmes.

Baptême Xxx Marty, 1786 © AD12

"Un enfant naturel de Pierre Marty vigneron et de Marie Jeanne Cabrolier mariés est né le 15 octobre 1786 et a été ondoyé à la maison y ayant cas de nécessité par Marguerite Bories sage femme…"

 

"Est né hier 11e mars 1787 un enfant mâle fils naturel et légitime de Jean Delannes vigneron et de Marie Carmes mariés et fut ondoyé à la maison par mademoiselle Vergnhes sage femme qui a signé"

Celle-ci est l’épouse de Pierre Bories, maître chirurgien.

 

"Une fille naissante d'Antoine Anterrieux vigneron et de Marie Jeanne Serles mariés fut ondoyée à la maison y ayant cas de nécessité par Marie Carles sage femme et mourut de suite le même jour 12 juin 1790 et fut enterrée le lendemain."

 

Les deux premières ne sont citées qu’une seule fois durant la décennie étudiée. Marie Carles ondoie 4 nouveau-nés et est marraine de 3 autres.

 

Baptême Anne Vigouroux, 1784 © AD12

"... la baptisée qui avait reçu l'eau a la maison par Jeanne Rols sage femme y ayant cas de nécessitté ainsi qu'elle nous la assuré..."

Jeanne Rols semble être la sage-femme principale. Elle intervient à partir de 1780 et jusqu’en 1792 au moins. Elle ondoie 11 enfants, en présente 2 autres et est témoin à 1 naissance. Avant elle, les sages-femmes ne sont jamais nommées dans les actes paroissiaux : est-ce un hasard ou est-ce parce qu’il n’y avait pas de sage-femme « officielle » ? Elle est prénommée Jeanne au début, une fois Janetelle (surnom ?) en 1782, puis Anne (parfois en 1784 puis à partir de 1788) ; en 1792 elle est nommée Raouls.
Elle est peut-être la fille de Joseph et Marie Jeanne Bousquet (mes sosas 272 et 273), Jeanne, née en 1751. Elle aurait 29 ans lorsqu’on la rencontre la première fois en tant que sage-femme. Cependant elle ne semble pas mariée ni mère (je n’ai pas trouvé son décès). Elle n'apparaît jamais dans les registres hors de son rôle de sage-femme.
Autre hypothèse : Elle se nommait en fait Raouls
(le patronyme Raouls est couramment dit Rols dans les registres, ou inversement). Dans ce cas, je compte 4 candidates possibles :

  • Jeanne Raouls née en 1725, fille de Géraud et Marie Issanjou (mes sosas 558 et 559). Née en 1725 elle aurait 67 ans lors de son dernier accouchement.
  • Jeanne Raouls, fille de Jean Raouls mon sosa 526 et de sa seconde épouse Anne Durieu.
  • Jeanne fille de Pierre et Anne Fontanier, née en 1711, mariée en 1745 avec Jean Arnaud.
  • Jeanne fille de Guillaume et Marie Delagnes, née en 1713, mariée en 1742 avec Jean Fournier, originaire de la paroisse voisine de Saint Marcel. 

Je n'ai plus trouvé trace des deux premières après leurs naissances. Si les deux dernières sont bien des femmes mariées, elles étaient âgées de plus de 80 ans lors du dernier accouchement (si toutefois elles étaient encore vivantes à cette date : je n'ai pas trouvé leurs décès).

 

Curieusement Marie Carles ondoie une fille « a pere et mere inconnus » ! Le père, passe encore, mais la mère devait bien être un peu connue…

Baptême Jeanne, 1786 © AD12

"Jeanne fille a pere et mere inconnus a été baptisée à la maison par Marie Carles y ayant cas de necessité, les autres cérémonies lui ont été supplées aujourd'hui 30 juin 1786 par nous vicaire soussigné après quelle nous a été présentée par Jeanne Rouquette veuve de Pierre Brozes qui a été sa marraine et qui nous a certifié que ladite Jeanne était née hier au soir et qui requise de signer a dit ne savoir ainsi que ladite Carles"

 

Jeanne Rols présente un enfant né dans les mêmes conditions :

"Antoine fils a pere et mere inconnus présenté par Jeanne Rols sage femme ..."

 

En fait, cela n’est guère étonnant car les sages-femmes étaient tenues à ce que l’on appellerait aujourd’hui le secret professionnel. Elles doivent garder inviolablement les secrets qui lui sont confiés. Comme l’identité d’une mère qui ne souhaite pas être connue par exemple.

 

 

2 commentaires:

  1. Lorsque la mère est inconnue, c'est que ses parents, souvent, tentent de cacher la faute d'une très jeune fille. J'ai vu des pseudo mères de 50 ans, qui ont un jeune fille de 18/20 ans, j'ai des doutes sur la vraie mère

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  2. Aucune sage-femme dans mes ancêtres mais plusieurs ont eu recours à elles, surtout quand le père était absent

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