« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

mercredi 15 novembre 2023

M comme Marraine

Dans les registres de Conques il y a des marraines et des parrains.

Le baptême, E. Renard © RMN

Ceux-ci sont choisis par les parents du nouveau-né. Cela peut être un membre de la famille, un ami, un voisin. Les parrains et marraines ont pour mission d'accompagner l'enfant et de le guider dans sa foi chrétienne. Ils sont présents dans les temps forts de l'éducation religieuse de l'enfant. Ce sont des personnes de confiance qui pourront être présentes en cas de besoin : ils ont un rôle essentiel pour suppléer les parents en cas de maladie ou de décès. C'est le sens premier des noms compère et commère que l'on donnait autrefois aux parrain et marraine (du latin ecclésiastique compatrem et commatrem, composés de cum, « avec » et pater/mater, « père/mère »).

 

Du sacrement du baptême naît une relation spirituelle de parrainage, entre parrain et filleul, mais aussi de compérage entre parrains et parents de l’enfant. La fraternité spirituelle qui s’instaure entre le filleul et les parrains, ou les enfants des parrains, s’accompagne logiquement d’interdits de mariage afin d’éviter l’inceste spirituel.

 

Pour l’aîné(e) les parrains/marraines sont souvent choisi parmi les grands-parents, comme Anne Albouze marraine de sa petite-fille Anne en 1784 ; ce n’est pas une règle absolue bien sûr : certains grands-parents sont choisis simplement pour les cadets. Ensuite on élargit le cercle familial : Marie Jeanne Cussac est marraine de deux de ses nièces en 1787 et 1790.

 

Mais le parrainage est aussi créateur de lien social. Le choix des parrains peut relever d’une certaine stratégie mise en place par les parents pour officialiser des relations avec des amis, des voisins, des relations de travail, ou bien s’efforcer d’obtenir la protection d’un plus puissant.

 

Les personnes sollicitées pour être parrains ou marraines peuvent l’être plusieurs fois, généralement à l’époque où elles sont elles-mêmes en âge d’être parents. C’est le cas par exemple de Marianne Cussac, triple marraine de 1783 à 1785 de ses trois nièces ou Elisabeth Delagnes aussi triple marraine, cette fois en dehors du cadre familial, de 1786 à 1788.

Toutefois à Conques je n’ai pas trouvé de femme revendiquée plus de trois fois pour être marraine.

Le triple parrainage est plus courant chez les hommes : Jacques Alran, Jean André Marti, Jean Antoine Falissard sont tous triple parrains. Jean Avalon, l’organiste, est même quatre fois parrain. Le record est détenu par Joseph Delagnes, huit fois parrain dans la décennie, tous de garçons inconnus déposés à l’hôpital ; mais son cas est particulier : il est l’un des hospitaliers de l’hôpital.

Pierre Jean Martin est deux fois parrain et deux fois représentant, c'est-à-dire parrain commis à la place d’un autre (voir à ce sujet la lettre A de ce ChallengeAZ).

Jean François Labro, en tant que prêtre est parrain trois fois et officiant à la cérémonie quatre fois. Cependant, si les religieux sont quelques fois sollicités, on les trouve plus souvent officiants (pour les prêtres et les curés), ou témoins aux décès, que parrains.

 

A Conques, mon étude commençant en janvier 1780, il faut attendre la toute fin du mois de novembre 1781 pour voir le premier acte contenant un parrain ET une marraine. En effet : les 26 premiers baptêmes ne contiennent qu’un parrain pour les garçons et une marraine pour les filles.

Baptême François Combret, 1781

"François Combret fils légitime et naturel de Joseph Combret et de Marie Mery mariés de la présente ville né le jour d’hier 30 novembre, a été baptisé ce jour d’hui 1er décembre 1781 ; son parrain a été François Ferrières, sa marraine Elisabeth Ytié soussignée ; le parrain requis de signer a dit ne savoir."

 

Toutefois, dans la décennie précédente ont trouve déjà le double parrainage/marrainage, même si ce n’est pas systématique, loin de là…

 

Quant à Marie Viguier et Antoinette Avalon elles sont marraines d’un petit garçon, respectivement Jean Pierre Fraysse et Antoine André Avalon, sans qu’il n’y ait de parrain. La première est la grand-tante du baptisé, la seconde sa tante :

Baptême Jean Pierre Fraysse, 1784 © AD12

"Jean Pierre Fraysse fils légitime et naturel de Joseph Fraysse et de Jeanne Balitrand de la ville de Conques naquit le 17ème juillet 1784 et fut baptisé le même jour par nous vicaire soussigné, sa marraine fut Marie Viguier grand tante du baptisé qui n’a su signer de ce requise"

 

"L’an 1789 et le 15ème du mois de mai est né et a été baptisé le 16ème dudit mois Antoine André Avalon fils légitime au sieur Jean Avalon organiste et de Demoiselle Christine Valete mariés, marraine a été Antoinette Avalon tante au baptisé qui n’a su signer de ce requise"

 

La famille Avalon fait partie de l’élite sociale de Conques : ils n’auraient pas eu de difficulté à trouver un parrain s’ils l’avaient souhaité : c’est donc un choix délibéré.

 

 

5 commentaires:

  1. As tu remarqué si des notables étaient demandés comme parrains, en raison de leur notabilité justement ? c'est le cas dans un des village de mon arbre.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Il n'y a pas beaucoup de grands personnages à Conques dont on pourrait chercher la protection. Si l'on observe les bourgeois, ils sont demandés assez fréquemment dans le cadre familial et, d'une manière générale, apparaissent beaucoup moins souvent que les restants de l'hôpital par exemple.
      Mélanie - Murmures d'ancêtres

      Supprimer
  2. Intéressant ces cas de parrain unique ou marraine unique. Aussi loin que je remonte dans ma généalogie (16eme ) et dans les registres que j'ai dépouillés il y a toujours un parrain ET une marraine et même quelquefois ils sont deux. (Région Centre, Auvergne et Creuse)

    RépondreSupprimer
  3. Un enfant pauvre pour parrain...
    Le 30 may 1659 Angers.St Maurille.
    Baptême de Urban Avril fils de René Avril escuyer sieur de la Roche et de Dame Geneviève Ménardeau son épouse.
    Ledit Avril a voulu pour parrain de son enfant par (taché) piété ?un enfant pauvre René Bussay ? et marraine Françoise Angélique Derouet ?(vue 374/543).
    (Angers St Maurille B -1640-1668)
    M@g.

    RépondreSupprimer
  4. En Suisse, on trouvait même 2 parrains et 2 marraines

    RépondreSupprimer